L’Essentiel : Madame [Z] [X] [L], chirurgien-dentiste depuis 1990, a souscrit un contrat de prévoyance en 1993, prévoyant un capital d’invalidité en cas d’incapacité de 66 % ou plus. Diagnostiquée avec une arthrose en 2020, elle a vu son activité professionnelle compromise. En mars 2023, la MACSF a refusé de reconnaître son invalidité, arguant d’un taux de 30 %. Contestant cette évaluation, Madame [Z] [X] [L] a assigné la MACSF en référé pour obtenir une expertise. Le tribunal a ordonné cette expertise, soulignant la légitimité de sa demande et fixant une provision pour la rémunération de l’expert.
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Présentation de Madame [Z] [X] [L]Madame [Z] [X] [L] exerce la profession de chirurgien-dentiste depuis 1990. Elle a souscrit un contrat de prévoyance auprès de la MACSF en 1993, qui prévoit un capital d’invalidité professionnelle en cas d’incapacité de 66 % ou plus, entraînant l’arrêt définitif de son activité. État de santé et invaliditéEn 2020, Madame [Z] [X] [L] a été diagnostiquée avec une arthrose, ce qui l’a empêchée d’utiliser son bras pour sa pratique dentaire. En mai 2023, un médecin conseil de la CPAM a déclaré son invalidité professionnelle avec un taux supérieur à 50 %. Refus de la MACSFLe 10 mars 2023, la MACSF a refusé de mettre en jeu la garantie d’invalidité, arguant que le taux d’invalidité était de 30 %, inférieur au seuil contractuel. Madame [Z] [X] [L] conteste cette évaluation, affirmant qu’elle est erronée. Procédure judiciaireLe 13 septembre 2024, Madame [Z] [X] [L] a assigné la MACSF en référé pour obtenir la désignation d’un médecin expert et réclamer 3000 euros au titre des frais de justice. Lors de l’audience du 19 novembre 2024, elle a maintenu sa demande d’expertise. Position de la MACSFLa MACSF a accepté la mesure d’expertise tout en émettant des réserves et en contestant la demande de paiement des frais irrépétibles. Elle a souligné que le taux d’invalidité devait être déterminé par l’expert selon les termes du contrat. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné une expertise, considérant que Madame [Z] [X] [L] avait justifié d’un motif légitime pour cette demande. L’expert désigné devra examiner son état de santé et déterminer le taux d’invalidité conformément au contrat. Modalités de l’expertiseL’expert, le Docteur [M] [E], devra convoquer les parties, examiner les documents médicaux et établir un rapport dans un délai de quatre mois. Il pourra se faire assister par d’autres spécialistes et devra rendre compte de l’avancement de ses travaux. Consignation et fraisUne provision de 2000 euros a été fixée pour la rémunération de l’expert, à consigner par Madame [Z] [X] [L] dans un délai de six semaines. En cas de non-consignation, la désignation de l’expert sera caduque. Conclusion de la décisionLe tribunal a laissé à Madame [Z] [X] [L] la charge provisoire des dépens et a rappelé que la décision est exécutoire par provision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la base légale pour demander une expertise judiciaire dans le cadre d’un litige ?La base légale pour demander une expertise judiciaire est prévue par l’article 145 du Code de procédure civile. Cet article stipule que : « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé. » Pour justifier d’un motif légitime, la partie requérante doit démontrer la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel. Dans le cas présent, Madame [Z] [X] [L] a produit un rapport médical indiquant un taux d’incapacité professionnelle de 70 %, ce qui constitue un élément probant justifiant la demande d’expertise. Ainsi, la décision de procéder à une expertise est fondée sur l’existence d’un motif légitime, permettant d’établir des faits qui pourraient influencer la résolution du litige. Quelles sont les conséquences de la demande d’expertise sur la charge des dépens ?La question de la charge des dépens est régie par l’article 700 du Code de procédure civile, qui dispose que : « Dans toutes les instances, le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. » Dans cette affaire, la société MACSF PREVOYANCE a accepté la mesure d’expertise, ce qui signifie qu’elle ne peut pas être considérée comme la partie perdante. Par conséquent, la demande de Madame [Z] [X] [L] en paiement de frais irrépétibles sur le fondement de l’article 700 doit être rejetée. Il est également précisé que Madame [Z] [X] [L] conserve la charge provisoire des dépens, sous réserve de ce qui sera décidé par le juge du fond, ce qui souligne que la décision sur les dépens peut être révisée