Conditions de recevabilité de l’appel et impact sur le droit d’accès à la justice

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Conditions de recevabilité de l’appel et impact sur le droit d’accès à la justice

L’Essentiel : Le 27 septembre 2023, le conseil de prud’hommes de Montmorency a jugé le licenciement de Mme [T] comme fondé sur un motif réel et sérieux, déboutant ainsi toutes ses prétentions. En réponse, Mme [T] a interjeté appel le 14 novembre 2023. Cependant, le 20 juin 2024, la cour d’appel a constaté la caducité de sa déclaration d’appel, faute de demande d’infirmation du jugement. Mme [T] a contesté cette décision, arguant d’une interprétation trop formaliste des règles de procédure. La cour a confirmé la caducité, soulignant l’importance de mentionner explicitement une demande d’infirmation dans les conclusions.

Jugement du Conseil de Prud’hommes

Le 27 septembre 2023, le conseil de prud’hommes de Montmorency a rendu un jugement concernant le licenciement de Mme [T]. Il a déclaré que ce licenciement était fondé sur un motif réel et sérieux, a débouté Mme [T] de toutes ses prétentions, ainsi que la société Euro techno com ETC de sa demande reconventionnelle. Les parties ont été laissées à la charge de leurs propres dépens.

Interjection d’Appel

Mme [T] a interjeté appel de ce jugement le 14 novembre 2023, en adressant une déclaration au greffe de la cour d’appel de Versailles.

Ordonnance de Caducité

Le 20 juin 2024, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel a constaté la caducité de la déclaration d’appel de Mme [T]. Il a également décidé qu’il n’y avait pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et a condamné Mme [T] aux dépens d’appel.

Motifs de l’Ordonnance

L’ordonnance a précisé que l’appel doit comporter une demande d’infirmation ou d’annulation du jugement contesté. En l’absence de cette demande dans les conclusions de l’appelant, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement. Les conclusions de Mme [T] remises le 13 février 2024 ne contenaient pas de telles demandes, entraînant ainsi la caducité de son appel.

Demande de Déféré

Par requête du 26 juin 2024, Mme [T] a demandé à la cour d’infirmer l’ordonnance du 20 juin 2024 et de déclarer sa déclaration d’appel valide. Elle a soutenu que la déclaration d’appel fixe l’objet du litige et que les conclusions formalisent les prétentions, arguant que les premiers juges avaient fait une interprétation trop formaliste des règles de procédure.

Réponse de la Société Euro Techno Com

La société Euro Techno Com a demandé la confirmation de l’ordonnance du 20 juin 2024, en soulignant que les conclusions de Mme [T] ne contenaient pas de demande d’infirmation du jugement. Elle a fait référence à la jurisprudence selon laquelle une telle demande est nécessaire pour éviter la caducité de l’appel.

Motifs de la Cour d’Appel

La cour a confirmé que l’appelant doit mentionner dans ses conclusions une demande d’infirmation du jugement. Étant donné que les conclusions de Mme [T] ne contenaient pas cette demande, la cour a jugé que la caducité de la déclaration d’appel était justifiée. La cour a également noté que l’application de cette règle ne portait pas atteinte au droit à un procès équitable.

Décision Finale

La cour a confirmé l’ordonnance de la mise en état en toutes ses dispositions, déboutant les parties de leurs demandes supplémentaires et condamnant Mme [T] aux dépens du déféré.

Q/R juridiques soulevées :

Quel est le fondement juridique de la caducité de la déclaration d’appel ?

La caducité de la déclaration d’appel est fondée sur les articles 542, 908 et 954 du code de procédure civile.

L’article 542 précise que l’appel a pour but de critiquer un jugement rendu par une juridiction du premier degré, en vue de sa réformation ou de son annulation par la cour d’appel.

L’article 908 impose à l’appelant de conclure dans un délai déterminé, et l’article 954, en son deuxième alinéa, stipule que le dispositif des conclusions de l’appelant doit comporter une prétention sollicitant expressément l’infirmation ou l’annulation du jugement frappé d’appel.

Ainsi, si l’appelant ne respecte pas cette obligation, la déclaration d’appel est déclarée caduque.

En effet, l’article 954, alinéa 3, précise que la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement si les prétentions énoncées dans le dispositif ne comportent pas une demande d’infirmation.

Cette règle vise à garantir la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice, sans porter atteinte au droit d’accès au juge d’appel.

Quelles sont les conséquences de la non-demande d’infirmation dans les conclusions d’appel ?

Les conséquences de la non-demande d’infirmation dans les conclusions d’appel sont clairement établies par les articles 542 et 954 du code de procédure civile.

Lorsque l’appelant ne demande pas dans le dispositif de ses conclusions l’infirmation ou l’annulation du jugement, la cour d’appel est contrainte de confirmer le jugement.

L’article 954, alinéa 3, précise que la cour ne peut statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif, ce qui signifie qu’une omission de cette nature entraîne la caducité de la déclaration d’appel.

De plus, l’article 914 permet à la cour de relever d’office la caducité de l’appel si les conditions sont réunies.

Dans le cas présent, la cour a constaté que les conclusions de Mme [T] ne contenaient pas de demande d’infirmation, ce qui a conduit à la confirmation de la caducité de sa déclaration d’appel.

Comment la jurisprudence a-t-elle évolué concernant la demande d’infirmation dans les conclusions d’appel ?

La jurisprudence a évolué pour affirmer que les premières conclusions de l’appelant doivent expressément mentionner une demande d’infirmation du jugement attaqué.

Cette évolution a été marquée par un arrêt de la Cour de cassation du 17 septembre 2020, qui a établi que l’absence d’une telle demande dans le dispositif des conclusions entraîne la caducité de la déclaration d’appel.

Cette interprétation a été renforcée par les articles 542 et 954 du code de procédure civile, qui imposent cette exigence.

Il est important de noter que cette règle s’applique aux déclarations d’appel postérieures à cette date, ce qui inclut le cas de Mme [T].

Ainsi, même si l’appelant peut formuler plusieurs prétentions, il doit toujours inclure une demande d’infirmation pour que son appel soit recevable.

Cette exigence vise à assurer une procédure efficace et à éviter des abus de la part des appelants.

Quels sont les droits de l’appelant en matière de régularisation des conclusions ?

L’appelant a des droits en matière de régularisation des conclusions, mais ceux-ci sont limités par les dispositions des articles 908 et 954 du code de procédure civile.

L’article 908 stipule que l’appelant doit conclure dans un délai de trois mois à compter de la déclaration d’appel.

Cependant, la régularisation des conclusions ne peut pas remédier à une caducité déjà produite en raison de l’absence d’une demande d’infirmation dans le dispositif.

L’article 910-3 permet une régularisation, mais uniquement dans les conditions qu’il prévoit, ce qui n’a pas été invoqué dans le cas de Mme [T].

Ainsi, même si l’appelant peut corriger des erreurs ou omissions, cela ne peut pas affecter la caducité de la déclaration d’appel si celle-ci a déjà été constatée.

Il est donc crucial pour l’appelant de respecter les exigences procédurales dès le départ pour éviter de perdre son droit d’appel.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80A

Chambre sociale 4-4

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 08 JANVIER 2025

N° RG 24/01911

N° Portalis DBV3-V-B7I-WTED

AFFAIRE :

[L] [T]

C/

Société EURO TECHNO COM ETC

Décision déférée à la cour : Ordonnance rendue le 20 juin 2024 par le Cour d’Appel de VERSAILLES

N° Chambre : 4

N° Section : 1

N° RG : 23/03209

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Oriane DONTOT

Me Christophe MEYNIEL

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE HUIT JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Madame [L] [T]

née le 22 juin 1978 à [Localité 5]

de nationalité française

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF & TEYTAUD SALEH, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617

Plaidant : Me Marie-Yannick AHTI-VIARD de la SELAS AHTI-VIARD, avocat au barreau de VAL D’OISE

APPELANTE

DEMANDERESSE À LA REQUÊTE EN DÉFÉRÉ

****************

Société EURO TECHNO COM ETC

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentant : Me Christophe MEYNIEL de la SELARL Tréville Société d’Avocats, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B440

INTIMEE

DEFENDERESSE À LA REQUÊTE EN DÉFÉRÉ

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 6 décembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Laurent BABY, Conseiller chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Aurélie PRACHE, Présidente,

Monsieur Laurent BABY, Conseiller,

Madame Nathalie GAUTIER, Conseillère,

Greffier lors des débats : Madame Dorothée MARCINEK

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE

Par jugement du 27 septembre 2023, notifié aux parties le 16 octobre 2023, le conseil de prud’hommes de Montmorency (section encadrement) a :

. dit que le licenciement de Mme [T] est fondé sur un motif réel et sérieux ;

. débouté Mme [T] de l’intégralité de ses prétentions ;

. débouté la société Euro techno com ETC de sa demande reconventionnelle ;

. laissé à chacune des parties la charge de ses propres dépens éventuels.

