L’Essentiel : Le litige oppose la SCI des FONDEURS et la société GARAGE PREMIUM, locataire d’un bail commercial depuis 2014. Le 6 février 2024, un juge a ordonné un commandement de quitter les lieux, exécuté le 17 juin. En réponse, GARAGE PREMIUM a contesté cette décision, demandant l’annulation du commandement et un délai d’un an pour quitter. Le tribunal a examiné l’affaire le 8 novembre 2024, mais a rejeté les demandes de GARAGE PREMIUM, soulignant son non-respect des obligations de paiement. Finalement, la société a été condamnée aux dépens et à verser 3.500 euros aux défenderesses.
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Contexte du litigeLa SCI des FONDEURS a signé un bail commercial avec la société GARAGE PREMIUM le 1er juin 2014 pour des locaux situés à [Adresse 4]. Le même jour, un autre bail a été consenti par la SCI des FONDEURS et la SCI TY BIAN & IMMOFORE, désormais représentée par la SCI AKO, pour d’autres locaux à la même adresse. Commandement de quitter les lieuxLe 6 février 2024, un juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a ordonné à la SCI des FONDEURS et à la SCI AKO de délivrer un commandement de quitter les lieux à la société GARAGE PREMIUM, acte effectué le 17 juin 2024. En réponse, la société GARAGE PREMIUM a assigné les deux SCI devant le tribunal le 17 juillet 2024 pour contester ce commandement. Audiences et demandes des partiesAprès plusieurs renvois, l’affaire a été examinée le 8 novembre 2024, avec la représentation des parties par leurs avocats. La société GARAGE PREMIUM a demandé l’annulation du commandement, un délai d’un an pour quitter les lieux, ainsi qu’une indemnisation de 2.000 euros. En revanche, la SCI des FONDEURS et la SCI AKO ont demandé le rejet des demandes de GARAGE PREMIUM et une indemnisation de 5.000 euros. Analyse de la demande de nullitéLa demande de nullité du commandement de quitter les lieux a été examinée à la lumière de l’article L411-1 du code des procédures civiles d’exécution. Le juge a constaté que la suspension des clauses résolutoires était conditionnée au paiement des loyers, ce que la société GARAGE PREMIUM n’a pas respecté. Exception d’inexécutionLa société GARAGE PREMIUM a tenté d’invoquer une exception d’inexécution en raison d’un dysfonctionnement d’un rideau métallique, arguant qu’aucun loyer n’était dû. Cependant, le juge a rejeté cette argumentation, soulignant que cela reviendrait à modifier le dispositif de l’ordonnance du 6 février 2024. Demande de délais pour quitter les lieuxConcernant la demande subsidiaire de délais pour quitter les lieux, le juge a noté que la société GARAGE PREMIUM n’a pas justifié son impossibilité de trouver un autre local, ce qui a conduit au rejet de cette demande. Dépens et indemnitésLa société GARAGE PREMIUM, ayant perdu le procès, a été condamnée aux dépens. De plus, elle a été condamnée à verser 3.500 euros aux défenderesses au titre de l’article 700 du code de procédure civile, tout en étant déboutée de sa propre demande d’indemnisation. Conclusion du jugementLe juge a rejeté toutes les demandes de la société GARAGE PREMIUM, l’a condamnée à payer les frais de justice et a rappelé que le jugement est immédiatement exécutoire, sans effet suspensif pour l’appel |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la validité du commandement de quitter les lieux délivré à la société GARAGE PREMIUM ?Le commandement de quitter les lieux délivré à la société GARAGE PREMIUM est valide en vertu de l’article L411-1 du code des procédures civiles d’exécution. Cet article stipule que : « L’expulsion d’un immeuble ou d’un lieu habité ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d’un commandement d’avoir à libérer les locaux. » Dans le cas présent, le commandement a été délivré suite à une ordonnance du juge des référés, qui a constaté l’acquisition de la clause résolutoire dans les baux. Il est donc établi que le commandement a été émis conformément aux exigences légales, rendant ainsi la demande d’annulation de la société GARAGE PREMIUM infondée. Quelles sont les conséquences de l’absence de paiement des loyers par la société GARAGE PREMIUM ?L’absence de paiement des loyers par la société GARAGE PREMIUM a des conséquences directes sur l’application des clauses résolutoires. Selon l’ordonnance du 6 février 2024, il est précisé que : « À défaut de règlement d’un seul des loyers, charges et accessoires courants à leurs échéances, l’intégralité de la dette sera immédiatement exigible, les poursuites pour son recouvrement pourront reprendre aussitôt, la clause résolutoire produira son plein et entier effet. » La société GARAGE PREMIUM n’ayant pas contesté le non-paiement des loyers courants, cela signifie que les clauses résolutoires ont repris effet, justifiant ainsi le commandement de quitter les lieux. Cette situation démontre que la société GARAGE PREMIUM ne peut pas se prévaloir d’une suspension des effets des clauses résolutoires, rendant sa contestation sans fondement. La société GARAGE PREMIUM peut-elle opposer une exception d’inexécution ?La société GARAGE PREMIUM a tenté d’opposer une exception d’inexécution en raison d’un prétendu dysfonctionnement d’un rideau