ultérieurement. Comment l’expert doit-il procéder pour réaliser sa mission d’expertise ?Les modalités de la mission de l’expert sont encadrées par les articles 263 et suivants du Code de procédure civile. Ces articles stipulent que : « L’expert doit, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion. » Lors de cette réunion, l’expert doit : – Procéder à une lecture contradictoire de sa mission, L’expert est également tenu de rendre compte de l’avancement de ses travaux et de toute carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission. Il doit remettre son rapport en un exemplaire original et en copie sous format numérique au greffe du tribunal dans un délai de quatre mois, sauf prorogation dûment sollicitée. Quelles sont les implications de la consignation de la provision pour l’expert ?La consignation de la provision est une obligation imposée par la décision judiciaire, qui stipule que : « Fixons à la somme de 2000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par Madame [Z] [X] [L] entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal. » Il est précisé que cette consignation doit être effectuée dans un délai de six semaines, sans autre avis et accompagnée d’une copie de la décision. Si Madame [Z] [X] [L] ne respecte pas ce délai, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet. Cela souligne l’importance de la consignation pour le bon déroulement de la procédure d’expertise et la nécessité pour la partie demanderesse de se conformer à cette exigence pour éviter des conséquences défavorables. |
RÉFÉRÉS
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 07 Janvier 2025
N°R.G. : 24/02203
N° Portalis DB3R-W-B7I-ZSPF
N° Minute :
[Z] [X] [L]
c/
Société MACSF PREVOYANCE
DEMANDERESSE
Madame [Z] [X] [L]
[Adresse 7]
[Localité 6]
représentée par Maître Omar YAHIA de la SELARL YAHIA AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : A0068
DÉFENDERESSE
Société MACSF PREVOYANCE
[Adresse 11]
[Adresse 4]
[Localité 10]
représentée par Maître Stéphane CHOISEZ de la SELARL CHOISEZ & ASSOCIES Société d’avocats, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : C2308
COMPOSITION DE LA JURIDICTION
Président : François PRADIER, 1er Vice-président, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,
Greffier : Flavie GROSJEAN, Greffier
Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 19 novembre 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour :
Madame [Z] [X] [L] a exercé la profession de chirurgien-dentiste depuis l’année 1990.
Depuis 1993, elle a souscrit auprès de la MACSF un contrat de prévoyance prévoyant le versement d’un capital d’invalidité professionnelle, lorsque ce taux est égal ou supérieur à 66 % et entraîne la cessation définitive de l’exercice de la profession de chirurgien-dentiste.
A partir de 2020, en raison d’une arthrose diagnostiquée, elle ne pouvait plus utiliser son bras dans l’exercice de sa pratique dentaire.
En mai 2023, elle a été déclarée en invalidité professionnelle par le médecin conseil de la CPAM de [Localité 6], fixant son taux d’invalidité au-delà de 50 %.
Sur la base d’une expertise diligentée par la MACSF, cette dernière lui a notifié le 10 mars 2023 un refus de la mise en jeu de sa garantie, invoquant un taux d’invalidité de 30 %, donc inférieur au taux contractuel égal ou supérieur à 66 %.
Invoquant que sur la base d’autres éléments médicaux, ce taux avait été mal apprécié par l’expert de l’assureur, Madame [Z] [X] [L] a, par acte en date du 13 septembre 2024 assigné en référé la société MACSF PREVOYANCE pour obtenir la désignation d’un médecin expert et la condamnation de cette dernière à lui verser la somme de 3000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
L’affaire étant venue à l’audience du 19 novembre 2024, Madame [Z] [X] [L] a maintenu sa demande d’expertise et l’attribution d’une indemnité de procédure sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
La société MACSF PREVOYANCE a déclaré ne pas s’opposer à la mesure d’expertise, tout en formulant des protestations et réserves et en proposant la mission qui serait confiée à l’expert désigné, telle qu’elle est énoncée au dispositif des conclusions écrites de son conseil. En revanche, elle conclut au rejet de la demande en paiement au titre des frais irrépétibles.
Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.
Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.
Au soutien de sa demande d’expertise, la requérante produit un rapport d’examen médical en date du 22 mars 2022 émanant du Docteur [Y] [F] mentionnant un taux d’incapacité professionnelle fixé à 70 %.
