Résiliation de bail commercial et conséquences d’un défaut de paiement

·

·

Résiliation de bail commercial et conséquences d’un défaut de paiement

L’Essentiel : Le 20 septembre 2021, Antin Résidences a signé un bail commercial de 9 ans avec Lourdes Service pour un local de 40 m², avec un loyer annuel de 13 187 euros HT. Le 24 septembre 2024, Antin Résidences a assigné l’association en référé pour faire constater la clause résolutoire et demander son expulsion, ainsi qu’un arriéré locatif de 33 104,11 euros. Le tribunal a validé la résiliation du bail, ordonnant l’expulsion de Lourdes Service si les lieux n’étaient pas restitués dans les 15 jours, et condamnant l’association à payer l’arriéré et des dépens.

Contexte du bail commercial

La société Antin Résidences a conclu un bail commercial avec l’association Lourdes Service le 20 septembre 2021, pour une durée de 9 ans, concernant un local de 40 m². Le loyer annuel a été fixé à 13 187 euros HT, payable trimestriellement.

Assignation en référé

Le 24 septembre 2024, Antin Résidences a assigné Lourdes Service en référé pour faire constater l’acquisition de la clause résolutoire du bail et demander l’expulsion de l’association, ainsi que le paiement d’un arriéré locatif de 33 104,11 euros. L’audience a eu lieu le 13 décembre 2024, sans représentation de Lourdes Service.

Motifs de la décision

Le tribunal a examiné les demandes en se basant sur le Code de procédure civile et le Code de commerce. Il a constaté que le commandement de payer délivré le 22 mai 2024 était régulier et que les sommes dues n’avaient pas été réglées dans le délai imparti. La clause résolutoire a donc été acquise, entraînant la résiliation du bail.

Ordonnances d’expulsion et de paiement

Le tribunal a ordonné l’expulsion de Lourdes Service si les lieux n’étaient pas restitués dans les 15 jours suivant la signification de l’ordonnance. Il a également condamné l’association à payer 33 104,11 euros pour l’arriéré locatif, ainsi qu’une indemnité d’occupation provisionnelle équivalente au loyer contractuel jusqu’à la libération des lieux.

Condamnation aux dépens

L’association Lourdes Service a été condamnée à supporter les dépens de la procédure, y compris le coût du commandement de payer. De plus, elle a été condamnée à verser 1 500 euros à Antin Résidences sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile. La décision est exécutoire à titre provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de mise en œuvre de la clause résolutoire dans un bail commercial ?

La clause résolutoire dans un bail commercial est régie par l’article L. 145-41 du Code de commerce, qui stipule que :

« Toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai. »

Pour que la clause résolutoire soit applicable, il est nécessaire que :

– Le bailleur ait délivré un commandement de payer,
– Ce commandement soit resté sans effet pendant un mois,
– Le défaut de paiement soit manifestement fautif.

En l’espèce, la société Antin Résidences a délivré un commandement de payer le 22 mai 2024, qui a été jugé régulier et a mentionné les dispositions de l’article L. 145-41.

Il a été établi que les causes du commandement n’avaient pas été réglées dans le délai imparti, ce qui a permis de constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail.

Quels sont les pouvoirs du juge des référés en matière de résiliation de bail ?

Les pouvoirs du juge des référés sont encadrés par l’article 834 du Code de procédure civile, qui dispose que :

« Dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend. »

De plus, l’article 835, alinéa 1er, précise que :

« Le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite. »

Ainsi, le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit d’un bail, même en cas de contestation sérieuse, à condition que la clause résolutoire soit claire et ne nécessite pas d’interprétation.

Dans le cas présent, le juge a pu constater la résiliation du bail en raison de l’absence de paiement des loyers, ce qui ne laissait pas de place à une contestation sérieuse.

Comment se calcule l’indemnité d’occupation due par le preneur après la résiliation du bail ?

L’indemnité d’occupation est généralement calculée sur la base du loyer contractuel. En l’espèce, le juge a fixé l’indemnité d’occupation à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, conformément aux dispositions du bail.

L’indemnité d’occupation est due depuis l’acquisition de la clause résolutoire jusqu’à la libération effective des lieux. Le juge a précisé que cette indemnité serait due en plus des charges, taxes et accessoires.

Il est important de noter que, selon la jurisprudence, l’indemnité d’occupation doit être équitable et ne pas être manifestement excessive. Dans ce cas, la demande de majoration de l’indemnité d’occupation a été rejetée, car le montant demandé était jugé excessif par rapport aux circonstances.

Quelles sont les conséquences de l’expulsion sur les meubles laissés sur les lieux ?

