Résiliation de bail et obligations locatives : enjeux de la dette et de la défense des locataires.

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Résiliation de bail et obligations locatives : enjeux de la dette et de la défense des locataires.

L’Essentiel : La SA ICF LA SABLIERE a engagé une procédure judiciaire contre M. [D] [V] et Mme [Y] [V] pour résiliation de bail et expulsion, suite à un arriéré locatif de 1922,07 euros. Lors de l’audience du 5 novembre 2024, les locataires n’étaient pas présents, et la dette avait diminué à 1268,51 euros. Le juge a jugé la demande recevable, mais a estimé que les manquements des locataires n’étaient pas suffisamment graves pour justifier la résiliation. Ils ont été condamnés à payer les loyers dus, avec intérêts, et la décision a été déclarée exécutoire à titre provisoire.

Contexte du litige

La SA ICF LA SABLIERE a signé un contrat de bail le 29 mai 2017 avec M. [D] [V] et Mme [Y] [V] pour un appartement, avec un loyer de 421,67 € plus charges. En raison d’un arriéré locatif, un commandement de payer de 1922,07 euros a été délivré aux locataires le 3 janvier 2024.

Procédure judiciaire

Le 16 mai 2024, la SA ICF LA SABLIERE a assigné M. [D] [V] et Mme [Y] [V] devant le tribunal judiciaire de Paris pour obtenir la résiliation du bail et l’expulsion des locataires. L’assignation a été notifiée au représentant de l’État le 21 mai 2024, et l’affaire a été appelée à l’audience le 5 novembre 2024.

Développements à l’audience

Lors de l’audience, la SA ICF LA SABLIERE a maintenu ses demandes, indiquant que la dette locative avait diminué à 1268,51 euros. M. [D] [V] et Mme [Y] [V] n’ont pas comparu. La décision a été mise en délibéré pour le 9 janvier 2025.

Analyse de la décision

Le juge a constaté que la demande de résiliation du bail était recevable, mais a noté que la violation des obligations contractuelles par les locataires n’était pas suffisamment grave pour justifier la résiliation. Bien que des impayés aient été constatés, les locataires avaient réglé leurs loyers de manière diligente en 2024.

Condamnation des locataires

M. [D] [V] et Mme [Y] [V] ont été condamnés à payer 1268,51 euros pour les loyers impayés, avec intérêts au taux légal à partir de l’assignation. Ils ont également été condamnés aux dépens et à verser 300 euros à la SA ICF LA SABLIERE au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Exécution de la décision

La décision a été déclarée exécutoire à titre provisoire, permettant ainsi à la SA ICF LA SABLIERE de récupérer les sommes dues sans attendre l’éventuel appel.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de la demande de résiliation judiciaire du bail ?

La recevabilité de la demande de résiliation judiciaire du bail est régie par plusieurs dispositions légales.

Tout d’abord, l’article 472 du code de procédure civile stipule que si le défendeur ne comparaît pas, le juge statue néanmoins sur le fond. Il ne fait droit à la demande que si celle-ci est régulière, recevable et bien fondée.

En l’espèce, la SA ICF LA SABLIERE a produit des pièces justifiant la demande de résiliation, notamment le contrat de location et la saisine de la Commission de Coordination des Actions de Prévention des Expulsions Locatives (CCAPEX) le 4 janvier 2024, soit plus de deux mois avant l’assignation.

De plus, la dénonciation de l’assignation à la Préfecture a été effectuée dans le délai de six semaines avant l’audience, conformément aux exigences légales.

Ainsi, la demande de résiliation, justifiée par une dette locative, est déclarée recevable.

Quelles sont les conditions de la résiliation judiciaire du bail selon le code civil ?

Les conditions de la résiliation judiciaire du bail sont définies par l’article 1224 du code civil, qui précise que la résolution d’un contrat peut résulter soit de l’application d’une clause résolutoire, soit d’une notification du créancier au débiteur en cas d’inexécution suffisamment grave, ou d’une décision de justice.

L’article 1228 du même code permet au juge de constater ou de prononcer la résolution, ou d’ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur.

En vertu de l’article 1728 du code civil, le preneur a deux obligations principales : user de la chose louée raisonnablement et payer le prix du bail aux termes convenus.

L’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 rappelle également que le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

Dans cette affaire, bien que la SA ICF LA SABLIERE ait prouvé une dette locative, le juge a estimé que la violation des obligations contractuelles n’était pas suffisamment grave pour justifier la résiliation du bail.

Quels sont les droits du bailleur en cas de non-paiement des loyers ?

En cas de non-paiement des loyers, le bailleur dispose de plusieurs droits, notamment en vertu de l’article 1103 du code civil, qui stipule que les contrats doivent être exécutés de bonne foi.

L’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989 précise que le locataire est tenu de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

Dans le cas présent, la SA ICF LA SABLIERE a produit un décompte des loyers impayés, s’élevant à 1268,51 euros au 4 octobre 2024.

Les locataires, n’ayant pas comparu, n’ont pas contesté le principe ni le montant de la dette. Par conséquent, ils ont été condamnés au paiement de cette somme, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation en justice.

