Rémunération variable et loyauté contractuelle : enjeux et conséquences dans le cadre d’un contrat de travail.

·

·

Rémunération variable et loyauté contractuelle : enjeux et conséquences dans le cadre d’un contrat de travail.

L’Essentiel : Mme [G] [U] a été engagée par la SAS Elan en janvier 2016 en tant que chargée d’affaires notaires. En 2018, elle a demandé une révision de sa rémunération variable, ce qui a conduit à une augmentation de son salaire fixe à 2.100 euros. Après sa démission en avril 2019, elle a saisi le conseil de prud’hommes en octobre 2020 pour des indemnités. Le 15 février 2022, le conseil a partiellement accueilli ses demandes, condamnant la société à verser des rappels de salaires. La cour d’appel a infirmé certaines décisions, tout en confirmant d’autres condamnations.

Engagement de Mme [G] [U]

Mme [G] [U] a été engagée par la SAS Elan le 18 janvier 2016 en tant que chargée d’affaires notaires, avec un contrat à durée indéterminée. Son travail s’étendait sur plusieurs départements, avec une durée hebdomadaire de 39 heures et une rémunération de 1.800 euros mensuels, complétée par une partie variable liée à des objectifs.

Modification de la rémunération

En 2018, Mme [U] a demandé une révision de sa rémunération variable. Suite à des négociations, son salaire fixe a été augmenté à 2.100 euros, et un nouveau système de calcul de la partie variable a été mis en place, effectif à partir du 1er janvier 2019.

Démission et saisie des prud’hommes

Le 8 avril 2019, Mme [U] a démissionné, et le 13 octobre 2020, elle a saisi le conseil de prud’hommes de Roanne pour des demandes d’indemnités et de rappels de salaires.

Jugement du conseil de prud’hommes

Le 15 février 2022, le conseil de prud’hommes a partiellement accueilli les demandes de Mme [U], condamnant la société Elan à lui verser des rappels de salaires pour heures supplémentaires et des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail, tout en déboutant certaines de ses autres demandes.

Appel de la société Elan

La société Elan a interjeté appel le 15 mars 2022, contestant les condamnations prononcées par le conseil de prud’hommes.

Conclusions de la cour d’appel

Dans ses conclusions, la cour a infirmé certaines décisions du jugement initial, notamment en ce qui concerne la loyauté de l’exécution du contrat de travail par la société Elan, et a débouté Mme [U] de plusieurs de ses demandes, tout en confirmant d’autres condamnations.

Heures supplémentaires et rémunération variable

La cour a examiné les demandes de Mme [U] concernant les heures supplémentaires et la rémunération variable, concluant que les objectifs fixés étaient atteignables et que les rappels de salaires pour heures supplémentaires étaient justifiés pour certaines années.

Indemnité pour travail dissimulé

Mme [U] a également demandé des dommages-intérêts pour travail dissimulé, mais la cour a confirmé le jugement initial, estimant que l’absence de paiement de la majoration des heures supplémentaires ne suffisait pas à prouver une intention de dissimulation de la part de l’employeur.

Publication de l’arrêt et dommages-intérêts

La cour a rejeté la demande de publication de l’arrêt aux portes de l’entreprise et a également infirmé la demande de Mme [U] pour des dommages-intérêts pour exécution déloyale, considérant qu’elle n’avait pas prouvé l’existence d’un préjudice distinct.

Intérêts de retard et remise de documents

La cour a ordonné la capitalisation des intérêts et a imposé à la société Elan de remettre à Mme [U] les documents sociaux nécessaires dans un délai de 30 jours, sans astreinte.

Décision finale

La cour a statué en faveur de Mme [U] pour certaines sommes dues, tout en confirmant d’autres décisions du conseil de prud’hommes et en condamnant la société Elan aux dépens d’appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences de la prescription des demandes de rappel de salaires pour heures supplémentaires ?

La société Elan a soulevé la prescription des demandes de Mme [U], arguant que celle-ci ne pouvait réclamer le paiement d’heures supplémentaires que pour les trois années précédant la saisine du conseil de prud’hommes, soit jusqu’au 13 octobre 2020.

L’article L. 3245-1 du Code du travail stipule que :

« L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. »

Ainsi, le point de départ de la prescription est la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible.

Dans le cas de Mme [U], la rupture de son contrat de travail étant intervenue le 8 mai 2019, elle est recevable à solliciter le paiement de rappels de salaire au titre des heures supplémentaires dues entre mai 2016 et mai 2019.

Par conséquent, le jugement qui a déclaré prescrites les demandes de rappels de salaires pour la période antérieure au 30 octobre 2017 a été infirmé.

Quelles sont les obligations de l’employeur concernant le paiement des heures supplémentaires ?