Les conséquences de l’expulsion sur les meubles sont régies par les articles L. 433-1 et suivants du Code des procédures civiles d’exécution. Ces articles prévoient que :

« En cas d’expulsion, les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désigné par elle. À défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié. »

Le juge a également précisé que les meubles seraient décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, et que la personne expulsée serait sommée de les retirer dans un délai d’un mois non renouvelable.

À l’expiration de ce délai, les meubles pourraient être mis en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, conformément aux dispositions légales.

Quelles sont les implications de l’article 700 du Code de procédure civile dans ce cas ?

L’article 700 du Code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés non compris dans les dépens. Cet article stipule que :

« Le juge peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. »

Dans cette affaire, le juge a condamné l’association Lourdes Service à payer la somme de 1500 euros à la société Antin Résidences sur le fondement de cet article.

Cette somme vise à compenser les frais engagés par le bailleur pour faire valoir ses droits dans le cadre de la procédure judiciaire. Cela souligne l’importance de l’article 700 pour garantir une certaine équité dans la prise en charge des frais de justice.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/56534 – N° Portalis 352J-W-B7I-C53RE

N° : 1-CH

Assignation du :
24 Septembre 2024

[1]

[1] 1 Copie exécutoire
délivrée le:

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 10 janvier 2025

par Maïté FAURY, Première vice-présidente adjointe au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Célia HADBOUN, Greffière.
DEMANDERESSE

La société ANTIN RESIDENCES SOCIETE ANONYME D’HABITATIONS A LOYER MODERE, Société anonyme
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Alain CROS, avocat au barreau de VAL-DE-MARNE – #PC182

DEFENDERESSE

Association LOURDES SERVICE
[Adresse 4]
[Localité 3]

non représentée

DÉBATS

A l’audience du 13 Décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Maïté FAURY, Première vice-présidente adjointe, assistée de Célia HADBOUN, Greffière,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Suivant acte sous seing privé en date du 20 septembre 2021, la société Antin Résidences a donné à bail commercial à l’association Lourdes Service pour une durée de 9 années à compter du 20 septembre 2021, un local situé [Adresse 4] [Localité 3], consistant en un local de 40 m2, moyennant un loyer annuel de 13187 euros HT, payable trimestriellement et à terme à échoir.

Par acte de commissaire de justice en date du 24 septembre 2024, la société Antin Résidences a assigné l’association Lourdes Service en référé devant le président du tribunal judiciaire de Paris aux fins de constater l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail liant les parties et d’obtenir:

– l’expulsion de l’association Lourdes Service ainsi que celle de tous occupants de son chef des lieux loués, si besoin avec le concours de la force publique et d’un serrurier,

– le transport des meubles garnissant les lieux loués dans un garde-meubles désigné par le bailleur en garantie des sommes dues, au frais de l’association Lourdes Service,

– la condamnation de l’association Lourdes Service à payer à la requérante à titre provisionnel, la somme de 33 104,11 euros au titre de l’arriéré locatif,

– la condamnation de l’association Lourdes Service au paiement, à titre provisionnel, d’une indemnité d’occupation trimestrielle d’un montant égal au loyer normalement exigible, majorations incluses, majoré de 25%,

– la condamnation de l’association Lourdes Service au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Lors de l’audience du 13 décembre 2024, la société Antin Résidences, représenté par son Conseil, maintient oralement ses demandes.

L’association Lourdes Service n’a pas constitué avocat.

A l’issue des débats, la décision a été mise en délibéré au 8 octobre 2025.

Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.

MOTIFS

1/ Sur les demandes principales

L’article 834 du Code de procédure civile dispose que, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

La juridiction des référés n’est toutefois pas tenue de caractériser l’urgence, au sens de l’article 834 du code de procédure civile, pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d’un bail.

Aux termes de l’article 835, alinéa 1er du Code de procédure civile, le président peut toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.

L’article L. 145-41 du Code de commerce dispose que toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai.

Selon jurisprudence constante le juge des référés peut constater la résiliation de plein droit du bail au titre d’une clause contenue à l’acte à cet effet, à condition que :

– le défaut de paiement de la somme réclamée dans le commandement de payer visant la clause résolutoire soit manifestement fautif,
– le bailleur soit, de toute évidence, en situation d’invoquer de bonne foi la mise en jeu de cette clause,
– la clause résolutoire soit dénuée d’ambiguïté et ne nécessite pas interprétation ; en effet, la clause résolutoire d’un bail doit s’interpréter strictement.

En l’espèce, la soumission du bail au statut des baux commerciaux ne donne lieu à aucune discussion.

Aux termes de l’article 19.1 du contrat de bail commercial, le bail sera résilié de plein droit à défaut de paiement d’un seul terme de loyer, comme de tout complément de loyer ou d’arriéré de loyer, de dépôt de garantie ou de charges, et un mois après une mise en demeure ou un commandement de payer demeuré sans effet.

