Cumul de mandats et qualification du lien de subordination : enjeux et implications.

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Cumul de mandats et qualification du lien de subordination : enjeux et implications.

L’Essentiel : La société Alès Groupe, spécialisée dans les services pour le secteur cosmétique, a traversé des difficultés financières, entraînant une procédure de redressement judiciaire en juillet 2020. M. [W] [C], engagé en 1999, a occupé divers postes jusqu’à son licenciement pour motif économique en octobre 2020. Contestant son statut, il a saisi le conseil de prud’hommes pour requalifier sa relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée. Cependant, le jugement du 29 mars 2022 a débouté sa demande, affirmant l’absence de lien de subordination, décision confirmée par la cour d’appel.

Présentation de la société Alès Groupe

La société Alès Groupe est une société anonyme à directoire et conseil de surveillance, immatriculée au RCS de Paris. Elle se spécialise dans les prestations de services et conseils en gestion, administration, ingénierie financière et management, principalement pour des sociétés du secteur cosmétique. Avec plus de 700 employés en France, elle a connu des difficultés financières entraînant une procédure de redressement judiciaire.

Engagement de M. [W] [C]

M. [W] [C] a été engagé par la société [H] Groupe, successeur des Laboratoires Phytosolba, en tant qu’assistant marketing en 1999. Après une mission aux États-Unis, il a été promu attaché auprès de la direction générale en 2007, puis chef de cabinet en 2008, et enfin conseiller du président en 2009, fonction qu’il a exercée jusqu’en janvier 2021.

Procédures judiciaires et licenciement

Le tribunal de commerce de Paris a ouvert une procédure de redressement judiciaire pour Alès Groupe en juillet 2020, suivie d’un plan de cession des actifs en septembre 2020. M. [W] [C] a été convoqué à un entretien préalable au licenciement en octobre 2020, et a reçu une notification de licenciement pour motif économique. Cependant, l’AGS n’a pas versé les créances salariales demandées par M. [W] [C].

Demande de requalification de la relation contractuelle

En mai 2021, M. [W] [C] a saisi le conseil de prud’hommes d’Argenteuil pour faire requalifier sa relation contractuelle en contrat de travail à durée indéterminée et obtenir des indemnités de rupture. Le jugement du 29 mars 2022 a débouté M. [W] [C] de ses demandes, affirmant qu’il n’était pas lié par un contrat de travail avec la société [H] Groupe.

Appel et arguments des parties

M. [W] [C] a interjeté appel du jugement, demandant la reconnaissance de son contrat de travail et le paiement de diverses indemnités. La société BTSG, mandataire-liquidateur, a demandé la confirmation du jugement initial, arguant que M. [W] [C] n’avait pas établi de lien de subordination. L’AGS a également soutenu que M. [W] [C] n’était pas salarié de la société.

Critères de cumul mandat social et contrat de travail

La cour a examiné les critères nécessaires pour établir un cumul entre un mandat social et un contrat de travail, notamment l’existence de fonctions techniques distinctes, une rémunération spécifique et un lien de subordination. M. [W] [C] a été incapable de prouver qu’il remplissait ces critères, étant donné ses fonctions de dirigeant au sein de la société.

Conclusion de la cour

La cour a confirmé le jugement du conseil de prud’hommes, concluant qu’aucun des critères pour reconnaître un cumul entre mandat social et contrat de travail n’était établi. En conséquence, toutes les demandes de M. [W] [C] relatives à son statut de salarié ont été rejetées. Les dépens ont été mis à sa charge.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions nécessaires pour établir un cumul entre un mandat social et un contrat de travail ?

Pour qu’un cumul entre un mandat social et un contrat de travail soit reconnu, trois conditions doivent être réunies :

1. **Des fonctions techniques distinctes du mandat social** : Cela signifie que les tâches effectuées dans le cadre du contrat de travail doivent être différentes de celles exercées en tant que mandataire social.

2. **Une rémunération spécifique** : Le salarié doit recevoir une rémunération pour ses fonctions techniques, distincte de celle perçue pour son mandat social.

3. **Un lien de subordination** : Le salarié doit travailler sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres, de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements.

Ces critères sont précisés dans les articles L.1221-1 et suivants du Code du travail, qui stipulent que le contrat de travail implique un engagement à travailler pour le compte d’autrui, sous subordination, moyennant rémunération.

Il est important de noter que l’existence d’un contrat de travail ne dépend pas de la volonté des parties, mais des conditions de fait dans lesquelles l’activité est exercée. En l’absence d’écrit, la charge de la preuve incombe à celui qui invoque l’existence d’un contrat de travail.

Comment le lien de subordination est-il caractérisé dans le cadre d’un contrat de travail ?

Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur. Cela implique que l’employeur a le pouvoir de donner des ordres et des directives, de contrôler l’exécution du travail et de sanctionner les manquements.