L’article L. 3121-28 du Code du travail précise que :

« Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent. »

De plus, l’article L. 3121-33 indique qu’une convention ou un accord collectif peut prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires par un repos compensateur.

Dans cette affaire, la société Elan a soutenu que les heures supplémentaires effectuées par Mme [U] avaient été compensées par un repos compensateur de remplacement. Cependant, l’employeur n’a pas prouvé que cette décision unilatérale ait été formalisée et portée à la connaissance des salariés.

Il a été établi que la société Elan avait payé chaque mois à Mme [U] les heures supplémentaires sur la base du taux horaire brut, mais n’a pas démontré que les majorations afférentes avaient été compensées par un repos de remplacement.

Ainsi, la société Elan a été condamnée à payer les sommes dues au titre des majorations d’heures supplémentaires.

Quels sont les critères de validité d’un « Pay Plan » en matière de rémunération variable ?

Le « Pay Plan » doit être élaboré de manière à ce que les objectifs fixés soient réalisables et compatibles avec le marché.

L’employeur doit fournir au salarié les moyens d’atteindre ces objectifs, qui doivent être portés à sa connaissance en début d’exercice.

Dans cette affaire, il a été démontré que le nouveau « Pay Plan » avait été négocié avec Mme [U] et qu’il prévoyait des objectifs atteignables.

La société Elan a produit des éléments montrant que d’autres salariés avaient atteint leurs objectifs, ce qui démontre que ceux-ci étaient réalisables.

Ainsi, la demande de Mme [U] concernant les rappels de salaires sur la base de la rémunération variable a été déboutée, car elle n’a pas prouvé que les objectifs étaient inatteignables.

Quelles sont les conditions pour obtenir des dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ?

L’article L. 1222-1 du Code du travail impose à l’employeur d’exécuter le contrat de travail de bonne foi.

Pour obtenir des dommages-intérêts pour exécution déloyale, le salarié doit prouver l’existence d’un préjudice spécifique causé par le manquement à cette obligation de loyauté.

Dans le cas de Mme [U], il a été constaté qu’elle n’avait pas rapporté la preuve d’un préjudice consécutif à une faute de l’employeur.

De plus, aucun élément ne permettait de conclure que la société Elan avait eu un comportement déloyal dans le cadre de la négociation du « Pay Plan ».

Par conséquent, la demande de Mme [U] a été rejetée, confirmant ainsi le jugement de première instance.

Quelles sont les implications de la demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ?

L’article L. 8223-1 du Code du travail stipule que :

« En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. »

Cependant, pour qu’il y ait travail dissimulé, il faut que l’employeur se soit soustrait intentionnellement à ses obligations, notamment en ne délivrant pas de bulletin de paie ou en mentionnant un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli.

Dans cette affaire, bien que l’employeur n’ait pas payé la majoration des heures supplémentaires, cela n’a pas suffi à caractériser une intention de dissimuler des heures de travail.

Ainsi, la demande de Mme [U] a été déboutée, confirmant le jugement de première instance.

AFFAIRE PRUD’HOMALE

RAPPORTEUR

N° RG 22/02086 – N° Portalis DBVX-V-B7G-OF63

S.A.S.U. ELAN

C/

[U]

APPEL D’UNE DÉCISION DU :

Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de Roanne

du 15 Février 2022

RG : 2000050

COUR D’APPEL DE LYON

CHAMBRE SOCIALE C

ARRÊT DU 10 JANVIER 2025

APPELANTE :

S.A.S.U. ELAN

[Adresse 1]

[Localité 3]

représentée par Me Elise LAPLANCHE substituée par Me Clémence CHOPINEAU de la SELARL YDES, avocats au barreau de LYON

INTIMÉE :

[G] [U]

née le 27 Janvier 1987 à [Localité 5]

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Laurent LIGIER de la SELARL LIGIER & DE MAUROY, avocat postulant du barreau de LYON et Me Céline DELANNOY, avocat plaidant du même barreau

DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 08 Novembre 2024

Présidée par Agnès DELETANG, Présidente magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assistée pendant les débats de Fernand CHAPPRON, Greffier.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

– Agnès DELETANG, Présidente

– Yolande ROGNARD, Conseillère

– Françoise CARRIER, Conseillère horaire exerçant des fonctions juridictionnelles

ARRÊT : CONTRADICTOIRE

Prononcé publiquement le 10 Janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;

Signé par Agnès DELETANG, Présidente et par Fernand CHAPPRON, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

********************

Mme [G] [U] a été engagée par la SAS Elan à compter du 18 janvier 2016 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de chargée d’affaires notaires, pour les départements de la Loire, du Rhône, de la Saône et Loire, du Puy de Dôme et de la Haute-Loire. La durée de travail est de 39 heures par semaine. Sa rémunération est composée d’un salaire fixe mensuel de 1.800 euros et d’une partie variable calculée en fonction des objectifs réalisés (déterminée par référence à un Pay Plan).

