Cour d’appel de Versailles, 9 janvier 2025, RG n° 22/03814
Cour d’appel de Versailles, 9 janvier 2025, RG n° 22/03814

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Versailles

Thématique : Inaptitude professionnelle et conséquences sur le contrat de travail : enjeux de la reconnaissance des accidents du travail.

Résumé

Engagement et Accident de Travail

M. [B] [O] a été engagé par la société Trans Tardet groupe en tant que conducteur routier poids lourd longue distance à partir du 9 octobre 2017. Le 28 septembre 2018, il a subi un accident du travail, reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie le 29 octobre. Suite à cet accident, il a été placé en arrêt maladie à plusieurs reprises, avec un arrêt continu à partir du 21 novembre 2019.

Inaptitude et Licenciement

Le 27 février 2020, un médecin du travail a déclaré M. [O] inapte à son poste, en énumérant diverses contre-indications. Après plusieurs convocations à des entretiens préalables, il a été licencié par courrier le 30 juin 2020, en raison de son inaptitude et de l’impossibilité de reclassement.

Actions en Justice

Le 2 mars 2021, M. [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Mantes la Jolie pour demander des rappels de salaire, des indemnités et des dommages-intérêts. Le jugement du 29 novembre 2022 a condamné la société à lui verser 63 euros pour le remboursement de la carte conducteur, tout en déboutant M. [O] du surplus de ses demandes.

Appel et Demandes de M. [O]

M. [O] a interjeté appel le 27 décembre 2022, demandant l’infirmation du jugement, sauf pour la condamnation de 63 euros. Il a sollicité des sommes pour indemnité spéciale de licenciement, indemnité compensatrice de préavis, heures supplémentaires, dommages-intérêts pour préjudice moral et financier, ainsi que des documents de fin de contrat conformes.

Réponse de la Société Trans Tardet

La société Trans Tardet groupe a demandé la confirmation du jugement initial, contestant les demandes de M. [O] et affirmant que son inaptitude n’avait pas d’origine professionnelle. Elle a également demandé l’infirmation de la condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Jugement et Décisions de la Cour

La cour a confirmé le jugement concernant le rejet des demandes de M. [O] pour heures supplémentaires et frais de justice, tout en réformant le jugement pour lui accorder des indemnités pour licenciement, préavis, et dommages-intérêts pour retard de paiement des salaires. La société a également été condamnée à remettre des documents de fin de contrat conformes, sous astreinte.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

Chambre sociale 4-6

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 09 JANVIER 2025

N° RG 22/03814 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VS6I

AFFAIRE :

[B] [O]

C/

S.A.R.L. TRANS TARDET GROUPE (TTG)

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 29 Novembre 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de MANTES LA JOLIE

N° Section : C

N° RG : F21/00097

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Audrey GAILLARD

Me Martine DUPUIS de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES- REIMS

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE NEUF JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [B] [O]

né le 25 Février 1970 à

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Audrey GAILLARD, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 59 –

APPELANT

****************

S.A.R.L. TRANS TARDET GROUPE (TTG)

N° SIRET : 807 998 877

[Adresse 4]

[Localité 1]

Représentant : Me Martine DUPUIS de la SELARL LX PARIS- VERSAILLES- REIMS, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 625 – substitué par Me Noémie PHILIPPE avocate au barreau de RENNES

INTIMEE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 Novembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Véronique PITE, Conseillère chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Nathalie COURTOIS, Présidente,

Madame Véronique PITE, Conseillère,

Madame Odile CRIQ, Conseillère,

Greffier lors des débats : Madame Isabelle FIORE,

FAITS ET PROCÉDURE

M. [B] [O] a été engagé par contrat à durée devenue indéterminée à compter du 9 octobre 2017 en qualité de conducteur routier poids lourd longue distance, par la société à responsabilité limitée Trans Tardet groupe, qui a pour activité le transport routier de marchandises en vrac, emploie plus de dix salariés et relève de la convention collective des transports routiers et activités auxiliaires.

Le 28 septembre 2018, il fut victime d’un accident du travail, reconnu par la caisse primaire d’assurance maladie le 29 octobre suivant.

Il fut placé en arrêt maladie du 28 septembre au 6 octobre 2018, puis du 26 janvier au 11 février 2019, enfin, quelques jours en juillet, août puis en octobre de la même année.

Après déclaration de rechute que la caisse primaire ne concédait pas, M. [O] a été arrêté continûment dès le 21 novembre 2019.

Le 27 février 2020, le médecin du travail l’estima inapte à son poste, et lista diverses contre-indications à respecter.

Convoqué le 13 mai 2020 à un entretien préalable à un éventuel licenciement, fixé au 26 mai suivant, puis de nouveau le 4 juin, pour le 16 juin, et enfin le 16 juin pour le 25, M. [O] a finalement été licencié par courrier du 30 juin 2020 énonçant son inaptitude et l’impossibilité de son reclassement.

M. [O] a saisi, le 2 mars 2021, le conseil de prud’hommes de Mantes la Jolie aux fins de demander divers rappels de salaire ou d’indemnité, ainsi que des dommages-intérêts en réparation de son préjudice moral et financier, ce à quoi la société s’opposait.

