Cour d’appel de Paris, 6 janvier 2025, RG n° 22/09734
Cour d’appel de Paris, 6 janvier 2025, RG n° 22/09734

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Paris

Thématique : Indemnisation de la détention provisoire : enjeux et conditions d’accès aux réparations.

Résumé

Contexte de la requête

M. [Z] [S], né en 2000, a été placé en détention provisoire le 26 mars 2022 pour des accusations de violences sur une personne dépositaire de l’autorité publique, de dégradations d’un bien public et de refus de délivrer un code de déchiffrement de son téléphone. Il a été remis en liberté sous contrôle judiciaire le 28 mars 2022, et le 9 mai 2022, il a été relaxé par le tribunal judiciaire de Bobigny.

Demande d’indemnisation

Le 31 mai 2022, M. [S] a déposé une requête auprès de la cour d’appel de Paris pour obtenir une indemnisation de sa détention provisoire, sollicitant des compensations pour préjudice matériel et moral, ainsi que des frais d’avocat. Il a demandé un total de 4 600 euros, répartis entre 1 200 euros pour les frais d’avocat, 1 000 euros pour le préjudice moral et 2 400 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Conclusions des parties

L’Agent Judiciaire de l’Etat a demandé l’irrecevabilité de la requête, tout en proposant une indemnisation limitée à 1 000 euros pour le préjudice moral et le rejet des autres demandes. Le procureur général a également conclu à l’irrecevabilité, mais a reconnu la recevabilité de la requête pour une détention de 3 jours, tout en soutenant une indemnisation pour le préjudice moral et le rejet du préjudice matériel.

Recevabilité de la requête

La cour a jugé la requête recevable, notant que M. [S] avait respecté le délai de six mois pour demander réparation après sa relaxe. La décision de relaxe était devenue définitive, et la requête contenait toutes les informations requises par le Code de procédure pénale.

Indemnisation du préjudice moral

M. [S] a fait valoir que sa détention avait été particulièrement difficile, étant donné son jeune âge et le fait qu’il s’agissait de sa première incarcération. La cour a décidé d’allouer 1 000 euros pour le préjudice moral, prenant en compte son âge et la durée de la détention.

Indemnisation du préjudice matériel

Concernant les frais d’avocat, M. [S] a demandé 1 200 euros, mais la cour a rejeté cette demande, estimant que les frais n’étaient pas justifiés comme étant exclusivement liés à la détention. En revanche, la cour a accordé 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour couvrir les frais irrépétibles engagés par M. [S].

Décision finale

La cour a statué en faveur de M. [S], lui accordant 1 000 euros pour le préjudice moral et 1 500 euros pour les frais irrépétibles, tout en rejetant le surplus de ses demandes. Les dépens de la procédure ont été laissés à la charge de l’Etat. La décision a été rendue le 6 janvier 2025.

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Chambre 1-5DP

RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES

DÉCISION DU 06 Janvier 2025

(n° , 5 pages)

N°de répertoire général : N° RG 22/09734 – N° Portalis 35L7-V-B7G-CF3AC

Décision contradictoire en premier ressort ;

Nous, Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, à la cour d’appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Victoria RENARD, Greffière, lors des débats et de [D] [M], Greffière stagiaire lors de la mise à disposition avons rendu la décision suivante :

Statuant sur la requête déposée le 31 Mai 2022 par M. [Z] [S] né le [Date naissance 1] 2000 à [Localité 4], élisant domicile chez Me Frédéric BEAUFILS – [Adresse 2] – [Localité 3] ;

non comparant

Représenté par Me Frédéric BEAUFILS, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS,

Vu les pièces jointes à cette requête ;

Vu les conclusions de l’Agent Judiciaire de l’Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;

Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l’audience fixée au 04 Novembre 2024 ;

Entendu Me Frédéric BEAUFILS représentant M. [Z] [S],

Entendu Me Anne-laure ARCHAMBAULT, avocat au barreau de PARIS, avocat représentant l’Agent Judiciaire de l’Etat,

Entendue Madame Marie-Daphnée PERRIN, avocate générale,

Les débats ayant eu lieu en audience publique, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;

Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R.26 à R40-7 du Code de Procédure Pénale ;

* * *

M. [Z] [S], né le [Date naissance 1] 2000, de nationalité française, a été traduit devant le procureur de la République près le tribunal judicaire de Bobigny selon la procédure de comparution différée le 26 mars 2022 des chefs de violences volontaires sur personne dépositaire de l’autorité publique n’ayant entraîné aucune ITT, de dégradations d’un bien public et de refus de délivrer le code de convention secrète de déchiffrement de son téléphone portable, puis placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de [Localité 5] le même jour par ordonnance du juge des libertés et de la détention de la même juridiction.

Par ordonnance du 28 mars 2022, le requérant a été remis en liberté et placé sous contrôle judiciaire.

Par jugement du 09 mai 2022, la 17e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Bobigny a relaxé M. [S] des fins de la poursuite et cette décision est définitive comme en atteste le certificat de non-appel du .30 mai 2022.

Le 31 mai 2022, M. [S] a adressé une requête au premier président de la cour d’appel de Paris en vue d’être indemnisé de sa détention provisoire, en application de l’article 149 du code de procédure pénale.

Il sollicite dans celle-ci :

– Déclarer recevable la présente requête ;

– Lui allouer les sommes suivantes :

‘ Au titre du préjudice matériel 1 200 euros au titre des fais d’avocat liés à la question de la détention

‘ Au titre du préjudice moral 1 000 euros

‘ Au titre de l’article 700 du code de procédure civile 2 400 euros.

Dans ses dernières conclusions, notifiées par RPVA et déposées le 14 août 2024, développées oralement, l’agent judiciaire de l’Etat demande au premier président de :

A titre principal

– Déclarer irrecevable la requête

A titre subsidiaire

– Limiter à de plus justes proportions qui ne sauraient pas excéder la somme de 1 000 euros l’indemnité qui sera allouée à M. [Z] [S] en réparation de son préjudice moral

– Rejeter la demande de M. [S] en réparation de son préjudice matériel

– Rejeter le surplus des demandes

– Réduire à de plus justes proportions le montant de l’indemnité octroyée en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Le procureur général a, dans ses dernières conclusions notifiées le 21 août 2024 et soutenues oralement à l’audience de plaidoiries du 04 novembre 2024, conclu :

A titre principal

– A l’irrecevabilité de la requête

A titre subsidiaire

– A la recevabilité de la requête pour une détention de 3 jours ;

– A la réparation du préjudice moral dans les conditions indiquées ;

– Au rejet de la demande de réparation du préjudice matériel.

Le requérant a eu la parole en dernier.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance contradictoire,

Déclarons recevable la requête de M. [Z] [S] pour une détention d’une durée de 3 jours ;

Allouons à M. [Z] [S] les sommes suivantes :

– 1 000 euros en réparation de son préjudice moral ;

– 1500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboutons M. [Z] [S] du surplus de ses demandes ;

Laissons les dépens de la présente procédure à la charge de l’Etat ;

Décision rendue le 06 Janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

LA GREFFI’RE LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ

 


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