La convention collective des Commerces de détail de la Papeterie, librairie, fournitures de bureau, bureautique et informatique est applicable.

Courant 2018, Mme [U] a fait part à la société Elan de son souhait de revoir le mode de calcul de sa rémunération variable. A l’issue des négociations intervenues entre la société Elan et Mme [U], la rémunération fixe de cette dernière a été portée de 1 800 euros bruts à 2 100 euros bruts et le calcul de la partie variable a été revu, le nouveau « Pay Plan » ayant vocation à s’appliquer à compter du 1er janvier 2019.

Le 8 avril 2019, Mme [U] a adressé sa démission à l’employeur, qui en a accusé réception le 16 avril suivant.

Par acte du 13 octobre 2020, Mme [U] a saisi le conseil de prud’hommes de Roanne de plusieurs demandes à caractère indemnitaire et salarial.

Par jugement du 15 février 2022, le conseil de prud’hommes de Roanne a :

– Dit partiellement justifiées les demandes de Mme [U] [G] ;

– Dit que les créances sollicitées de Mme [U] sont recevables à compter du 30 octobre 2017 :

– Condamné la société Elan à payer à Mme [U] les sommes suivantes :

‘ 92,75 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2017, outre 9,28 euros de congés payés afférents,

‘ 560,00 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2018, outre 56,50 euros de congés payés afférents,

‘ 228,80 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2019, outre 22,88 euros de congés payés afférents,

‘ 5.650,00 euros nets de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

– Débouté Mme [U] de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

– Débouté Mme [U] de sa demande de rappel de salaire au titre de la rémunération variable sur marge brute 2019 ;

– Dit que l’exécution provisoire ne s’applique que pour les condamnations de plein droit ;

– Fixé le départ des intérêts à compter du 13 octobre 2020 pour les heures supplémentaires ;

– Débouté Mme [U] de sa demande de capitalisation des intérêts ;

– Condamné la société Elan à payer à Mme [U] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Débouté la société Elan de sa demande reconventionnelle au titre de ce même article ;

– Condamné la société Elan aux dépens de l’instance.

Par déclaration du 15 mars 2022, la société Elan a interjeté appel de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions notifiées par voie électronique le 29 novembre 2022, la société Elan demande à la cour de :

– Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Roanne en ce qu’il a condamné la société Elan au paiement des sommes suivantes :

‘ 92,75 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2017, outre 9,28 euros de congés payés afférents,

‘ 560,00 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2018, outre 56,50 euros de congés payés afférents,

‘ 228,80 euros bruts de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2019, outre 22,88 euros de congés payés afférents,

‘ 5.650,00 euros nets de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail,

‘ 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance ;

Statuant de nouveau sur les points infirmés :

À titre principal,

– Juger que la société Elan a exécuté le contrat de travail de Mme [U] loyalement ;

Par conséquent,

– Débouter Mme [U] de ses demandes de rappel de salaire concernant les heures supplémentaires et d’indemnité compensatrice de congés payés afférents,

– Débouter Mme [U] de sa demande de dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail ;

À titre subsidiaire,

– Juger que Mme [U] ne rapporte pas l’existence ni l’étendue d’un préjudice distinct justifiant l’octroi de dommages et intérêts ;

Par conséquent,

– Rapporter le montant des dommages intérêts à hauteur de 100 euros symboliques ;

– Confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Mme [U] de ses demandes de condamnations suivantes :

‘ 415,30 euros bruts de majorations pour heures supplémentaires au titre de l’année 2016, outre 41,53 euros de congés payés afférents,

‘ 466,01 euros bruts de rappel de salaire au titre de la rémunération variable sur chiffre d’affaires 2019, outre 46,60 euros de congés payés y afférents,

‘ 1.319,79 euros de rappels de rappel de salaire au titre de la rémunération variable sur la marge bruts 2019, outre 131,97 euros au titre des congés payés y afférents,

‘ 22.557 euros nets de dommages-intérêts sur le fondement de L.8223-1 du code du travail,

‘ La publication de l’arrêt de la cour d’appel aux portes d’entrée du siège social de la société Elan,

‘ fixer la date des départs des intérêts à compter de la saisine des prud’hommes pour les sommes à caractère indemnitaire et à compter du 26 mai 2020 pour les sommes à caractère salarial,

‘ capitalisation des intérêts,

‘ remise de bulletin de paie rectificatifs dans un délai de 15 jours calendaire à compter de la notification de l’arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

En tout état de cause,

– Débouter Mme [U] de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de condamnation aux dépens ;

– Condamner Mme [U] à verser à la société Elan la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.

