L’Essentiel : M. [G] [S], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative le 4 novembre 2024, suite à une obligation de quitter le territoire français. Le tribunal judiciaire de Lille a validé ce placement, ordonnant plusieurs prolongations. Le 4 janvier 2025, une prolongation exceptionnelle de 15 jours a été décidée, malgré l’appel de M. [G] [S] qui contestait la légitimité de sa rétention. Des actes d’obstruction, tels que le refus de se rendre à une audition consulaire, ont été constatés, justifiant ainsi la prolongation. L’ordonnance a été confirmée, l’appel déclaré recevable, mais la rétention maintenue.
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Contexte de la rétention administrativeM. [G] [S], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative le 4 novembre 2024 par le préfet du Nord, en raison d’une obligation de quitter le territoire français notifiée le 19 janvier 2024. Ce placement visait à préparer son éloignement vers l’Algérie. Décisions judiciaires successivesLe 6 novembre 2024, le tribunal judiciaire de Lille a validé le placement en rétention et a ordonné une prolongation de 26 jours, décision confirmée par la cour d’appel le 8 novembre 2024. Une nouvelle prolongation de 30 jours a été décidée le 4 décembre 2024, également confirmée par la cour d’appel le 6 décembre 2024. Prolongation exceptionnelle et appelLe 4 janvier 2025, le magistrat a ordonné une prolongation exceptionnelle de 15 jours de la rétention. M. [G] [S] a fait appel le 5 janvier 2025, demandant la main-levée de sa rétention, en soutenant qu’il n’y avait pas eu d’obstruction à son éloignement. Conditions de prolongation de la rétentionSelon l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers, une prolongation exceptionnelle de la rétention peut être demandée si l’étranger a fait obstruction à l’éloignement. En l’absence d’obstruction, la prolongation ne peut être accordée que si l’administration justifie que les obstacles à l’éloignement peuvent être levés rapidement. Actes d’obstruction constatésIl a été établi que M. [G] [S] avait refusé de se rendre à une audition consulaire le 3 janvier 2025, ce qui constitue un acte d’obstruction. Ce refus a été précédé d’un autre refus le 6 décembre 2024, malgré ses déclarations de maladie. Ces refus ont été interprétés comme des tentatives d’éviter l’exécution de l’éloignement. Confirmation de l’ordonnanceL’ordonnance de prolongation de la rétention a été confirmée, considérant que l’administration n’avait pas manqué de diligence et que l’intéressé avait effectivement obstrué le processus d’éloignement. L’appel a été déclaré recevable, mais l’ordonnance initiale a été maintenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la base légale pour la prolongation de la rétention administrative ?La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Cet article stipule que : « A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours : 1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ; 2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement : a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ; b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ; 3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. » Il est également précisé que le juge peut être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. La prolongation de la rétention ne peut excéder une durée maximale de quinze jours, et si des circonstances justifiant une nouvelle prolongation surviennent, celle-ci peut être renouvelée une fois, portant la durée maximale de rétention à quatre-vingt-dix jours. Quelles sont les conditions d’obstruction à l’éloignement ?L’obstruction à l’éloignement est définie par l’article L 742-5, qui précise que : « L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué. » L’obstruction est constituée par tout acte matériel effectué par action ou par omission dans le seul but d’éviter l’exécution de l’éloignement. Ainsi, le fait de donner ou de maintenir une identité ou une nationalité fausse pour éviter la délivrance d’un laissez-passer consulaire constitue un acte d’obstruction continue. De même, le refus d’embarquer à destination du pays d’éloignement est également considéré comme une obstruction. Dans le cas présent, M. [G] [S] a refusé de se rendre à une audition consulaire, ce qui a été interprété comme un acte d’obstruction, justifiant ainsi la prolongation de sa rétention. Quelles sont les implications de l’absence d’obstruction ?Lorsque l’étranger ne fait pas obstruction à l’éloignement, la prolongation de la rétention administrative