Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Rennes
Thématique : Examen des conditions de validité d’une saisie immobilière et de l’exigibilité d’une créance.
→ RésuméContexte de la saisie immobilièreLa Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens a engagé une procédure de saisie immobilière contre monsieur [W] [D] concernant une maison d’habitation située à [Localité 16], suite à un commandement de payer daté du 13 novembre 2023. Ce commandement a été publié au service de la publicité foncière de Rennes et vise la vente de biens immobiliers pour un montant de créance de 134.296,87 euros. Procédure judiciaireMonsieur [W] [D] a été assigné à comparaître devant le juge de l’exécution le 16 février 2024. Après plusieurs renvois pour échanges de pièces, l’affaire a été plaidée le 14 novembre 2024. La Caisse de Crédit Mutuel a demandé au juge de statuer sur la validité de la saisie et de procéder à la vente forcée des biens, tout en contestant les demandes de monsieur [W] [D]. Arguments de la Caisse de Crédit MutuelLa Caisse de Crédit Mutuel a soutenu qu’elle disposait d’une créance exigible, malgré les contestations de monsieur [W] [D] concernant la validité du commandement de payer. Elle a également rejeté la demande de vente amiable, arguant que le mandat de vente était tardif et que le prix proposé ne reflétait pas la réalité du marché immobilier. Demandes de monsieur [W] [D]Monsieur [W] [D] a demandé la nullité du commandement de payer et de l’assignation, invoquant l’absence d’exigibilité de la créance. Il a également sollicité un sursis à statuer en attendant une décision d’un autre tribunal concernant des actions en responsabilité contre un avocat et l’État, qui, selon lui, pourraient influencer l’issue de la saisie. Décision du juge de l’exécutionLe juge a rejeté les demandes de monsieur [W] [D], confirmant la régularité de la procédure de saisie immobilière. Il a ordonné la vente forcée de l’immeuble, fixant la date de l’audience d’adjudication au 3 avril 2025. La créance de la Caisse de Crédit Mutuel a été confirmée à 134.296,87 euros, avec des intérêts à compter du 14 février 2024. Conséquences de la décisionLa décision du juge a des implications significatives pour monsieur [W] [D], qui se voit débouté de toutes ses demandes. La vente forcée des biens immobiliers sera effectuée selon les modalités établies dans le jugement, et les frais de la procédure seront à la charge de l’adjudicataire. |
Cour d’appel de Rennes
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE RENNES
[Adresse 12] – [Localité 9] – tél : [XXXXXXXX01]
JUGEMENT D’ORIENTATION
Le 09 Janvier 2025
N° RG 24/00005 – N° Portalis DBYC-W-B7I-K2RQ
CAISSE DE CREDIT MUTUEL VAL DU CENS
Maître Benjamin BUSQUET
C/
M. [W] [D]
la SELARL CABINET BARTHOMEUF
Ordonne la vente forcée à l’audience du jeudi 03 avril 2025 à 10 h00
A l’audience d’orientation tenue au nom du peuple français, publiquement en matière de saisie immobilière, le neuf Janvier deux mil vingt cinq, par Madame Mélanie FRENEL, vice-président du tribunal judiciaire de RENNES, juge de l’exécution,
Assistée de Madame Annie PRETESEILLE greffier,
ENTRE :
CAISSE DE CREDIT MUTUEL VAL DU CENS, Société coopérative de crédit a capital variable et à responsabilité statutairement limitée immatriculée au RCS de NANTES sous le n° 786 025 817 dont le siège social est [Adresse 14] [Localité 11] (France), prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège.