Dans ses uniques conclusions notifiées par voie électronique le 6 septembre 2022, Mme [G] [U] demande à la cour de :

A titre principal,

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a condamné la société Elan au paiement des sommes suivantes :

‘ 228,80 euros au titre des heures supplémentaires, outre 22,88 euros de congés payés pour l’année 2019 ;

‘ 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande de rappels de salaire dus au titre des majorations pour heures supplémentaires antérieures au 30 octobre 2017 ;

Statuant à nouveau :

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 415,30 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2016, outre 41,53 euros de congés payés afférents ;

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 556,54 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2017, outre 55,65 euros de congés payés afférents ;

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 560,45 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires sont dues au titre de l’année 2018, outre 56,05 euros de congés payés afférents par conséquent ;

– Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande de rappels de salaire au titre des rémunérations variables sur Chiffre d’Affaires et Marge Brute 2019 ;

Statuant à nouveau :

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 466,01 euros de rappels de salaire au titre de la rémunération variable sur Chiffre d’Affaires 2019, outre 46,60 euros au titre des congés payés afférents ;

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 1.319,79 euros de rappels de salaire au titre de la rémunération variable sur marge brute 2019, outre 131,97 euros au titre des congés payés afférents ;

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a partiellement débouté Mme [U] de sa demande indemnitaire au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

Statuant à nouveau :

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 11.200 euros nets de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail ;

– Infirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande de 30.624 euros nets de dommages-intérêts sur le fondement de l’article L. 8223-1 du code du travail ;

Statuant à nouveau :

– Condamner la société Elan à verser à Madame [U] la somme de de 22.557,24 euros nets de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 8223-1 du Code

du travail ;

– Ordonner la publication de l’arrêt à intervenir de la Cour d’appel de Lyon aux portes

d’entrée du siège social de la société Elan pendant une durée de 12 mois ;

– Infirmer le jugement du Conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 en ce qu’il a débouté Mme [U] de sa demande de capitalisation des intérêts ;

Statuant à nouveau :

– Juger que la date de départ des intérêts court à compter de la saisine du conseil de

prud’hommes pour les sommes à caractère indemnitaire et à compter du 26 mai 2020 pour les sommes à caractère salarial en application de l’article 1153 du code civil ;

– Prononcer la capitalisation des intérêts en application de l’article 1154 du code civil ;

– Condamner la société Elan à la remise de bulletins de paie rectificatifs dans un délai de 15 jours calendaires à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et par document ;

A titre subsidiaire :

– Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne du 15 février 2022 dans toutes ses dispositions ;

En tout état de cause :

– Condamner la société Elan à verser à Mme [U] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner la société Elan aux entiers dépens de 1ère instance et d’appel.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour se réfère, pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties, à leurs conclusions écrites précitées.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 8 octobre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande au titre des heures supplémentaires

Sur la prescription

La société Elan soulève la prescription des demandes de Mme [U] faisant valoir que la salariée ne peut réclamer le paiement d’heures supplémentaires que pour les trois années précédant la saisine du conseil de prud’hommes, soit le 13 octobre 2020. Elle en conclut que les demandes de rappels de salaires pour la période antérieure au 13 octobre 2017 sont prescrites.

Mme [U] soutient quant à elle que ses demandes ne sont pas prescrites et qu’elle est fondée à réclamer un rappel de salaires au titre des heures supplémentaires qu’elle a effectuées à compter du 8 mai 2016, correspondant aux trois années ayant précédé la rupture de son contrat de travail intervenue le 8 mai 2019, conformément aux dispositions de l’article L. 3245-1 du code du travail.

L’article L 3245-1 du Code du travail dispose que : « L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat ».

De cet article il se déduit d’une part, que le contrat de travail du salarié concerné soit toujours en cours ou qu’il ait été rompu, que c’est la date à laquelle le salarié a eu connaissance ou aurait dû avoir connaissance du manquement de l’employeur qui fixe le point de départ du délai de trois ans dont il dispose pour engager son action en paiement et d’autre part, qu’en cas de rupture du contrat de travail, c’est la date de cette rupture qui détermine rétroactivement les créances salariales sur lesquelles son action peut porter et il s’agit uniquement de celles nées au cours des trois années ayant précédé cette rupture.

Le point de départ de la prescription de l’action en paiement du salaire est la date à laquelle la créance salariale est devenue exigible. Il s’ensuit que la prescription de chacune des créances salariales revendiquées par Mme [U] a couru à compter de sa date d’exigibilité, étant précisé que pour les salariés payés au mois, la date d’exigibilité du salaire correspond à la date habituelle du paiement des salaires en vigueur dans l’entreprise, soit pour la société Elan, selon les bulletins de paie produits, le dernier jour du mois auquel il se rapporte, et concerne l’intégralité du salaire afférent au mois considéré.