Par jugement rendu le 29 novembre 2022, notifié le 7 décembre suivant, le conseil a statué comme suit :

Condamne la société Trans Tardet groupe à payer à M. [O] la somme de 63 euros nets à titre de remboursement de la carte conducteur.

Dit que cette somme portera intérêts au taux légal à compter du jour du prononcé du présent jugement, conformément à l’article 1231-7 du code civil.

Déboute M. [O] du surplus de ses demandes.

Déboute la société Trans Tardet groupe en sa demande reconventionnelle.

Dit que la société Trans Tardet groupe supportera les entiers dépens qui comprendront les éventuels frais d’exécution.

Le 27 décembre 2022, M. [O] a relevé appel de cette décision par voie électronique.

Selon ses dernières conclusions remises au greffe le 10 septembre 2024, il demande à la cour de :

Infirmer le jugement en toutes ses dispositions, sauf s’agissant de la condamnation de la société Trans Tardet groupe à lui payer la somme de 63 euros nets au titre du remboursement de la carte conducteur.

Et, statuant à nouveau,

Condamner la société Trans Tardet groupe à lui verser :

– à titre de solde d’indemnité spéciale de licenciement, la somme de 2.000,97 euros

– à titre d’indemnité équivalente à l’indemnité compensatrice de préavis, la somme de 4.611,94 euros

– au titre des heures supplémentaires effectuées en 2018 et 2019, la somme de 5.571,5 euros, outre les congés payés afférents d’un montant de 557,15 euros

– à titre de dommages et intérêts pour préjudice moral et financier, la somme de 3.000 euros

Dire que ces sommes porteront intérêts au taux légal à compter de la date d’introduction de l’instance et en ordonner la capitalisation des intérêts

Condamner la société Trans Tardet groupe à lui remettre des bulletins de salaires et documents de fin de contrat conformes à l’arrêt à intervenir, et ce sous astreinte de 100 euros par jour et par document de retard

La débouter de toutes ses demandes, fins et conclusions

La condamner à lui verser la somme de 3.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

La débouter de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile

La condamner aux entiers dépens.

Aux termes de ses dernières conclusions remises au greffe le 4 septembre 2024, la société Trans Tardet groupe demande à la cour de :

Confirmer le jugement du conseil de prud’hommes de Mantes la Jolie en ce qu’il a :

Débouté M. [O] de ses demandes en paiement d’une indemnité spéciale de licenciement et d’une indemnité de préavis outre congés payés afférents, d’heures supplémentaires, de dommages et intérêts au titre d’un préjudice moral et financier et

Débouté M. [O] du surplus de ses demandes

Dit qu’il n’y avait lieu à ordonner de lui remettre des bulletins de paie et documents de fin de contrat rectifiés

Infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée du paiement d’une indemnité de 2.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile

En conséquence :

Juger que l’inaptitude au travail de M. [O] a une origine non professionnelle

Débouter M. [O] de ses demandes :

à titre de solde d’indemnité spéciale de licenciement à hauteur de 2.000,97 euros

en paiement d’une indemnité compensatrice de préavis pour un montant de 4.611,94 euros

au titre des heures supplémentaires sur les années 2018-2019 pour un montant de 5.571,51 euros outre 557,15 euros de congés payés

au titre du préjudice moral et financier pour un montant de 3 000 euros

de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

Débouter M. [O] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

Statuant à nouveau,

Condamner M. [O] à lui verser la somme de 2.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code du procédure civile

Le condamner aux entiers dépens.

Pour un plus ample exposé des faits et de la procédure, ainsi que des moyens et prétentions des parties, il convient de se référer aux écritures susvisées.

Par ordonnance rendue le 11 septembre 2024, le conseiller chargé de la mise en état a ordonné la clôture de l’instruction et a fixé la date des plaidoiries au 5 novembre 2024.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, par arrêt contradictoire,

Confirme le jugement dans la limite de la dévolution en ce qu’il a rejeté la demande de M. [B] [O] en paiement d’heures supplémentaires et sur les frais de justice ;

Le réforme pour le surplus ;

Statuant de nouveau et y ajoutant ;

Condamne la société à responsabilité limitée Trans Tardet groupe à payer à M. [B] [O] :

– 2.000,97 euros à titre d’indemnité spéciale de licenciement ;

– 4.611,94 euros à titre d’indemnité équivalente à l’indemnité compensatrice de préavis ;

– 1.500 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice né du retard de paiement des salaires dus de mars à juin 2020 ;

– 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile en cause d’appel ;

Dit que les créances de nature contractuelle sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la réception par l’employeur de la convocation devant le bureau de conciliation pour les créances échues à cette date et que les créances indemnitaires sont productives d’intérêts au taux légal à compter de la décision en fixant tout à la fois le principe et le montant ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;

Condamne la société à responsabilité limitée Trans Tardet groupe à remettre à M. [B] [O] un bulletin de paie et des documents de fin de contrat conformes à la présente décision, sous astreinte de 50 euros par jour et document passé un mois de la signification du présent arrêt, durant trois mois ;

Condamne la société à responsabilité limitée Trans Tardet groupe aux entiers dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Nathalie COURTOIS, Présidente et par Madame Isabelle FIORE, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon