L’Essentiel : Le Centre Hospitalier de [Localité 5] a sollicité le tribunal judiciaire de Metz pour un contrôle de la nécessité d’une mesure de soins sans consentement pour Madame [P] [N], hospitalisée depuis le 27 décembre 2024. Des certificats médicaux ont attesté de troubles mentaux graves, notamment un délire de persécution, justifiant son hospitalisation complète. Le juge a vérifié la régularité de la procédure, confirmant que le certificat médical avait été établi par un médecin extérieur à l’établissement. En conséquence, le tribunal a validé la demande d’hospitalisation, rappelant les modalités d’appel et la prise en charge des dépens par le Trésor Public.
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Contexte de l’affaireLe Centre Hospitalier de [Localité 5] a saisi le Juge du tribunal judiciaire de Metz pour obtenir un contrôle de la nécessité d’une mesure de soins sans consentement concernant Madame [P] [N], sous curatelle renforcée, hospitalisée depuis le 27 décembre 2024. Le Ministère Public a été informé et a formulé ses observations par écrit. Admission en hospitalisation complèteMadame [P] [N] a été admise en hospitalisation complète suite à un certificat médical du Dr [Y] qui a constaté un péril imminent pour sa santé. Des certificats médicaux ultérieurs ont confirmé la présence de troubles mentaux, notamment un délire de persécution, et ont recommandé la poursuite de l’hospitalisation. État de santé de Madame [P] [N]Les certificats médicaux ont révélé que Madame [P] [N] présentait des troubles délirants persistants, incluant des croyances erronées et une opposition aux soins. Un avis motivé a confirmé que son état mental nécessitait une hospitalisation complète, car elle ne reconnaissait pas ses troubles. Procédure judiciaireLe juge a examiné la régularité de la procédure d’admission, en vérifiant que le certificat médical avait été établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement. Il a constaté que le Dr [Y] n’était pas un médecin du CHS de [Localité 5], mais a validé la procédure d’hospitalisation complète. Décision du tribunalLe tribunal a déclaré recevable la requête du directeur du Centre Hospitalier et a maintenu la mesure d’hospitalisation complète pour Madame [P] [N]. Il a rappelé aux parties les modalités d’appel et a précisé que les éventuels dépens seraient à la charge du Trésor Public. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation sans consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux ?L’article L. 3212-1 du Code de la santé publique précise les conditions dans lesquelles une personne atteinte de troubles mentaux peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement. Cet article stipule que : 1° La personne doit avoir des troubles qui rendent impossible son consentement ; 2° Son état doit nécessiter des soins immédiats, justifiant soit une hospitalisation complète avec surveillance médicale constante, soit une prise en charge sous une autre forme avec surveillance médicale régulière. Ainsi, pour qu’une hospitalisation sans consentement soit légale, il est impératif que ces deux conditions soient remplies. De plus, l’article L. 3212-1 II 2° précise que le directeur de l’établissement doit prononcer la décision d’admission lorsqu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, constaté par un certificat médical. Ce certificat doit être établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade, ce qui garantit une évaluation indépendante de l’état de santé du patient. Quel est le rôle du juge dans le contrôle de l’hospitalisation complète ?Le rôle du juge dans le contrôle de l’hospitalisation complète est défini par l’article L. 3216-1 du Code de la santé publique. Cet article stipule que le juge doit vérifier la régularité des décisions administratives prises en matière d’hospitalisation complète. Il doit également s’assurer que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles du patient sont adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis, conformément à l’article L. 3211-3. Il est important de noter que le juge ne peut pas se substituer à l’autorité médicale pour ce qui est de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins à administrer. Cela signifie que le juge doit se concentrer sur la légalité de la procédure et le respect des droits du patient, sans entrer dans le fond des décisions médicales. Quelles sont les conséquences d’une hospitalisation sans consentement sur la liberté individuelle ?L’article 66 de la Constitution française établit que la liberté individuelle ne peut être entravée que par des mesures nécessaires. Cette disposition est essentielle dans le cadre de