Mme [U] présente une demande de rappel de salaire au titre de la majoration d’heures supplémentaires non payées comprises entre mai 2016 et mai 2019. En saisissant le conseil des prud’hommes par requête du 13 octobre 2020, Mme [U] a donc agi dans le délai de trois ans prévu par l’article L.3245-1 alinéa 1 précité. En application de l’alinéa 2 de ce même article, Mme [U], dont la rupture du contrat de travail est intervenue le 8 mai 2019, est donc recevable à solliciter le paiement de rappel de salaire au titre des heures supplémentaires dues entre mai 2016 et mai 2019.

Dès lors il convient d’infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré prescrite la demande de rappels de salaires de Mme [U] pour la période antérieure au 30 octobre 2017.

Sur la majoration des heures supplémentaires

La société Elan reproche aux premiers juges d’avoir considéré qu’elle était tenue au paiement de la majoration des heures supplémentaires alors que les quatre heures supplémentaires mensuelles figurant sur les bulletins de paie de la salariée ont été rémunérées sur la base du taux horaire de base et leur majoration ont donné lieu à un repos compensateur de remplacement. Elle souligne que le remplacement de la majoration des heures supplémentaires par l’attribution d’un repos compensateur est possible, non seulement en vertu de l’article 2.7 de l’accord de branche du 13 juillet 2001 applicable au sein de la branche des commerces de détail de la papeterie et des fournitures de bureau, mais également par le code du travail dès lors que l’entreprise ne comporte aucun délégué syndical et qu’elle n’est pas assujettie à l’obligation de négociation annuelle. Elle affirme que le repos compensateur de remplacement, correspondant à la majoration des quatre heures supplémentaires, s’élève à une heure par semaine, soit 4,33 heures par mois. Elle précise qu’elle a décidé, dès 2005, que ce repos compensateur de remplacement serait pris par les salariés sous la forme de pauses café à raison de 13 minutes par jour et que ce dispositif a été réaffirmé et porté à la connaissance de l’ensemble des salariés, par l’intermédiaire des délégués du personnel, dans le courant de l’année 2017. La société Elan fait en outre valoir que les horaires de travail de Mme [U] lui permettaient largement de bénéficier de son repos compensateur correspondant à l’attribution de 13 minutes de pause par jour, qu’elle lui a payé 39 heures par semaine de travail effectif sans rechercher si la salariée les avait réellement effectuées et qu’en tout état de cause, il appartient à Mme [U] de rapporter la preuve qu’elle a réalisé des heures supplémentaires ayant eu pour effet de porter sa durée du travail au-delà de 35 heures par semaine.

En réplique, Mme [U] conteste avoir eu connaissance de l’existence de la décision unilatérale de l’employeur instituant un repos compensateur de remplacement, de sorte que le dispositif dont se prévaut la société lui est inopposable et qu’en outre, tant au regard de ses fonctions que des horaires auxquels elle était astreinte, il ne lui était pas possible de bénéficier d’un repos compensateur journalier. Elle souligne, égalemen, que son contrat de travail ne fait aucunement référence au principe du repos compensateur, ni à l’accord de branche, ni même à la décision unilatérale prise par l’employeur sur le principe du repos compensateur de remplacement.

En vertu de l’article L. 3121-28 du code du travail, Toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent.

L’article L. 3121-33 du même code, dans sa version applicable au litige, précise qu’une convention ou un accord collectif d’entreprise ou d’établissement ou, à défaut, une convention ou un accord de branche peut également prévoir le remplacement de tout ou partie du paiement des heures supplémentaires, ainsi que des majorations, par un repos compensateur équivalent.

S’agissant de la possibilité de substituer l’attribution d’un repos compensateur de remplacement au paiement des heures supplémentaires, l’avenant du 13 juillet 2001 relatif à l’aménagement et à la réduction du temps de travail à 35 heures de la convention collective nationale des entreprises du bureau et du numérique précise à l’article 2.7 que les heures ayant la qualité d’heures supplémentaires en application des dispositions légales ainsi que leur majoration ou bonification pourront donner lieu à l’initiative de l’employeur à un paiement ou à l’attribution d’un repos compensateur de remplacement.

Par ailleurs, en application de l’article D 3171-11 du code du travail, à défaut de précision conventionnelle contraire, les salariés sont informés du nombre d’heures de repos compensateur de remplacement et de contrepartie obligatoire en repos portés à leur crédit par un document annexé au bulletin de paie. Dès que ce nombre atteint sept heures, ce document comporte une mention notifiant l’ouverture du droit à repos et l’obligation de le prendre dans un délai maximum de deux mois après son ouverture.

