L’Essentiel : La société Louvre capital a assigné la société Kimpi et deux notaires devant le tribunal judiciaire de Paris, cherchant à écarter des pièces pour violation de la confidentialité et à obtenir une provision de 100.000 euros. En réponse, Kimpi a formulé des demandes reconventionnelles, réclamant 345.000 euros pour indemnité d’immobilisation. Le tribunal a jugé que certaines pièces de Kimpi ne violaient pas le secret professionnel, mais a écarté la pièce n° 4. Finalement, le tribunal a rejeté toutes les demandes, estimant qu’il n’y avait pas lieu à référé, laissant chaque partie à ses propres dépens.
|
Contexte de l’affaireLa société Louvre capital a assigné en référé la société Kimpi, ainsi que deux notaires, Maître [I] et la société [S] & associés, devant le tribunal judiciaire de Paris. Cette action vise à écarter certaines pièces de la société Kimpi pour violation de la confidentialité des échanges entre notaires, à obtenir une provision de 100.000 euros, et à débouter la société Kimpi de ses demandes. Demandes de la société KimpiEn réponse, la société Kimpi a formulé des demandes reconventionnelles, cherchant à débouter la société Louvre capital de ses demandes et à obtenir le paiement de 345.000 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation stipulée dans une promesse unilatérale de vente. Elle a également demandé que le paiement de cette somme soit effectué par les notaires concernés. Secret professionnel des notairesLa société Louvre capital a demandé le retrait de certaines pièces de la société Kimpi, arguant qu’elles violaient le secret professionnel des notaires. Le tribunal a rappelé que le secret professionnel est général et absolu, mais a jugé que certaines pièces produites par la société Kimpi ne revêtaient pas de caractère confidentiel et ne violaient pas ce secret. Analyse des pièces produitesLe tribunal a décidé d’écarter la pièce n° 4, qui pourrait porter atteinte au secret professionnel, tout en maintenant les pièces n° 20, 21 et 24 dans les débats. Ces dernières contenaient des échanges de courriels entre notaires concernant la planification de la signature d’un acte, sans révéler d’informations confidentielles. Demande de provision de la société Louvre capitalLa société Louvre capital a soutenu que l’obligation de restitution de l’indemnité séquestrée n’était pas sérieusement contestable, car la promesse de vente était devenue caduque. Cependant, le tribunal a constaté qu’il existait une contestation sérieuse sur cette caducité, étant donné que les parties avaient continué à échanger pour finaliser la vente. Demande reconventionnelle de la société KimpiLa société Kimpi a également demandé une provision de 345.000 euros, affirmant que toutes les conditions suspensives étaient levées et que la société Louvre capital avait manqué à ses engagements. Toutefois, le tribunal a estimé que cette obligation était également sérieusement contestable, nécessitant une interprétation des intentions des parties, ce qui excède les pouvoirs du juge des référés. Décision du tribunalLe tribunal a rejeté les demandes principales et reconventionnelles des parties, statuant qu’il n’y avait pas lieu à référé. Chaque partie a été laissée à la charge de ses propres dépens, et les demandes fondées sur l’article 700 du code de procédure civile ont également été rejetées. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la présomption d’origine professionnelle des maladies selon le Code de la sécurité sociale ?Selon l’article L. 461-1 du Code de la sécurité sociale, il est stipulé que : “[…] est présumée d’origine professionnelle toute maladie désignée dans un tableau de maladies professionnelles et contractée dans les conditions mentionnées à ce tableau. Si une ou plusieurs conditions tenant au délai de prise en charge, à la durée d’exposition ou à la liste limitative des travaux ne sont pas remplies, la maladie telle qu’elle est désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est directement causée par le travail habituel de la victime. […] Dans les cas mentionnés aux deux alinéas précédents, la caisse primaire reconnaît l’origine professionnelle de la maladie après avis motivé d’un comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles. La composition, le fonctionnement et le ressort territorial de ce comité ainsi que les éléments du dossier au vu duquel il rend son avis sont fixés par décret. L’avis du comité s’impose à la caisse dans les mêmes conditions que celles fixées à l’article L.315-1.” Ainsi, la présomption d’origine professionnelle est établie pour les maladies inscrites dans un tableau, mais peut être contestée si certaines conditions ne sont pas remplies. Il est donc essentiel d’examiner si les conditions spécifiques du tableau n°79, qui concerne les lésions chroniques du ménisque, ont été respectées dans le cas de Madame [A] [E] [W]. Quelles sont les conditions de prise en charge des maladies professionnelles selon le tableau n°79 ?Le tableau n°79 relatif aux “Lésions chroniques du ménisque à caractère dégénératif” précise les conditions de prise en charge suivantes : – Délai de prise en charge : 2 ans, Il est donc crucial de vérifier si les activités de Madame [A] [E] [W] correspondent à ces critères. Dans le cas présent, la CPAM a rejeté la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle en raison du non-respect de la liste limitative des travaux. L’avis du CRRMP a également souligné qu’il n’y avait pas de lien direct entre le travail habituel de la requérante et la maladie déclarée, ce qui a conduit à la décision de refus de prise en charge. Quel est le rôle du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles ?L’article R. 142-17-2 du Code de la sécurité sociale précise que : “Lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une maladie dans les conditions prévues aux sixième et septième alinéa de l’article L. 461-1, le tribunal recueille préalablement l’avis d’un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du huitième alinéa de l’article L.461-1. Le tribunal désigne alors le comité d’une des régions les plus proches.” Dans le cas de Madame [A] [E] [W], le tribunal a décidé de désigner un second comité régional pour recueillir un nouvel avis sur la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle. Cette procédure est essentielle pour garantir que toutes les perspectives soient prises en compte avant de rendre une décision finale sur l’origine professionnelle de la maladie. Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal concernant la désignation d’un nouveau CRRMP ?La décision du tribunal de désigner un nouveau CRRMP a plusieurs conséquences importantes. Tout d’abord, cela signifie que le tribunal sursoie à statuer sur les autres demandes en attendant l’avis du nouveau comité. Cela est conforme à l’article R. 142-17-2, qui stipule que le tribunal doit recueillir l’avis d’un autre comité lorsque le différend concerne la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une maladie. De plus, le tribunal a ordonné que la caisse primaire d’assurance maladie transmette le dossier de Madame [A] [E] [W] au CRRMP désigné, conformément aux dispositions de l’article D. 461-29 du Code de la sécurité sociale. Cela garantit que le comité dispose de toutes les informations nécessaires pour rendre un avis motivé sur la demande de reconnaissance de la maladie professionnelle. Enfin, le tribunal a rappelé que l’avis du comité doit être motivé et qu’il sera transmis aux parties pour qu’elles puissent préparer leurs conclusions sur le fond. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
■
N° RG 24/56144
N° Portalis 352J-W-B7I-C5HII
N° : 6
Assignation du :
28 août 2024
[1]
[1] 3 copies exécutoires
délivrées le :
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 08 janvier 2025
par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Arnaud FUZAT, Greffier.