L’article L.1221-1 du Code du travail précise que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte d’autrui, sous subordination.

Le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination, surtout lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail.

Il est également essentiel de noter que la qualification d’une relation entre une société et un dirigeant dépend de la capacité d’influence de ce dernier sur la société, comme l’a rappelé la Cour de cassation dans un arrêt du 27 novembre 2024.

Quelles sont les implications de la décision de Pôle Emploi sur la reconnaissance d’un contrat de travail ?

La décision de Pôle Emploi de verser des indemnités chômage à un individu ne constitue pas une preuve suffisante de l’existence d’un contrat de travail. En effet, Pôle Emploi statue sur des critères qui ne sont pas de même nature que ceux qui définissent le statut juridique de mandataire social ou de salarié.

La jurisprudence indique que l’arbitrage de Pôle Emploi vise à l’octroi d’une prestation, mais cela ne dispense pas l’individu de prouver l’existence d’une relation salariale.

Ainsi, même si Pôle Emploi a reconnu M. [W] [C] comme salarié en lui versant des indemnités, cela ne suffit pas à établir un lien de subordination ou à prouver l’existence d’un contrat de travail, comme le stipule l’article L.1221-1 du Code du travail.

Quels sont les critères de rémunération pour établir un contrat de travail ?

Pour qu’un contrat de travail soit reconnu, la rémunération doit correspondre au salaire normal de l’emploi. En outre, le versement d’une rémunération spécifique à l’exercice des fonctions techniques salariées constitue un indice d’un contrat de travail.

Les articles L.1221-1 et suivants du Code du travail stipulent que le contrat de travail implique une rémunération pour le travail effectué.

Dans le cas de M. [W] [C], bien que sa rémunération ait été régulièrement votée par les organes de la société, cela ne prouve pas en soi l’existence d’un contrat de travail.

Il est également important de noter que la convention collective applicable ne mentionne pas la catégorie d’emploi de « conseiller du président », ce qui soulève des questions sur la validité de la rémunération revendiquée.

Quelles sont les conséquences d’une absence de lien de subordination dans un contrat de travail ?

L’absence de lien de subordination entraîne le rejet de toute demande de reconnaissance d’un contrat de travail. En effet, si un individu ne peut prouver qu’il travaille sous l’autorité d’un employeur, il ne peut pas revendiquer les droits associés à un contrat de travail.

Dans le cas de M. [W] [C], la cour a constaté qu’il était membre du directoire et directeur général de la société, ce qui lui conférait des pouvoirs similaires à ceux de l’employeur.

Ainsi, il ne pouvait pas établir un lien de subordination, ce qui a conduit à la confirmation du jugement du conseil de prud’hommes, rejetant ses demandes de reconnaissance d’un contrat de travail et des indemnités associées.

L’article L.1221-1 du Code du travail souligne que le contrat de travail implique un engagement à travailler sous subordination, et sans cela, les demandes de salariat ne peuvent être retenues.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80C

Chambre sociale 4-3

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

DU 06 JANVIER 2025

N° RG 22/01144 –

N° Portalis DBV3-V-B7G-VD5G

AFFAIRE :

[W] [C]

C/

AGS CGEA [Localité 8]

Décision déférée à la cour : Jugement rendue le 22 Mars 2022 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire d’ARGENTEUIL

N° Section : E

N° RG : F21/00140

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Jean-claude CHEVILLER

Me Sophie CORMARY

Me Francine TOUCHARD VONTRAT

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE SIX JANVIER DEUX MILLE VINGT CINQ,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

Monsieur [W] [C]

né le 07 Octobre 1977 à [Localité 7] (04)

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Jean-claude CHEVILLER, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : D0945

Plaidant : Me Olivier KHATCHIKIAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : G0619

APPELANT

****************

AGS CGEA [Localité 8]

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représentant : Me Sophie CORMARY de la SCP HADENGUE et Associés, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 98

Société BTSG Prise en la personne de Maître [R] [U], Mandataire Judiciaire de la société [H] GROUPE

[Adresse 1]

[Localité 6]

Représentant : Me Francine TOUCHARD VONTRAT de la SELEURL FTO AVOCAT, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : B0838

Substitué : Me Marie-Clémence BIENVENU, avocat au barreau de PARIS

INTIMÉES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 06 Novembre 2024 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Mme Florence SCHARRE, Conseillère chargé du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Laurence SINQUIN, Présidente,

Mme Florence SCHARRE, Conseillère,

Madame Aurélie GAILLOTTE, Conseillère,

Greffier lors des débats : Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI

FAITS ET PROCÉDURE

La société Alès Groupe est une société anonyme à directoire et conseil de surveillance (SA) immatriculée au registre du commerce et des sociétés (RCS) de Paris sous le n° 399 636 323. Elle a pour activité l’exécution de prestations de services et conseils en matière de gestion d’administration, d’organisation, d’ingénierie financière et de management des entreprises au profit des sociétés avec lesquelles elle a des liens en capital et qui relèvent du secteur de la cosmétologie (industrie chimique).

