Problématiques de la légalité des mesures d’isolement en psychiatrie

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Problématiques de la légalité des mesures d’isolement en psychiatrie

L’Essentiel : Monsieur [Y] [S], hospitalisé sans consentement depuis juillet 2022, a été placé sous isolement le 6 janvier 2025 en raison d’un risque de violence. Cette mesure, renouvelée régulièrement, a suscité des contestations. L’avocat de Monsieur [Y] [S] a demandé sa levée, arguant que les prolongations n’avaient pas été validées par des médecins psychiatres, en violation du Code de la Santé Publique. Des irrégularités ont été constatées, car des non-médecins avaient prolongé l’isolement. Le tribunal a finalement décidé de lever cette mesure, rappelant que l’ordonnance pouvait faire l’objet d’un appel dans les vingt-quatre heures.

Contexte de l’hospitalisation

Monsieur [Y] [S], né le 26 juillet 1985, est hospitalisé sans son consentement depuis le 22 juillet 2022, à la demande du représentant de l’État. Cette mesure a été régulièrement confirmée par le juge des libertés et de la détention, avec la dernière ordonnance rendue le 22 juillet 2024. Le maintien de cette mesure a été décidé par un arrêté du 25 novembre 2024.

Mesures d’isolement

Le 6 janvier 2025, Monsieur [Y] [S] a été placé sous le régime de l’isolement en raison d’un risque de passage à l’acte violent. Cette mesure a été renouvelée par tranches de 12 heures ou moins, et exceptionnellement au-delà de 48 heures. Le Directeur du CHS de [Localité 1] a déposé une requête pour le maintien de cette mesure d’isolement.

Arguments de la défense

L’avocat de Monsieur [Y] [S], Maître Aurore Damilot, a demandé la levée de la mesure d’isolement, arguant que les prolongations n’avaient pas été autorisées par des médecins psychiatres, ce qui contrevient aux dispositions du Code de la Santé Publique. Il a également souligné l’absence de motifs valables pour la prorogation de l’isolement.

Irregularités constatées

Les documents fournis indiquent que la mesure d’isolement a été prolongée par des personnes qui ne sont pas des médecins psychiatres de l’établissement. Selon l’article L.3222-5-1 du Code de la Santé Publique, l’isolement doit être décidé par un psychiatre, et les prolongations doivent suivre les mêmes modalités. Cette irrégularité a causé un préjudice à Monsieur [Y] [S].

Décision du tribunal

Le tribunal a déclaré la requête recevable et a décidé de lever la mesure d’isolement mise en œuvre depuis le 6 janvier 2025. Il a rappelé aux parties que cette ordonnance peut faire l’objet d’un appel dans un délai de vingt-quatre heures. Les éventuels dépens de la procédure sont laissés à la charge du Trésor Public.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour le placement à l’isolement en milieu psychiatrique ?

Selon l’article L.3222-5-1 I du Code de la Santé Publique, l’isolement et la contention ne peuvent être appliqués qu’en tant que pratiques de dernier recours.

Ces mesures ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement.

Elles ne peuvent être mises en œuvre que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui.

Cela doit se faire sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient.

De plus, la mise en œuvre de ces mesures doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical.

Quelles sont les conséquences d’une irrégularité dans le renouvellement de la mesure d’isolement ?

L’article L.3222-5-1 II, alinéa 3 du Code de la Santé Publique stipule que le placement à l’isolement doit être décidé par un psychiatre.

Les décisions de renouvellement doivent également être prises selon les mêmes modalités.

Dans le cas de Monsieur [Y] [S], il a été constaté que les prolongations de l’isolement n’avaient pas été effectuées par des médecins psychiatres de l’établissement.

Cette irrégularité constitue un grief pour l’intéressé, car elle ne respecte pas les conditions posées par la loi.

Ainsi, les éléments produits ne permettent pas de satisfaire aux exigences légales, entraînant la nécessité de lever la mesure d’isolement.

Quels recours sont disponibles après une décision de levée de mesure d’isolement ?

La décision de levée de la mesure d’isolement peut faire l’objet d’un appel.

Conformément aux dispositions légales, cet appel doit être formé dans un délai de vingt-quatre (24) heures à compter de la notification de la décision.

L’article pertinent précise que l’appel doit être transmis par déclaration au greffe de la Cour d’appel de Metz.

Il est important de noter que la décision de levée de l’isolement est réputée contradictoire et rendue en premier ressort, ce qui permet aux parties de contester la décision.

Ainsi, les voies de recours sont clairement établies pour garantir les droits du patient et le respect des procédures légales.