Quelles sont les conséquences de la défaillance des locataires sur les dépens ?

La défaillance des locataires a des conséquences directes sur les dépens, conformément à l’article 696 du code de procédure civile, qui stipule que la partie perdante supporte les dépens.

Dans cette affaire, M. [D] [V] et Mme [Y] [V], en raison de leur non-comparution, ont été condamnés aux dépens.

Cela signifie qu’ils doivent rembourser les frais engagés par la SA ICF LA SABLIERE pour la procédure, ce qui inclut les frais de justice et d’assignation.

Cette décision vise à garantir que la partie qui a causé la procédure par son inaction ou son manquement à ses obligations contractuelles supporte les coûts associés à celle-ci.

Comment sont déterminés les frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile ?

Les frais au titre de l’article 700 du code de procédure civile sont déterminés en fonction de l’équité et des frais exposés par la partie gagnante dans le cadre de la procédure.

Cet article permet au juge d’allouer une somme à la partie qui a gagné le procès pour couvrir les frais non compris dans les dépens.

Dans cette affaire, le juge a estimé qu’il serait inéquitable de laisser à la charge de la SA ICF LA SABLIERE les frais exposés dans la présente instance.

Ainsi, une somme de 300 euros a été allouée à la SA ICF LA SABLIERE au titre de l’article 700, afin de compenser les frais engagés pour la procédure.

Cette allocation vise à assurer une certaine justice dans la répartition des coûts liés à la procédure judiciaire.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copie conforme délivrée
le :
à :
Monsieur [D] [P] [V]
Madame [Y] [V]

Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Emmanuel COSSON

Pôle civil de proximité

PCP JCP fond

N° RG 24/05608 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5B2S

N° MINUTE :

JUGEMENT
rendu le jeudi 09 janvier 2025

DEMANDERESSE
ICF LA SABLIERE, S.A. d’HLM
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Emmanuel COSSON, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : #P0004

DÉFENDEURS
Monsieur [D] [P] [V]
demeurant [Adresse 2]
non comparant, ni représenté

Madame [Y] [V], demeurant [Adresse 2]
non comparante, ni représentée

COMPOSITION DU TRIBUNAL
Mathilde CLERC, Juge des contentieux de la protection
assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière,

DATE DES DÉBATS
Audience publique du 05 novembre 2024

JUGEMENT
réputé contradictoire, en premier ressort, prononcé par mise à disposition le 09 janvier 2025 par Mathilde CLERC, Juge des contentieux de la protection, assistée de Coraline LEMARQUIS, Greffière
Décision du 09 janvier 2025
PCP JCP fond – N° RG 24/05608 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5B2S

EXPOSE DU LITIGE

Par contrat du 29 mai 2017, la SA ICF LA SABLIERE a donné bail à M. [D] [V] et Mme [Y] [V] un appartement sis [Adresse 2], moyennant un loyer de 421,67 € majoré des charges locatives.

Par acte de commissaire de justice du 3 janvier 2024, le bailleur a fait délivrer aux locataires un commandement de payer la somme principale de 1922,07 euros au titre de l’arriéré locatif.

La commission de coordination des actions de prévention des expulsions locatives a été informée de la situation de M. [D] [V] et de Mme [Y] [V] le 4 janvier 2024.

Par acte de commissaire de justice du 16 mai 2024, la SA ICF LA SABLIERE a assigné M. [D] [V] et Mme [Y] [V] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Paris, aux fins de :
– prononcé de la résiliation judiciaire du bail ;
– expulsion de M. [D] [V] et Mme [Y] [V] ainsi que celle de tous occupants de leur chef et ce, avec l’assistance du Commissaire de Police et de la Force Publique s’il y a lieu, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du jugement à intervenir, pendant un délai de trois mois, à l’issue duquel elle sera liquidée et à laquelle il pourra de nouveau être fait droit ;
– séquestration et transport des objets entreposés sur l’emplacement de stationnement dans tel garde-meubles qu’il plaira à la bailleresse aux frais, risques et périls des locataires,
– condamnation des défendeurs à lui payer les sommes suivantes :
– 1949,16 euros au titre des arriérés de loyers et charges,
– 680,65 euros au titre de l’indemnité d’occupation, à compter de la résiliation du bail et jusqu’à parfaite libération des locaux,
– 650 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens de l’instance.

L’assignation a été notifiée au représentant de l’État dans le département le 21 mai 2024.

L’affaire a été appelée à l’audience du 5 novembre 2024.

À l’audience du 5 novembre 2024, la SA ICF LA SABLIERE maintient ses demandes, précisant que la dette locative est en baisse, puisqu’elle s’élève à la date de l’audience à 1268,51 euros (échéance de septembre 2024 incluse). Elle indique ne pas être opposée à des délais de paiement.

