Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Versailles
Thématique : Évaluation du taux d’incapacité et impact professionnel : enjeux de la reconnaissance des maladies professionnelles.
→ RésuméContexte de l’affaireMme [W] [I] [K], salariée de la société [5], a déclaré une pathologie à l’épaule droite le 7 décembre 2016. La caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin a pris en charge cette pathologie le 6 avril 2017, la classant sous le tableau n° 57 A des maladies professionnelles. Évaluation de l’incapacitéL’état de santé de la victime a été consolidé le 28 février 2019, et un taux d’incapacité permanente partielle de 28 %, dont 3 % pour le taux professionnel, a été reconnu par décision du 12 juillet 2019. La société a contesté ce taux, mais la commission médicale de recours amiable a déclaré sa saisine irrecevable. Procédures judiciairesLa société a saisi le tribunal judiciaire de Versailles, qui a ordonné une expertise médicale. Par jugement du 18 octobre 2022, le tribunal a déclaré recevable le recours de la société, homologué le rapport d’expertise, et a fixé le taux d’incapacité à 13 %. La caisse a fait appel de cette décision. Consultation médicale et nouvelles audiencesLe 5 octobre 2023, la cour a ordonné une nouvelle consultation médicale pour évaluer le taux d’incapacité à la date de consolidation. Le rapport du docteur [T] a été déposé le 22 novembre 2023, et l’affaire a été plaidée à l’audience du 23 octobre 2024. Arguments des partiesLa caisse a demandé à la cour d’infirmer le jugement et de confirmer le taux d’incapacité à 28 %. Elle a soutenu que ce taux était conforme aux séquelles de la victime. De son côté, la société a demandé à la cour de fixer le taux à 8 % et a mis en avant l’absence de traitement médical et l’incohérence des lésions initiales. Évaluation par les expertsLes experts ont divergé dans leurs évaluations. Le médecin conseil de la caisse a retenu un taux de 28 %, tandis que l’expert désigné par le tribunal a proposé un taux de 5 %. Le docteur [T] a finalement conclu à un taux de 20 % pour la limitation des amplitudes articulaires. Décision de la courLa cour a infirmé le jugement précédent, fixant le taux d’incapacité permanente partielle à 23 %, dont 3 % pour le taux socio-professionnel. Elle a également confirmé que les frais d’expertise étaient à la charge de la caisse et a condamné celle-ci aux dépens d’appel. |
COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 89E
Ch.protection sociale 4-7
ARRÊT N°
CONTRADICTOIRE
DU 09 JANVIER 2025
N° RG 24/00105 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WI5K
AFFAIRE :
CPAM DU BAS-RHIN
C/
S.A.S. [5]
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 18 Octobre 2022 par le pôle social du tribunal judiciaire de VERSAILLES
N° RG : 20/00001
Copies exécutoires délivrées à :
Me Mylène BARRERE
Me Julien TSOUDEROS
Copies certifiées conformes délivrées à :
CPAM DU BAS-RHIN
S.A.S. [5]
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,
La cour d’appel de Versailles, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
CPAM DU BAS-RHIN
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Mylène BARRERE, avocate au barreau de PARIS, vestiaire : D2104
APPELANTE
****************
S.A.S. [5]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Me Julien TSOUDEROS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D1215
INTIMÉE
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 945-1 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 23 Octobre 2024, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Charlotte MASQUART, conseillère chargée d’instruire l’affaire.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente,
Madame Aurélie PRACHE, présidente de chambre,
Madame Charlotte MASQUART, conseillère,
Greffière, lors des débats et du prononcé : Madame Juliette DUPONT,
EXPOSÉ DU LITIGE
Salariée de la société [5] (la société), Mme [W] [I] [K] (la victime) a, le 7 décembre 2016, déclaré une pathologie affectant l’épaule droite, que la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin (la caisse) a prise en charge, le 6 avril 2017, sur le fondement du tableau n° 57 A des maladies professionnelles.
L’état de santé de la victime a été déclaré consolidé le 28 février 2019 et un taux d’incapacité permanente partielle de 28 %, dont 3 % pour le taux professionnel, lui a été reconnu par décision du 12 juillet 2019.
La société a contesté ce taux devant la commission médicale de recours amiable, qui a déclaré irrecevable sa saisine, à défaut pour la société de lui avoir transmis une copie de la décision contestée.
La société a alors saisi le pôle social du tribunal de grande instance de Versailles, devenu le tribunal judiciaire.
Par décision du 14 décembre 2021, le tribunal judiciaire de Versailles a ordonné, avant dire droit, une expertise médicale judiciaire sur pièces, confiée au docteur [C] [H], laquelle a déposé son rapport le 30 mai 2022.