DEMANDERESSE
La S.A.S. Louvre Capital
[Adresse 2]
[Localité 8]
représentée par Maître Pierre-Emmanuel MOATI, avocat au barreau de PARIS – #G0122
DEFENDEURS
La S.A.S. KIMPI
[Adresse 1]
[Localité 6]
représentée par Maître Claire JOUFFREY, avocat au barreau de LILLE, plaidant, et par Maître Jacques BELLICHACH, avocat au barreau de PARIS – #G0334, postulant,
Monsieur [O] [I]
[Adresse 4]
[Localité 5]
La S.A.S. [S] & ASSOCIÉS, NOTAIRES
[Adresse 4]
[Localité 5]
représentés par Maître Véronique VITSE-BOEUF, avocat au barreau de LILLE, plaidant, et par Maître Benjamin MOISAN de la SELARL BAECHLIN MOISAN Associés, avocats au barreau de PARIS – #L34, postulant,
DÉBATS
A l’audience du 04 décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Rachel LE COTTY, Première vice-présidente, assistée de Arnaud FUZAT, Greffier,
Après avoir entendu les conseils des parties,
Par acte du 28 août 2024, la société Louvre capital a assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire de Paris la société Kimpi, Maître [I], notaire, et la société [S] & associés, notaires, aux fins de voir, en l’état de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience du 4 décembre 2024, sur le fondement des articles 834 et suivants du code de procédure civile :
écarter des débats les pièces n°4, 20, 21 et 24 de la société Kimpi dès lors que leur communication viole la confidentialité attachée aux échanges entre notaires ;renvoyer les parties à mieux se pourvoir, mais d’ores et déjà, et par provision ;juger qu’elle est fondée et recevable en ses demandes ;juger que l’obligation de la société Kimpi n’est pas sérieusement contestable ;En conséquence,
condamner la société Kimpi à lui payer à titre de provision la somme de 100.000 euros correspondant au montant de l’indemnité d’immobilisation séquestrée entre les mains de Maître [I] ;En tout état de cause,
juger que la société Kimpi n’est pas fondée en ses demandes ;débouter la société Kimpi, Maître [I] et la société [S] & Associés, notaires, de l’intégralité de leurs demandes ;condamner la société Kimpi à lui payer la somme de 5.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner la société Kimpi aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, la société Kimpi demande, sur le fondement de l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile et des articles 1103 et 1104 du code civil, de :
débouter la société Louvre capital de sa demande de rejet de pièces ;débouter la société Louvre capital de l’intégralité de ses demandes ;condamner à titre reconventionnel la société Louvre capital à lui payer la somme de 345.000 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation convenue dans la promesse unilatérale de vente du 12 septembre 2022 ;juger que le paiement de la somme de 345.000 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation s’effectuera comme suit : enjoindre l’étude notariale [S] & associés et Maître [I], notaire, ou l’un à défaut de l’autre, à lui verser la somme de 100.000 euros séquestrée entre leurs mains, sur présentation de l’ordonnance de référé à intervenir ; condamner la société Louvre capital à lui payer le différentiel de 245.000 euros restant dû au titre de l’indemnité d’immobilisation ;condamner en toute hypothèse la société Louvre capital à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner en toute hypothèse la société Louvre capital aux entiers dépens.
Aux termes de leurs conclusions déposées et soutenues oralement à l’audience, Maître [I], notaire, et la société [S] & associés, notaires, demandent de :
statuer ce que de droit sur la demande de libération de l’indemnité d’immobilisation sollicitée par la société Louvre capital ;rejeter le surplus des prétentions de la société Louvre capital ;condamner la partie succombante à leur payer la somme de 1.500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;condamner la partie succombante aux entiers frais et dépens de l’instance.
Conformément aux dispositions des articles 455 et 446-1 du code de procédure civile, il est renvoyé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des faits, de la procédure et des moyens.
Sur la demande de la société Louvre capital tendant à voir écarter des débats les pièces n°4, 20, 21 et 24 de la société Kimpi pour violation de la confidentialité attachée aux échanges entre notaires
La société Louvre capital demande le retrait des débats des pièces n°4, 20, 21 et 24 de la société Kimpi pour violation de la confidentialité attachée aux échanges entre notaires.
Le secret professionnel du notaire est prévu à l’article 23 de la loi du 25 Ventôse an XI.
Il est rappelé à l’article 3.4 du règlement national du notariat, qui est rédigé en ces termes :
« Le secret professionnel du notaire est général et absolu.
Confident nécessaire de ses clients, le notaire est tenu au secret professionnel dans les conditions prévues par le code pénal ou toutes autres dispositions législatives ou réglementaires.
Ce secret couvre tout ce qui a été porté à la connaissance du notaire dans l’exercice de ses fonctions. Il s’étend aux correspondances et échanges entre notaires ou avec les instances de la profession et avec les associés d’une société pluri professionnelles d’exercice.
Le notaire doit veiller à ce que tous ses collaborateurs soient instruits de cette obligation qui est aussi la leur et qu’ils la respectent ».
Le notaire est en effet appelé à recueillir des confidences, qui ne peuvent en aucun cas être divulguées.
Le secret professionnel du notaire présente donc des caractéristiques particulièrement fortes qui se traduisent notamment par le fait qu’il prévaut sur son obligation de conseil et qu’il est absolu à l’égard des tiers sauf exceptions, soit spécifiquement prévues par la loi, soit générales.
