L’Essentiel : La caisse primaire d’assurance maladie de la Marne a pris en charge la maladie de Mme [H] le 15 décembre 2020, décision contestée par l’employeur. La CARSAT est intervenue pour soutenir cette contestation, arguant que la cour d’appel de Nancy n’était pas compétente, mais plutôt la cour d’appel d’Amiens. La Cour a rappelé que les litiges relatifs aux décisions des caisses d’assurance relèvent de la juridiction du contentieux de la tarification. Finalement, la Cour de cassation a jugé la cour d’appel de Nancy incompétente et a renvoyé l’affaire à Amiens pour un traitement approprié.
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Contexte de l’affaireLa caisse primaire d’assurance maladie de la Marne a pris en charge la maladie déclarée par Mme [H], salariée de la société [4], en date du 15 décembre 2020. Cette décision a été contestée par l’employeur devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale, qui a pour but de remettre en question l’opposabilité de cette prise en charge et d’inscrire les dépenses liées à la maladie au compte spécial. Intervention de la CARSATLa caisse d’assurance retraite et de la santé au travail du Nord-Est (CARSAT) a décidé d’intervenir volontairement dans l’instance pour soutenir la position de l’employeur. Arguments de la CARSATLa CARSAT a contesté la compétence de la cour d’appel de Nancy, arguant que la question de l’imputation des dépenses de la maladie professionnelle sur le compte spécial relevait de la juridiction spécifiquement désignée, à savoir la cour d’appel d’Amiens. Elle a soutenu que la cour d’appel avait violé plusieurs articles du code de l’organisation judiciaire et du code de la sécurité sociale en statuant sur cette demande. Réponse de la CourLa Cour a rappelé que la juridiction du contentieux de la tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles est compétente pour les litiges relatifs aux décisions des caisses d’assurance. Elle a également précisé que l’article D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire maintenait une compétence exclusive pour ce type de contentieux. Décision de la Cour de cassationLa Cour de cassation a constaté que l’employeur avait saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale avant la notification de son taux de cotisation, ce qui a conduit la cour d’appel à confirmer sa compétence. Cependant, la Cour a jugé que cette décision était en violation des textes applicables. Conséquences de la cassationLa Cour de cassation a décidé de statuer au fond, considérant qu’il était dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de le faire. Elle a déclaré la cour d’appel de Nancy incompétente pour connaître de la demande d’inscription au compte spécial des dépenses liées à la maladie, a infirmé le jugement du tribunal judiciaire de Reims et a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel d’Amiens, qui est la juridiction compétente pour ce litige. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la compétence des juridictions en matière de tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles ?La compétence des juridictions en matière de tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles est régie par plusieurs articles du code de la sécurité sociale et du code de l’organisation judiciaire. Selon l’article L. 142-1, 7° du code de la sécurité sociale, la juridiction du contentieux de la tarification connaît des litiges relatifs aux décisions des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail concernant la fixation du taux de cotisation, l’octroi de ristournes, et l’imposition de cotisations supplémentaires. De plus, l’article L. 311-16 du code de l’organisation judiciaire précise que la juridiction spécialement désignée a compétence exclusive pour connaître du contentieux de la tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles. Enfin, l’article D. 311-12 du même code maintient cette compétence exclusive, confirmant ainsi que les demandes d’inscription des dépenses afférentes à une maladie professionnelle au compte spécial relèvent de cette juridiction. Quelles sont les conséquences de la violation des règles de compétence en matière de contentieux de la sécurité sociale ?La violation des règles de compétence en matière de contentieux de la sécurité sociale a des conséquences significatives sur le traitement des affaires. En l’espèce, la cour d’appel de Nancy a été déclarée incompétente pour connaître de la demande d’inscription au compte spécial des dépenses afférentes à la maladie professionnelle litigieuse. Cette décision repose sur l’article L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire, qui stipule que la Cour de cassation peut statuer au fond lorsque l’intérêt d’une bonne administration de la justice le justifie. Ainsi, la Cour de cassation a infirmé le jugement du tribunal judiciaire de Reims qui avait rejeté l’exception d’incompétence, et a renvoyé l’affaire devant la cour d’appel d’Amiens, qui est la juridiction compétente pour ce type de litige, conformément à l’article D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire. Comment les décisions des caisses d’assurance sont-elles contestées par les employeurs ?Les employeurs peuvent contester les décisions des caisses d’assurance en saisissant une juridiction compétente, comme le prévoit l’article L. 143-4 du code de la sécurité sociale. Cet article stipule que les décisions des caisses d’assurance peuvent faire l’objet d’un recours devant les juridictions compétentes, notamment en matière de tarification des accidents du travail et des maladies professionnelles. Dans le cas présent, l’employeur a saisi une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale pour contester l’opposabilité de la décision de la caisse primaire d’assurance maladie concernant la prise en charge de la maladie de Mme [H]. Cependant, il est déterminant que cette contestation soit portée devant la juridiction appropriée, comme l’indiquent les articles L. 311-16 et D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire, qui désignent la cour d’appel d’Amiens comme la juridiction compétente pour ce type de litige. |
AF1
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 janvier 2025
Cassation partielle partiellement sans renvoi
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 13 F-D
Pourvoi n° Z 23-10.027
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025
La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail du Nord-Est, dont le siège est [Adresse 3], a formé le pourvoi n° Z 23-10.027 contre l’arrêt n° RG : 22/00531 rendu le 19 octobre 2022 par la cour d’appel de Nancy (chambre sociale, section 1), dans le litige l’opposant :
1°/ à la société [4], société par actions simplifiée, dont le siège est [Adresse 2],
2°/ à la caisse primaire d’assurance maladie de la Marne, dont le siège est [Adresse 1],
défenderesses à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, trois moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Reveneau, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d’assurance retraite et de la santé au travail du Nord-Est, de la SARL Boré, Salve de Bruneton et Mégret, avocat de la société [4], et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Reveneau, conseiller rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon l’arrêt attaqué (Nancy, 19 octobre 2022), par décision du 15 décembre 2020, la caisse primaire d’assurance maladie de la Marne (la caisse) a pris en charge, au titre de la législation professionnelle, la maladie déclarée par Mme [H] (la victime), salariée de la société [4] (l’employeur).