Demandeur et créancier poursuivant ayant pour avocat constitué Maître Benjamin BUSQUET représentant la SCP AVOCATS LIBERTE avocat au Barreau de pour avocat plaidant Maître Quentin PELLETIER représentant la SELARL ASKE 5, avocat au Barreau de Nantes
ET :
Monsieur [W] [H] [N] [I] [D], né le [Date naissance 6] 1980 à [Localité 17], de nationalité française, en invalidité, demeurant résidence Alizéa [Adresse 7] [Localité 15] ;
Débiteur saisi, ayant pour avocat constitué Maître Perrine DELVILLE, SELARL CABINET BARTHOMEUF, Avocat au Barreau de Rennes et pour avocat plaidant Maître Marie DUPIN – Avocat au Barreau de Paris
ET ENCORE :
La Caisse de CREDIT MUTUEL DE [Localité 17] ROOSEVELT laquelle a élu domicile en l’Etude de Maître [K] [S] notaire associé au sein de la société LEXONOT [Adresse 4] [Localité 10]
Créancier inscrit en vertu :
– d’un privilège de prêteur de deniers en date du 12 novembre 2013 publié au SPF de [Localité 17] 1er bureau le 28 novembre 2013 sous les références 3504P01 volume 2013 V N°5302
– d’une hypothèque conventionnelle en date du 12 novembre 2013 publiée au SPF de [Localité 17] 1er bureau le 28 novembre 2013 sous les références 3504P01 volume 2013 V N°5303
Non comparante, ni représentée
EXPOSÉ DU LITIGE
Selon commandement aux fins de saisie immobilière en date du 13 novembre 2023, publié au service de la publicité foncière de Rennes 1er bureau, archivage provisoire S n°48, le 18 décembre 2023, la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens poursuit la vente de biens et droits immobiliers portant sur une maison d’habitation, appartenant à monsieur [W] [D], située à [Localité 16], [Adresse 3], cadastrée section AI n°[Cadastre 8], pour une contenance de 01a 14ca, plus amplement désignés dans le cahier des conditions de la vente déposé le 20 février 2024 au greffe du juge de l’exécution du tribunal judiciaire de Rennes.
Par acte de commissaire de justice en date du 16 février 2024, la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens a fait assigner monsieur [W] [D] à comparaître devant le juge de l’exécution, en audience d’orientation.
Cette assignation a été dénoncée au créancier inscrit le 19 février 2024.
Après plusieurs renvois pour échange de pièces et écritures, l’affaire a été plaidée à l’audience du 14 novembre 2024 au cours de laquelle les parties ont repris leurs écritures.
Aux termes de conclusions notifiées par l’intermédiaire du réseau privé virtuel des avocats le 2 octobre 2024, la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens demande au juge de l’exécution de :
“Vu notamment les dispositions des articles L. 311-2 à L. 311-4 et L. 311-6 du Code des procédures civiles d’exécution et des articles R. 322-4 à R. 322-9 du Code des procédures civiles d’exécution,
Vu l’article 700 du Code de procédure civile,
Vu les pièces du dossier,
– Débouter monsieur [W] [D] de toutes ses demandes, fins et conclusions ;
– Vérifier que les conditions des articles L311-2, L311-4 et L311-6 du code des procédures civiles d’exécution sont réunies ;
– Statuer sur les éventuelles contestations et demandes incidentes ;
– Fixer le montant retenu pour la créance du poursuivant à la somme de 134.296,87 euros sous réserve des intérêts courus ou à courir frais intérêts accessoires non comptabilisés au 13 février 2024 ;
– Déterminer les modalités de poursuite de la vente ;
– Ordonner la vente forcée des biens et droits immobiliers objets du commandement valant saisie et régulièrement publié à la conservation des hypothèques ;
– Fixer le montant de la mise à prix tel que mentionné dans le cahier des conditions de la vente à la somme de 99.000 € ;
– Fixer la date d’audience de vente ;
– Déterminer les modalités de visite de l’immeuble en présence de l’huissier de justice et avec le concours si besoin est de la force publique ;
– Dire que la date de visite sera fixée par le créancier poursuivant dans les 10 jours précédant la date de vente ;
– Ordonner l’emploi des dépens en frais privilégiés de vente, dont distraction au profit de maître Benjamin BUSQUET sur son affirmation de droit ;
A défaut dans l’hypothèse d’autorisation d’une vente amiable des biens saisis :
– Dire que la vente devra intervenir dans un délai maximum de quatre mois ;
– Dire que les débiteurs devront rendre compte au créancier poursuivant sur sa simple demande des démarches accomplies pour vendre l’immeuble ;
– Rappeler que la vente amiable se déroulera conformément aux dispositions du cahier des conditions de vente ;
– Dire que les fonds provenant de la vente ainsi que les frais taxés seront consignés par l’acquéreur sur un compte séquestre ouvert à la CARPA de l’ordre des avocats du barreau de RENNES ;
– Dire que le notaire ne pourra procéder à la rédaction de l’acte notarié de vente qu’après justification du paiement du prix de vente et des frais taxés ;
– Fixer la date de l’audience de rappel ;
– Taxer les frais de poursuites qui devront être réglés à l’avocat poursuivant ;
– Condamner monsieur [W] [D] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens la somme de 3.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’en tous les dépens.”