l’hospitalisation sans consentement, car elle impose que toute restriction à la liberté d’une personne atteinte de troubles mentaux soit justifiée par la nécessité de protéger la santé de cette personne ou celle des tiers. Le Conseil Constitutionnel, dans sa décision 2010/71 QPC du 26 novembre 2010, a également souligné que la protection de la liberté individuelle doit être équilibrée avec la protection de la sécurité de la personne concernée et des tiers. Ainsi, toute mesure d’hospitalisation doit être proportionnée et justifiée par un péril imminent pour la santé de la personne, ce qui est une condition sine qua non pour respecter les droits fondamentaux. Quelles sont les voies de recours possibles contre une décision d’hospitalisation complète ?Les voies de recours contre une décision d’hospitalisation complète sont spécifiées dans les articles R. 3211-18 et R. 3211-33 du Code de la santé publique. Ces articles prévoient que la décision d’hospitalisation peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la Cour d’Appel dans un délai de 10 jours à compter de sa notification. L’appel doit être formé par déclaration transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’appel. Il est également important de noter que, selon l’article L. 3211-12-4 alinéa 2, l’appel interjeté par la personne hospitalisée ou son avocat n’est pas suspensif. Cela signifie que la mesure d’hospitalisation reste en vigueur pendant la durée de l’appel, ce qui peut avoir des implications importantes pour les droits du patient pendant cette période. |
N° MINUTE : 25/00022
COUR D’APPEL DE METZ
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE METZ
SERVICE DU JUGE DES LIBERTÉS ET DE LA DETENTION
ORDONNANCE DU 07 Janvier 2025
HOSPITALISATION SOUS CONTRAINTE
Devant nous, Madame Doris BREIT, Vice-Président au tribunal judiciaire de Metz, assistée de Madame Agathe LEFEVRE, Greffier, après débats au sein des locaux judiciaires du Centre Hospitalier de Jury ;
DEMANDEUR
CHS DE [Localité 5]
[Adresse 2]
[Localité 5]
non comparante, ni représentée
DÉFENDEUR
[P] [N]
[Adresse 1]
[Localité 3]
née le 04 Septembre 1976 à [Localité 4]
représentée par Me Aurore DAMILOT, avocat au barreau de METZ
Le Ministère Public, régulièrement avisé, a fait valoir ses observations par écrit en date du 6 janvier 2025 ;
Madame [W] [Z], chargée de la mesure de curatelle, convoqué(e) à l’audience, n’a pas comparu.
Vu la requête reçue au greffe le 2 janvier 2025, par laquelle le directeur du Centre Hospitalier de [Localité 5], a saisi le Juge du tribunal judiciaire de Metz aux fins de contrôle de plein droit de la nécessité d’une mesure de soins sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète dont fait l’objet Madame [P] [N], (majeur protégé sous le régime de la curatelle renforcée), depuis le 27 décembre 2024 (contrôle à 12j) ;
Vu le certificat médical initial établi le 27 décembre 2024 par le Dr [Y] établissant l’existence d’un péril imminent pour la santé de l’intéressée ;
Vu le relevé des démarches de recherche et d’information de tiers pour un patient admis en soins psychiatriques en cas de péril imminent ;
Vu la décision du directeur du Centre Hospitalier de [Localité 5] en date du 27 décembre 2024 prononçant l’admission de Madame [P] [N] en hospitalisation complète, notifiée ou information de la personne hospitalisée le 28 décembre 2024 ;
Vu le certificat médical dit des 24 heures établi le 28 décembre 2024 par le Dr [O] [A] ;
Vu le certificat médical dit des 72 heures établi le 30 décembre 2024 par le Dr [G] [I] [H] ;
Vu la décision du directeur de l’établissement en date du 30 décembre 2024 maintenant pour un mois les soins sous le régime de l’hospitalisation complète de Madame [P] [N], notifiée ou information de la personne hospitalisée sans date ;
Vu l’avis motivé établi le 2 janvier 2025 par le Dr [X] [R] ;
Vu les réquisitions écrites du ministère public en date du 6 janvier 2025, sollicitant la poursuite de la mesure ;
Vu le débat contradictoire en date du 7 janvier 2025 ;
Vu l’absence de Madame [P] [N] qui indiquait le 3 janvier 2025 ne pas vouloir être présent (e) à l’audience ;
Vu les articles L3211-1 et suivants, L.3212-1 et suivants du code de la santé publique ;
Faits et moyens des parties :
Madame [P] [N] était hospitalisé au Centre Hospitalier de [Localité 5] sans son consentement dans les conditions rappelées dans l’en-tête de la présente ordonnance.
Le certificat médical établi par le Dr [Y] le 27 décembre 2024 décrivait en ces termes l’existence de troubles mentaux : “troubles du comportement, délire de persécution,,labilité émotionnelle”.
Etait constatée l’existence d’un péril imminent pour la santé de l’intéressé.
Les certificats médicaux postérieurs établissaient pendant la période d’observation qu’elle présentait un délire de persécution (certitude d’avoir été empoisonnée par un ex-compagnon) avec une adhésion totale ainsi que des éléments de subexaltation, qu’elle refusait catégoriquement les soins et que la prise en charge de Madame [P] [N] devait se poursuivre sous le mode de l’hospitalisation complète.
L’avis motivé daté du 2 janvier 2025 constatait que les troubles délirants à l’origine de son hospitalisation étaient toujours présents, l’intéressée croyant avoir reçu pour Noël de son compagnon un enfant adopté, qu’elle avait une thymie instable avec une sub exaltation et des éléments mégalomaniaques, qu’elle était anosognosique et opposée aux soins et que l’hospitalisation devait se poursuivre.
A l’audience, le conseil de Madame [P] [N] a été entendu en ses observations. Il a indiqué que. Le certificat initial était signé du Dr [Y] qui semblait être un médecin de l’établissement.
Interrogé en cours de délibéré, le requérant a précisé que le Dr [Y] n’était pas un médecin de l’établissement.
L’hospitalisation sans son consentement d’une personne atteinte de troubles mentaux doit respecter le principe, résultant de l’article 66 de la Constitution, selon lequel la liberté individuelle ne saurait être entravée par une rigueur qui ne soit pas nécessaire (Conseil Constitutionnel, décision 2010/71 QPC du 26 novembre 2010). La protection de la liberté individuelle peut notamment trouver sa limite dans la protection de la sécurité de la personne objet des soins et des tiers auquel elle pourrait porter atteinte.
Selon l’article L. 3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être admise en soins psychiatriques sans son consentement sur la décision du directeur d’un établissement psychiatrique que si :
1° ses troubles rendent impossible son consentement ;
2° son état impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme.
Le juge doit contrôler en application de l’article L3216-1 du code de la santé publique la régularité des décisions administratives prises en matière d’hospitalisation complète. En application de l’article L3211-3 du code de la santé publique il doit aussi veiller, à ce que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles du patient soient adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en oeuvre du traitement requis.
Le juge ne peut dans le cadre de son contrôle se substituer à l’autorité médicale s’agissant de l’évaluation du consentement du patient, du diagnostic posé ou des soins.
Aux termes de l’article L 3212-1 II 2°, le directeur de l’établissement prononce la décision d’admission lorsqu’il existe, à la date d’admission, un péril imminent pour la santé de la personne, dûment constaté par un certificat médical. Ce certificat constate l’état mental de la personne malade, indique les caractéristiques de sa maladie et la nécessité de recevoir des soins. Il est également prévu que le certificat ne peut être établi que par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade.
En l’espèce, le Dr [Y] [F] n’est pas un médecin du CHS de [Localité 5] mais fait partie du service des urgences du Centre Hospitalier de [Localité 6] au vu du cachet figurant sur le certificat intial.
Il résulte de l’ensemble des éléments produits que la procédure relative à l’admission de Madame [P] [N] en hospitalisation complète est régulière.
Les troubles du comportement persistent et rendent impossible son consentement sur la durée. En effet, le péril imminent est toujours présent, Madame [P] [N] ayant des troubles délirants qu’elle ne reconnaît pas et demeure opposante aux soins, selon l’avis motivé.
L’état mental de Madame [P] [N] impose la poursuite des soins assortis d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète.
statuant publiquement, par ordonnance réputée contradictoire, en premier ressort,
DeclaRE recevable la requête présentée par le Directeur du Centre Hospitalier de [Localité 5] ;
MaintIENS la mesure d’hospitalisation complète dont fait l’objet Madame [P] [N] ;
RAPPELLE aux parties que :
– la présente ordonnance peut faire l’objet d’un appel devant le premier président de la Cour d’Appel et ce, dans un délai de 10 jours à compter de sa notification (articles R. 3211-18 et R. 3211-33 du code de la santé publique) ;
– cet appel doit être formé par déclaration transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’appel de Metz ;
– l’appel interjeté par la personne hospitalisée ou son avocat n’est pas suspensif en application de l’article L.3211-12-4 alinéa 2 du code de la santé publique ;
LAISSE les éventuels dépens de la présente procédure à la charge du Trésor Public ;
Ainsi rédigé au Tribunal Judiciaire de METZ, le 7 janvier 2025 par Doris BREIT, Vice-Présidente au Tribunal Judiciaire de METZ et signé par elle et le Greffier.
Le greffier La Vice-Présidente
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