Elle emploie plus de 700 salariés en France.

Par contrat à durée indéterminée du 1er septembre 1999, M. [W] [C] a été engagé par la société [H] Groupe, venant aux droits de la société Laboratoires Phytosolba, en qualité d’assistant marketing, statut agent de maîtrise, coefficient 225.

A son retour en France après une mission qu’il a exercé aux Etats Unis de septembre 1999 à décembre 2006, un avenant a été régularisé le 1er mai 2007 attribuant à M. [W] [C] la fonction d’attaché auprès de la direction générale, moyennant un salaire de 2 900 euros bruts mensuels.

Le 1er novembre 2008, M. [W] [C] s’est vu attribuer la fonction de chef de cabinet.

Par courrier et à compter du 1er juillet 2009, M. [W] [C] a exercé les fonctions de conseiller du président jusqu’au 24 janvier 2021.

Les relations contractuelles étaient régies par les dispositions de la convention collective nationale des industries chimiques.

Par jugement rendu le 9 juillet 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Alès Groupe et a désigné Maître [K] en qualité d’administrateur et la société BTSG en qualité de mandataire judiciaire.

Par jugement rendu le 24 septembre 2020, le tribunal de commerce de Paris a arrêté le plan de cession des actifs de la société Alès Groupe au profit de la société Impala et a autorisé le licenciement pour motif économique des cinq salariés appartenant à la catégorie « Direction générale Alès », dont l’emploi devait être supprimé.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 7 octobre 2020, l’administrateur judiciaire de la société [H] Groupe, a convoqué M. [W] [C] à un entretien préalable à un éventuel licenciement pour motif économique, qui s’est tenu le 19 octobre 2020.

Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 22 octobre 2020, l’administrateur judiciaire a notifié à M. [W] [C] son licenciement pour motif économique, à titre conservatoire sous réserve de la reconnaissance de sa qualité de salarié.

Par la suite, l’AGS n’a pas procédé au versement des créances salariales sollicitées par M. [W] [C].

Par jugement rendu le 28 octobre 2020, le tribunal de commerce de Paris a prononcé la conversion de la procédure de redressement en liquidation judiciaire de la société Alès Groupe et a désigné la société BTSG en qualité de mandataire-liquidateur.

Par requête introductive reçue au greffe le 7 mai 2021, M. [W] [C] a saisi le conseil de prud’hommes d’Argenteuil d’une demande tendant à ce que sa relation contractuelle soit requalifiée en contrat de travail à durée indéterminée et à obtenir le paiement de diverses indemnités de rupture au titre de son licenciement pour motif économique.

Par jugement rendu le 29 mars 2022, auquel renvoie la cour pour l’exposé des demandes initiales des parties et de la procédure antérieure, le conseil de prud’hommes d’Argenteuil a :

– dit que M. [W] [C] ne peut prétendre être lié à la société [H] Groupe par un contrat de travail ;

En conséquence,

– débouté M. [W] [C] de l’ensemble de ses demandes ;

– dit que l’action initiée par M. [W] [C] est manifestement abusive et qu’il sera condamné à une amende civile de 3 000 euros qui sera recouvrée par le Trésor public ;

– mis les dépens à la charge de M. [W] [C].

Par déclaration d’appel reçue au greffe le 7 avril 2022, M. [W] [C] a interjeté appel de ce jugement.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 18 septembre 2024.

MOYENS ET PRÉTENTIONS

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 4 juillet 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens et prétentions conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, M. [W] [C], appelant, demande à la cour de :

– réformer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Argenteuil n° RG F21/00140 en date du 29 mars 2022 en ce qu’il a :

* dit que M. [W] [C] ne peut prétendre être lié à la société [H] Groupe par un contrat de travail ;

* débouté M. [W] [C] de l’ensemble de ses demandes ;

* dit que l’action initiée par M. [W] [C] est manifestement abusive et l’a condamné à une amende civile de 3 000 euros (trois-mille euros) qui sera recouvrée par le trésor public ;

* mis les dépens à la charge de M. [W] [C].

Et statuant à nouveau sur l’ensemble des chefs de demandes présentés par M. [W] [C],

– juger valable le contrat de travail de M. [W] [C] ;

– fixer la rémunération brute moyenne mensuelle de M. [W] [C] à la somme de 17 014,79 euros ;

En conséquence,

– fixer au passif de la société [H] Groupe les sommes suivantes :

* 50 001 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis (subsidiairement : 34 944 euros à titre de rappel d’indemnité compensatrice de préavis) ;

* 32 955,21 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés ;

* 210 416,24 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement (subsidiairement :

85 031 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement) ;

* 22 118 euros au titre du salaire de juillet et octobre 2020 prorata temporis ;

* 50 000 euros à titre de rappel de primes pour l’exercice 2019 ;

* 5 000 euros à titre de congés payés afférents ;

* 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;

* 8 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

– ordonner que ces sommes produisent intérêt au taux légal à compter de la réception des défenderesses de la convocation devant le conseil de prud’hommes, avec capitalisation des intérêts sur le fondement de l’article 1343-2 du code civil ;

– déclarer l’arrêt opposable à l’Association de gestion du régime de garantie des salaires (AGS).