En l’espèce, le contrat de travail de Mme [U] stipule, en son article 4 « durée du travail ‘ horaires » que :

la durée du travail hebdomadaire est fixée conformément à l’horaire collectif affiché dans l’entreprise à titre informatif, elle est de 39 heures répartie comme suit :

du lundi au jeudi : 8 heures/12 heures ‘ 14 heures/18 heures

le vendredi : 8 heures/12 heures- 14 heures/17 heures.

Les horaires ainsi détaillés représentent une durée de travail hebdomadaire de 39 heures.

Les 39 heures hebdomadaires figurant dans le contrat de travail sont corroborées par l’étude des bulletins de salaire qui fait apparaître que la salariée était rémunérée sur la base de 39 heures, même s’il est distingué 35 heures au titre de la durée légale de travail et 4 heures supplémentaires contractualisées.

Ainsi, il importe peu que le salarié ait effectué ou non lesdites heures supplémentaires, l’employeur qui s’est contractuellement engagé, se doit de les rémunérer.

Il est établi par les pièces produites que la société Elan a payé, chaque mois, à Mme [U] les 4 heures supplémentaires sur la base du taux horaire brut.

S’agissant de la majoration de ces heures supplémentaires, la société Elan considère n’être redevable d’aucune somme dès lors que, selon elle, l’intégralité des majorations afférentes à ces heures de travail a été compensée par l’attribution de repos compensateurs de remplacement conformément à une décision unilatérale de sa part, appliquée dans l’entreprise depuis 2005.

Il convient toutefois de relever que la société Elan ne rapporte pas la preuve que cette décision unilatérale ait été formalisée et portée à la connaissance des salariés. A cet égard, la société Elan ne peut valablement se fonder sur le mail adressé le 23 février 2018 par M. [H] [D] à certains salariés pour soutenir que ces derniers auraient été valablement informés de la décision unilatérale appliquée depuis 2005 dans l’entreprise. En outre, aucun relevé mensuel annexé aux bulletins de salaire n’est produit, de telle sorte que le décompte exact des repos compensateurs de remplacement dont devait bénéficier Mme [U] n’est pas justifié par l’employeur.

En tout état de cause, la société Elan ne démontre d’aucune manière que la salariée a effectivement pu bénéficier des repos compensateurs de remplacement. L’argument selon lequel il était accordé quotidiennement des « pauses café à raison de 13 minutes par jour » en contrepartie de la majoration des heures supplémentaires est à cet égard inopérant.

Dès lors, la société Elan ne démontre pas que l’intégralité des heures supplémentaires aient été payées ou à défaut compensées par un repos de remplacement.

Dans ces conditions, par infirmation du jugement entrepris de ce chef, il y a lieu de condamner la société Elan à payer à Mme [U] les sommes suivantes :

– 415,30 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2016, outre 41,53 euros de congés payés afférents ;

– 556,54 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2017, outre 55,65 euros de congés payés afférents ;

– 560,45 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires sont dues au titre de l’année 2018, outre 56,05 euros de congés payés afférents.

En revanche, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné la société Elan à payer à Mme [U] la somme de 228,80 euros bruts au titre de majorations d’heures supplémentaires dues au titre de l’année 2019, outre 22,88 euros de congés payés afférents.

Sur la demande au titre de la prime d’objectifs

Mme [U] sollicite des rappels de salaires sur les deux composantes de sa rémunération variable, portant d’une part, sur le chiffre d’affaires et d’autre part, sur la marge brute, pour les montants respectifs de 466,01 euros outre 46,60 euros de congés payés afférents et de 1.319,79 euros outre 131,97 euros de congés payés afférents.

A l’appui de cette demande, Mme [U] fait valoir pour l’essentiel qu’un nouveau Pay Plan a été négocié courant 2018 aux termes duquel les objectifs fixés étaient inatteignables et qui contenait une grille d’objectifs et de primes moins intéressante que celle contenue dans le précédent « Pay Plan ». Elle souligne qu’il importe peu qu’elle ait participé à l’élaboration de ce « Pay Plan » et qu’elle l’ait signé, ces seules circonstances ne permettant d’en déduire que les objectifs qui y étaient contenus étaient réalisables.

La société Elan soutient au contraire que le Pay Plan, négocié en concertation avec les chargés d’affaires, et plus particulièrement Mme [U], prévoyait des objectifs atteignables et souligne notamment que sur les quatre premiers mois de l’année 2019, la salariée a obtenu davantage de rémunération variable au titre du « Pay Plan 2019 » que pour l’année 2018. Elle observe que d’autres salariés de l’entreprise ont largement atteints les objectifs fixés, ce qui démontre que ceux-ci étaient réalisables.

