Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Paris
Thématique : Problématique de la répartition des charges dans un règlement de copropriété et de la qualification des parties communes et privatives.
→ RésuméContexte de l’affaireL’immeuble situé à [Adresse 1] à [Localité 4] est soumis au statut de la copropriété, régie par un règlement de copropriété datant du 3 mai 1952, modifié le 5 novembre 1987. Ce règlement a entraîné la subdivision du lot n°100 en deux nouveaux lots, le n°132 et le n°133, chacun ayant des caractéristiques spécifiques. Propriétés et réclamationsM. et Mme [M] sont propriétaires du lot n°133, tandis que Mme [P] possède le lot n°132. Ils ont signalé une dégradation de la toiture du bâtiment K, où se trouve leur lot, et ont demandé au syndic de soumettre des travaux de réfection à l’assemblée générale. Leur demande a été rejetée, ce qui les a poussés à relancer le syndic par plusieurs courriers et à mettre en demeure ce dernier de réaliser les travaux. Réponse du syndicLe syndic a informé M. et Mme [M] que la réfection de la toiture était de leur responsabilité, se basant sur l’article 7 du règlement de copropriété. En réponse, M. et Mme [M] ont demandé l’autorisation de l’assemblée générale pour effectuer les travaux à leurs frais, tout en se réservant le droit de contester la clause du règlement. Résolutions de l’assemblée généraleLors de l’assemblée générale du 18 décembre 2019, deux résolutions ont été adoptées : l’une autorisant les copropriétaires des lots n°132 et 133 à effectuer les travaux de réfection de la toiture, et l’autre concernant la gestion des travaux de couverture du bâtiment K. Procédure judiciaireM. et Mme [M] ont saisi le tribunal pour faire déclarer non écrite la clause du règlement de copropriété qui les obligeait à supporter seuls les coûts de la réfection de la toiture. Ils ont également demandé une nouvelle répartition des charges générales de l’immeuble et la désignation d’un expert-géomètre. Arguments des partiesM. et Mme [M] soutiennent que la clause en question est obsolète et que la toiture ne peut être considérée comme une partie privative, car elle est essentielle pour l’ensemble du bâtiment. Le syndicat des copropriétaires, en revanche, argue que la toiture est privative et que la clause est valide, se basant sur la configuration spécifique du bâtiment K. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré non écrite la clause du règlement de copropriété qui imposait aux propriétaires du lot n°100 de supporter seuls les travaux de réfection de la toiture. Il a également débouté M. et Mme [M] de leur demande de remboursement des travaux, arguant que ces derniers avaient été réalisés avec l’autorisation de l’assemblée générale, mais aux frais exclusifs des époux [M]. Conséquences financièresLe syndicat des copropriétaires a été condamné aux dépens et à verser une somme de 4000 euros à M. et Mme [M] en application de l’article 700 du code de procédure civile. De plus, M. et Mme [M] ont été dispensés de participer aux frais de la procédure, qui seront répartis entre les autres copropriétaires. |
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Copies exécutoires
délivrées le:
à Me MESSECA
Copies certifiées
conformes délivrées le:
à Me KEDINGER JACQUES
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8ème chambre
3ème section
N° RG 21/02142
N° Portalis 352J-W-B7F-CTZP2
N° MINUTE :
Assignation du :
09 février 2021
JUGEMENT
rendu le 10 janvier 2025
DEMANDEURS
Madame [T] [M]
Monsieur [X] [M]
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentés par Maître Carole MESSECA, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #C1157
DÉFENDEUR
Syndicat des copropriétaires du [Adresse 1] – [Localité 4], représenté par son syndic la société NEXITY LAMY par NEXITY [Localité 3] REPUBLIQUE
[Adresse 5]
[Localité 3]
représenté par Maître Sylvie KEDINGER JACQUES, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B0266
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Madame Marie-Charlotte DREUX, première vice-présidente adjointe
Madame Lucile VERMEILLE, vice-présidente
Madame Céline CHAMPAGNE, juge
assistées de Madame Léa GALLIEN, greffière,
Décision du 10 janvier 2025
8ème chambre 3ème section
N° RG 21/02142 – N° Portalis 352J-W-B7F-CTZP2
DÉBATS
A l’audience du 11 octobre 2024 tenue en audience publique devant Céline CHAMPAGNE, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seule l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du code de procédure civile.
JUGEMENT
Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe
Contradictoire
Premier ressort
EXPOSÉ DU LITIGE
L’immeuble situé [Adresse 1] [Localité 4], soumis au statut de la copropriété, est régi par un règlement de copropriété, en date du 03 mai 1952, qui a fait l’objet d’un modificatif le 05 novembre 1987, aux termes duquel le lot n°100 a été subdivisé en deux lots, le n°132 et le n°133.