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 23 août 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la société BTSG, en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société [H] Groupe, intimée, demande à la cour de :

A titre principal :

– confirmer le jugement du conseil de prud’hommes d’Argenteuil du 29 mars 2022, section encadrement (RG F21/00140), en toutes ses dispositions ;

– débouter M. [W] [C] de l’ensemble de ses demandes ;

– le condamner en tous les dépens.

A titre subsidiaire :

Si par impossible, la cour d’appel de céans retenait l’existence d’un lien de subordination auquel serait resté soumis M. [W] [C], en dépit de ses multiples mandats sociaux et l’impossibilité de faire la distinction entre ses fonctions au titre de son contrat de travail et ses fonctions au titre de ses mandats sociaux :

– dire et juger que M. [W] [C], du fait de la suspension de son contrat de travail, ne peut prétendre qu’à la fixation au passif de la liquidation judiciaire de ses indemnités de rupture, calculées correctement, en tenant compte de son ancienneté réelle en tant que salarié au titre de son contrat de travail d’origine, soit du 1er septembre 1999 au 1er janvier 2010 (10 ans et 4 mois), sur la base de son salaire mensuel brut de 6 000 euros, tel que celui-ci apparaît sur ses bulletins de salaire de l’année 2010 ;

– débouter M. [W] [C] de l’ensemble de ses autres demandes ;

– débouter M. [W] [C] de sa demande de prime de 50 000 euros pour l’exercice 2019 qui ne repose sur aucun fondement contractuel ;

– le condamner en tous les dépens.

Par dernières conclusions remises au greffe et notifiées par le RPVA le 30 septembre 2022, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé des moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la Délégation Île-de-France Ouest de l’Association de gestion du régime de garantie des salaires (AGS), représentée par le Centre de gestion et d’études agréé (CGEA) de [Localité 8], intimée, demande à la cour de :

A titre principal :

– juger que M. [W] [C] n’a pas la qualité de salarié de la société [H] Groupe ;

En conséquence,

– confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes d’Argenteuil en date du 29 mars 2022 en ce qu’il a débouté M. [W] [C] de l’ensemble de ses demandes et dire n’y avoir lieu à garantir ;

– mettre hors de cause l’association de gestion du régime de garantie des salaires au titre de la demande d’article 700 du code de procédure civile.

A titre subsidiaire :

– juger que la garantie de l’association de gestion du régime de garantie des salaires est plafonnée, toutes créances avancées à un des trois plafonds définis à l’article D. 3253-5 du code du travail ;

– fixer l’éventuelle créance allouée au salarié au passif de la société [H] Groupe ;

– juger que l’obligation du centre de gestion et d’études agréé de faire l’avance de la somme à laquelle serait évalué le montant total des créances garanties, compte tenu du plafond applicable, ne pourra s’exécuter que sur présentation d’un relevé par le mandataire judiciaire ;

– mettre hors de cause l’association de gestion du régime de garantie des salaires au titre de la demande d’article 700 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été prononcée le 18 septembre 2024.

MOTIFS

Sur le cumul mandat social et contrat de travail

Il résulte des articles L.1221-1 et suivants du code du travail que le contrat de travail suppose un engagement à travailler pour le compte et sous la subordination d’autrui, moyennant rémunération.

Le lien de subordination est caractérisé par l’exécution d’un travail sous l’autorité d’un employeur qui a le pouvoir de donner des ordres et des directives, d’en contrôler l’exécution et de sanctionner les manquements de son subordonné.

Le travail au sein d’un service organisé peut constituer un indice du lien de subordination lorsque l’employeur détermine unilatéralement les conditions d’exécution du travail.

L’existence d’un contrat de travail dépend, non pas de la volonté manifestée par les parties ou de la dénomination de la convention, mais des conditions de fait dans lesquelles est exercée l’activité du travailleur.

En l’absence d’écrit ou d’apparence de contrat de travail, il appartient à celui qui invoque un contrat de travail d’en rapporter la preuve.

Concernant spécifiquement le cumul mandat social et contrat de travail, trois conditions sont exigées : des fonctions techniques distinctes du mandat social, une rémunération spécifique et un lien de subordination.

La Cour de cassation a rappelé le 27 novembre 2024 (Cass. Soc. 23-10-389) les critères permettant de distinguer un contrat de travail d’un mandat social dans le cadre de l’application du règlement Bruxelles I bis. En s’appuyant sur la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE), elle juge que la qualification juridique d’une relation entre une société et un dirigeant dépend notamment de la capacité d’influence de ce dernier sur la société.

M. [W] [C], qui sollicite l’infirmation du jugement, se prévaut d’une ancienneté au sein de la société [H] Groupe de 20 ans et invoque l’existence d’un contrat de travail en qualité de conseiller du président.

Il sollicite la fixation au passif de la société [H] Groupe de diverses sommes calculées sur la base de son salaire moyen mensuel (17 014,79 euros) soit la somme de 50 001 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis, celle de 32 955,21 euros à titre d’indemnité compensatrice de congés payés et enfin celle de 210 416,24 euros à titre d’indemnité conventionnelle de licenciement.

Il ne conteste pas avoir été titulaire de plusieurs mandats sociaux dans le cadre des sociétés [H] Groupe et Avila mais considère établir la preuve d’un lien de subordination avec son employeur puisqu’il exécutait ses missions selon des directives et instructions du président de la société. Il estime prouver la réalité du travail accompli et précise qu’il exerçait des fonctions techniques.

Concernant ses mandats sociaux, il indique qu’il disposait d’un mandat de directeur général de la société [H] Groupe depuis le 15 janvier 2015 lorsque la société [H] Groupe est devenue une SA à directoire et conseil de surveillance. Il souligne que la société holding Avila n’est pas détenue exclusivement par des membres de sa famille et que 13.5% de son capital appartient à une fondation « [N] [H] Les Hommes et les Plantes ». Il ajoute que la société Co-Capital est actionnaire à hauteur de 40% dans le capital d’Avila et que la participation de Avila dans [H] Groupe n’a pas augmenté comme le prétend le mandataire mais est restée stable à hauteur de 78,57%. Il ajoute enfin que les mandats de directeur général et de membre du directoire de la société [H] Groupe ne lui ont été confiés qu’à la suite de la démission de M. [G] et de manière transitoire uniquement de mars à septembre 2020.

Concernant sa rémunération, il ajoute que son salaire a été régulièrement voté par les organes de la société qui l’employait.

Il invoque, au soutien du contrat de travail qu’il revendique, l’enquête de Pole Emploi qui l’a considéré comme salarié en lui versant des indemnités chômage.

La mandataire liquidateur de la société [H] Groupe sollicite le rejet de ses prétentions financières et la confirmation du jugement.

Il soutient que M. [W] [C], qui disposait d’un mandat de directeur général depuis le 23 août 2010, était fortement impliqué dans la construction capitalistique de la société [H] Groupe et de la holding Avila.

Il conteste tout lien de subordination et conclut à l’absence de tout cumul contrat de travail/mandat social.

Il considère que M. [W] [C] échoue à apporter la preuve de ce qu’il accomplissait des fonctions techniques distinctes des mandats sociaux qu’il détenait et qu’en ce sens ses missions relevaient clairement de la gestion de la société [H] Groupe. Il souligne que l’intitulé du poste de « conseiller du président » ne correspond à aucune classification de la convention collective et que le coefficient de 660, volontairement minoré, mentionné sur les bulletins de paie, ne correspond pas aux fonctions réellement exercées par M [C]. Il relève l’absence de tout lien de subordination de M. [W] [C] tant à l’égard du président du directoire de la société [H] Groupe, dès lors qu’il disposait des mêmes pouvoirs que celui-ci, qu’à l’égard de la holding financière la société Avila. Il s’interroge enfin sur l’absence de rémunération au titre des mandats sociaux comme affirmé par M. [W] [C] alors que dans le même temps les salaires de celui-ci ont augmenté entre 2010 et 2019 de 187,91%.

Concernant la décision de Pole Emploi invoquée par M. [W] [C], le mandataire judiciaire indique que Pole Emploi statue sur pièces sans avoir compétence pour dire le droit.

L’Unédic Délégation AGS CGEA de [Localité 8] sollicite la confirmation du jugement. La Délégation AGS considère que l’effectivité des fonctions techniques qui auraient été exercées par M. [W] [C] n’est pas établie et ajoute que les fonctions de chef de cabinet puis conseiller du président relèvent des mandats sociaux dont les statuts confèrent au directeur général les mêmes pouvoirs que ceux du président. Elle considère que la rémunération de M. [W] [C], sans qu’aucun avenant au contrat de travail ne soit établi, correspondait à ses mandats sociaux.

Elle conclut que le lien de subordination n’est pas établi dès lors que M, [C] ne démontre ni n’avoir reçu des ordres et directives dans l’exercice du contrat de travail qu’il revendique, ni qu’il aurait rendu compte de son activité, ni même qu’il était soumis à un pouvoir hiérarchique ou disciplinaire.