métallique. Cependant, l’article R121-1 du code des procédures civiles d’exécution stipule que : « Le juge de l’exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l’exécution. » En conditionnant l’exigibilité des loyers à la bonne exécution par les bailleresses de leurs obligations, la société GARAGE PREMIUM cherche à modifier le dispositif de l’ordonnance du 6 février 2024. Cette argumentation ne peut donc prospérer, car elle ne respecte pas les dispositions légales en vigueur. La société GARAGE PREMIUM peut-elle obtenir un délai pour quitter les lieux ?La demande de la société GARAGE PREMIUM d’obtenir un délai pour quitter les lieux est régie par l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, qui prévoit que : « Le juge de l’exécution peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou de locaux à usage professionnel dont l’expulsion aura été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales. » Dans cette affaire, la société GARAGE PREMIUM n’a pas fourni d’argumentation ou de preuve démontrant son impossibilité de trouver un autre local. Par conséquent, elle ne remplit pas la condition prévue par cet article, et sa demande subsidiaire doit être rejetée. Quelles sont les implications des dépens dans cette affaire ?Les dépens sont régis par l’article 696 du code de procédure civile, qui dispose que : « La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. » Dans cette affaire, la société GARAGE PREMIUM, ayant succombé dans ses demandes, sera condamnée aux dépens. De plus, le coût du commandement du 17 juin 2024, qui est déjà à sa charge en vertu de l’article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution, ne sera pas considéré comme un dépens d’instance. Comment est déterminée la somme due au titre de l’article 700 du code de procédure civile ?L’article 700 du code de procédure civile stipule que : « Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. » Dans cette affaire, la société GARAGE PREMIUM, condamnée aux dépens, devra verser aux défenderesses une somme de 3.500 euros au titre de cet article. Le juge a pris en compte l’équité et la situation économique de la partie condamnée pour déterminer cette somme, et la société GARAGE PREMIUM a été déboutée de sa demande à ce titre. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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JUGE DE L’EXÉCUTION
JUGEMENT rendu le 10 Janvier 2025
N° RG 24/00369 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YTED
DEMANDERESSE :
S.A.S.U. GARAGE PREMIUM
[Adresse 4]
[Localité 2]
représentée par Me Philippe TALLEUX, avocat au barreau de LILLE, substitué par Me Laura LOUIS
DÉFENDERESSES :
S.C.I. DES FONDEURS
[Adresse 5]
[Localité 2]
S.C.I. AKO
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentées par Me Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE
MAGISTRAT TENANT L’AUDIENCE : Etienne DE MARICOURT, Juge du tribunal judiciaire de LILLE
Juge de l’exécution par délégation de Monsieur le Président du tribunal judiciaire de LILLE
GREFFIER : Sophie ARES
DÉBATS : A l’audience publique du 08 Novembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 20 Décembre 2024, prorogé au 10 Janvier 2025
JUGEMENT prononcé par décision CONTRADICTOIRE rendue en premier ressort par mise à disposition au Greffe
Tribunal judiciaire de Lille N° RG 24/00369 – N° Portalis DBZS-W-B7I-YTED
Par contrat du 1er juin 2014, la SCI des FONDEURS a consenti à la société GARAGE PREMIUM un bail commercial portant sur des locaux situés à [Adresse 4] (bureaux de 150m² et parkings).
Suivant acte du même jour, la SCI des FONDEURS et la SCI TY BIAN & IMMOFORE, aux droits de laquelle vient désormais la SCI AKO, ont consenti à la société GARAGE PREMIUM un bail commercial portant sur d’autres locaux situés à [Adresse 4] (bureaux de façade, bureaux à côté de la société SUMER et parkings).
En vertu d’une ordonnance rendue par le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille le 6 février 2024, la SCI des FONDEURS et la SCI AKO ont fait délivrer à la société GARAGE PREMIUM un commandement de quitter les lieux par acte du 17 juin 2024.
Par acte d’huissier du 17 juillet 2024, la société GARAGE PREMIUM a fait assigner la SCI des FONDEURS et la SCI AKO devant ce tribunal à l’audience du 6 septembre 2024 afin de contester ce commandement.
Après deux renvois à l’initiative des parties, l’affaire a été retenue à l’audience du 8 novembre 2024 au cours de laquelle les parties étaient représentées par leurs conseils.
Dans ses conclusions, la société GARAGE PREMIUM présente les demandes suivantes :
-A titre principal, annuler le commandement du 17 juin 2024 et en ordonner mainlevée,
-A titre subsidiaire, lui accorder un délai d’un an pour quitter les lieux,
-En tout état de cause, condamner chacune des défenderesses à lui verser 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les condamner aux dépens.
Dans leurs conclusions, la SCI des FONDEURS et la SCI AKO présentent les demandes suivantes :
-Rejeter les demandes adverses,
-Condamner la société GARAGE PREMIUM à leur payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre sa condamnation aux dépens comprenant le coût du commandement de quitter les lieux.
