L’Essentiel : Monsieur [T] [F], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative en France le 5 novembre 2024, suite à une obligation de quitter le territoire. Le 3 janvier 2025, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de cette rétention, justifiant la nécessité de maintenir Monsieur [F] au-delà de la période initiale. Lors de l’audience, l’intéressé a exprimé son souhait d’être assisté par un avocat, affirmant qu’il ne constituait plus une menace pour l’ordre public. Le tribunal, après examen, a conclu que les conditions de prolongation n’étaient pas réunies et a ordonné sa remise en liberté dans les vingt-quatre heures.
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Contexte de l’affaireMonsieur [T] [F], de nationalité algérienne, a été placé en rétention administrative en France le 5 novembre 2024, suite à une obligation de quitter le territoire français. Cette décision a été notifiée le même jour, interdisant son retour sur le territoire et ordonnant son placement en rétention pour une durée initiale de quatre jours. Prolongation de la rétentionLe 3 janvier 2025, le Préfet du Nord a demandé une prolongation de la rétention administrative de Monsieur [F] pour une durée maximale de quinze jours, invoquant la nécessité de maintenir l’intéressé au-delà de la période initiale. Cette demande a été justifiée par des décisions antérieures du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, qui avaient déjà prolongé la rétention à deux reprises. Déclarations de l’intéresséLors de l’audience, Monsieur [F] a exprimé son souhait d’être assisté par un avocat et a mentionné qu’il avait été condamné pour vol dans le passé, mais qu’il considérait cette période comme révolue. Il a insisté sur le fait qu’il ne constituait plus une menace pour l’ordre public et a demandé la mainlevée de sa rétention, soulignant son désir de retrouver sa vie avec sa femme présente en France. Arguments des avocatsL’avocat de la Préfecture a soutenu la prolongation de la rétention, arguant que la condamnation de Monsieur [F] représentait une menace pour l’ordre public. En revanche, l’avocate commise d’office a plaidé pour la mainlevée de la rétention, indiquant que la condamnation était ancienne et ne justifiait pas un maintien en rétention. Décision du tribunalLe tribunal a examiné les conditions de prolongation de la rétention selon l’article L. 742-5 du CESEDA. Il a conclu que les conditions requises pour une prolongation supplémentaire n’étaient pas réunies, notamment en raison de l’absence de preuves suffisantes établissant que Monsieur [F] constituait une menace pour l’ordre public. Par conséquent, la demande de prolongation a été rejetée. Conséquences de la décisionLe tribunal a ordonné la remise en liberté de Monsieur [F] dans un délai de vingt-quatre heures, tout en lui rappelant son obligation de quitter le territoire national. Il a également été informé de ses droits pendant cette période, notamment la possibilité de contacter un avocat et de faire appel de la décision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-5 du Code de l’Entrée et du Séjour des Étrangers et du Droit d’Asile (CESEDA). Cet article stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L. 742-4, lorsque certaines conditions sont remplies. Ces conditions incluent : 1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ; 2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement : 3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. Quelles sont les implications de la condamnation pénale sur la rétention administrative ?La condamnation pénale d’un étranger peut avoir des implications sur la rétention administrative, notamment en ce qui concerne la menace à l’ordre public. Dans le cas de M. [F], bien qu’il ait reconnu avoir été condamné pour vol en 2021, la juridiction a noté que cette condamnation était ancienne et que la peine encourue n’était pas précisée. L’article L. 742-5 du CESEDA précise que la menace pour l’ordre public doit être établie de manière concrète. Les mentions du FAED (Fichier des Auteurs d’Infractions Étrangers) ne suffisent pas à elles seules à établir un trouble à l’ordre public. Il est essentiel de démontrer que l’individu constitue réellement une menace, ce qui n’a pas été prouvé dans le cas de M. [F]. La juridiction a donc conclu que les conditions pour prolonger la rétention administrative n’étaient pas réunies, rejetant ainsi la demande de prolongation formulée par le Préfet. Quels sont les droits de l’étranger en rétention administrative ?Les droits des étrangers en rétention administrative sont clairement énoncés dans le