Type de juridiction : Cour d’appel
Juridiction : Cour d’appel de Paris
Thématique : Indemnisation de la détention provisoire : enjeux et réparations à l’égard des préjudices subis.
→ RésuméContexte de la requêteMonsieur [B] [Z], né en 2001 à [Localité 6], a été mis en examen pour plusieurs chefs d’accusation, dont viol en réunion et séquestration, le 13 mars 2020. Il a été placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de [Localité 7]. Après une période de détention, il a été remis en liberté sous contrôle judiciaire le 29 novembre 2021. Le 5 juillet 2022, un non-lieu partiel a été prononcé, suivi d’une mise en accusation pour violences en réunion. Décision de la cour d’assisesLe 24 octobre 2023, la cour d’assises de Seine-et-Marne a acquitté M. [Z] du chef de viol en réunion, mais l’a condamné à un an d’emprisonnement pour violences en réunion. Cette décision est devenue définitive le 10 janvier 2024, date à laquelle M. [Z] a déposé une requête pour obtenir une indemnisation de sa détention provisoire. Demandes d’indemnisationDans sa requête du 8 février 2024, M. [Z] a sollicité une indemnisation pour préjudices moral et matériel, incluant 75 600 euros pour le préjudice moral, 15 000 euros pour la perte de chance de poursuivre ses études, 2 460 euros pour les frais de défense, et 2 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile. Conclusions des partiesL’agent judiciaire de l’État a proposé des montants inférieurs pour les préjudices, suggérant 5 500 euros pour le préjudice matériel et 17 800 euros pour le préjudice moral, tout en demandant le rejet du surplus des demandes. Le Ministère Public a conclu à la recevabilité de la requête et à la réparation des préjudices dans les conditions indiquées. Recevabilité de la requêteLa requête de M. [Z] a été jugée recevable, car elle a été déposée dans le délai de six mois suivant la décision d’acquittement. La durée de détention reconnue est de 261 jours, après déduction des périodes de détention justifiées par la condamnation. Évaluation du préjudice moralM. [Z] a fait état de l’impact psychologique de sa détention, notamment en raison de son jeune âge, de son isolement familial et des conditions de détention difficiles. L’agent judiciaire de l’État a proposé une indemnisation de 17 800 euros, tandis que le Ministère Public a reconnu l’importance du choc carcéral. Finalement, il a été décidé d’allouer 23 000 euros pour le préjudice moral. Évaluation du préjudice matérielConcernant la perte de chance de poursuivre ses études, M. [Z] a été reconnu comme un étudiant assidu dont la détention a entravé sa scolarité. Une somme de 5 000 euros a été allouée pour ce préjudice. Pour les frais de défense, 1 500 euros ont été retenus, correspondant aux frais directement liés à la détention. En outre, une somme de 2 000 euros a été accordée sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Conclusion de la décisionLa requête de M. [B] [Z] a été déclarée recevable, et il a été alloué un total de 31 500 euros pour ses préjudices moral et matériel, tandis que le surplus de ses demandes a été rejeté. Les dépens ont été laissés à la charge de l’État. La décision a été rendue le 6 janvier 2025. |
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Chambre 1-5DP
RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES
DÉCISION DU 06 Janvier 2025
(n° , 6 pages)
N°de répertoire général : N° RG 24/03441 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CI6I2
Décision contradictoire en premier ressort ;
Nous, Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, à la cour d’appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Michelle NOMO, Greffière Stagiaire, lors des débats et de la mise à disposition avons rendu la décision suivante :
Statuant sur la requête déposée le 08 Février 2024 par Monsieur [B] [Z]
né le [Date naissance 1] 2001 à [Localité 6], demeurant [Adresse 2] ;
Non comparant
Représenté par Maître Gérard MATTEI, avocat au barreau de Paris
Vu les pièces jointes à cette requête ;
Vu les conclusions de l’Agent Judiciaire de l’Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l’audience fixée au 21 Octobre 2024 ;
Entendu Maître Gérard MATTEI représentant Monsieur [B] [Z],
Entendu Maître Julien DESPEISSE, avocat au barreau de Paris, substituant Maître Colin MAURICE, avocat au barreau de Paris, représentant l’Agent Judiciaire de l’Etat,
Entendue Madame Chantal BERGER, Magistrate Honoraire,
Les débats ayant eu lieu en audience publique, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;
Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R.26 à R40-7 du Code de Procédure Pénale ;
* * *
M. [B] [Z], né le [Date naissance 1] 2001, de nationalité algérienne, a été mis en examen des chefs de viol en réunion, séquestration avec libération volontaire avant le 7e jour, vol en réunion et de refus de remettre la convention secrète de déchiffrement d’un moyen de cryptologie le 13 mars 2020 par un juge d’instruction du tribunal judiciaire de Meaux. Par ordonnance du juge des libertés et de la détention de la même juridiction, il a été placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de [Localité 7] le même jour.
