L’Essentiel : Monsieur [D] [L], ressortissant irakien, a été soumis à une interdiction définitive du territoire français en raison de sa condamnation pour aide à l’entrée irrégulière. Le 24 octobre 2024, il a été placé en rétention administrative pour quatre jours, prolongée par le préfet du Pas-de-Calais pour des raisons de sécurité publique. Le 6 janvier 2025, une nouvelle demande de prolongation a été formulée. L’avocat de la préfecture a évoqué une menace à l’ordre public, tandis que l’avocat de Monsieur [L] a plaidé pour sa libération. Le juge a finalement autorisé la prolongation de la rétention pour quinze jours supplémentaires.
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Contexte JuridiqueL’affaire concerne Monsieur [D] [L], un ressortissant irakien né le 23 juillet 2004, qui a été soumis à une interdiction définitive du territoire français par la cour d’appel de Douai le 7 juin 2023. Cette décision a été prise en raison de sa condamnation pour des faits d’aide à l’entrée et au séjour irrégulier en bande organisée. Placement en Rétention AdministrativeLe 24 octobre 2024, un arrêté préfectoral a ordonné son placement en rétention administrative pour une durée initiale de quatre jours. Ce placement a été notifié à l’intéressé le même jour à 09h17. Par la suite, le préfet du Pas-de-Calais a demandé des prolongations de cette rétention, invoquant des raisons de sécurité publique. Demande de ProlongationLe 6 janvier 2025, le préfet a sollicité une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [L] pour une durée maximale de quinze jours, après plusieurs prolongations antérieures. L’intéressé, assisté par un avocat, a été informé de ses droits et des possibilités de recours. Observations des PartiesL’avocat de la préfecture a soutenu la prolongation de la rétention en raison d’une menace à l’ordre public, tandis que l’avocat de Monsieur [L] a demandé sa remise en liberté, arguant qu’il n’avait pas refusé les démarches consulaires et qu’il serait libéré dans quinze jours de toute façon. Décision du JugeLe juge a examiné la situation et a noté que la menace à l’ordre public pouvait être fondée sur des actes antérieurs, comme la condamnation de Monsieur [L]. Il a conclu que l’intéressé ne présentait pas de garanties suffisantes pour la mise en œuvre de la mesure de reconduite à la frontière, justifiant ainsi la prolongation de la rétention. Conclusion de l’OrdonnanceEn conséquence, le juge a autorisé la prolongation de la rétention administrative de Monsieur [D] [L] pour une durée maximale de quinze jours à compter du 7 janvier 2025. L’ordonnance a été notifiée à l’intéressé, qui a été informé de son droit de faire appel. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile ?La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4, dans certaines situations. Ces situations incluent : 1. L’étranger a fait obstruction à l’exécution de la décision d’éloignement. 2. L’étranger a présenté une demande de protection contre l’éloignement ou une demande d’asile dans le but de faire échec à la décision d’éloignement. 3. La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle durée maximale de quinze jours. Il est important de noter que la durée maximale de la rétention ne doit pas excéder quatre-vingt-dix jours. Comment la menace à l’ordre public est-elle appréciée dans le cadre de la rétention administrative ?L’appréciation de la menace à l’ordre public dans le cadre de la rétention administrative est précisée dans la jurisprudence et les articles du CESEDA. En effet, le juge peut considérer qu’une menace pour l’ordre public persiste en se basant sur des faits antérieurs, comme une condamnation pénale. Dans le cas présent, Monsieur [L] a été condamné à une interdiction définitive du territoire français pour des faits d’aide à l’entrée et au séjour irrégulier. Cette condamnation est un élément déterminant pour établir qu’il constitue une menace persistante pour l’ordre public. L’article L. 742-5 précise que la menace à l’ordre public peut être fondée sur des actes antérieurs, ce qui signifie qu’il n’est pas nécessaire de prouver un trouble à l’ordre public nouveau durant la dernière période de rétention. Ainsi, la réalité de la menace pour l’avenir est prise en compte, et le juge peut conclure à la nécessité de prolonger la rétention administrative en raison de la gravité des faits passés. Quels sont les droits de l’étranger pendant la rétention administrative ?Les droits de l’étranger pendant la rétention administrative sont énoncés dans les articles L. 743-9 et L. 743-24 du CESEDA. Ces articles stipulent que l’étranger a le droit d’être informé de ses droits pendant la rétention et des possibilités de recours contre les décisions le concernant. L’article L. 743-9 précise que l’étranger doit être informé de ses droits, notamment le droit d’être assisté par un avocat. Il doit également être informé des délais de recours disponibles. De plus, l’article L. 743-24 souligne que l’étranger a le droit d’être entendu et de présenter ses observations. Dans le cas de Monsieur [L], il a été assisté par un avocat et a exprimé son souhait d’être assisté tout au long de la procédure. Cela garantit que ses droits sont respectés et qu’il a la possibilité de contester les décisions prises à son encontre. Quelles sont les conséquences d’une décision de prolongation de la rétention administrative ?La décision de prolongation de la rétention administrative a des conséquences significatives pour l’étranger concerné. Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, si le juge ordonne la prolongation, celle-ci commence à compter de l’expiration de la dernière période de rétention. La prolongation peut être accordée pour une durée maximale de quinze jours, et si des circonstances particulières se présentent, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. Il est également important de noter que la durée totale de la rétention ne doit pas dépasser quatre-vingt-dix jours. Cela signifie que l’étranger peut être maintenu en rétention pour une période prolongée, ce qui peut avoir des implications sur sa situation personnelle, notamment en termes de séparation familiale, de conditions de vie et de santé mentale. En conclusion, la prolongation de la rétention administrative est une mesure qui doit être justifiée par des éléments concrets, et l’étranger a des droits qui doivent être respectés tout au long de cette procédure. |
Au nom du Peuple Français
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION
MINUTE: 25/32
Appel des causes le 07 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00048 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CU6
Nous, Mme DESWARTE Anne, Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assistée de Mme Samira CHAIB, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;
En présence de [R] [G], interprète en langue kurde, serment préalablement prêté ;
En présence de Maître Roxane GRIZON représentant de M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS ;
Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;
Monsieur [D] [L]
de nationalité Irakienne
né le 23 Juillet 2004 à [Localité 3] (IRAK), a fait l’objet :
– d’une interdiction définitive du territoire français prononcée par arrêt contradictoire de la cour d’appel de Douai en date du 07 juin 2023 ;
– d’un arrêté préfectoral ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcé le 24 octobre 2024 par M. PREFET DU PAS-DE-CALAIS , qui lui a été notifié le 24 octobre 2024 à 09h17 ;
Par requête du 06 Janvier 2025, arrivée par courrier électronique à 11h17 M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 28 octobre 2024, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 23 novembre 2024, prolongé par un délai de QUINZE JOURS selon l’ordonnance du 22 décembre 2024, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.
En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Me Hervé KRYCH, avocat au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations
L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. Je comprends un peu le français.
L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations ; sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé notamment sur le fondement de la menace à l’ordre public. Les diligences de l’administration sont constantes comme précisées dans la requête.
Me Hervé KRYCH entendu en ses observations : je sollicite la remise en liberté de Monsieur [L]. On évoque toujours de la menace à l’ordre public. On sait que dans 15 jours il sortira même si vous prolongez. Il n’a pas refusé les rendez-vous consulaires. Il faut lui rendre la liberté.
L’intéressé : je suis allé à l’ambassade. J’ai signé les papiers demandés. Je suis resté à disposition. On dit que je suis un danger pour la France mais de toute façon au pire je sors dans quinze jours. Je veux partir moi.
Audience suspendue et mise en délibéré.
Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
En l’espèce, il résulte de la procédure que Monsieur [L] a été condamné par la cour d’Appel de Douai par arrêt du 07 juin 2023 à une peine de trois ans d’emprisonnement ainsi qu’à une interdiction définitive du territoire français pour des faits d’aide à l’entrée et au séjour irrégulier commis en bande organisée.
Au regard de la gravité des faits commis et ayant justifié d’une peine d’interdiction définitive du territoire français, il y a lieu de juger que Monsieur [L] constitue une menace persistante pour l’ordre public, étant rappelé qu’à la différence de l’obstruction, la menace qui procède d’une logique préventive est une situation qui peut se fonder sur des actes antérieurs aux fins d’apprécier le risque de dangerosité future de sorte qu’il n’y a pas lieu de rechercher si un trouble à l’ordre public nouveau est intervenu au cours de la dernière période de rétention.
En effet, ce n’est pas l’acte troublant l’ordre public qui est recherché mais la réalité de la menace pour l’avenir. Le juge peut apprécier qu’une menace pour l’ordre public survient ou persiste dans les quinze derniers jours en se fondant sur des faits antérieurs telle qu’une condamnation à une peine d’interdiction définitive du territoire français comme en l’espèce.
L’intéressé ne présente pas de garanties suffisantes pour la mise à exécution de la mesure de reconduite à la frontière, des mesures de surveillance sont nécessaires.
Eu égard aux nécessités invoquées par Monsieur le Préfet, il convient d’accorder la prorogation demandée.
Autorisons l’autorité administrative à retenir Monsieur [D] [L] dans les locaux ne relevant pas de l’Administration pénitentiaire pour une prolongation de rétention administrative d’une durée maximale de QUINZE JOURS à compter du 07 janvier 2025
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 2] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01]) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.
L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,
décision rendue à 10h23
Ordonnance transmise ce jour à M. LE PREFET DU PAS DE CALAIS
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00048 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CU6
Décision notifiée à …h…
L’intéressé, L’interprète,
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