Résiliation de bail et effets des clauses résolutoires en matière locative

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Résiliation de bail et effets des clauses résolutoires en matière locative

L’Essentiel : La SCI SH 52 a signé un bail commercial avec la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD le 20 janvier 2020, mais des loyers impayés ont conduit à des complications juridiques. Le 15 juillet 2024, un commandement de payer de 168.800 euros a été délivré, suivi d’une citation devant le tribunal. La SCI a demandé l’expulsion de la SARL et le paiement des loyers dus. En réponse, la SARL a sollicité des délais de paiement, reconnaissant sa dette. Le tribunal a ordonné le paiement de la somme due et accordé des délais, précisant que tout manquement entraînerait la résiliation du bail.

Contexte de l’affaire

La SCI SH 52 a signé un bail commercial avec la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD le 20 janvier 2020, pour des locaux situés à une adresse précise, avec un loyer annuel de 36.000 euros. Cependant, des loyers sont restés impayés, entraînant des complications juridiques.

Commandement de payer

Le 15 juillet 2024, la SCI SH 52 a délivré un commandement de payer à la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD, réclamant la somme de 168.800 euros pour loyers et charges impayés. Ce commandement a été suivi d’une citation devant le tribunal judiciaire de Paris le 12 septembre 2024, en raison de la non-régularisation des paiements.

Demandes de la SCI SH 52

La SCI SH 52 a demandé au tribunal de constater l’acquisition de la clause résolutoire, d’ordonner l’expulsion de la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD, de condamner cette dernière à payer une indemnité d’occupation, ainsi qu’une provision pour les loyers impayés, et d’autres frais liés à la procédure.

Réponse de la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD

En réponse, la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD a sollicité des délais de paiement, espérant suspendre les effets de la clause résolutoire. Elle a reconnu sa dette, mais a demandé des conditions plus favorables pour le règlement.

Décision du tribunal

Le tribunal a constaté que la dette locative n’était pas contestée et a ordonné le paiement de 168.800 euros à titre de provision. Il a également décidé d’accorder des délais de paiement à la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD, tout en précisant que le non-respect de ces délais entraînerait la résiliation du bail et l’expulsion.

Conséquences de la décision

La décision stipule que si la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD ne respecte pas les délais de paiement, la clause résolutoire sera acquise, entraînant la résiliation du bail et l’expulsion de la société. De plus, une indemnité d’occupation sera due à la SCI SH 52 jusqu’à la libération des lieux.

Frais et dépens

La SARL BOLLYWOOD BOULEVARD a également été condamnée à verser 1.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à payer les dépens liés à la procédure, y compris le coût du commandement de payer.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de la résiliation de plein droit d’un bail pour défaut de paiement ?

La résiliation de plein droit d’un bail pour défaut de paiement est régie par l’article 24 de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989. Cet article stipule que :

« Toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour non versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement demeuré infructueux. »

Dans le cas présent, la SA DOMOFRANCE a signifié à Madame [Y] [B] un commandement de payer le 12 juin 2024, lui demandant de régler la somme de 1571,03 € au titre des loyers échus.

Madame [Y] [B] n’ayant pas réglé cette somme dans le délai imparti, la clause de résiliation a pu être appliquée, entraînant la résiliation du bail à compter du 13 août 2024.

Il est important de noter que, selon l’article 24 V de la même loi, le juge peut accorder des délais de paiement au locataire, suspendant ainsi les effets de la clause de résiliation pendant la durée de ces délais.

Quels sont les droits du locataire en cas de demande de délais de paiement ?

L’article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 précise que :

« Le juge peut, même d’office, accorder au locataire en situation de régler sa dette locative, des délais de paiement dans la limite de 3 années. Pendant le cours des délais accordés par le juge, les effets de la clause de résiliation de plein droit sont suspendus. »

Dans le litige en question, Madame [Y] [B] a reconnu sa dette et a sollicité des délais de paiement, proposant un échelonnement de 200 € par mois.