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TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE METZ

Service du juge des libertés
et de la détention

ORDONNANCE EN MATIÈRE
D’HOSPITALISATION SANS CONSENTEMENT

CONTENTIEUX DE L’ISOLEMENT
LEVEE

N° MINUTE :
N° RG : N° 25/00065
[S] [Y]

Nous, Doris BREIT, Vice-Présidente au tribunal judiciaire de Metz, statuant en notre cabinet, assistée de Agathe LEFEVRE, greffier,

Vu les articles L.3222-5-1 et suivants, R.3211-10 et suivants du Code de la Santé Publique ;

Vu la procédure de soins psychiatriques sans consentement sous la forme de l’hospitalisation complète concernant :
Monsieur [Y] [S]
né le 26/07/1985 à [Localité 2]
actuellement domicilié à CHS de [Localité 1] (57) ;

Vu la requête présentée par le Directeur du CHS de [Localité 1] le 8 janvier 2025 à 11h37, enregistrée à 14h59, aux fins de maintien de la mesure d’isolement concernant l’intéressé ;

Vu l’avis au Ministère Public et au tuteur de l’intéressé du 8 janvier 2025 à 14h59 ;

Vu les conclusions de Maître Aurore DAMILOT, avocat, en date du janvier 2025, sollicitant la main levée de la mesure aux motifs de :
– l’absence de qualité des personnes ayant autorisé la prolongation de l’isolement ;
– l’absence de motif de prorogation de l’isolement;

Attendu qu’il est disposé à l’article L.3222-5-1 I du Code de la Santé Publique, que l’isolement et la contention sont des pratiques de dernier recours et ne peuvent concerner que des patients en hospitalisation complète sans consentement ; qu’il ne peut y être procédé que pour prévenir un dommage immédiat ou imminent pour le patient ou autrui, sur décision motivée d’un psychiatre et uniquement de manière adaptée, nécessaire et proportionnée au risque après évaluation du patient ; que leur mise en œuvre doit faire l’objet d’une surveillance stricte, somatique et psychiatrique, confiée par l’établissement à des professionnels de santé désignés à cette fin et tracée dans le dossier médical ;

Attendu que Monsieur [Y] [S] était hospitalisé à l’UMD de [Localité 3] puis à CHS de [Localité 1] sans son consentement depuis le 22 juillet 2022 à la demande du représentant de l’Etat, cette mesure étant régulièrement confirmée par le juge des libertés et de la détention, la dernière ordonnance étant rendue le 22 juillet 2024 ; que cette mesure a été maintenue par arrêté du 25 novembre 2024 ;

Que par décision du 6 janvier 2025 à 10h53, Monsieur [Y] [S] a été placé sous le régime de l’isolement d’un passage à l’acte de violence ou hétéro agressivité chez un patient souffrant de troubles du neurodéveloppement; que cette mesure a été renouvelée successivement par tranche de 12h ou moins, et à titre exceptionnel, au-delà de 48h ;

Que le Directeur d’établissement du CHS de [Localité 1] nous a saisi d’une requête en maintien de la mesure d’isolement ; que la requête a été présentée avant la 72ème heure après le début de la mesure ; qu’elle est recevable ;

Que [Y] [S] n’a pas souhaité être entendu, son audition étant par ailleurs contre-indiquée selon le certificat du Dr [F] du 8 janvier 2025 ;

Que son Conseil, chargé de le représenter, fait valoir que des décisions de renouvellement n’ont pas toutes été prises par un médecin psychiatre, ses décisions n’étant pas confirmées par le médecin psychiatre;  

Attendu qu’il résulte des documents transmis que la mesure d’isolement a été prolongée le 7 janvier 2025 à 22h53 par [K] [W] et le 8 janvier 2025 à 10h53 par [U] [B] ; qu’il ne s’agit pas de médecins psychiatres de l’établissement au vu des documents ; que le texte précité prévoit expressément qu’il est procédé au placement à l’isolement sur décision motivée d’un psychiatre ; que les décisions de renouvellement sont prises selon les mêmes modalités ;

Que dès lors les éléments produits ne permettent pas de satisfaire aux conditions posées par l’article L3222-5-1 II. alinéa 3 du code de la santé publique, cette irrégularité causant nécessairement grief à l’intéressé ;

Qu’il y a dès lors lieu de dire que les conditions du renouvellement de la mesure d’isolement dont a fait l’objet [Y] [S] au-delà de la période maximale autorisée ne sont pas respectées ;

Qu’en conséquence, il y a lieu de lever la mesure d’isolement ;

PAR CES MOTIFS

Statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et rendue en premier ressort,

DECLARONS la requête recevable ;

LEVONS la mesure d’isolement mise en œuvre dans le cadre de l’hospitalisation psychiatrique complète dont fait l’objet [Y] [S] depuis le 6 janvier 2025 à 10h53 ;

RAPPELONS aux parties que :- la présente ordonnance peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la Cour d’Appel ou son délégué, dans un délai de vingt-quatre (24) heures à compter de sa notification ;
– cet appel doit être formé par déclaration transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’appel de Metz ;

LAISSONS les éventuels dépens de la présente procédure à la charge du Trésor Public ;

Ainsi rédigé au Tribunal Judiciaire de METZ, le 8 janvier 2025 à 15h20.
Le greffier La Présidente

La présente ordonnance a été notifiée par courriel au CHS de [Localité 1] pour notification, à charge pour lui de notifier cette décision au patient,
Le Greffier,

SIGNATURE DU PATIENT APRES LECTURE (si le patient refuse de signer, l’indiquer. Si le patient n’est pas en état de signer mais a compris la lecture ou a lu la décision, l’indiquer. Si le patient n’est pas en mesure de comprendre et de signer l’indiquer par une mention manuscrite et signée du soignant ou du personnel administratif qui notifie)

La présente ordonnance a été notifiée par courriel au Conseil du patient le à h
Le Greffier

La présente ordonnance a été transmise au Procureur de la République par courriel le à h
Le Greffier


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