Par déclaration adressée au greffe de la cour d’appel de Versailles le 14 novembre 2023, Mme [T] a interjeté appel de ce jugement.

Par ordonnance du 20 juin 2024, le conseiller de la mise en état de la cour d’appel de Versailles a :

. constaté la caducité de la déclaration d’appel du 14 novembre 2023 ;

. dit n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

. condamné Mme [T] aux dépens d’appel.

. rappelé que la présente ordonnance peut faire l’objet d’un déféré à la cour dans les quinze jours de sa date.

Les motifs de l’ordonnance sont les suivants :

« L’article 542 du code de procédure civile prévoit que l’appel tend, par la critique du jugement rendu par une juridiction du premier degré, à sa réformation ou à son annulation par la cour d’appel.

Il résulte de ce texte et des articles 908 et 954 du code de procédure civile, que l’objet du litige devant la cour d’appel étant déterminé par les prétentions des parties, le respect de l’obligation faite à l’appelant de conclure conformément à l’article 908 s’apprécie nécessairement en considération des prescriptions de l’article 954.

Il résulte de ce dernier texte, en son deuxième alinéa, que le dispositif des conclusions de l’appelant

remises dans le délai de l’article 908 doit comporter une prétention sollicitant expressément l’infirmation ou l’annulation du jugement frappé d’appel.

A défaut, en application de l’article 908, la déclaration d’appel est caduque ou, conformément à l’article 954, alinéa 3, la cour d’appel ne statuant que sur les prétentions énoncées au dispositif, ne peut que confirmer le jugement.

Ainsi, l’appelant doit, dans le dispositif de ses conclusions, mentionner qu’il demande l’infirmation ou la réformation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l’anéantissement, ou l’annulation du jugement. En cas de non-respect de cette règle, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue de relever d’office la caducité de l’appel. Lorsque l’incident est soulevé par une partie, ou relevé d’office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant la cour d’appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d’appel si les conditions en sont réunies.

Ces règles, qui encadrent les conditions d’exercice du droit d’appel, poursuivent un but légitime au sens de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, en l’occurrence la célérité de la procédure et une bonne administration de la justice, ne portent pas une atteinte disproportionnée au droit d’accès au juge d’appel, un rapport raisonnable de proportionnalité existant entre les moyens employés et le but visé.

Elles sont, en outre, prévisibles. La règle, affirmée pour la première fois par un arrêt publié (2e Civ.,17 septembre 2020, pourvoi n° 18-23.626), était prévisible pour les parties à la date à laquelle il a été relevé appel.

La caducité de la déclaration d’appel n’est pas encourue lorsque l’appelant, sans se borner, dans le dispositif de ses conclusions, à demander à la cour d’annuler, infirmer ou réformer la décision entreprise, formule plusieurs prétentions, dès lors qu’il n’est pas tenu de reprendre, dans ce dispositif, les chefs de dispositif du jugement dont il demande l’infirmation.

Au cas particulier, les seules conclusions d’appelant remises au greffe dans le délai de l’article 908 susvisé l’ont été le 13 février 2024. Ces conclusions mentionnent, à titre de dispositif :

« Madame [T] sollicite de la Cour d’appel de céans qu’elle :

‘ Fixe le salaire de référence à la somme de 3 650 euros

A titre principal

‘ Juge que l’employeur a violé la liberté d’expression, liberté fondamentale de Madame [T] et que cette dernière n’a pas abusé de sa liberté d’expression en dénonçant une opération qu’elle a estimé frauduleuse entre l’entreprise ETC et ETC Maroc

A défaut,

‘ Juge que Madame [T] a fait l’objet de harcèlement moral en raison du retrait de ses fonctions et/ou d’une mise à l’écart et du défaut d’aménagement de son poste conformément aux préconisations du médecin du travail

En conséquence

‘ Juge le licenciement dont a fait l’objet Madame [T] le 5 mai 2021 nul,

‘ Condamne la société ETC à payer à Madame [T] la somme de 87 600 euros correspondant à 24 mois de salaire

A titre subsidiaire

‘ Juge le licenciement dont a fait l’objet Madame [T] sans cause réelle et sérieuse notamment en raison de l’absence de caractérisation de l’insuffisance professionnelle reprochée à la salariée