Par jugement du 18 octobre 2022, le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles a, sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– déclaré recevable et bien fondé le recours introduit par la société contre la caisse ;
– homologué le rapport d’expertise du docteur [H] ;
– infirmé la décision de la caisse du 12 juillet 2019, fixant le taux d’incapacité permanente partielle de la victime à 28 % ;
– fixé le taux d’incapacité permanente partielle de la victime à 13 %, incluant le taux de 3 % au titre du coefficient professionnel, dans les rapports entre l’employeur et la caisse ;
– enjoint à la caisse d’en tirer les conséquences de droit ;
– débouté la caisse de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– rappelé que les frais d’expertise seront à la charge de la caisse nationale d’assurance maladie, et en tant que besoin la condamne au paiement de ces frais, qui sont fixés à la somme de 800 euros ;
– condamné la caisse aux dépens.
La caisse a relevé appel de cette décision.
L’affaire a été plaidée à l’audience du 7 septembre 2023.
Par arrêt du 5 octobre 2023, la cour a :
Avant dire droit,
– ordonné une consultation médicale sur pièces confiée au Docteur [J] [T] afin de déterminer, à la date de consolidation fixée au 28 février 2019, le taux d’incapacité permanente de la victime au titre d’une tendinopathie de l’épaule droite prise en charge par la caisse, le 6 avril 2017.
Le docteur [T] a déposé son rapport le 22 novembre 2023.
L’affaire a été plaidée à l’audience du 23 octobre 2024.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la caisse, qui comparaît représentée par son avocat, demande à la cour d’infirmer le jugement déféré. Elle demande de confirmer la décision fixant le taux d’incapacité permanente partielle de la victime à 28 %, dont 3 % pour le taux professionnel.
Elle expose, en substance que le taux attribué correspond aux séquelles présentées par la victime à la date de consolidation et est conforme au barème. Elle considère que le taux professionnel est justifié par le licenciement pour inaptitude de la victime et la perte financière consécutive à l’incapacité.
La caisse conteste le taux retenu par l’expert désigné par la cour, considérant que ce dernier a omis de prendre en compte la diminution de la force musculaire, la douleur et la majoration du fait de la bilatéralité de l’atteinte du membre opposé.
Par conclusions écrites, déposées et soutenues oralement à l’audience, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé complet des moyens et prétentions, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, la société, qui comparaît représentée par son avocat, demande à la cour d’infirmer le jugement déféré et de fixer le taux d’incapacité litigieux à 8 %, tous éléments confondus. A titre subsidiaire, la société sollicite la confirmation du jugement.
La société s’appuie sur la note de son médecin consultant, le docteur [U], pour considérer que la victime présente un état antérieur, sans rapport avec la maladie professionnelle déclarée par la victime.
La société met en exergue l’absence de traitement médical ainsi que l’incohérence entre le caractère bénin des lésions initiales et le taux d’incapacité retenu.
La société soutient, pour l’essentiel de son argumentation, que l’examen clinique réalisé par le médecin conseil est incomplet, notamment en l’absence d’étude des mouvements passifs ; elle considère qu’il est impossible de retenir l’existence d’une véritable raideur articulaire et que seule peut être prise en compte une limitation d’origine algique des mouvements actifs.
La société estime, en particulier, que le coefficient de synergie ne saurait excéder 1 % dans la mesure où l’atteinte controlatérale ne justifie en elle-même qu’un taux d’incapacité de 3 %, et que le coefficient socio-professionnel doit être réduit à 2 %.
La société demande la condamnation de la caisse à lui rembourser la somme de 800 euros versée à titre de consignation des frais d’expertise de première instance.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, la caisse sollicite la condamnation de la société au paiement de la somme de 1 500 euros. La société ne formule aucune demande de ce chef.
PAR CES MOTIFS
La cour, statuant publiquement et contradictoirement, par mise à disposition au greffe :
Infirme le jugement entrepris en ce qu’il a homologué le rapport d’expertise du docteur [H] du 30 mai 2022 et a fixé le taux d’incapacité permanente partielle de Mme [W] [I] [K] à 13 %, incluant le taux professionnel de 3 % ;
Le confirme pour le surplus ;
Statuant à nouveau sur les points réformés,
Dit que les séquelles de la maladie professionnelle ‘tendinopathie de l’épaule droite’, déclarée par Mme [W] [I] [K] le 7 décembre 2016, justifient, dans les rapports de la société [5] avec la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin, l’attribution d’un taux d’incapacité permanente partielle de 23 %, dont 3 % à titre de taux socio-professionnel, à la date de consolidation du 28 février 2019 ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin ;
Condamne la caisse primaire d’assurance maladie du Bas-Rhin aux dépens d’appel ;
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Marie-Bénédicte JACQUET, conseillère, faisant fonction de présidente, et par Madame Juliette DUPONT, greffière, à laquelle la magistrate signataire a rendu la minute.
La greffière La conseillère
Laisser un commentaire