M. [D] [V] et Mme [Y] [V], régulièrement cités à étude, n’ont pas comparu ni n’ont été représentés.

La décision a été mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 9 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

En l’espèce, les défendeurs n’ont pas comparu, de sorte qu’il sera fait application des dispositions précitées.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de bail et l’expulsion

Sur la recevabilité de la demande

Il résulte des pièces versées aux débats et notamment :
– du contrat de location entre la SA ICF LA SABLIERE et M. [D] [V] et Mme [Y] [V] ;
– de la saisine de la CCAPEX le 4 janvier 2024, soit plus de deux mois avant l’assignation ;
– de la dénonciation de l’assignation à la Préfecture par voie électronique le 21 mai 2024, dans le délai de six semaines avant le premier appel de l’affaire à l’audience,
que la demande de résiliation, justifiée par une dette locative, est recevable.

Sur le fond

Aux termes de l’article 1224 du code civil, la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice.

En application de l’article 1228 du code civil, le juge peut, selon les circonstances, constater ou prononcer la résolution ou ordonner l’exécution du contrat, en accordant éventuellement un délai au débiteur, ou allouer seulement des dommages et intérêts.

En vertu de l’article 1728 du code civil le preneur est tenu de deux obligations principales : user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, et payer le prix du bail aux termes convenus. Comme le rappelle également l’article 7 de la loi n°89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est notamment obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus.

Le paiement du loyer est une obligation essentielle du locataire. Elle est la contrepartie du droit de jouissance des lieux qui lui est concédé par le propriétaire.

Il appartient à celui qui se prévaut de la résiliation judiciaire du contrat de rapporter la preuve du manquement et de justifier de sa gravité suffisante à entraîner la résiliation du contrat de bail aux torts du locataire et son expulsion des lieux.

En l’espèce, la SA ICF LA SABLIERE produit un décompte démontrant qu’à la date du 25 octobre 2024, M. [D] [V] et Mme [Y] [V] étaient redevables de la somme de 1268,51 euros, échéance de septembre 2024 incluse. Il résulte du décompte produit que la dette s’est constituée à compter du 31 mars 2023, les loyers des mois d’avril 2023 et août 2023, impayés, composant l’essentiel de la dette.

Il apparaît toutefois que les loyers ont été réglés dans leur intégralité et avec diligence au cours de l’année 2024.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il sera constaté que si la violation des obligations contractuelles est avérée, elle n’est pas suffisamment grave pour justifier de la résiliation du bail, le décompte démontrant que les locataires se montrent diligents dans le règlement de leur loyer courant et que la dette locative (qui représente au jour de l’audience moins de deux mois de loyers sur un bail conclu plus de six années auparavant) a diminué depuis l’assignation.

La SA ICF LA SABLIERE sera ainsi déboutée de sa demande de résiliation judiciaire ainsi que de ses demandes subséquentes en expulsion et en paiement d’une indemnité d’occupation.

Sur la demande en paiement

M. [D] [V] et Mme [Y] [V] sont redevables des loyers impayés en application de l’article 1103 du code civil, de l’article 7 de la loi n°89-462 du 06 juillet 1989, et du bail.

En l’espèce, il ressort du décompte produit par la SA ICF LA SABLIERE que les impayés de loyers s’élèvent au 4 octobre 2024 à 1268,51 euros.

M. [D] [V] et Mme [Y] [V], non comparants, n’apportent par définition aucun élément de nature à contester le principe ni le montant de la dette.

Ils seront donc condamnés au paiement de la somme de 1268,51 euros, avec les intérêts au taux légal à compter de l’assignation en justice.

Sur les demandes accessoires :

Sur les dépens :

M. [D] [V] et Mme [Y] [V] , dont la défaillance est à l’origine de la présente procédure, supporteront les dépens en application de l’article 696 du code de procédure civile.

Sur l’article 700 du code de procédure civile :

Il serait inéquitable de laisser à la charge du bailleur les frais exposés par lui dans la présente instance et non compris dans les dépens. La somme de 300 euros lui sera donc allouée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

La présente décision est exécutoire à titre provisoire, conformément à l’article 514 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des contentieux de la protection, statuant publiquement, par jugement réputé contradictoire et en premier ressort, mis à disposition au greffe :

REJETTE la demande formée au titre de la résiliation judiciaire du bail conclu entre les parties portant sur l’appartement situé [Adresse 2] et les demandes subséquentes d’expulsion sous astreinte et de condamnation au paiement d’une indemnité d’occupation ;

CONDAMNE M. [D] [V] et Mme [Y] [V] au paiement de la somme de 1268,51 euros, correspondant à l’arriéré de loyers et de charges, à la SA ICF LA SABLIERE, avec les intérêts au taux légal à compter de l’assignation en justice,

CONDAMNE M. [D] [V] et Mme [Y] [V] aux dépens;

CONDAMNE M. [D] [V] et Mme [Y] [V] à verser à l’établissement la SA ICF LA SABLIERE une somme de 300 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

RAPPELLE que la présente décision bénéficie de l’exécution provisoire de droit.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition les jour, mois et an susdits par la Juge des contentieux de la protection et la greffière susnommées.

La greffière, La juge des contentieux de la protection

Décision du 09 janvier 2025
PCP JCP fond – N° RG 24/05608 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5B2S


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