CESEDA. En particulier, l’article L. 743-9 stipule que l’étranger a le droit d’être assisté par un avocat et d’être informé des possibilités et des délais de recours contre les décisions le concernant. De plus, l’article L. 743-24 précise que l’étranger doit être informé de ses droits pendant la rétention, y compris le droit de contester la décision de rétention. Il est également important de noter que l’étranger peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter pendant la période de rétention. Ces droits visent à garantir que l’étranger puisse exercer ses recours et bénéficier d’une assistance juridique adéquate. Quelles sont les conséquences d’une décision de rejet de prolongation de rétention ?Lorsqu’une demande de prolongation de la rétention administrative est rejetée, comme dans le cas de M. [F], cela entraîne plusieurs conséquences. Tout d’abord, l’intéressé doit être remis en liberté dans un délai de vingt-quatre heures suivant la notification de la décision au procureur de la République. De plus, l’étranger est informé qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant ce délai, ce qui signifie qu’il peut être soumis à des conditions spécifiques jusqu’à ce qu’une décision soit prise sur un éventuel appel ou sur le fond de l’affaire. Enfin, le rejet de la prolongation de la rétention ne signifie pas que l’étranger n’a pas l’obligation de quitter le territoire national. Cette obligation demeure, et l’intéressé doit être informé des conséquences de son statut d’étranger en situation irrégulière. |
Au nom du Peuple Français
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE BOULOGNE SUR MER
ORDONNANCE STATUANT SUR UNE DEMANDE DE PROLONGATION DE RETENTION
MINUTE: 25/29
Appel des causes le 05 Janvier 2025 à 10h00 en visioconférence
Divétrangers
N° étrN° RG 25/00032 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CUM
Nous, Madame METTEAU Pascale, Première Vice-Présidente au Tribunal judiciaire de BOULOGNE SUR MER, juge chargé du contrôle des mesures restrictives et privatives de libertés en droit des étrangers, assistée de Madame CHAIB Samira, Greffier, statuant en application des articles L.742-1, L.743-4, L.743-6 à L.743-8, L. 743-20 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile;
En présence de Madame [R] [C], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté;
En présence de Maître PATINIER Antoine, avocat au barreau de Boulogne-sur-Mer, représentant de M. LE PREFET DU NORD ;
Vu le Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile notamment en ses articles L. 741-1 et suivants ;
Monsieur [T] [F]
de nationalité Algérienne
né le 01 Janvier 2001 à [Localité 2] (ALGERIE), a fait l’objet :
d’une obligation de quitter le territoire français sans délai de départ volontaire, fixant le pays de destination de la reconduite, lui faisant interdiction de retour sur le territoire français et ordonnant son placement en rétention administrative pour une durée de quatre jours, prononcée le 05 novembre 2024 par M. PREFET DU NORD , qui lui a été notifié le 05 novembre 2024 à 17 heures 30 .
Par requête du 03 Janvier 2025, arrivée par courrier électronique à 15h37 M. LE PREFET DU NORD invoquant devoir maintenir l’intéressé au-delà de QUATRE JOURS, prolongé par un délai de VINGT-SIX JOURS selon l’ordonnance du 09 novembre 2024 du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, prolongé par un délai de TRENTE JOURS selon l’ordonnance du 05 décembre 2024 du tribunal judiciaire de Boulogne-sur-Mer, demande l’autorisation de prolonger ce délai pour une durée de QUINZE JOURS maximum.
En application des articles L.743-9 et L. 743-24 du Code de l’Entrée et du Séjour des Etrangers et du Droit d’Asile il a été rappelé à l’intéressé, assisté de Maître SEVERIN Marion, avocate au Barreau de BOULOGNE-SUR-MER et commis d’office, les droits qui lui sont reconnus pendant la rétention et a été informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant ; qu’il a été entendu en ses observations
L’intéressé déclare : Je souhaite être assisté d’un avocat. J’ai déjà été condamné pour des faits de vol. C’est fini tout ça maintenant. Je suis marié et j’ai une belle vie.
L’avocat de la Préfecture entendu en ses observations : Je sollicite la prolongation de la rétention administrative de l’intéressé. Monsieur déclare avoir été condamné. Je soutiens donc la menace à l’ordre public.
Maître Marion SEVERIN entendue en ses observations : j’allais vous demander une mainlevée de la rétention avant que Monsieur déclare avoir été condamné. Je n’ai donc pas d’observation à formuler.
L’intéressé : En 2021, j’étais jeune et j’ai volé.