Il sera rappelé que les objectifs déterminés par l’employeur doivent être réalisables et compatibles avec le marché. Le salarié doit avoir les moyens de les atteindre et ils doivent être portés à sa connaissance en début d’exercice. La charge de la preuve du caractère réalisable desdits objectifs et de ce que leur non-atteinte est imputable au salarié incombe à l’employeur.

En l’espèce, il ressort des pièces produites qu’à compter de juillet 2018, à la demande de plusieurs salariés, le « Pay Plan » a donné lieu à des négociations entre la direction et certains salariés de la société, conformément à la demande de ces derniers. Un nouveau « Pay Plan » a, dans ce cadre été élaboré et signé par Mme [U], celui-ci ayant vocation à recevoir application à compter du 1er janvier 2019.

Ce document prévoit expressément que ‘ les objectifs ont été fixés entre Madame [G] [U] et la direction en tenant compte notamment :

– du potentiel des secteurs sur lesquels Madame [G] [U] est susceptible d’intervenir auprès des clients et prospects existants

– du degré de professionnalisme de Madame [G] [U]

– de la situation du marché, des moyens mis à la disposition de Madame [G] [U] pour mener à bien sa mission (‘)’

Si la comparaison des deux « Pay Plan » démontre que les modalités de mise en ‘uvre de la part variable de la rémunération de Mme [U] sont différentes, il n’en demeure pas moins que les correctifs appliqués ne rendent pas inatteignables les objectifs à réaliser. De même, l’employeur démontre, par une évaluation comparative des « Pay Plan » qu’en fonction des seuils de déclenchement, la part variable se trouve progressivement augmentée.

En outre, le tableau comparatif produit pas la société Elan fait apparaître que plusieurs salariés ont été en mesure de réaliser leurs objectifs en 2019 (entre 84 et 114%), sur la base du même « Pay plan », avec une progression notable par rapport aux années antérieures.

Sur la seule période courant du 1er janvier 2019 au 8 mai 2019, date à laquelle le contrat de travail a pris fin, l’employeur démontre que Mme [U] a été en mesure d’atteindre une partie de ses objectifs, soit environ 52% de son objectif sur le chiffre d’affaires et 63% de son objectif sur marge brute, ces résultats étant meilleurs que ceux réalisés au titre de l’année 2018. La part variable de sa rémunération pour cette période a été intégralement payée.

Il s’évince de ces éléments que les objectifs de la salariée étaient atteignables de sorte que le manquement allégué n’est pas établi.

Dès lors, la décision sera confirmée en ce qu’elle débouté Mme [U] de ses demandes à ce titre.

Sur la demande d’indemnité au titre de travail dissimulé

Mme [U] réclame le paiement de la somme de 22.557,24 euros nets de dommages et intérêts sur le fondement de l’article L. 8223-1 du code du travail, soutenant que la société Elan s’est volontairement soustraite au paiement de la majoration des heures supplémentaires qu’elle a effectuées.

Selon l’article L.8223-1 du code du travail, « En cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L.8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L.8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. »

L’article L.8221-5 du code du travail dispose que : « Est réputé travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié le fait pour tout employeur :

1° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L.1221-10, relatif à la déclaration préalable à l’embauche ;

2° Soit de se soustraire intentionnellement à l’accomplissement de la formalité prévue à l’article L.3243-2, relatif à la délivrance d’un bulletin de paie, ou de mentionner sur ce dernier un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, si cette mention ne résulte pas d’une convention ou d’un accord collectif d’aménagement du temps de travail conclu en application du titre II du livre Ier de la troisième partie;

3° Soit de se soustraire intentionnellement aux déclarations relatives aux salaires ou aux cotisations sociales assises sur ceux-ci auprès des organismes de recouvrement des contributions et cotisations sociales ou de l’administration fiscale en vertu des dispositions légales » .

En l’espèce, si l’employeur n’ignorait pas l’exécution d’heures supplémentaires par la salariée, l’absence de paiement de la seule majoration des heures supplémentaires sans que les conditions légales en soient réunies n’est pas suffisante à caractériser une intention de l’employeur de dissimuler des heures de travail salariées et plus spécifiquement des heures supplémentaires.

Le jugement entrepris, qui a débouté Mme [U] de cette demande, sera donc confirmé

Sur la publication de l’arrêt à intervenir

Dans le dispositif de ses conclusions devant la juridiction de renvoi, Mme [U] forme une demande nouvelle tendant à ce que soit ordonnée la publication de la décision à intervenir « aux portes d’entrée du siège social de la société Elan pour une durée de douze mois ».

Aucune considération ne justifie d’ordonner une telle publication. Il y aura donc lieu de débouter Mme [U] de sa demande à ce titre.