En conséquence

‘ Écarte le barème Macron qui ne permet pas de réparer l’entier préjudice subi par la salariée au regarde son ancienneté de 2 ans et 10 mois

‘ Condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 87 600 euros correspondant à 24 mois de salaire

En tout état de cause

‘ A défaut de juger le licenciement nul sur le fondement du harcèlement moral, de condamner la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 21 900 euros correspondant à 6 mois de salaire à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral à titre de préjudice distinct condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 21 900 euros correspondant à six mois de salaire pour discrimination en raison de son état de santé/ son handicap à titre de préjudice distinct

‘ Condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 21 900 euros correspondant à six mois de salaire pour exécution déloyale du contrat de travail à titre de préjudice distinct

‘ Condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 21 900 euros correspondant à six mois de salaire pour violation de l’obligation de sécurité de résultat à titre de préjudice distinct

‘ Condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 3 650 euros correspondant à un mois de salaire pour rupture brutale et vexatoire du contrat de travail à titre de préjudice distinct

‘ Condamne la société ETC à verser à Madame [T] la somme de 50 000 euros correspondant à treize mois et demi de salaire pour perte de chance d’obtenir une prime à l’occasion de l’entrée du nouvel actionnaire et/ou dommages et intérêts pour inégalités de traitement

‘ Condamne la société ETC à payer à Madame [T] la somme de 5 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

‘ Ordonne la capitalisation des intérêts

‘ Condamne la société ETC aux entiers dépens »

Ce dispositif est donc exempt de toute demande d’infirmation ou de réformation des chefs du dispositif du jugement dont l’appelant recherche l’anéantissement, ou d’annulation du jugement.

Il convient donc de constater la caducité de la déclaration d’appel.

Le moyen tiré d’une régularisation des conclusions à tout moment avant que le juge statue est inopérant quant au respect de l’obligation faite à l’appelant de conclure conformément à l’article 908 dès lors que cette obligation s’apprécie nécessairement en considération des prescriptions de l’article 954.

En toute hypothèse, la caducité produit ses effets dès l’expiration du délai prévu par l’article 908 et

ne saurait être remise en cause par une régularisation postérieure quelle qu’elle soit, sauf à l’écarter

dans les conditions prévues par l’article 910-3 qui n’est pas invoqué. »

Par requête aux fins de déféré du 26 juin 2024, à laquelle il est expressément renvoyé pour l’énoncé complet des moyens, Mme [T] demande à la cour de :

. faire droit au présent déféré ;

. infirmer l’ordonnance du 20 juin 2024 ayant jugé l’appel de Mme [T] caduc ;

Statuant à nouveau,

. débouter la société Euro techno com de son incident et le dire mal fondé ;

. dire n’y avoir lieu à prononcer la caducité de la déclaration d’appel du 14 novembre 2023 ;

. dire la cour de céans valablement saisie au fond et fixer un calendrier de procédure ;

. condamner la société Euro techno com à payer à Mme [T] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

. dire que les dépens du présent déféré suivront ceux de l’instance au fond.

Elle soutient que c’est la déclaration d’appel qui fixe l’objet du litige et que ce sont ensuite les conclusions qui formalisent les prétentions.

Elle fait valoir que le premier juge a par ailleurs fait une interprétation trop formaliste de l’article 954 du code de procédure civile, ajoutant que cet article ne lui impose nullement d’indiquer l’objet de l’appel et donc la demande d’infirmation et qu’à la vérité, ce n’est qu’à la faveur d’une construction purement prétorienne que la Cour de cassation a cru pouvoir sanctionner les appelants qui ne mentionneraient pas l’objet de l’appel dans le dispositif des conclusions, d’une caducité de leur acte d’appel. Elle précise d’ailleurs que le texte de l’article 954 du code de procédure civile, dans sa rédaction en vigueur depuis le 1er septembre 2024, a été modifié dans le sens de cette jurisprudence, ce qui, selon elle, montre encore que dans sa rédaction applicable avant cette date, cette obligation n’existait pas et ne saurait donc être sanctionnée par la caducité de la déclaration d’appel.

Elle ajoute en outre que les premiers juges l’ont déboutée de l’ensemble de ses demandes de sorte qu’en reformulant lesdites demandes devant le cour d’appel de Versailles et en la saisissant donc à cet effet, c’est qu’implicitement et nécessairement, elle demandait l’infirmation de la décision.