Par acte de commissaire de justice du 22 mai 2024, la société Antin Résidences a fait délivrer au preneur un commandement visant la clause résolutoire insérée au bail et reproduisant les dispositions de l’article L 145-41 du code de commerce. Ce commandement de payer est régulier et détaille le montant de la créance.

Il est établi que les causes du commandement de payer n’ont pas été réglées dans le mois de sa délivrance.

Il y a lieu en conséquence de constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail avec toutes conséquences de droit.

L’expulsion du preneur et de tout occupant de son chef sera ordonnée en cas de non restitution volontaire des lieux dans les 15 jours de la signification de la présente ordonnance.

Le sort des meubles trouvés dans les lieux sera régi en cas d’expulsion conformément aux dispositions du code des procédures civiles d’exécution et selon les modalités précisées au dispositif de l’ordonnance.

Il résulte du décompte locatif produit que l’obligation du preneur au titre des loyers, charges, taxes, accessoires et indemnités d’occupation dus à la Société Antin Résidences n’est pas sérieusement contestable à hauteur de 33 104,11 euros.

Il convient donc de condamner l’association Lourdes Service à payer à titre provisionnel la somme de 33 104,11 euros au demandeur au titre de l’arriéré locatif, terme du 3ème trimestre 2024 inclus avec intérêts au taux légal courant à compter de l’ordonnance.

Les pouvoirs du juge des référés qui accorde une provision sur une clause pénale sont limités par le caractère non sérieusement contestable de celle-ci. 

En l’espèce, la majoration du loyer à titre d’indemnité d’occupation s’analyse en une clause pénale et son montant apparaît manifestement excessif au regard des circonstances de la cause. Il n’y a donc pas lieu à référé sur cette demande.

L’indemnité d’occupation due depuis l’acquisition de la clause résolutoire et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, est fixée à titre provisionnel au montant du loyer contractuel, outre les charges, taxes et accessoires et la défenderesse sera condamnée,à payer cette indemnité d’immobilisation jusqu’à la libération effective des lieux.

2/ Sur les autres demandes

Conformément aux dispositions de l’article 696 du Code de procédure civile, l’association Lourdes Service qui succombe supportera le poids des dépens.

Il est équitable de condamner l’association Lourdes Service au paiementà la Société Antin Résidences de la somme de 1500 euros sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

L’exécution provisoire est de droit.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par mise à disposition au greffe, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

Constatons l’acquisition de la clause résolutoire insérée au bail à la date du 22 juin 2024;

Ordonnons, à défaut de restitution volontaire des lieux dans les quinze jours de la signification de la présente ordonnance, l’expulsion de l’association Lourdes Service et de tout occupant de leur chef des lieux situés adresse, avec le concours, en tant que de besoin, de la force publique;

Disons, en cas de besoin, que les meubles se trouvant sur les lieux seront remis aux frais de la personne expulsée dans un lieu désignée par elle et qu’à défaut, ils seront laissés sur place ou entreposés en un autre lieu approprié et décrits avec précision par l’huissier chargé de l’exécution, avec sommation à la personne expulsée d’avoir à les retirer dans le délai d’un mois non renouvelable à compter de la signification de l’acte, à l’expiration duquel il sera procédé à leur mise en vente aux enchères publiques, sur autorisation du juge de l’exécution, ce conformément à ce que prévoient les articles L. 433-1 et suivants et R. 433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution ;

Condamnons l’association Lourdes Service à payer à la Société Antin Résidences la somme provisionnelle de 33 104,11 euros (trente trois mille cent quatre euros onze centimes) au titre des loyers, charges, accessoires et indemnités d’occupation impayés selon décompte arrêté au terme de décembre 2024 inclus, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation;

Fixons à titre provisionnel l’indemnité d’occupation due par l’association Lourdes Service à compter du 01 janvier 2025 et jusqu’à la libération effective des lieux par la remise des clés, à une somme égale au montant du loyer trimestriel contractuel, outre charges et accessoires, normalement exigibles et les condamnons in solidum au paiement de cette indemnité;

Disons n’y avoir lieu à référés pour la majoration du loyer à titre d’indemnité d’occupation;

Condamnons l’association Lourdes Service aux dépens, qui comprendront notamment le coût du commandement de payer du 22 mai 2024;

Condamnons l’association Lourdes Service à payer à la société Antin Résidences la somme de 1500 euros (mille cinq cents euros) sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire ;

Fait à Paris le 10 janvier 2025

La Greffière, La Présidente,

Célia HADBOUN Maïté FAURY


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon