L’Essentiel : M. [K], salarié de la société [4], a subi un accident de travail le 16 avril 2017, reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie. Il a demandé la reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur, arguant d’un manquement à l’obligation de sécurité. La victime a souligné que l’employeur n’avait pas fourni de plan de sécurité adéquat, exposant ainsi le salarié à des risques de chute. La cour d’appel a rejeté sa demande, estimant que M. [K] avait agi de manière imprudente. Cependant, elle a reconnu une infraction de l’employeur pour l’absence de mesures de sécurité, sans en tirer les conséquences.
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Accident de travailM. [K], salarié de la société [4], a subi un accident le 16 avril 2017, reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie de Corse du Sud dans le cadre de la législation professionnelle. Demande de reconnaissance de faute inexcusableLa victime a introduit une demande auprès d’une juridiction spécialisée pour faire reconnaître la faute inexcusable de son employeur, arguant que ce dernier n’avait pas respecté son obligation de sécurité envers lui. Arguments de la victimeLa victime soutenait que l’employeur, en réalisant des travaux sans fournir un plan de sécurité adéquat, avait omis de prendre les mesures nécessaires pour protéger le salarié des risques de chute, ce qui constituait une faute inexcusable. Décision de la cour d’appelLa cour d’appel a rejeté la demande de la victime, affirmant que celle-ci avait agi de sa propre initiative en utilisant une échelle inappropriée pour accéder à la terrasse, et que l’employeur ne pouvait pas être tenu responsable de ce comportement dangereux. Constatations de la courLa cour a reconnu que le plan de sécurité établi ne prévoyait pas les modalités d’accès aux terrasses ni les mesures de sécurité nécessaires, ce qui constituait une infraction pour laquelle l’employeur avait été condamné pénalement. Toutefois, elle a conclu que l’employeur n’avait pas manqué à ses obligations de sécurité. Violation des textes légauxEn ne tenant pas compte des éléments établis concernant l’absence de mesures de sécurité adéquates, la cour d’appel a violé les dispositions du Code de la sécurité sociale et du Code du travail, ne tirant pas les conséquences de ses propres constatations sur la responsabilité de l’employeur. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est l’obligation de sécurité de l’employeur envers ses salariés ?L’obligation de sécurité de l’employeur envers ses salariés est définie par l’article L. 4121-1 du Code du travail, qui stipule : « L’employeur prend les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs. Ces mesures comprennent : 1. Éviter les risques ; Cette obligation de sécurité est renforcée par l’article L. 4121-2, qui précise que l’employeur doit également prendre en compte les conditions de travail et les risques liés à l’environnement de travail. En cas de manquement à cette obligation, l’employeur peut être reconnu coupable de faute inexcusable, comme le stipule l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale : « La faute inexcusable de l’employeur est caractérisée lorsque celui-ci avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. » Ainsi, l’employeur a une obligation de résultat en matière de sécurité, et son manquement peut entraîner des conséquences juridiques significatives. Quelles sont les conséquences d’un manquement à l’obligation de sécurité ?Les conséquences d’un manquement à l’obligation de sécurité sont principalement la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, qui peut avoir des répercussions sur les droits de la victime. Selon l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale, la faute inexcusable est reconnue lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver. En cas de reconnaissance de la faute inexcusable, la victime peut bénéficier de plusieurs droits, notamment : 1. Une majoration de la rente d’incapacité permanente ; Il est donc déterminant pour l’employeur de respecter ses obligations de sécurité afin d’éviter des conséquences juridiques et financières lourdes. Comment la jurisprudence interprète-t-elle la notion de faute inexcusable ?La jurisprudence interprète la notion de faute inexcusable de manière stricte, en se basant sur les éléments factuels et les obligations légales de l’employeur. Dans l’arrêt du 16 février 2022, la cour d’appel a été amenée à examiner si l’employeur avait effectivement manqué à son obligation de sécurité. Elle a constaté que le plan particulier de sécurité et de protection de la santé des travailleurs ne prévoyait pas les modalités d’accès aux terrasses, ce qui constitue une infraction. Cependant, la cour a également noté que la victime avait pris l’initiative de passer par l’extérieur, ce qui a conduit à sa chute. Cette décision soulève des questions sur la responsabilité de l’employeur et la prise en compte des comportements des salariés. La jurisprudence tend à considérer que même si le salarié agit de manière imprudente, cela n’exclut pas la responsabilité de l’employeur si celui-ci n’a pas pris les mesures nécessaires pour garantir la sécurité des travailleurs. Ainsi, la reconnaissance de la faute inexcusable repose sur une analyse approfondie des circonstances de l’accident et des obligations de l’employeur. |
AF1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 janvier 2025
Cassation partielle
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 11 F-D
Pourvoi n° Y 22-24.167
Aide juridictionnelle totale en demande
au profit de M. [K].