Au vu de cet élément, Madame [Z] [X] [L] justifie de l’existence d’un motif légitime, lui permettant d’obtenir l’organisation d’une mesure d’expertise dans les termes et conditions figurant au dispositif de la présente décision.
A cet égard, c’est à juste titre que la société défenderesse fait observer que le taux d’invalidité devra être déterminé par l’expert désigné au regard des prévisions du contrat.
La partie défenderesse à une demande d’expertise ordonnée sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile ne peut être considérée comme la partie perdante au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Il conviendra de rejeter la demande en paiement formée sur ce chef par Madame [Z] [X] [L] à l’encontre de la société MACSF PREVOYANCE.
Il convient de laisser à Madame [Z] [X] [L] la charge provisoire des dépens, sous réserve de ce qui sera éventuellement décidé par le juge du fond.
Statuant par décision mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort,
Renvoyons les parties à se pourvoir sur le fond du litige,
Ordonnons une expertise et commettons pour y procéder :
Docteur [M] [E]
Hôpital [13]
[Adresse 3]
[Localité 9]
Tél : [XXXXXXXX02]
Email : [Courriel 12]
(expert inscrit auprès de la cour d’appel de [Localité 14], sous la rubrique F-01.14 – Médecine générale – Gériatrie – Soins palliatifs)
lequel pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix, avec pour mission de:
° Convoquer les parties, leur rappelant qu’elles peuvent se faire assister ou représenter par un médecin-conseil ;
° Entendre tous sachants si nécessaire ;
° Se faire remettre tous documents et pièces qu’il estimera utiles à l’accomplissement de sa mission;
° Examiner Madame [Z] [X] [L] aux fins de procéder à toutes constatations utiles, et prendre connaissance de son dossier médical;
° Retracer l’entier historique de l’état de santé général de Madame [Z] [X] [L] depuis son arrêt de travail du 2 juillet 2021 jusqu’au 15 janvier 2023 et préciser le cas échéant l’existence d’antécédents médicaux et leur incidence sur l’incapacité de Madame [Z] [X] [L] ;
° Déterminer les causes de l’arrêt de travail déclaré par Madame [Z] [X] [L] ;
° Fixer la date de consolidation de l’état de santé de Madame [Z] [X] [L], si cela est possible ;
° Déterminer le taux d’invalidité professionnelle de Madame [Z] [X] [L] selon les termes du contrat, soit par référence au barème figurant à l’annexe I des conditions générales du contrat ;
° Dire si l’état de Madame [Z] [X] [L] est susceptible d’aggravation, fournir toutes précisions utiles sur le degré de probabilité de cette évolution et indiquer, dans le cas où un nouvel examen serait nécessaire, le délai dans lequel il devrait être pratiqué ;
Faisons injonction aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions,
Disons que l’expert pourra se faire communiquer tant par les médecins que par les caisses de sécurité sociale et par les établissements hospitaliers concernés, tous les documents médicaux qu’il jugerait utiles aux opérations d’expertise,
Disons que l’expert ne communiquera directement aux parties les documents médicaux ainsi obtenu directement de tiers concernant la partie demanderesse qu’avec son accord; qu’à défaut d’accord de celui-ci, ces éléments seront portés à la connaissance des parties par l’intermédiaire du médecin qu’elles auront désigné à cet effet.
Disons que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d’un fichier PDF enregistré sur un CD-ROM au greffe du tribunal judiciaire de Nanterre, service du contrôle des expertises, extension du palais de justice, [Adresse 8] ([XXXXXXXX01]), dans le délai de quatre mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
Disons que l’expert devra, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera a une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d’éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu’à l’issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,
Dans le but de limiter les frais d’expertise, invitons les parties, pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE,
Disons que, sauf accord contraire des parties, l’expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,
Disons que l’expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelons qu’il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives,
Désignons le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents,
Disons que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile,
Fixons à la somme de 2000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert, qui devra être consignée par Madame [Z] [X] [L] entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 5], dans le délai de 6 semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis et accompagné d’une copie de la présente décision,
Disons que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet,
Disons qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,
Disons n’y avoir lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Laissons à Madame [Z] [X] [L] la charge provisoire des dépens de l’instance,
Rappelons que la présente décision est exécutoire par provision,
FAIT À NANTERRE, le 07 Janvier 2025.
LE GREFFIER,
Flavie GROSJEAN, Greffier
LE PRESIDENT.
François PRADIER, 1er Vice-président
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