Sur la demande de dommages-intérêts au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail

Mme [U] reproche pour l’essentiel à la société Elan de lui avoir fixé des objectifs qui n’étaient pas réalisables et qu’il en est résulté pour elle un préjudice financier, n’ayant perçu qu’un quart de la rémunération variable qu’elle visait mais également de l’avoir contrainte à réclamer le paiement de la majoration de ses heures supplémentaires.

En réplique, la société Elan conteste avoir eu un comportement déloyal et fait valoir que Mme [U] n’apporte aucun élément sur l’existence et l’étendue du préjudice justifiant l’octroi de dommages et intérêts.

En application de l’article L. 1222-1 du code du travail, tout contrat de travail comporte une obligation de loyauté qui impose à l’employeur d’exécuter le contrat de bonne foi.

La preuve de l’exécution déloyale du contrat de travail par l’employeur doit être rapportée par le salarié qui l’allègue.

Enfin, l’exécution déloyale du contrat de travail peut donner lieu à l’attribution de dommages et intérêts, à condition que le salarié démontre un préjudice spécifique causé par ce manquement à la bonne foi.

En premier lieu, il sera relevé que Mme [U] ne rapporte la preuve d’aucun préjudice consécutif à une faute de l’employeur qui n’aurait pas été réparé par le paiement des rappels de salaires au titre de la majoration des heures supplémentaires.

En second lieu, aucun des éléments produits par Mme [U] ne permet de retenir que la société Elan a eu un comportement déloyal dans le cadre de la négociation du « Pay Plan », étant ajouté au surplus que la salariée ne justifie aucunement du préjudice qu’elle invoque à hauteur de 11.200 euros.

Il y a donc lieu de débouter Mme [U] de ce chef de demande, par infirmation du jugement entrepris.

Sur les intérêts de retard

C’est à bon droit que les premiers juges ont assorti les créances salariales des intérêts au taux légal à compter du 19 octobre 2020, date de la réception par l’employeur de sa convocation à comparaître devant le bureau de conciliation et d’orientation.

La capitalisation des intérêts doit également être ordonnée dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil.

Le jugement sera infirmé de ce chef.

Sur la remise des documents sociaux

Il sera ordonné à la société Elan de remettre à Mme [U] une attestation destinée Pôle emploi (devenu France Travail), un bulletin de salaire et un reçu pour solde de tout compte conformes au présent arrêt, dans un délai de 30 jours suivant la signification du dit arrêt, sans qu’il soit néanmoins nécessaire de prononcer une astreinte à cette fin.

Sur les demandes accessoires

Le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a statué sur les dépens et les frais irrépétibles.

La société Elan sera condamnée aux dépens d’appel.

L’équité ne recommande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, après en avoir délibéré, statuant par arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe,

Infirme le jugement du conseil de prud’hommes de Roanne en date du 15 février 2022 en ses dispositions soumises à la cour sauf en en ce qu’il a

– condamné la société Elan à payer à Mme [U] la somme de 228,80 euros au titre d’heures supplémentaires outre 22,88 euros de congés pour l’année 2019 ;

– débouté Mme [G] [U] de sa demande de rappel de salaire au titre de la rémunération variable sur marge brute 2019 ;

– débouté Mme [G] [U] de sa demande de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

– fixé le départ des intérêts à compter du 13 octobre 2020 pour le rappel des majorations d’heures supplémentaires ;

– condamné la société Elan à payer à Mme [G] [U] la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– débouté la société Elan de sa demande reconventionnelle au titre de ce même article ;

– condamné la société Elan aux dépens ;

Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant,

Dit recevables les demandes de Mme [G] [U] au titre de rappels de salaire et congés payés afférents sur heures supplémentaires,

Condamne la SAS Elan à payer à Mme [U] les sommes suivantes :

– 415,30 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2016, outre 41,53 euros de congés payés afférents ;

– 556,54 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires au titre de l’année 2017, outre 55,65 euros de congés payés afférents ;

– 560,45 euros bruts de majorations d’heures supplémentaires sont dues au titre de l’année 2018, outre 56,05 euros de congés payés afférents ;

Déboute Mme [G] [U] de sa demande de dommages-intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail,

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du Code civil ;

Ordonne à la SAS Elan de remettre à Mme [G] [U] les documents sociaux conformes au présent arrêt (bulletin de paie, attestation Pôle emploi, certificat de travail, reçu pour solde de tout compte), dans un délai de 30 jours suivant la signification du présent arrêt ;

Dit n’y avoir lieu au prononcé d’une astreinte ;

Condamne la SAS Elan aux dépens d’appel ;

Dit n’y avoir lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rejette toute autre demande.

Le greffier La présidente


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon