L’Essentiel : La caisse d’allocations familiales des Yvelines a notifié à Mme [E] [F] une contrainte le 16 novembre 2021, concernant un indu de prestations familiales. En réponse, Mme [E] [F] a formé opposition devant une juridiction spécialisée. La caisse a contesté le jugement annulant la contrainte, arguant d’une violation du principe du contradictoire. Cependant, le tribunal a confirmé l’annulation, soulignant l’absence de notifications initiales et de mise en demeure, ainsi que des erreurs dans la lettre de rappel. Il a également été jugé que le tribunal avait violé l’article 16 du code de procédure civile en ne permettant pas aux parties de s’exprimer.
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Contexte de l’affaireLa caisse d’allocations familiales des Yvelines a notifié à Mme [E] [F], allocataire des allocations familiales et du complément d’activité, une contrainte le 16 novembre 2021, concernant un indu de prestations familiales pour la période de décembre 2014 à octobre 2017. Opposition à la contrainteMme [E] [F] a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction spécialisée dans le contentieux de la sécurité sociale. Arguments de la caisseLa caisse a contesté le jugement qui a annulé la contrainte, arguant que le tribunal avait violé le principe du contradictoire en se basant sur des éléments non discutés, tels que l’absence de notification des indus et l’absence de mise en demeure préalable. Réponse du tribunalLe tribunal a statué que la contrainte était annulée en raison de l’absence de production des notifications initiales et de la mise en demeure, ainsi que des erreurs dans les mentions de la lettre de rappel, rendant la procédure de recouvrement irrégulière. Violation du principe du contradictoireLe tribunal a été jugé en violation de l’article 16 du code de procédure civile, car il n’a pas invité les parties à présenter leurs observations sur les moyens relevés d’office avant de rendre sa décision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quel est le principe du contradictoire en matière de procédure civile ?Le principe du contradictoire est énoncé à l’article 16 du Code de procédure civile, qui stipule : « Le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction. » Ce principe garantit que chaque partie à un litige a le droit d’être informée des arguments et des éléments de preuve présentés par l’autre partie. Il permet également à chaque partie de répondre à ces éléments avant que le juge ne prenne sa décision. Dans le cas présent, le tribunal judiciaire a statué sans inviter les parties à s’expliquer sur des points non discutés, ce qui constitue une violation de ce principe fondamental. Quelles sont les conséquences de la violation du principe du contradictoire ?La violation du principe du contradictoire peut entraîner l’annulation de la décision rendue par le juge. En effet, selon la jurisprudence, si le juge statue sur des éléments non débattus par les parties, cela peut affecter l’équité du procès. Dans le jugement du tribunal judiciaire de Versailles, il a été retenu que la caisse n’avait pas produit les notifications initiales de l’indu ni la mise en demeure. De plus, des mentions erronées figuraient sur la lettre de « dernier rappel avant action en justice », et il manquait des indications sur les voies et délais de recours. Ces irrégularités ont conduit à l’annulation de la contrainte émise par la caisse, car la procédure de recouvrement était jugée irrégulière. Quelles sont les obligations de la caisse d’allocations familiales en matière de notification des indus ?La caisse d’allocations familiales a l’obligation de notifier les indus à l’allocataire, conformément aux dispositions du Code de la sécurité sociale. L’article L. 553-1 du Code de la sécurité sociale précise que : « Les organismes de sécurité sociale doivent notifier à l’assuré les décisions qui lui sont opposables, ainsi que les voies et délais de recours. » Cette notification doit être claire et précise, permettant à l’allocataire de comprendre la nature de l’indu et les recours possibles. Dans le cas présent, la caisse n’a pas respecté cette obligation, ce qui a contribué à l’irrégularité de la procédure de recouvrement. Comment le tribunal a-t-il justifié l’annulation de la contrainte émise par la caisse ?Le tribunal a justifié l’annulation de la contrainte en se fondant sur plusieurs éléments. Il a constaté l’absence de production des notifications initiales de l’indu et de la mise en demeure. De plus, il a relevé des mentions erronées sur la lettre de « dernier rappel avant action en justice », ainsi que l’absence d’indication des voies et délais de recours. Ces éléments ont conduit le tribunal à conclure que la procédure de recouvrement était irrégulière. En statuant ainsi sans inviter les parties à présenter leurs observations, le tribunal a violé le principe du contradictoire, ce qui a justifié l’annulation de la contrainte. |