Admission du bureau d’aide juridictionnelle
près la Cour de cassation
en date du 20 octobre 2022.
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025
M. [B] [K], domicilié [Adresse 1], a formé le pourvoi n° Y 22-24.167 contre l’arrêt rendu le 16 février 2022 par la cour d’appel de Bastia (chambre sociale), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société [4], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 3],
2°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de Corse du Sud, dont le siège est [Adresse 2],
défenderesses à la cassation.
Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, un moyen de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Reveneau, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. [K], de la SCP Rocheteau, Uzan-Sarano et Goulet, avocat de la société [4], et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Reveneau, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Bastia, 16 février 2022), M. [K] (la victime), salarié de la société [4] (l’employeur), a été victime, le 16 avril 2017, d’un accident pris en charge par la caisse primaire d’assurance maladie de Corse du Sud (la caisse) au titre de la législation professionnelle.
2. La victime a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale d’une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de son employeur.
Enoncé du moyen
3. La victime fait grief à l’arrêt de rejeter sa demande, alors « qu’en vertu du contrat de travail le liant à son salarié, l’employeur est tenu envers ce dernier d’une obligation de sécurité de résultat, notamment en ce qui concerne les accidents du travail ; que le manquement à cette obligation a le caractère d’une faute inexcusable, lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était exposé le salarié et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver ; que la cour d’appel devait donc rechercher si, comme il était soutenu, l’employeur, en procédant à la réalisation de travaux de bâtiment ou génie civil sans remise du plan particulier de sécurité et de protection de la santé des travailleurs, prévoyant notamment les conditions d’accès aux terrasses sur lesquelles les travaux étaient effectués, infraction pour laquelle il avait été condamné pénalement, n’avait pas omis de prendre les mesures nécessaires pour préserver le salarié du danger de chute d’une grande hauteur dont il aurait dû avoir conscience, ce qui avait été une cause nécessaire de l’accident; que la cour d’appel a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale ».
Vu l’ article L. 452-1 du code de la sécurité sociale et les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail :
4. Il résulte de ces textes que le manquement à l’obligation légale de sécurité et de protection de la santé à laquelle l’employeur est tenu envers le travailleur a le caractère d’une faute inexcusable lorsque l’employeur avait ou aurait dû avoir conscience du danger auquel était soumis le travailleur et qu’il n’a pas pris les mesures nécessaires pour l’en préserver.
5. Pour débouter la victime de sa demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, l’arrêt retient que, n’ayant pu accéder de l’intérieur à la terrasse de l’appartement sur laquelle elle devait effectuer des travaux d’étanchéité, la victime a décidé de sa propre initiative de passer par l’extérieur de l’immeuble et d’utiliser l’échelle de la co-propriété, dont les caractéristiques impropres à un tel usage se sont révélées à l’origine directe de sa chute. Il en déduit qu’il ne peut être reproché à l’employeur de ne pas avoir anticipé un tel comportement, intrinsèquement dangereux, et de ne pas avoir, en conséquence, fourni à son salarié le matériel adapté à un travail en hauteur.
6. En statuant ainsi, alors qu’elle constatait que le plan particulier de sécurité et de protection de la santé des travailleurs établi pour le bâtiment ne prévoyait pas les modalités d’accès aux terrasses et les mesures de sécurité propres à garantir la sécurité de ces derniers contre les risques découlant d’une circulation en hauteur, infraction pour laquelle l’employeur avait été condamné pénalement, ce dont il résultait qu’il n’avait pas pris les mesures nécessaires pour préserver la victime du danger de chute de grande hauteur dont il ne pouvait pas ne pas avoir conscience, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations, a violé les textes susvisés.
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