ne peut être ordonnée que si l’administration française justifie que les obstacles administratifs à l’éloignement peuvent être levés « à bref délai ». Il est important de noter que le texte n’exige pas que la circonstance d’obstruction soit liée à des faits commis dans les 15 derniers jours de la période précédente. Ainsi, si aucune obstruction n’est invoquée, la prolongation de la rétention ne peut être accordée que sur la base de preuves tangibles que les obstacles à l’éloignement sont sur le point d’être levés. Dans le cas de M. [G] [S], l’administration a pu démontrer qu’il avait effectivement fait obstruction, ce qui a permis de justifier la prolongation de sa rétention. Quels sont les recours possibles contre la décision de prolongation de la rétention ?Les recours contre la décision de prolongation de la rétention administrative sont régis par les articles 612 et suivants du Code de procédure civile, ainsi que par l’article R743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile. Il est précisé que : « Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public. » Le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification de la décision. Le pourvoi doit être formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur. Dans le cas de M. [G] [S], il a exercé un recours en appel, et la décision de prolongation a été confirmée, ce qui lui laisse la possibilité d’un pourvoi en cassation dans le délai imparti. |
Chambre des Libertés Individuelles
N° RG 25/00026 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6MW
N° de Minute : 33
Ordonnance du lundi 06 janvier 2025
République Française
Au nom du Peuple Français
APPELANT
M. [G] [S]
né le 05 Avril 1977 à [Localité 2] (ALGERIE)
de nationalité Algérienne
Actuellement retenu au centre de rétention de [Localité 1]
dûment avisé, comparant en personne
assisté de Me Anne Sophie AUDEGOND-PRUD’HOMME, avocat au barreau de DOUAI, Avocat (e) commis (e) d’office et de Mme [T], interprète en langue kabylle
INTIMÉ
M.LE PREFET DU NORD
dûment avisé, absent non représenté
PARTIE JOINTE
M. le procureur général près la Cour d’Appel de Douai : non comparant
MAGISTRATE DELEGUÉE : Danielle THEBAUD, conseillère à la Cour d’Appel de Douai désignée par ordonnance pour remplacer le premier président empêché
assisté(e) de Véronique THÉRY, greffière
DÉBATS : à l’audience publique du lundi 06 janvier 2025 à 13 h 30
ORDONNANCE : prononcée publiquement à Douai, le lundi 06 janvier 2025 à
Le premier président ou son délégué,
Vu les articles L.740-1 à L.744-17 et R.740-1 à R.744-47 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et spécialement les articles R 743-18 et R 743-19 ;
Vu l’ordonnance du juge du tribunal judiciaire de LILLE en date du 04 janvier 2025 à 15 h 27 prolongeant la rétention administrative de M. [G] [S] ;
Vu l’appel interjeté par Maître ZAIRI venant au soutien des intérêts de M. [G] [S] par déclaration reçue au greffe de la cour d’appel de ce siège le 05 janvier 2025 à 16 H 36 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative ;
Vu l’audition des parties, les moyens de la déclaration d’appel et les débats de l’audience ;
M. [G] [S], né le 5 avril 1977 à [Localité 2] (Algérie) de nationalité algérienne, a fait l’objet d’un placement en rétention administrative ordonné par M. le préfet du Nord le 4 novembre 2024 à 15h25 pour l’exécution d’un éloignement vers pays de nationalité, que la base d’une obligation de quitter le territoire français prononcée et notifiée le 19 janvier 2024.
Par décision en date du 6 novembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille a déclaré régulier le placement en rétention administrative et a ordonné la prolongation du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 26 jours, décision confirmée le 8 novembre 2024 par la cour d’appel.
Par décision rendue le 4 décembre 2024, le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille a ordonné la prolongation du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 30 jours, décision confirmée le 6 décembre 2024 par la cour d’appel.
Vu l’article 455 du code de procédure civile,
Vu l’ordonnance du magistrat du siège du tribunal judiciaire de Lille en date du 4 janvier 2025 à 15h27, ordonnant une première prolongation exceptionnelle du placement en rétention administrative de l’appelant pour une durée de 15 jours,
Vu la déclaration d’appel de M. [G] [S] du 5 janvier 2025 à 16h36 sollicitant la main-levée du placement en rétention administrative.
Au soutien de sa déclaration d’appel l’appelant soutient le moyen suivant :
– absence d’obstruction.