S’agissant de la demande de nullité du commandement de payer aux fins de saisie immobilière et de nullité subséquent de l’assignation soulevée par monsieur [W] [D], la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens soutient par ailleurs qu’elle dispose bien d’une créance exigible, le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes ayant rétracté son ordonnance du 12 septembre 2023, laquelle ne lui avait au demeurant jamais été notifiée par le greffe ni signifiée par le débiteur et ne lui était donc pas opposable au moment de la délivrance de l’acte critiqué. Pour les mêmes motifs, elle conclut à la recevabilité de l’assignation en audience d’orientation.
Pour conclure au rejet de la demande de sursis à statuer, la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens fait valoir qu’il n’est pas démontré que l’événement prétendument de nature à fonder ce sursis ait une incidence sur la présente instance de saisie immobilière, l’issue de la procédure engagée devant le tribunal judiciaire du Mans étant au demeurant très incertaine selon elle eu égard aux données du litige. La banque considère que ce sursis à statuer se justifie d’autant moins que monsieur [W] [D] a déjà bénéficié de larges délais de paiement, un délai de grâce de 24 mois lui ayant été accordé en 2018 et la déchéance du terme datant de plus d’une année. Elle pointe la mauvaise foi du débiteur saisi qui n’a eu de cesse de multiplier les procédures afin de gagner du temps et n’a jamais formé aucune proposition de règlement.
L’établissement bancaire s’oppose à la demande de vente amiable estimant que le mandat de vente produit est tardif et établi uniquement pour les besoins de la procédure. Il estime par ailleurs que le prix de vente qui y figure
n’est pas en phase avec les réalités du marché immobilier actuel.
La banque fait également conclure au rejet de la demande indemnitaire formée par le débiteur à son encontre, en l’absence de faute caractérisée et de préjudice démontré, ce d’autant que monsieur [W] [D] apparaît comme étant de mauvaise foi.
Aux termes de conclusions notifiées par le réseau privé virtuel des avocats le 2 octobre 2024, monsieur [W] [D] demande au juge de l’exécution de :
“Vu les articles 1343-5 al 4 du code civil
R 321-1 et R322-20 et suivants du code des procédures civiles d’exécution
In limine litis :
– Prononcer la nullité du commandement de payer valant saisie signifié par le Crédit Mutuel Val du Cens à Monsieur [D] le 13 novembre 2023 portant sur le crédit n° [XXXXXXXXXX02] ;
– Prononcer la nullité des actes subséquent dudit commandement de payer valant saisie dont l’assignation signifiée par le Crédit Mutuel Val du Cens à Monsieur [D] le 16 février 2024 en audience d’orientation devant la présente juridiction et constituant son acte de saisine ;
A défaut,
– Déclarer irrecevable l’assignation signifiée par le Crédit Mutuel Val du Cens à Monsieur [D] le 16 février 2024 en audience d’orientation devant la présente juridiction et constituant son acte de saisine ;
A défaut,
– Sursoir à statuer dans l’attente du délibéré du jugement qui sera rendu par le Tribunal judiciaire du Mans dans la procédure RG 22/03312 à l’encontre de Madame [Z] ;
A défaut, sur le fond :
– Autoriser Monsieur [W] [D] à vendre le bien à l’amiable sis sur la commune de [Localité 16] en Ille et Vilaine, [Adresse 3] et [Adresse 5] cadastré section AI n°[Cadastre 8] au prix minimum de 200.000€ pour le [Adresse 3] et 300.000 € pour le [Adresse 5] ;
– Condamner le crédit Mutuel Val du Cens à payer la somme de 15.000€ au titre du préjudice moral subi par Monsieur [D] du fait de son action ;
– Condamner le Crédit Mutuel Val du Cens à payer la somme de 5.000€ à Monsieur [D] au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– Le condamner aux entiers dépens.”
Monsieur [W] [D] conclut à la nullité du commandement de payer aux fins de saisie immobilière et à celle subséquente de l’assignation, compte tenu de l’absence d’exigibilité de la créance de l’établissement bancaire au moment de sa délivrance, son obligation en remboursement du prêt contracté auprès de cette banque ayant été suspendue par ordonnance du juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Rennes du 12 septembre 2023.
Pour les mêmes motifs, il se prévaut de l’irrecevabilité de l’assignation en audience d’orientation.