Ce lot n°100 était ainsi décrit :
« au rez-de-chaussée
un local commercial, actuellement à usage de boulangerie, comprenant boutique, arrière boutique, salle à manger, chambre à four et pétrin sur cour, chambre et dégagement sur cour, remise sous bâtiment K, water closet.
A l’entresol, cinq pièces et un grenier à farine dans le bâtiment « K »
(location société BLH) ».
Après modificatif du règlement de copropriété, ce lot a été supprimé et remplacé par les lots 132 et 133 ainsi décrits :
« lot numéro 132
au rez-de-chaussée avec accès par la [Adresse 6] ou la cour commune : un local commercial comprenant :
une boutique sur rue, un laboratoire et un fournil sur cour
un fournil et un water closet
au premier étage : un logement comprenant :
une chambre sur rue, cuisine, chambre sur cour, une autre chambre et une salle de bains wc,
ces deux niveaux communiquant entre eux par un escalier privatif »,
« lot numéro 133
au rez-de-chaussée avec accès par la cour commune, le départ de l’escalier privatif donnant accès au premier étage et une salle de bains wc
au premier étage : un logement comprenant : une cuisine et deux chambres sur cour
le rez-de-chaussée et le premier étage communique entre eux par un escalier privatif
au deuxième étage : un grenier sur cour
accès au deuxième étage à partir d’une trappe depuis le premier étage. ».
Décision du 10 janvier 2025
8ème chambre 3ème section
N° RG 21/02142 – N° Portalis 352J-W-B7F-CTZP2
M. et Mme [M] sont ainsi propriétaires du lot n°133, et Mme [P] du lot n°132 faisant partie du « groupe VI (escaliers J, K et L) ».
Se plaignant de la dégradation de la toiture du bâtiment K, dans lequel se situe leur lot, M. et Mme [M] ont demandé au syndic de soumettre au vote de l’assemblée générale du 20 décembre 2017 la réalisation de travaux de réfection de cette toiture.
Cette résolution ayant été rejetée, ils ont réitéré leur demande par courriers en date du 27 novembre 2018 et 18 janvier 2019 avant de mettre en demeure le syndic de réaliser ces travaux, par courrier en date du 16 février 2019.
Le syndic, se prévalant des dispositions de l’article 7 du règlement de copropriété, a toutefois informé M. et Mme [M] que la réfection de cette toiture leur incombait.
Par courrier en date du 24 octobre 2019, M. et Mme [M] ont sollicité l’autorisation de l’assemblée générale pour engager ces travaux, expliquant que, dans un souci d’efficacité et de pragmatisme, ils en assumeraient le coût mais qu’ils se réservaient toutefois la possibilité de saisir le tribunal afin de faire déclarer nulle la clause du règlement de copropriété invoquée par le syndic.
Lors de l’assemblée générale du 18 décembre 2019, ont ainsi été adoptées une résolution n°30 autorisant les copropriétaires des lots n°132 et 133 à « effectuer les travaux de réfection de la toiture du bâtiment K (partie privative) », et une résolution n°31 concernant « la réalisation et la gestion des travaux de couverture bâtiment K partie copropriété ».
Par acte délivré le 09 février 2021, M. et Mme [M] ont saisi la présente juridiction afin de voir déclaré non écrit l’article 7 du règlement de copropriété, qu’il soit procédé à une nouvelle répartition des charges générales de l’immeuble et, à titre subsidiaire, de voir désigner un expert-géomètre afin de voir proposer une nouvelle répartition des charges, outre la publication du jugement en marge de la publication du règlement de copropriété.
