Cour de cassation, 9 janvier 2025, Pourvoi n° 22-21.030
Cour de cassation, 9 janvier 2025, Pourvoi n° 22-21.030

Type de juridiction : Cour de cassation

Juridiction : Cour de cassation

Thématique : Respect des droits de la défense dans le cadre des sanctions administratives en santé.

Résumé

Contexte de l’affaire

L’affaire concerne Mme [D], une infirmière libérale, qui a été soumise à une analyse de son activité professionnelle par la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère. Cette analyse a porté sur la période de décembre 2016 à décembre 2018, et a conduit à la notification d’un indu le 20 mars 2019, suivie d’une notification de griefs le 1er juillet 2019, et d’un avertissement le 12 août 2019.

Recours de la professionnelle de santé

En réponse à l’avertissement, Mme [D] a saisi une juridiction compétente pour contester la décision. Elle a fait valoir que la procédure suivie par la caisse n’avait pas respecté ses droits, notamment en ce qui concerne le droit à un entretien contradictoire avant le prononcé de la sanction.

Arguments de la professionnelle de santé

Mme [D] a soutenu que le directeur de la caisse aurait dû lui accorder un entretien suite à sa demande formulée dans le délai imparti. Elle a également affirmé que le non-respect de cette procédure constituait une violation de ses droits de la défense et du principe du contradictoire, ce qui justifiait l’annulation de l’avertissement.

Réponse de la Cour d’appel

La cour d’appel a rejeté le recours de Mme [D], arguant que le directeur n’était pas obligé de donner suite à la demande d’entretien, ayant reçu des observations écrites qu’il jugeait suffisantes. Elle a également noté que la professionnelle de santé avait eu accès aux éléments de la caisse et avait pu répondre lors de la phase judiciaire.

Décision de la Cour de cassation

La Cour de cassation a annulé l’avertissement prononcé contre Mme [D], soulignant que le directeur de la caisse devait entendre la professionnelle de santé avant de notifier une sanction. La cour a affirmé que le droit à un entretien contradictoire était une formalité substantielle dont l’inobservation entraînait la nullité de la procédure de sanction.

Conséquences de la décision

La décision de la Cour de cassation a des implications importantes pour la procédure de sanction des professionnels de santé, réaffirmant la nécessité de respecter les droits de la défense et le principe du contradictoire dans le cadre des décisions administratives. L’avertissement a donc été annulé, rétablissant ainsi les droits de Mme [D].

CIV. 2

AF1

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 9 janvier 2025

Cassation partielle sans renvoi

Mme MARTINEL, président

Arrêt n° 5 F-B

Pourvoi n° P 22-21.030

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025

Mme [Z] [D], domiciliée [Adresse 2], a formé le pourvoi n° P 22-21.030 contre l’arrêt rendu le 6 juillet 2022 par la cour d’appel de Rennes (9e chambre, sécurité sociale), dans le litige l’opposant à la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère, dont le siège est [Adresse 1], défenderesse à la cassation.

La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.

Le dossier a été communiqué au procureur général.

Sur le rapport de M. Leblanc, conseiller, les observations de la SCP Marlange et de La Burgade, avocat de Mme [D], de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère, et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Leblanc, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,

la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.

Faits et procédure

1. Selon l’arrêt attaqué (Rennes, 6 juillet 2022), à la suite d’une analyse de l’activité professionnelle exercée par Mme [D], infirmière libérale, (la professionnelle de santé), portant sur la période de décembre 2016 à décembre 2018, la caisse primaire d’assurance maladie du Finistère (la caisse) lui a notifié, le 20 mars 2019, un indu puis, le 1er juillet 2019, le directeur de la caisse lui a adressé une notification de griefs avant de prononcer à son encontre un avertissement du 12 août 2019.

2. La professionnelle de santé a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 114-17-1 et R. 147-2 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige :

4. Il résulte de ces textes que le directeur de l’organisme local d’assurance maladie peut prononcer une sanction à l’encontre du professionnel de santé en raison d’un indu consécutif au non-respect des règles de facturation ou de tarification. Lorsqu’il a connaissance des faits susceptibles de faire l’objet de cette sanction, il adresse à la personne physique ou morale en cause la notification des faits reprochés ainsi que le montant de la pénalité encourue et lui indique qu’elle dispose d’un délai d’un mois à compter de sa réception pour demander à être entendu, si elle le souhaite, ou pour présenter des observations écrites.

5. Le droit du professionnel de santé à être entendu, préalablement au prononcé de la sanction envisagée contre lui, constitue une formalité substantielle dont l’inobservation entraîne la nullité de la procédure de sanction.

6. Pour rejeter le recours de la professionnelle de santé, l’arrêt retient que c’est en vain qu’elle se prévaut d’une violation du principe du contradictoire et des droits de la défense dès lors que si son conseil a effectivement sollicité un entretien par lettre du 1er juillet 2019, reçue par la caisse le 5 août, le directeur n’avait cependant aucune obligation de faire droit à cette demande, ayant reçu des observations écrites qu’il pouvait estimer suffisantes. Il relève, par ailleurs, que la professionnelle de santé a pu avoir accès aux éléments en possession de la caisse et répondre à ses conclusions pendant la phase judiciaire.

7. En statuant ainsi, alors que le directeur de la caisse ne pouvait pas notifier un avertissement avant d’avoir entendu la professionnelle de santé, comme celle-ci le lui avait demandé dans le délai d’un mois qui lui était imparti, et que la possibilité pour cette dernière de débattre des éléments recueillis à son encontre par la caisse, à l’occasion de son recours judiciaire, ne la privait pas de son droit de contester la régularité de la procédure de sanction, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Portée et conséquences de la cassation

8. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de
procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code
de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.

9. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la
Cour de cassation statue au fond.

10. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 4, 5 et 8 que l’avertissement prononcé à l’encontre de la professionnelle de santé doit être annulé.

 


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