Ainsi, viole le secret professionnel le notaire qui, choisi par un client en raison de ses fonctions d’officier ministériel dans le but d’amener une autre personne à signer un acte authentique de vente, délivre, alors que sa démarche n’a pas abouti, une attestation destinée à être produite en justice et faisant état des propos recueillis par ce notaire, peu important qu’il n’ait agi qu’en qualité de négociateur (1re Civ., 18 juin 1985, pourvoi n° 84-13.159, Bull. 1985, I, n° 193).
Un notaire, fût-il choisi en commun par ceux qui ont sollicité son intervention, ne peut révéler à la demande d’une partie, les propos recueillis de l’un d’entre eux lors d’une réunion commune. Dès lors, viole l’article 378 du code pénal alors en vigueur, la cour d’appel qui pour statuer dans un litige successoral, se fonde sur une attestation délivrée par le notaire chargé du règlement de la succession en énonçant qu’il ne peut y avoir violation du secret professionnel, cette faute supposant une divulgation au profit des tiers (1re Civ., 13 novembre 1996, pourvoi n° 94-17.088, Bull. 1996, I, n° 398).
Le secret professionnel interdit au notaire de révéler au vendeur d’un bien immobilier qu’il a été chargé par l’acquéreur de procéder à sa revente, quel qu’en soit le prix (1re Civ., 3 mai 2006, pourvoi n° 04-17.599, Bull. 2006, I, n° 209).
Le secret professionnel interdit encore au notaire de révéler au conjoint l’acquisition que projette de faire son époux en instance de divorce (1re Civ., 4 juin 2007, pourvoi n° 06-14.609, Bull. 2007, I, n° 221).
Le droit à la preuve découlant de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme ne peut faire échec à l’intangibilité du secret professionnel du notaire, lequel n’en est délié que par la loi, soit qu’elle impose, soit qu’elle autorise la révélation du secret (1re Civ., 4 juin 2014, pourvoi n° 12-21.244, Bull. 2014, I, n° 101).
Toutefois, en l’espèce, les pièces n° 20, 21 et 24 produites par la société Kimpi ne revêtent aucun caractère confidentiel et ne sont pas soumises au secret professionnel des correspondances entre notaires puisqu’il s’agit d’échanges officiels entre les notaires des parties, soit pour fixer des dates de rendez-vous de signature de l’acte, soit pour communiquer des documents nécessaires à la régularisation de l’acte.
En effet, des correspondances entre les notaires des parties peuvent, le cas échéant, permettre d’établir l’accord des parties pour proroger le délai de réitération de la vente au-delà de la date initialement prévue (3e Civ., 12 janvier 2010, pourvoi n° 09-11.419).
Au cas présent, la société Kimpi a extrait des échanges de mail produits en pièce n° 4 un seul extrait, en pièce n° 24, dont la teneur est la suivante :
– courriel du 25 janvier 2024 du notaire de la société Kimpi au notaire de la société Louvre capital :
« Ma chère consoeur,
Ma cliente souhaite que la signature de l’acte de vente intervienne impérativement sur le mois de janvier.
Pourrions nous prévoir une signature avant la fin de ce mois et au plus tard mercredi 31 janvier ? »
– courriel en réponse du même jour du notaire de la société Louvre capital au notaire de la société Kimpi :
« Mon client m’a confirmé à l’instant son souhait de réitérer dès que possible. Malheureusement compte tenu de différents reports intervenus dans ce dossier, le notaire du financement exige maintenant un dossier complet et un certain délai avant de débloquer les fonds (lesquels ont été appelés à plusieurs reprises puis restitués à la banque). Dans ces conditions, il ne nous est pas possible de nous engager pour une signature au 31 janvier. Toutefois afin de rassurer les parties, nous vous proposons de bloquer dès à présent une date de signature le 5 février à 14 heures, dans la mesure où nous sommes tout à fait convaincus que vous pourrez obtenir les pièces manquantes dans un délai suffisant afin de nous permettre de débloquer les fonds pour cette date (le notaire de banque exige un minimum de six ouvrés) ».
Cet échange ne révélant aucune information couverte par le secret professionnel, la pièce n° 24 ne sera pas écartée des débats, pas plus que les pièces n° 20 et 21. En revanche, la pièce n° 4, plus étoffée et dont la production pourrait porter atteinte au secret professionnel du notaire, sera écartée des débats.
Sur la demande de provision
Aux termes de l’article 835, alinéa 2, du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire, dans les cas où l’existence de l’obligation n’est pas sérieusement contestable, peut accorder une provision au créancier ou ordonner l’exécution de l’obligation même s’il s’agit d’une obligation de faire.
Au cas présent, il ressort des pièces produites et des explications des parties que, par acte notarié du 12 septembre 2022 reçu par Maître [L], une promesse unilatérale de vente a été signée entre la société Kimpi, promettant, et la société Louvre capital, bénéficiaire, portant sur le lot n°1 d’un immeuble situé [Adresse 3] et [Adresse 7] à [Localité 9] pour un prix de vente de 3.450.000 euros.
Une indemnité d’immobilisation d’un montant total de 345.000 euros était prévue, dont 100.000 euros ont été versés par la société Louvre capital à la signature de la promesse, séquestrés entre les mains de Maître [I].
La promesse a, par ailleurs, été consentie sous les conditions suspensives suivantes :
– que le total des charges hypothécaires et des créances garanties par la loi n’excède pas le prix de vente payable comptant ou que le promettant produise l’accord des créanciers pour apurer ce passif amiablement ;
– que des travaux de structure soient réalisés pour le 28 février 2023 au plus tard.
L’ensemble des conditions suspensives n’ayant pas été levées dans le délai prévu, la promesse de vente a fait l’objet de deux avenants en date des 18 avril et 29 septembre 2023, le délai de réalisation des conditions suspensives étant prorogé au 31 octobre 2023.
L’article 25.3 c) de la promesse de vente stipule que :
« Toutefois, dans cette même hypothèse de non réalisation de la vente promise, la somme ci-dessus versée sera intégralement restituée au Bénéficiaire s’il se prévalait de l’un des cas suivants :
– Si l’une au moins des conditions suspensives stipulées aux présentes venait à défaillir selon les modalités et délais prévus au présent acte ; […]
– Et enfin si la non réalisation de la vente promise était imputable au seul Promettant ».
La société Louvre capital soutient que l’obligation de restitution de l’indemnité séquestrée n’est pas sérieusement contestable dès lors qu’au 31 octobre 2023, la promesse de vente est devenue caduque en l’absence de levée des conditions suspensives par la société Kimpi.
Elle expose que, la société Kimpi refusant d’instruire le séquestre aux fins de mainlevée de l’indemnité séquestrée alors même que les conditions suspensives n’ont pas été levées au terme de la promesse, elle est fondée à solliciter la condamnation à titre provisionnel de celle-ci à lui verser le montant de cette indemnité.
Cependant, il existe une contestation sérieuse sur la caducité de la promesse de vente au 31 octobre 2023 et, par suite, sur l’obligation de restitution de la somme de 100.000 euros à la société Louvre capital, dès lors qu’il résulte des échanges entre les notaires que cette dernière a souhaité poursuivre la vente au-delà de la date du 31 octobre 2023 et a proposé une date de signature au 5 février 2024, date à laquelle les conditions suspensives auraient été levées.
En effet, par courriel du 25 janvier 2024, le notaire de la société Kimpi écrivait : « Ma cliente souhaite que la signature de l’acte de vente intervienne impérativement sur le mois de janvier.
Pourrions-nous prévoir une signature avant la fin de ce mois et au plus tard mercredi 31 janvier ? »
Et le notaire de la société Louvre capital répondait : « Mon client m’a confirmé à l’instant son souhait de réitérer dès que possible. Malheureusement compte tenu de différents reports intervenus dans ce dossier, le notaire du financement exige maintenant un dossier complet et un certain délai avant de débloquer les fonds (lesquels ont été appelés à plusieurs reprises puis restitués à la banque). Dans ces conditions, il ne nous est pas possible de nous engager pour une signature au 31 janvier. Toutefois afin de rassurer les parties, nous vous proposons de bloquer dès à présent une date de signature le 5 février à 14 heures, dans la mesure où nous sommes tout à fait convaincus que vous pourrez obtenir les pièces manquantes dans un délai suffisant afin de nous permettre de débloquer les fonds pour cette date (le notaire de banque exige un minimum de six ouvrés) » (pièce n° 24 de la défenderesse).
Il apparaît ainsi que les parties ont continué à échanger et à oeuvrer, au-delà du terme du 31 octobre 2023, pour permettre la réalisation de la vente, de sorte qu’il est nécessaire de procéder à une interprétation de leur volonté s’agissant de la prorogation tacite éventuelle du terme pour la réalisation de l’acte de vente et la levée des conditions suspensives, interprétation qui excède les pouvoirs du juge des référés.
L’obligation de la société Kimpi de restitution de l’indemnité d’immobilisation séquestrée est donc sérieusement contestable et la demande de provision de 100.000 euros sera rejetée.
Sur la demande reconventionnelle en paiement de la somme de 345.000 euros formée par la société Kimpi
La société Kimpi fait valoir qu’à la date prévue pour la signature de l’acte authentique, reportée par les parties en dernier lieu au 5 février 2024, toutes les conditions suspensives étaient levées, seules quelques pièces accessoires restant à transmettre pour la régularisation de l’acte notarié, de sorte que rien ne s’opposait à la signature de l’acte authentique.
Elle expose que son notaire a fait sommation à la société Louvre capital de se présenter à la signature de l’acte de vente et que c’est cette dernière qui a été défaillante dans ses engagements.
La promesse signée entre les parties stipule aux articles 17 et 25.3 b) :
« 17. Carence
En l’absence de levée d’option ou de signature de l’acte de vente dans le délai
Au cas où le Bénéficiaire n’aurait ni levé l’option ni signé l’acte de vente à l’intérieur du délai de réalisation, il sera de plein droit déchu du bénéfice de la promesse au terme dudit délai de réalisation sans qu’il soit besoin d’une mise en demeure de la part du Promettant, qui disposera alors librement du Bien nonobstant toute manifestation ultérieure de la volonté du Bénéficiaire de l’acquérir. »
« 25.3. Sort de ce versement
b) en cas de non réalisation de la vente promise selon les modalités et délais prévus au présent acte, la somme ci-dessus versée restera acquise au Promettant à titre d’indemnité forfaitaire pour l’immobilisation entre ses mains de l’immeuble formant l’objet de la présente promesse de vente pendant la durée de celle-ci ».
La société Kimpi se fonde sur ces dispositions pour solliciter la condamnation de la société Louvre capital à lui payer une provision de 345.000 euros au titre de l’indemnité d’immobilisation.
Cependant, au même titre que l’obligation de la société Kimpi est sérieusement contestable, celle de la société Louvre capital l’est également, le litige, qui implique l’interprétation de la volonté des parties de proroger ou non tacitement le terme fixé par écrit pour la promesse de vente, relevant du juge du fond et excédant les pouvoirs du juge des référés.
Il n’y a donc pas lieu à référé.
Sur les frais et dépens
Les demandes principales et reconventionnelles étant rejetées, aucune partie n’est partie perdante au sens de l’article 696 du code de procédure civile, de sorte que chacune d’elles conservera la charge de ses propres dépens et de ses frais irrépétibles, la demande formée par Maître [I], notaire, et la société [S] & associés, notaires, sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile étant également rejetée.
Statuant publiquement, par mise à disposition au greffe, par ordonnance de référé contradictoire et en premier ressort,
Ecartons des débats la pièce n° 4 produite par la société Kimpi ;
Disons n’y avoir lieu d’écarter des débats les pièces n° 20, 21 et 24 produites par la société Kimpi ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur les demandes principales et reconventionnelles formées par les parties ;
Laissons à chaque partie la charge des dépens par elle exposés à l’occasion de la présente instance ;
Rejetons les demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Fait à Paris le 8 janvier 2025.
Le Greffier, Le Président,
Arnaud FUZAT Rachel LE COTTY
Laisser un commentaire