Enfin, elle expose que son erreur ou son omission, peut être régularisée même après le délai de trois mois prévu par l’article 908 du code de procédure civile et que l’application des règles de la procédure d’appel ne doit pas faire disparaître le respect des principes fondateurs du procès civil, à savoir le droit d’être entendu et jugé, le droit au double degré de juridiction et le droit à un procès équitable consacré par l’article 6-1 de la Convention européenne des droits de l’homme.

Par conclusions remises à la cour le 1er juillet 2024, le défendeur au déféré la société Euro techno com, demande à la cour de :

. confirmer l’ordonnance du conseiller de la mise en état du 20 juin 2024 en toutes ses dispositions, sauf à infirmer celle disant qu’il n’y a lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code du procédure civile

. condamner Mme [T] à payer à la société la somme de 2 500 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

La société Euro Techno Com rappelle que la salariée a relevé appel de la décision critiquée le 14 novembre 2023 et que ses premières conclusions déposées dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile le 13 février 2024 ne demandaient pas l’infirmation du jugement. Elle se fonde sur la jurisprudence de la Cour de cassation, constante depuis 2017, selon laquelle les premières conclusions de l’appelant doivent mentionner, dans leur dispositif, une demande d’infirmation, à défaut de quoi sa déclaration d’appel est caduque.

MOTIFS

Il résulte des articles 542 et 954 du code de procédure civile que lorsque l’appelant ne demande dans le dispositif de ses conclusions ni l’infirmation ni l’annulation du jugement, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement. Cependant, l’application immédiate de cette règle de procédure, qui résulte de l’interprétation nouvelle d’une disposition au regard de la réforme de la procédure d’appel avec représentation obligatoire issue du décret n° 2017-891 du 6 mai 2017 et qui n’a jamais été affirmée par la cour de cassation dans un arrêt publié dans les instances introduites par une déclaration d’ appel antérieure au 17 septembre 2020, aboutirait à priver l’appelant du droit à un procès équitable au sens de l’article 6, § 1, de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales.

Il résulte aussi des articles 542 et 954 du code de procédure civile que l’appelant doit dans le dispositif de ses conclusions mentionner qu’il demande l’infirmation des chefs du dispositif du jugement dont il recherche l’anéantissement, ou l’annulation du jugement et qu’en cas de non-respect de cette règle, la cour d’appel ne peut que confirmer le jugement, sauf la faculté qui lui est reconnue, à l’article 914 du code de procédure civile, de relever d’office la caducité de l’appel. Lorsque l’incident est soulevé par une partie, ou relevé d’office par le conseiller de la mise en état, ce dernier, ou le cas échéant la cour d’appel statuant sur déféré, prononce la caducité de la déclaration d’appel si les conditions en sont réunies (Civ.2, 4 novembre 2021, pourvoi n°20-15.757, publié).

En l’espèce, il n’est pas discuté que dans le dispositif de ses premières conclusions, l’appelant ne demandait pas l’infirmation du jugement attaqué. Sa déclaration d’appel étant datée du 14 novembre 2023, c’est-à-dire postérieurement au 17 septembre 2020, il y a lieu d’appliquer la règle qui résulte d’une nouvelle interprétation des règles procédurales susvisées et dont l’application à l’espèce ne prive pas le salarié de son droit à un procès équitable.

Il convient donc d’adopter les motifs du conseiller de la mise en état qui a constaté que l’appelant n’avait, dans ses premières conclusions remises au greffe dans le délai de l’article 908 du code de procédure civile, pas demandé l’infirmation du jugement, la cour ajoutant que l’appelant n’a pas régularisé de nouvelles conclusions comportant une demande d’infirmation dans ce délai.

L’ordonnance déférée sera donc confirmée en toutes ses dispositions, y compris en ce qu’elle déboute l’employeur de sa demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile compte tenu de la situation respective des parties.

Les dépens de l’appel seront mis à la charge de la salariée.

PAR CES MOTIFS:

Statuant publiquement et par arrêt contradictoire, la cour :

CONFIRME l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions,

Y AJOUTANT,

DÉBOUTE les parties de leurs demandes autres, plus amples, ou contraires,

DIT n’y avoir lieu à condamnations sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

CONDAMNE Mme [T] aux dépens du déféré.

. prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

. signé par Madame Aurélie Prache, Présidente et par Madame Dorothée Marcinek, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


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