A titre subsidiaire, il sollicite le prononcé d’un sursis à statuer dans l’attente de la décision du tribunal judiciaire du Mans devant laquelle il a assigné un avocat en responsabilité et indemnisation, celui-ci étant à l’origine de ses difficultés actuelles en raison des graves erreurs et omissions commises. Il ajoute avoir doublé cette procédure d’une action en responsabilité contre l’Etat devant le tribunal administratif et qu’une procédure pénale en escroquerie est en cours devant le juge d’instruction. Il soutient que cette procédure aura nécessairement une incidence sur le présent litige puisque l’indemnisation qu’il recevra dans ce cadre lui permettra de solder le crédit immobilier à l’égard de la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens ainsi que de mettre un terme au litige. Il en déduit qu’il serait d’une bonne administration de la justice de suspendre la présente procédure de saisie immobilière.
Sur le fond, monsieur [W] [D] demande le droit d’organiser une vente amiable de chacun des appartements concerné par la présente procédure et sollicite que leur prix plancher soit de 200.000 € pour l’un et de 300.000 € pour l’autre.
Il réclame par ailleurs des dommages et intérêts en réparation du préjudice moral qu’il subit du fait de l’engagement de la présente procédure en saisie immobilière alors que la banque ne pouvait pas agir en exécution forcée à son encontre du fait de la suspension de son obligation au paiement du crédit immobilier sur le fondement de l’article L. 313-12 du Code de la consommation.
Il explique le chiffrage de sa demande indemnitaire au titre de l’article 700 du Code de procédure civile par le fait qu’outre les frais de défense, il a été contraint d’engager de coûteux frais de transport pour être présent à l’audience alors qu’il réside en Guadeloupe et qu’il ne dispose désormais que de peu de ressources, et que la présente procédure a par ailleurs aggravé son état de santé fragile.
Pour un plus ample exposé des moyens en fait et en droit des parties, il est renvoyé au détail de leurs conclusions respectives conformément à l’article 455 du Code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS
Le juge de l’exécution, statuant après débats en audience publique, par jugement réputé contradictoire, rendu en premier ressort,
– DÉBOUTE monsieur [W] [D] de l’intégralité de ses demandes ;
– FIXE le montant retenu pour la créance de la Caisse de Crédit Mutuel Val du Cens à l’encontre de monsieur [W] [D] à la somme totale de 134.296,87 € en principal, intérêts et frais arrêtés au 13 février 2024, outre les intérêts postérieurs au taux de 1,68 % l’an à compter du 14 février 2024 sur la somme de 121.698,11 € correspondant au capital restant dû;
– ORDONNE la vente forcée du bien immobilier visé au commandement de payer valant saisie, par adjudication judiciaire à l’audience du Jeudi 03 avril 2025 à 10 h00
qui sera tenue à la Cité judiciaire [Adresse 13] à [Localité 17] ;
– DIT que cette vente se fera aux conditions du cahier de vente déposé au greffe le 20 février 2024 ;
– DIT que ledit commissaire de justice fera procéder dans les lieux par tout expert de son choix à l’établissement ou à l’actualisation si nécessaire, des diagnostics d’amiante, termites, plomb (si construction antérieure à 1948), performance énergétique, gaz, électricité, risques naturels et technologiques majeurs ;
– DIT que le commissaire de justice commis pourra se faire assister pour ces deux interventions, si besoin est, du commissaire de police ou de la gendarmerie ou de deux témoins majeurs conformément à l’article L. 142-1 du Code des procédures civiles d’exécution et d’un serrurier requis ;
– DIT que les mesures de publicité sont celles de droit commun des articles R. 322-31 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution, avec possibilité d’aménagement dans les conditions requises aux articles R. 322-37 et suivants du même code ;
– DIT que les dépens et frais de poursuites seront taxés préalablement à l’audience d’adjudication et seront supportés par l’adjudicataire en sus du prix ;
– DIT que les dépens excédant les frais taxés ainsi que les émoluments dus à l’avocat en application de l’article A. 444-191 du Code de commerce seront employés en frais privilégiés de vente ;
– DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du Code de procédure civile relativement au présent incident ;
– REJETTE toute autre demande ;
– DIT que le présent jugement sera mentionné en marge de la publication du commandement de payer valant saisie immobilière en date du 13 novembre 2023 publié au service de la publicité foncière de [Localité 17] 1er bureau, archivage provisoire S n°48, le 18 décembre 2023 ;
– RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit.
Le Greffier, Le Juge de l’exécution,
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