Sur la troisième prolongation sollicitée
L’article L 742-5 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile modifié par la loi n° 2024-42 du 26 janvier 2024 articles 37 et 40 dispose que :
» A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours. »
Il convient de rappeler que lorsque la procédure se situe dans le cadre des articles précités et concerne une demande de troisième ou de quatrième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative :
– Il n’existe aucune obligation de justification d’une arrivée à « bref délai » des documents et titres en attente pour exécuter l’éloignement dès lors que l’étranger a fait obstruction à la mesure d’éloignement, dans les 15 jours précédents la demande, notamment par des demandes dilatoires d’asile ou de protection.
– En revanche, lorsqu’aucune obstruction ne peut être invoquée à l’encontre de l’étranger, une troisième prorogation exceptionnelle du placement en rétention administrative ne peut être ordonnée que si l’administration française est en mesure de justifier que les obstacles administratifs à la mise en ‘uvre de l’éloignement peuvent être levés » à bref délai ».
– Le texte n’exige pas, pour la troisième prolongation, que la circonstance prévue par son septième aliéna corresponde à des faits commis dans les 15 derniers jours de la période précédente.
L’obstruction est constituée par tout acte matériel effectué par action ou par omission dans le seul but d’éviter l’exécution de l’éloignement.
Ainsi le fait de donner ou de maintenir une identité ou une nationalité fausse de manière à éviter la délivrance d’un laisser passer consulaire constitue un acte d’obstruction continue relevant de l’article L.742-5 1° du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.
Constitue également une obstruction au sens de l’article L.742-5 1° du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile le fait de refuser d’embarquer à destination du pays d’éloignement.
En l’espèce, il ne peut être reproché à l’administration un manque de diligence, en revanche l’intéressé a commis un acte d’obstruction dans les 15 derniers jours de la précédente prolongation, en refusant de se rendre le 3 janvier 2025 à l’audition par le vice-consul d’Algérie, audition permettant son identification, et la délivrance d’un laissez-passer consulaire, ainsi qu’il résulte du procès-verbal établi le 3 janvier 2024 à 11h00, étant précisé que l’intéressé avait déjà refusé de se rendre le 6 décembre 2024 à une précédente audition consulaire. Si effectivement l’intéressé a indiqué qu’il refusait de s’y rendre par ce qu’il était malade, c’est uniquement pour les besoins de la cause, après qu’il lui a été indiqué par le policier, le risque encourue en cas de refus de présentation à l’audition consulaire, à l’identique du refus du 6 décembre 2024.
L’ordonnance dont appel sera confirmée.
DÉCLARONS l’appel recevable ;
CONFIRMONS l’ordonnance entreprise.
DISONS que la présente ordonnance sera communiquée au ministère public par les soins du greffe ;
DISONS que la présente ordonnance sera notifiée dans les meilleurs délais à l’appelant, à son conseil et à l’autorité administrative ;
LAISSONS les dépens à la charge de l’Etat.
Véronique THÉRY,
greffière
Danielle THEBAUD, conseillère
N° RG 25/00026 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6MW
REÇU NOTIFICATION DE L’ORDONNANCE DU 06 Janvier 2025 ET DE L’EXERCICE DES VOIES DE RECOURS :
Vu les articles 612 et suivants du Code de procédure civile et R743-20 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile
Pour information :
L’ordonnance n’est pas susceptible d’opposition.
Le pourvoi en cassation est ouvert à l’étranger, à l’autorité administrative qui a prononcé le maintien en zone d’attente ou la rétention et au ministère public.
Le délai de pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la notification.
Le pourvoi est formé par déclaration écrite remise au secrétariat greffe de la Cour de cassation par l’avocat au Conseil d’Etat et à la Cour de cassation constitué par le demandeur.
Reçu copie et pris connaissance le lundi 06 janvier 2025 :
– M. [G] [S]
– l’interprète
– l’avocat de M. [G] [S]
– l’avocat de M.LE PREFET DU NORD
– décision notifiée à M. [G] [S] le lundi 06 janvier 2025
– décision transmise par courriel pour notification à M.LE PREFET DU NORD et à Maître Anne sophie AUDEGOND-PRUD’HOMME le lundi 06 janvier 2025
– décision communiquée au tribunal administratif de Lille
– décision communiquée à M. le procureur général :
– copie au juge du tribunal judiciaire de LILLE
Le greffier, le lundi 06 janvier 2025
N° RG 25/00026 – N° Portalis DBVT-V-B7J-V6MW
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