Elle ajoute que la décision de Pole Emploi de verser des indemnités chômage ne dispense pas l’appelant de rapporter la preuve d’une relation salariale.

Elle en déduit qu’en l’absence d’une relation salariée entre M. [W] [C] et la société [H] Groupe, la cour devra débouter M. [W] [C] de ses demandes et considérer que l’AGS n’a donc pas vocation à garantir une quelconque créance qui serait détenue par M. [W] [C] à l’encontre de la société [H] Groupe.

A titre infiniment subsidiaire, l’AGS invoque le plafond de sa garantie dans le cadre de l’article L.3253-5 du code du travail.

En l’espèce,

A titre préliminaire, il est nécessaire de rappeler que la société [H] Groupe est une société familiale constituée en société anonyme à directoire et conseil de surveillance.

M. [C] est le petit-fils de son fondateur, M. [N] [H].

La société [H] Groupe était détenue jusqu’à 2019 à hauteur de 78,57% par une holding, la SA Avila dont le capital est quant à lui détenu par une fondation (« Les Hommes et les Plantes ») à hauteur de 13,15% et des six membres de la famille [H], dont M. [W] [C] qui détient quant à lui 8,86% des parts d’Avila. Le reste du capital de la société [H] Groupe appartenait à un groupement d’investisseurs (Alternext) à hauteur de 21,53%.

A compter de 2019, la fondation « Les Hommes et les Plantes » et les six membres de la famille [H], dont M. [W] [C], ont ainsi détenu 60% du capital de la holding Avila, les 40% restant étant dès lors détenue par la société Co-Capital. De son côté, la holding Avila a ouvert en 2019 40% de son capital à un investisseur étranger (la société Co-Capital).

Les sociétés Avila et [H] Groupe ont fait l’objet d’une procédure collective courant 2020.

La S.A [H] Groupe disposait par ailleurs de filiales à l’étranger ainsi que des sociétés filles, dont les sociétés Laboratoires Phytosolba, PhytAlès, [H] Groupe Industrie, Laboratoires Liérac, Caster, Laboratoire Jowae et Franklin Roosevelt Coiffure et Beauté. Elle comportait également des sociétés petites-filles dont les sociétés [H] Groupe France, [H] Groupe Logistique, Distri-Coiff, Boy Diffusion.

Dans ce cadre, M. [W] [C] a détenu 13 mandants sociaux dans le cadre de la société [H] Groupe.

Au sein de la seule société [H] Groupe, il a été administrateur de cette société à compter de 2010, puis membre du directoire à compter de décembre 2014, et enfin directeur général depuis le 4 décembre 2014, et non pas du 15 janvier 2015 comme il l’affirme.

Il a par ailleurs été associé, puis directeur général, et à compter de 2019, membre du conseil de surveillance et président de la holding Avila.

Il convient donc d’examiner si les trois critères cumulatifs précités sont réunis, étant rappelé que la charge de la preuve appartient à celui qui se prévaut d’un contrat de travail salarié. Il appartient aussi au mandataire social qui se prévaut d’un contrat de travail de rapporter la preuve du lien de subordination.

En avant-propos, la cour écartera le moyen tiré de ce que le contrat de travail salarié aurait été reconnu par Pôle Emploi (France Travail), qui a versé des indemnités chômage à M. [W] [C]. En effet, l’arbitrage de Pôle Emploi vise à l’octroi d’une prestation dont les critères ne sont pas de même nature que ceux qui visent à définir le statut juridique de mandataire social ou de salarié.

Concernant l’exercice de fonctions techniques distinctes des mandats sociaux.

A ce titre, le mandataire judiciaire produit aux débats une lettre, datée du 21 septembre 2020, adressée par le directeur général adjoint (M. [Y]) au mandataire judiciaire de la société [H] Groupe qui mentionne que les missions du contrat de travail confiés à M. [W] [C] étaient de nature financière d’une part (collaboration quotidienne et étroite avec le directeur administratif et financier, élaboration des budgets, de rapports de rentabilité, de préparation des opérations financières importantes ainsi que la mise en relation avec les apporteurs de fonds) et également stratégique et juridique (l’analyse des documents relatifs à la gestion du personnel, la conduite des procédures stratégiques relatives à l’administration du personnel et la préparation et l’analyse des contrats engageant la société).

M. [W] [C] produit quant à lui aux débats, une douzaine de mails et s’est par ailleurs présenté aux organes de la procédure collective comme leur interlocuteur privilégié. Il résulte de ces mails que M. [W] [C] prenait part aux rendez-vous du mois de décembre 2015 avec la BNP, ou encore qu’il lui était demandé « nous autorisez-vous à en faire profiter les autres investisseurs » ou enfin le 22 janvier 2019 lorsque le directeur général de la société [H] Groupe (M. [G] encore à ce moment) lui demandait de se charger d’une discussion avec un potentiel investisseur (Peak6).

Il ressort des pièces de l’appelant que, si elles évoquent l’envoi de tableau de dividendes, ou encore de document de travail en vue d’un rendez-vous clients ou l’examen d’un projet dit Phoenix, elles ne permettent cependant pas, comme celui-ci l’affirme, d’en déduire qu’il exerçait des fonctions de salarié et non de dirigeant.

Par ailleurs, il ressort de l’examen de l’ensemble des mails produits que les interlocuteurs de M. [W] [C], et notamment le président M. [G], le considérait et s’adressait à lui avant tout en sa qualité de directeur général de la société et non pas comme son subalterne ou simple conseiller salarié du président.

Enfin, il n’est pas davantage établi, ni contesté par l’appelant, que ses fonctions ont été modifiées lorsqu’il a été promu directeur général de la société [H] Groupe.

La réalité des fonctions exercées par M.[W] [C] telle qu’elle ressort des pièces communiquées ne corrobore pas la mention figurant sur la fiche de poste adressée au mandataire judiciaire selon laquelle il exerçait simplement une collaboration quotidienne et étroite avec le directeur administratif et financier,. En conséquence, la preuve de l’exercice de fonctions techniques n’est pas rapportée.

Il doit en être déduit que les pièces versées aux débats permettent d’en conclure que M. [W] [C] a exercé des fonctions de mandataire social et non pas techniquement distinctes de celles-ci.

Concernant la rémunération spécifique

S’il ne fait aucun doute qu’un mandat social puisse être exercé à titre gratuit, les fonctions salariées doivent en revanche être obligatoirement rémunérées et correspondre au salaire normal de l’emploi.

En outre, le versement d’une rémunération spécifique à l’exercice des fonctions techniques salariées constitue un indice d’un contrat de travail cumulé au mandat social : Soc., 14 mai 1998, pourvoi n° 97-40.652, Bull., V, n° 696 ; Soc 29 avril 2009, n° 08-41.958).

Concernant les bulletins de paie produits, la cour observe que ceux-ci mentionnent l’emploi « conseiller du président ». Il est fait état d’un coefficient « 660 » et d’une rémunération d’un montant de

17 014,79 euros bruts. Cependant, ces bulletins de paie n’établissent pas en eux-mêmes l’existence d’un contrat de travail.

Il appartient à la cour de vérifier si la rémunération correspond à l’emploi salarié revendiqué.

La Cour constate en premier lieu que la convention collective applicable ne mentionne pas la catégorie d’emploi de « conseiller du président ».

L’examen de la convention révèle ensuite qu’elle comporte 23 coefficients hiérarchiques de 130 à 880 et que le coefficient 660 est celui correspondant aux Ingénieurs et cadres assumant la responsabilité:

– soit d’une unité importante d’un établissement en raison notamment des liaisons ou interconnexions avec les autres unités de celui-ci ;

– soit de plusieurs unités appartenant, le cas échéant, à des établissements différents ;

– soit d’un établissement d’importance moyenne ;

– soit d’un important secteur d’activité de l’entreprise.

Leurs principales décisions ont des répercussions sensibles sur les autres unités et nécessitent la prise en compte préalable et la coordination d’éléments complexes et variés.

Les ingénieurs et cadres placés à ce niveau sont associés à la définition des objectifs ou orientations de l’ensemble auquel ils appartiennent. ».

Ce détail des fonctions ne correspond en rien aux fonctions de conseiller du président revendiquées par M. [C] et telles que décrites dans le mail du 21 septembre 2020 du directeur général adjoint de la société [H].

En second lieu, la classification 660 prévoit un salaire brut d’un minimum de 5 775 euros. M [C] reconnaît que sa rémunération trois fois supérieure au minima conventionnel a été régulièrement votée par les organes de la société. Il ne conteste pas que de 2010 à 2019 il a connu une augmentation de salaires de 187,91% .

Un tel écart entre la grille minimale de rémunération et la réalité du salaire attribué à M. [W] [C] ne permet pas de considérer que la rémunération M. [W] [C] figurant aux bulletins de salaires corresponde à celui d’un cadre au coefficient 660.

Le lien de subordination

M. [W] [C] est membre du directoire de la SA [H] Groupe et directeur général de la société depuis le 4 décembre 2014.

D’une part, l’examen des statuts de la société [H] Groupe permet de constater (article 18) que « le conseil de surveillance peut décider d’attribuer le même pouvoir de représentation à plusieurs membres du directoire qui portent alors le titre de directeur général. Vis-à-vis des tiers, tous actes engageant la société sont valablement accomplis par le président du directoire ou tout membre ayant reçu du conseil de surveillance le titre de directeur général, ainsi que toute personne à qui le président du directoire ou un directeur général aurait délégué partiellement son pouvoir de représentation.».

D’autre part, la lecture du procès-verbal de la réunion du conseil de surveillance du 29 avril 2019 évoque : « l’engagement personnel de M. [W] [C] pour la réussite du Groupe et de sa participation aux mesures à mettre en place dans le cadre du plan de retournement et de déploiement des activités au sein de la société ».

Par ailleurs, M. [W] [C] échoue à apporter la preuve de ce qu’il rendait compte de son travail auprès d’une personne ou d’un groupe de personnes déterminées et n’établit pas davantage qu’il était soumis à un pouvoir hiérarchique et disciplinaire. Les nombreux mails qu’il produit à ce sujet ne permettent pas de retenir l’existence d’un réel pouvoir hiérarchique et disciplinaire.

Par sa seule qualité de directeur général, M. [W] [C], disposait du pouvoir d’engager la société [H] Groupe et ne peut dès lors justifier d’un lien de subordination à l’égard d’un membre de la direction disposant des mêmes pouvoirs que ceux que les statuts lui attribuaient.

A titre d’exemple, il est établi par les pièces versées aux débats que M. [C] représentait la société [H] Groupe dans le cadre des décisions concernant la gestion des filiales et qu’à ce titre la SAS [H] Groupe, représentée par M. [C] en sa qualité de directeur général associé unique, procédait à sa propre nomination en qualité de président de la société [H] Groupe Industrie et des Laboratoires Phytosolba, Jowae ou encore Franklin Roosevelt Coiffure et Beauté le 26 février 2020. De la même manière dans les mails qui lui ont été adressés par M. [G] le 5 novembre 2015 ce dernier écrit à

M. [C], « je propose que vous évoquiez le sujet sans moi avec les banques et que vous preniez la décision de rajouter des infos sur le sujet suivant les reco des banquiers ».

M. [C] ne peut soutenir valablement l’existence d’un lien de subordination alors qu’il a occupé les mandats sociaux de directeur général, président et membre du conseil de surveillance de la holding financière [H] Groupe et de la SAS Avila. Ainsi, il ressort des mails du mois de juillet 2021, adressés au mandataire judiciaire par les établissements financiers dans lesquels la société [H] Groupe disposait de comptes bancaires, que M. [W] [C] disposait de plusieurs procurations bancaires avec la possibilité d’émettre et signer des chèques, procéder à des opérations de change et auprès du LCL d’engager, par sa seule signature, la société à hauteur de 150 000 euros.

En conséquence, la capacité d’influence de M. [C] sur la société [H] Groupe est amplement démontrée puisqu’en qualité de dirigeant il disposait d’un pouvoir de contrôle autonome sur la gestion de la société [H] Groupe et ne peut dès lors être considéré comme étant en situation de subordination avec cette dernière.

De plus, le caractère des tâches effectuées et confiées à M. [C] en tant que dirigeant sont bien celles habituellement dévolues à un membre d’un conseil d’administration.

Enfin, la nature de la relation contractuelle telle que précisée dans la fiche de poste produite aux débats s’inscrit aussi dans le mandat social.

Il doit en être déduit que l’autonomie dont disposait M. [W] [C], conduit la cour à écarter que celui-ci établisse le lien de subordination qu’il revendique.

***

La cour, confirmant le jugement critiqué, déduit de l’examen des pièces produites qu’aucun des trois critères nécessaires à la reconnaissance valable d’un cumul mandat social et contrat de travail de

M. [W] [C] n’est établi et en conséquence l’ensemble des demandes ayant trait au salariat revendiqué seront rejetées.

Sur les dommages et intérêts pour résistance abusive

M. [W] [C] sollicite la fixation au passif de son ancien employeur de la somme de 20 000 euros à ce titre.

Le mandataire judiciaire et les AGS s’y opposent considérant que l’appelant ne fournit aucune pièce au soutien de sa demande.

Considérant qu’il n’est pas démontré que la résistance du mandataire liquidateur soit établie et qu’à supposer qu’elle le soit elle ait dégénéré en abus de droit, l’appelant sera donc débouté de sa demande à ce titre.

Sur l’amende civile pour procédure abusive

Il ne résulte pas de la procédure que M. [C] ait intenté cette action dans l’intention de nuire ou que son action procède d’une erreur grossière. En conséquence, il n’y a pas lieu au prononcé d’une amende civile à ce titre.

Sur les dépens

Il y a lieu de mettre les dépens à la charge de M. [C] qui succombe en ses prétentions.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire, en dernier ressort et prononcé par mise à disposition au greffe:

CONFIRME le jugement du conseil de prud’hommes d’Argenteuil du 29 mars 2022 sauf en ce qu’il a condamné M. [C] à une amende civile de 3 000 euros ;

Y ajoutant ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

CONDAMNE M. [C] aux dépens.

– prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Madame Laurence SINQUIN, Présidente et par Madame Angeline SZEWCZIKOWSKI, Greffière, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente


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