La SA DOMOFRANCE, de son côté, a indiqué ne pas s’opposer à l’octroi de ces délais.

Ainsi, le tribunal a décidé d’accorder à Madame [Y] [B] la possibilité de se libérer de sa dette dans un délai de 24 mois, avec des mensualités successives, tout en précisant que si ces délais ne sont pas respectés, la clause de résiliation reprendra son plein effet.

Quelles sont les conséquences d’un manquement aux délais de paiement accordés par le juge ?

En cas de non-respect des délais de paiement accordés, l’article 24 V de la loi du 6 juillet 1989 stipule que :

« Si le locataire se libère de sa dette locative dans le délai et selon les modalités fixées par le juge, la clause de résiliation de plein droit est réputée ne pas avoir joué. Dans le cas contraire, elle reprend son plein effet. »

Dans le cas présent, si Madame [Y] [B] ne respecte pas les mensualités convenues, la totalité de la somme restant due deviendra immédiatement exigible.

De plus, la clause de résiliation du bail sera alors appliquée, entraînant la résiliation immédiate du contrat de bail et, si nécessaire, l’expulsion de Madame [Y] [B] des lieux loués.

Quelles sont les dispositions concernant les indemnités d’occupation en cas d’expulsion ?

Les indemnités d’occupation sont régies par les articles L.433-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution. Ces articles prévoient que :

« En cas d’expulsion, le locataire est tenu de payer une indemnité d’occupation égale au montant du loyer révisable selon les dispositions contractuelles. »

Dans cette affaire, il a été décidé que Madame [Y] [B] serait tenue au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle, fixée au montant du loyer et des charges, soit 385,46 € et 15,53 € par mois, jusqu’à la libération effective des lieux.

Cette indemnité sera due à compter du 13 août 2024, date à laquelle la résiliation du bail a été constatée.

Ainsi, en cas de non-respect des délais de paiement, Madame [Y] [B] devra également s’acquitter de cette indemnité d’occupation.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS

N° RG 24/56256

N° Portalis 352J-W-B7I-C5XVZ

N° : 10

Assignation du :
12 septembre 2024

[1]

[1] 2 copies exécutoires
délivrées le :

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 janvier 2025

par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,

Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.

DEMANDERESSE

La S.C.I. SH 52
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Gina MARUANI de la SELAS JACQUIN MARUANI & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS – #P0428

DEFENDERESSE

La S.A.R.L. BOLLYWOOD BOULEVARD
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Maître Estelle LEVI, avocat au barreau de PARIS – #C0804

DÉBATS

A l’audience du 26 novembre 2024, tenue publiquement, présidée par Anne-Charlotte MEIGNAN, Vice-Président, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,

Nous, Président,

Après avoir entendu les conseils des parties,

Aux termes d’un acte sous seing privé signé le 20 janvier 2020, la SCI SH 52 a donné à bail à la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD des locaux à usage commercial situés [Adresse 1], moyennant le paiement d’un loyer annuel en principal de 36.000 euros.

Des loyers étant demeuré impayés, le bailleur a délivré au preneur, le 15 juillet 2024, un commandement de payer la somme de 168.800 euros au titre des loyers et charges impayés à cette date.

Se prévalant de la clause résolutoire stipulée au contrat de bail et de la non régularisation des causes du commandement de payer, la SCI SH 52 a, par exploit délivré le 12 septembre 2024, fait citer la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD devant le président du tribunal judiciaire de Paris, statuant en référé, aux fins de :
– constater l’acquisition de la clause résolutoire au 15 juillet 2024, ordonner l’expulsion de la défenderesse et de tout occupant de son chef comme sans droit ni titre avec au besoin l’assistance de la force publique et d’un serrurier, outre la séquestration des meubles conformément à la loi,
– condamner la partie défenderesse à lui payer à titre provisionnel une indemnité d’occupation égale au montant du dernier loyer, majoré de 50%, outre charges et TVA, du 15 août 2024 jusqu’à complète libération des lieux, et à titre de provision, la somme de 168.000 euros au titre des loyers et charges impayés au 1er septembre 2024, avec intérêts de droit et capitalisation dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil,
– la condamner au paiement de la clause pénale,
– dire et juger que le dépôt de garantie versé par le preneur lui restera acquis,
– la condamner au paiement de la somme de 3000 euros, au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens, dont le coût du commandement de payer.