Pour moi, la condamnation est ancienne et il n’est plus une menace à l’ordre public. Je vous demande la mainlevée.
L’intéressé : j’en ai marre. Ma femme est ici. J’ai envie de sortir.
Audience suspendue et mise en délibéré.
Selon l’article L. 742-5 du CESEDA, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours:
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
M. [F] a été placé en rétention administrative le 5 novembre 2024. La mesure a été prolongée le 9 novembre 2024 (décision confirmée par la cour d’appel de Douai le 11 novembre 2024) puis le 5 décembre 2024 (décision confirmée par la cour d’appel de Douai le 6 décembre 2024).
M. [F] étant dépourvu de son passeport, une demande de laissez passer consulaire a été faite auprès des autorités algériennes le 6 novembre 2024.
M. [F] a refusé une audition consulaire le 13 décembre mais cette audition est intervenue le 3 janvier 2025.
Malgré des relances et cette audition, les autorités algériennes n’ont pas répondu à la demande de laissez passer et aucun élément de la procédure ne permet de dire que la délivrance interviendra à bref délai.
La préfecture invoque le fait que M. [F] constituerait une menace pour l’ordre public au regard des inscriptions FAED le concernant. Cependant, si un relevé FAED faisant état de nombreuses inscriptions est produit, ce qui établit que M. [F] est défavorablement connu des services de police selon les indications de M. le Préfet et que son nom ressort à la consultation du FAED, il n’en demeure pas moins que les mentions du FAED sont insuffisantes pour retenir un trouble à l’ordre public ou une menace à l’ordre public. En effet, ces mentions ne démontrent pas que l’intéressé a réellement commis les faits mentionnés et qu’il est dangereux faute de toute condamnation, de reconnaissance des faits et en l’absence d’indication sur le devenir des procédures. M. [F] a reconnu lors de l’audience avoir été condamné en 2021 pour vol. Cependant, cette condamnation ancienne et pour laquelle la peine est totalement ignorée ne permet pas d’apprécier l’éventuelle dangerosité de Monsieur [F] et d’affirmer qu’il constituerait une menace pour l’ordre public.
Dès lors, les conditions de l’article L. 742-5 du CESEDA pour une troisième prolongation ne sont pas réunies et la demande de ce chef sera rejetée.
REJETONS la demande de prolongation de maintien en rétention administrative de M. LE PREFET DU NORD
ORDONNONS que Monsieur [T] [F] soit remis en liberté à l’expiration d’un délai de vingt quatre heures suivant la Notification à Monsieur le Procureur de la République de BOULOGNE SUR MER de la présente ordonnance sauf dispositions contraires prises par ce magistrat.
INFORMONS Monsieur [T] [F] qu’il est maintenu à la disposition de la justice pendant un délai de vingt quatre heures à compter de la notification de la présente ordonnance au procureur de la République et le cas échéant, jusqu’à ce qu’il soit statué sur l’effet suspensif de l’appel ou la décision au fond, que pendant ce délai il peut contacter un avocat, un tiers, rencontrer un médecin et s’alimenter.
RAPPELONS à l’intéressé qu’il a l’obligation de quitter le territoire national.
NOTIFIONS sur le champ la présente ordonnance par mail au CRA pour remise à l’intéressé qui, en émargeant ci-après, atteste avoir reçu copie et avisons l’intéressé de la possibilité de faire appel, devant le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué, de la présente ordonnance dans les vingt quatre heures de son prononcé ; l’informons que la déclaration d’appel doit être motivée et peut être transmise par tout moyen (notamment par mail via la boîte structurelle : [Courriel 3] ) au greffe de la Cour d’Appel de DOUAI (numéro de FAX du greffe de la Cour d’Appel: [XXXXXXXX01].) ; lui indiquons que seul l’appel formé par le ministère public peut être déclaré suspensif par le Premier Président de la Cour d’Appel ou son délégué.
L’avocat de la Préfecture, L’avocat, Le Greffier, Le Juge,
décision rendue à 11h17
Ordonnance transmise ce jour à M. LE PREFET DU NORD
Ordonnance transmise au Tribunal administratif de LILLE
N° étrN° RG 25/00032 – N° Portalis DBZ3-W-B7J-76CUM
Ordonnance notifiée à Monsieur le procureur de la République à
Décision notifiée à …h…
L’intéressé, L’intéressé,
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