Par ordonnance du 29 novembre 2021, le magistrat instructeur a remis en liberté M. [Z] et l’a placé sous contrôle judiciaire.
Par nouvelle ordonnance du 05 juillet 2022, le juge d’instruction a prononcé un non-lieu partiel, une requalification et une mise en accusation du requérant devant la cour d’assises des mineurs de Seine-et-Marne des chefs de viol en réunion et de violences en réunion.
Par arrêt du 24 octobre 2023, la cour d’assises de Seine-et-Marne a acquitté M. [Z] du chef de viol en réunion et l’a condamné du chef de violences en en réunion ayant entraîné une ITT n’excédant pas 8 jours à la peine d’un an d’emprisonnement. Cette décision est devenue définitive à son égard comme en atteste le certificat de non appel du 10 janvier 2024.
Le 08 février 2024, M. [Z] a adressé une requête au premier président de la cour d’appel de Paris en vue d’être indemnisé de sa détention provisoire en application de l’article 149 du code de procédure pénale et sollicite dans celle-ci, de :
– Déclarer recevable et bien fondée la demande d’indemnisation ;
– Allouer à M. [Z] en réparation du préjudice moral la somme de 75 600 euros ;
– Allouer à M. [Z] en réparation de son préjudice matériel au titre de la perte de chance de poursuivre sa scolarité la somme de 15 000 euros ;
– Allouer à Mme [Z] en réparation de son préjudice matériel au titre de ses frais de défense la somme de 2 460 euros ;
– Allouer à M. [Z] la somme de 2 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Par conclusions responsives et récapitulatives déposées le 10 octobre 2024 et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoiries du 04 novembre 2024, M. [Z] a maintenu ses demandes.
Dans ses dernières conclusions en défense, notifiées par RPVA et déposées le 17 octobre 2024, développées oralement, l’agent judiciaire de l’Etat demande au premier président de :
– Allouer à M. [Z] la somme de 5 500 euros en réparation de son préjudice matériel ;
– Allouer à M. [Z] la somme de 17 800 euros en réparation de son préjudice moral ;
– Rejeter le surplus des demandes ;
– Réduire à de plus justes proportions la demande formulée au titre du préjudice moral qui ne saurait excéder la somme de 25000 euros ;
– Statuer ce que de droit s’agissant de la demande qui ne saurait excéder la somme de 1 000 euros au titre de l’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile.
Le Ministère Public, dans ses dernières conclusions notifiées le 06 août 2024 et reprises oralement à l’audience, conclut :
– A la recevabilité de la requête pour une détention provisoire de 261 jours ;
– A la réparation du préjudice moral dans les conditions indiquées ;
– A la réparation du préjudice matériel dans les conditions indiquées.
PAR CES MOTIFS
Déclarons la requête de M. [B] [Z] recevable ;
Lui allons les sommes suivantes :
– 23 000 euros en réparation de son préjudice moral ;
– 1 500 euros TTC au titre de ses frais de défense ;
– 5 000 euros au titre de la perte de chance de poursuivre sa scolarité ;
– 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboutons M. [B] [Z] du surplus de ses demandes ;
Laissons les dépens à la charge de l’Etat ;
Décision rendue le 06 Janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFI’RE LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ
Laisser un commentaire