2. L’employeur a saisi d’un recours une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale aux fins de contestation de l’opposabilité de cette décision, et d’inscription des dépenses afférentes à la maladie litigieuse au compte spécial.
3. La caisse d’assurance retraite et de la santé au travail du Nord-Est (la CARSAT) est intervenue volontairement à l’instance.
Sur le premier moyen
Enoncé du moyen
4. La CARSAT fait grief à l’arrêt de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a, sur la demande d’imputation au compte spécial, rejeté l’exception d’incompétence matérielle, alors « que l’appréciation de l’affectation des dépenses de la maladie professionnelle sur le compte spécial constitue une question relative à la tarification, laquelle relève de la seule juridiction spécialement désignée à cet effet, la cour d’appel d’Amiens ; qu’en jugeant qu’elle pouvait elle-même statuer sur la demande de l’employeur aux fins d’inscription au compte spécial des conséquences de la pathologie de Mme [H], la cour d’appel a violé les articles L. 311-16 et D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire, et l’article L. 142-1, 7° du code de la sécurité sociale, dans leur version applicable au litige, ensemble les articles L. 211-1 et L. 215-1 du code de la sécurité sociale ».
Vu les articles L. 142-1, 7°, et L. 143-4 du code de la sécurité sociale, ce dernier alors en vigueur, l’article L. 311-16 du code de l’organisation judiciaire, dans sa rédaction issue de la loi n° 2019-222 du 23 mars 2019, et les articles L. 242-5, D. 242-6-4, D. 242-6-5 et D. 242-6-7 du code de la sécurité sociale, dans leur rédaction applicable au litige :
5. Il résulte de la combinaison des trois premiers de ces textes, que la juridiction du contentieux de la tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles connaît des litiges relatifs aux décisions des caisses d’assurance retraite et de la santé au travail et des caisses de mutualité sociale agricole concernant, en matière d’accidents du travail agricoles et non agricoles, la fixation du taux de cotisation, l’octroi de ristournes, l’imposition de cotisations supplémentaires, et pour les accidents régis par le livre IV du code de la sécurité sociale, la détermination de la contribution prévue à l’article L. 437-1.
6. L’article D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire a maintenu une juridiction spécialement désignée ayant compétence exclusive pour connaître du contentieux de la tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles.
7. Depuis un arrêt de la deuxième chambre civile du 28 septembre 2023, (pourvoi n° 21-25.719), la Cour de cassation décide que les demandes de l’employeur de retrait de son compte des dépenses afférentes à une maladie professionnelle ou d’inscription de ces dépenses au compte spécial, même formées avant notification de son taux de cotisation, relèvent de la seule compétence de la juridiction du contentieux de la tarification de l’assurance des accidents du travail et des maladies professionnelles.
8. Ayant relevé que l’employeur avait saisi, avant notification de son taux de cotisation, une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale, d’une demande d’inscription au compte spécial des dépenses relatives à la maladie professionnelle litigieuse , la cour d’appel a retenu sa compétence en confirmant le jugement attaqué.
9. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés.
Portée et conséquences de la cassation
10. Après avis donné aux parties, conformément à l’article 1015 du code de procédure civile, il est fait application des articles L. 411-3, alinéa 2, du code de l’organisation judiciaire et 627 du code de procédure civile.
11. L’intérêt d’une bonne administration de la justice justifie, en effet, que la Cour de cassation statue au fond.
12. Il résulte de ce qui est dit aux paragraphes 5, 6 et 7, qu’il convient de déclarer la cour d’appel de Nancy incompétente pour connaître de la demande aux fins d’inscription au compte spécial des dépenses afférentes à la maladie litigieuse, d’infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Reims en ce qu’il rejette l’exception d’incompétence, et de renvoyer sur ce point, l’affaire et les parties, devant la cour d’appel d’Amiens, spécialement désignée par l’article D. 311-12 du code de l’organisation judiciaire, compétente pour connaître de ce litige.
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