LM
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 9 janvier 2025
Cassation
Mme MARTINEL, président
Arrêt n° 25 F-D
Pourvoi n° V 22-22.163
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, DEUXIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 9 JANVIER 2025
La caisse d’allocations familiales des Yvelines, dont le siège est [Adresse 1], a formé le pourvoi n° V 22-22.163 contre le jugement rendu le 16 juin 2022 par le tribunal judiciaire de Versailles (pôle social, contentieux général de sécurité sociale), dans le litige l’opposant à Mme [Z] [E] [F], domiciliée [Adresse 2], défenderesse à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, deux moyens de cassation.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Montfort, conseiller référendaire, les observations de la SCP Gatineau, Fattaccini et Rebeyrol, avocat de la caisse d’allocations familiales des Yvelines, et l’avis de Mme Pieri-Gauthier, avocat général, après débats en l’audience publique du 20 novembre 2024 où étaient présents Mme Martinel, président, M. Montfort, conseiller référendaire rapporteur, Mme Renault-Malignac, conseiller doyen, et Mme Gratian, greffier de chambre,
la deuxième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
1. Selon le jugement (tribunal judiciaire de Versailles, 16 juin 2022), rendu en dernier ressort, et les productions, à la suite d’une vérification de la situation de Mme [E] [F] (l’allocataire), bénéficiaire des allocations familiales et du complément d’activité de la prestation d’accueil du jeune enfant, la caisse d’allocations familiales des Yvelines (la caisse) lui a notifié, le 16 novembre 2021, une contrainte afférente à un indu de prestations familiales pour la période de décembre 2014 à octobre 2017.
2. L’allocataire a formé opposition à cette contrainte devant une juridiction chargée du contentieux de la sécurité sociale.
Sur le premier moyen, pris en ses deuxième et troisième branches
Enoncé du moyen
3. La caisse fait grief au jugement d’annuler la contrainte litigieuse, alors :
« 2°/ que le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui même le principe de la contradiction ; qu’en relevant d’office, pour invalider la contrainte émise le 15 novembre 2021 par la CAF, que cette dernière ne justifiait pas de la notification des indus avec possibilité de saisir la commission de recours amiable pour les contester, ni de l’envoi d’une mise en demeure préalable à la contrainte, sans préalablement inviter les parties à s’expliquer sur ces points non discutés, le tribunal judiciaire a violé le principe du contradictoire et, partant, l’article 16 du code de procédure civile.
3°/ que le juge est tenu de respecter le contradictoire ; qu’en décidant d’invalider la contrainte émise le 15 novembre 2021 par la caisse, en relevant d’office le caractère erroné du délai de paiement mentionné sur la mise en demeure distribuée le 5 décembre 2019 (et non 2017 comme indiqué par erreur par le tribunal), ainsi que l’absence des délais et voies de recours, sans préalablement inviter les parties à s’expliquer sur ces point non discutés, le tribunal judiciaire a derechef violé le principe du contradictoire et, partant, l’article 16 du code de procédure civile. »
Vu l’article 16 du code de procédure civile :
4. Aux termes de ce texte, le juge doit, en toutes circonstances, faire observer et observer lui-même le principe de la contradiction.
5. Pour annuler la contrainte émise par la caisse, le jugement retient qu’à défaut de production des notifications initiales de l’indu et de la mise en demeure, et compte tenu des mentions erronées figurant sur la lettre de « dernier rappel avant action en justice » et de l’absence d’indication sur celle-ci des voies et délais de recours, la procédure de recouvrement est irrégulière.
6. En statuant ainsi, sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations sur les moyens relevés d’office, le tribunal a violé le texte susvisé.
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