A l’audience, la requérante sollicite le bénéfice de son acte introductif d’instance. Elle s’oppose à l’octroi de délais de paiement.

En réponse, la défenderesse sollicite l’octroi des plus larges délais de paiement, suspensifs des effets de la clause résolutoire.

Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens, il est renvoyé à l’acte introductif d’instance, aux écritures de la défenderesse ainsi qu’aux notes d’audience.

MOTIFS

Sur la provision

Aux termes de l’article 835 du code de procédure civile, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, le président du tribunal judiciaire peut accorder une provision au créancier, ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
La dette locative n’est pas contestée par la défenderesse, qui se reconnaît redevable du droit d’entrée de 150.000€. Celle-ci sera donc condamnée au paiement de la somme de 168.800 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et droit d’entrée échus au 1er septembre 2024, 3ème trimestre 2024 inclus.

Il n’y a pas lieu de préciser que la condamnation est assortie des intérêts de droit, s’agissant d’un effet légal résultant de l’article 1231-7 du code civil. La capitalisation des intérêts sera ordonnée conformément aux dispositions de l’article 1343-2 du même code.

Compte tenu du montant élevé des sanctions cumulées par les clauses relatives à la pénalité forfaitaire, à la majoration de l’indemnité d’occupation et à la conservation du dépôt de garantie, toutes trois sollicitées dans la présente instance, il ne saurait être fait droit à aucune de ces demandes, l’application de l’ensemble de ces clauses cumulativement pouvant revêtir un caractère manifestement excessif au sens de l’article 1231-5 du code civil, dont l’appréciation ne relève pas du juge des référés.

Sur la demande principale

Aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire peut ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend.

Le juge des référés n’est toutefois pas tenu de caractériser l’urgence pour constater l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation de droit d’un bail.

L’article L.145-41 du code de commerce dispose que « toute clause insérée dans le bail prévoyant la résiliation de plein droit ne produit effet qu’un mois après un commandement demeuré infructueux. Le commandement doit, à peine de nullité, mentionner ce délai ».

En l’espèce, l’article 25 du contrat de bail stipule qu’à défaut de paiement d’un seul terme de loyer, ou de ses accessoires, notamment du dépôt de garantie, ainsi que des frais d’actes d’huissier, le bail sera résilié de plein droit un mois après la délivrance d’un commandement resté infructueux et contenant déclaration du bailleur de se prévaloir de la clause résolutoire.

Il n’est opposé aucune contestation sur la régularité du commandement de payer et il n’est pas contesté que ses causes n’ont pas été régularisées dans le délai d’un mois, de sorte le contrat de bail s’est trouvé résilié de plein droit par l’effet de l’acquisition de la clause résolutoire.

Aux termes de l’alinéa 2 de l’article L.145-41 du code de commerce, le juge saisi d’une demande présentée dans les formes et conditions prévues à l’article 1343-5 du code civil peut, en accordant des délais, suspendre la réalisation et les effets des clauses de résiliation, lorsque la résiliation n’est pas constatée ou prononcée par une décision de justice ayant acquis l’autorité de la chose jugée. La clause résolutoire ne joue pas, si le locataire se libère dans les conditions fixées par le juge.