Aux termes de leurs conclusions récapitulatives n°4, notifiées par voie électronique le 23 juin 2024, M. et Mme [M] demandent, au visa des articles 2, 3, 10 et 43 de la loi du 10 juillet 1965, 1188 et suivants,1301 et suivants du code civil, de :
« Recevoir Madame [T] [M] et Monsieur [X] [M] en l’intégralité de leurs fins, demandes et conclusions,
A TITRE PRINCIPAL :
Juger obsolète la clause du règlement de copropriété, visée par l’article 7 du règlement de copropriété, intitulée « Charges individuelles » dans son 6 ème alinéa disposant que : « Le propriétaire du lot numéro 100 (boulangerie) supportera seul les travaux de réparation et de réfection de la toiture de la partie des locaux à usage de grenier à farine dans le bâtiment escalier « K »,
A TITRE SUBSIDIAIRE :
Réputer non-écrite la clause du règlement de copropriété, visée par l’article 7 du règlement de copropriété, intitulée « Charges individuelles » dans son 6 ème alinéa, disposant que : « Le propriétaire du lot numéro 100 (boulangerie) supportera seul les travaux de réparation et de réfection de la toiture de la partie des locaux à usage de grenier à farine dans le bâtiment escalier « K »,
EN TOUT ETAT DE CAUSE :
Condamner le syndicat de copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4] à rembourser à Madame [T] [M] et Monsieur [X] [M] la somme de 11.339,40 € en application des articles 1301 et suivants du Code civil,
Assortir la condamnation du syndicat de copropriétaires d’une astreinte de 300 € par jour de retard passé le délai d’un mois à compter de la signification du jugement à intervenir pendant 120 jours,
Dispenser Madame [T] [M] et Monsieur [X] [M] de participer aux frais induits par la présente procédure, en ce compris les frais d’une éventuelle expertise, conformément aux dispositions de l’article 10-1 al. 2 de la loi du 10 juillet 1965,
Ordonner la publication du jugement à intervenir en marge du règlement de copropriété de l’immeuble sis [Adresse 1] à [Localité 4], ce dans les 6 mois de la date à laquelle il sera devenu définitif, à la diligence et aux frais exclusifs du syndicat de copropriétaires,
Condamner le syndicat de copropriétaires au paiement d’une somme de 7.000 € par application des dispositions de l’article 700 du Code de procédure civile,
Condamner le syndicat de copropriétaires aux dépens que Maître Carole MESSECA, avocat aux offres de droit, pourra recouvrer conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de procédure civile. »
Aux termes de ses conclusions en défense n°4, notifiées par voie électronique le 23 juin 2024 , le syndicat des copropriétaires demande, au visa de la loi du 10 juillet 1965, notamment en ses articles 2 et 43, de :
« Débouter Madame [T] [M] et Monsieur [X] [M] de leurs demandes de déclarer obsolète ou non écrite la clause du règlement de copropriété, visée par l’article 7 du règlement de copropriété intitulée charges individuelles, aux termes de laquelle ils doivent assumer seuls le coût de la réfection de la toiture située au-dessus de leur lot,
Les débouter de leur demande de remboursement sur le fondement des articles 1341 et suivants du code civil,
En conséquence,
Les débouter de l’ensemble de leurs demandes.
Écarter l’exécution provisoire de droit du jugement à intervenir, conformément aux articles 514 et suivants du CPC
Condamner in solidum Madame [T] [M] et Monsieur [X] [M] au paiement de la somme de 5.000 € en application de l’article 700 du CPC
Les condamner in solidum aux entiers dépens de la présente instance, dont distraction au profit de Maître Sylvie KEDINGER, avocat, dans les conditions de l’article 699 du CPC. »
Il est fait expressément référence aux pièces du dossier et aux écritures déposées et visées ci-dessus pour un plus ample exposé des faits, de la cause et des prétentions des parties.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 25 octobre 2023 et la date de plaidoirie a été fixée au 11 octobre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré au 10 janvier 2025.
PAR CES MOTIFS,
Le tribunal statuant publiquement, par jugement contradictoire rendu en premier ressort, par mise à disposition greffe,
DÉCLARE non écrite la clause du règlement de copropriété, visée par l’article 7 dudit règlement intitulé « Charges individuelles » dans son 6 ème alinéa, ainsi rédigée : « le propriétaire du lot numéro 100 (boulangerie) supportera seul les travaux de réparation et de réfection de la toiture de la partie des locaux à usage de grenier à farine dans le bâtiment escalier « K » » ;
DÉBOUTE M. [X] [M] et Mme [T] [M] de leur demande de remboursement et de leur demande de publication de la présente décision en marge du règlement de copropriété ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1] [Localité 4] aux dépens ;
AUTORISE Maître Carole Messeca à recouvrer directement ceux des dépens dont elle aurait fait l’avance sans avoir reçu provision ;
CONDAMNE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1] [Localité 4] à régler à M. [X] [M] et Mme [T] [M], ensemble, la somme de 4000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
DISPENSE M. [X] [M] et Mme [T] [M] de toute participation à la dépense commune des frais de procédure, dont la charge sera répartie entre les autres copropriétaires conformément aux dispositions de l’article 10-1 de la loi du 10 juillet 1965 ;
DÉBOUTE le syndicat des copropriétaires de l’immeuble situé [Adresse 1] [Localité 4] de sa demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
RAPPELLE que l’exécution provisoire est de droit.
Fait et jugé à Paris le 10 janvier 2025
La greffière La présidente
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