Pour un exposé de l’argumentation des parties, il y a lieu de se référer, par application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, à ces conclusions et aux éléments repris dans la motivation du présent jugement.
Sur la demande de nullité du commandement de quitter les lieux.
En vertu de l’article L411-1 du code des procédures civiles d’exécution, l’expulsion d’un immeuble ou d’un lieu habité ne peut être poursuivie qu’en vertu d’une décision de justice ou d’un procès-verbal de conciliation exécutoire et après signification d’un commandement d’avoir à libérer les locaux.
Sur l’absence alléguée de titre exécutoire.
Par ordonnance du 6 février 2024, le juge des référés du tribunal judiciaire de Lille a notamment:
-constaté l’acquisition de la clause résolutoire contenue dans chacun des baux,
-Suspendu rétroactivement l’effet de ces clauses résolutoires, à condition que la SASU GARAGE PREMIUM règle aux termes convenus, les loyers tels que prévus au bail,
-dit qu’à défaut de règlement d’un seul des loyers, charges et accessoires courants à leurs échéances, l’intégralité de la dette sera immédiatement exigible, les poursuites pour son recouvrement pourront reprendre aussitôt, la clause résolutoire produira son plein et entier effet, il pourra être procédé à l’expulsion de la SAS GARAGE PREMIUM.
La demanderesse soutient que dès lors que le juge des référés a suspendu rétroactivement l’effet des clauses et ne l’a pas condamnée à un arriéré locatif, les clauses résolutoires ne pourraient reprendre leurs effets.
Néanmoins, cette argumentation fait totalement abstraction du dispositif parfaitement clair de l’ordonnance du 6 février 2024 qui conditionne le maintien de la suspension de l’effet des clauses résolutoires au paiement des loyers courants.
Or la demanderesse ne conteste pas n’avoir payé aucun des loyers courants depuis l’ordonnance du 6 février 2024 comme le soutiennent les défenderesses.
L’argumentation de la demanderesse sur ce point est donc sans pertinence.
Sur l’exception d’inexécution.
La société GARAGE PREMIUM fait ensuite valoir qu’elle serait dans l’impossibilité d’exploiter les locaux loués compte tenu du dysfonctionnement d’un rideau métallique ; qu’elle serait dès lors bien fondée à opposer l’exception d’inexécution aux défenderesses ; qu’aucun loyer ne serait donc dû et que ses bailleresses ne pourraient pas par conséquent se prévaloir de l’acquisition des clauses résolutoires.
Néanmoins, l’article R121-1 du code des procédures civiles d’exécution prévoit que le juge de l’exécution ne peut ni modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites, ni en suspendre l’exécution.
Or, conditionner l’exigibilité des loyers et donc la reprise d’effet des clauses résolutoires à la bonne exécution par les bailleresses de leurs obligations reviendrait à modifier le dispositif de l’ordonnance du 6 février 2024 en ajoutant une condition à celui-ci.
Cette argumentation ne peut donc prospérer.
Sur la demande subsidiaire de délais pour quitter les lieux.
Aux termes de l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution, le juge de l’exécution peut accorder des délais renouvelables aux occupants de locaux d’habitation ou de locaux à usage professionnel dont l’expulsion aura été ordonnée judiciairement chaque fois que le relogement des intéressés ne pourra avoir lieu dans des conditions normales.
Au cas présent, la société GARAGE PREMIUM ne fournit aucune argumentation pour démontrer qu’elle serait dans l’impossibilité de trouver un autre local. Elle ne justifie donc pas remplir la condition prévue par l’article L412-3 du code des procédures civiles d’exécution. Sa demande subsidiaire ne peut qu’être rejetée.
Sur les dépens.
Aux termes de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.
En l’espèce, la société GARAGE PREMIUM qui succombe sera condamnée aux dépens. Le coût du commandement du 17 juin 2024, acte d’exécution déjà à la charge de la société GARAGE PREMIUM en vertu de l’article L111-8 du code des procédures civiles d’exécution, n’est pas susceptible de constituer un dépens d’instance.
Sur l’article 700 du code de procédure civile.
En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation. Les parties peuvent produire les justificatifs des sommes qu’elles demandent.
Condamnée aux dépens, la société GARAGE PREMIUM versera aux défenderesses une somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et sera déboutée de sa demande à ce titre.
Le juge de l’exécution, statuant par jugement prononcé par mise à disposition au greffe, contradictoire et susceptible d’appel,
REJETTE l’ensemble des demandes de la société GARAGE PREMIUM ;
CONDAMNE la société GARAGE PREMIUM à payer à la SCI des FONDEURS et la SCI AKO une somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE la société GARAGE PREMIUM aux dépens ;
RAPPELLE que le présent jugement est immédiatement exécutoire, le délai d’appel et l’appel lui-même des décisions du juge de l’exécution n’ayant pas d’effet suspensif en application de l’article R121-21 du code des procédures civiles d’exécution ;
En foi de quoi le présent jugement a été signé par le juge et le greffier.
LE GREFFIER LE JUGE DE L’EXÉCUTION
Sophie ARES Etienne DE MARICOURT
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