Compte tenu du fait que la dette est principalement constituée du droit d’entrée, normalement payable au mois de janvier 2024, il convient de faire droit à la demande de délais de paiement, lesquels auront pour effet de suspendre la réalisation et les effets de la clause résolutoire, sans préjudicier aux droits du bailleur qui retrouvera sa liberté d’agir en expulsion s’ils ne sont pas respectés.
A défaut de respecter les délais de paiement, la clause résolutoire sera acquise et la défenderesse sera redevable d’une indemnité d’occupation à titre provisionnel, qu’il convient de fixer à une somme égale au montant non sérieusement contestable du loyer trimestriel, des charges et taxes en cours, et ce jusqu’à libération des lieux.

Il a été exposé plus haut qu’il n’y avait pas lieu à référé sur la majoration de l’indemnité d’occupation compte tenu du pourcentage stipulé et des demandes cumulatives au titre des diverses clauses susceptibles d’être qualifiées de clauses pénales.

Sur le surplus des demandes

Il n’apparaît pas inéquitable de condamner la défenderesse au paiement de la somme de 1 000€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

En application des dispositions de l’article 696 du même code, succombant à l’instance, la partie défenderesse sera condamnée au paiement des dépens, en ce compris le coût du commandement de payer.

PAR CES MOTIFS

Nous, Juge des référés, statuant publiquement, par ordonnance contradictoire et en premier ressort,

Renvoyons les parties à se pourvoir au fond ainsi qu’elles en aviseront, mais dès à présent par provision, tous les moyens des parties étant réservés ;

Constatons que les conditions d’acquisition de la clause résolutoire sont réunies ;

Condamnons la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD à verser à la SCI SH 52 la somme de 168.800 euros à titre de provision à valoir sur les loyers, charges et droit d’entrée échus au 1er septembre 2024, 3ème trimestre 2024 inclus ;

Ordonnons la capitalisation de cette somme dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;

Autorisons la société BOLLYWOOD BOULEVARD à se libérer de cette somme en vingt-quatre mensualités égales et consécutives, en sus du loyer et des charges courants, le premier versement devant être effectué au plus tard le 10ème jour du mois suivant la signification de la présente ordonnance à défaut d’exécution volontaire de cette ordonnance, et tout paiement étant imputé en priorité sur les loyers et charges en cours, sauf meilleur accord des parties ;

Suspendons pendant cette période, les effets de la clause résolutoire qui sera réputée n’avoir jamais été acquise en cas de respect des modalités de paiement ;

Disons qu’à défaut de paiement d’un seul terme (loyer ou arriéré) à son échéance et dans son intégralité, le solde restant dû deviendra immédiatement exigible et la clause résolutoire reprendra ses effets ;

Constatons en ce cas la résiliation de plein droit du bail consenti à la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD portant sur des locaux situés [Adresse 1] ;

Autorisons en ce cas l’expulsion de la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD et celle de tous occupants de son chef des lieux précité, et disons qu’à défaut de départ volontaire, la partie défenderesse pourra être contrainte à l’expulsion avec, si besoin est, l’assistance de la force publique ;

Rappelons que le sort des meubles sera régi conformément aux dispositions des articles L.433-1 et L.433-2 du code des procédures civiles d’exécution ;

Condamnons en ce cas la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD à payer à la SCI SH 52 une indemnité d’occupation provisionnelle équivalente au montant du loyer trimestriel, majoré des charges et taxes, et ce à compter du non respect des délais de paiement jusqu’à libération effective des lieux,

Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande de majoration de l’indemnité d’occupation, sur la demande de conservation du dépôt de garantie et sur la demande de condamnation au paiement d’une clause pénale ;

Condamnons la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD à verser à la SCI SH 52 la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamnons la SARL BOLLYWOOD BOULEVARD au paiement des dépens ;

Rappelons que la présente ordonnance bénéficie de plein droit de l’exécution provisoire.

Ainsi ordonné et mis à disposition au greffe le 8 janvier 2025.

Le Greffier, Le Président,

Arnaud FUZAT Anne-Charlotte MEIGNAN


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