L’Essentiel : Monsieur [H] [R], né en Algérie, est arrivé en France pour des raisons économiques. Après un arrêté d’obligation de quitter le territoire, il a été placé en rétention. Son avocate, Me Domnine ANDRE, conteste la prolongation de cette rétention, arguant que les conditions ne sont pas remplies et qu’aucun incident n’a été signalé. Malgré ses liens familiaux et son respect des lois, Monsieur [H] [R] se trouve dans une situation précaire, sans documents de voyage. La décision de prolonger sa rétention est confirmée, bien que son comportement ne justifie pas une menace à l’ordre public.
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Procédure et moyensLes articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) sont invoqués dans cette affaire. Un arrêté d’obligation de quitter le territoire a été pris par le préfet des Alpes-Maritimes le 02 septembre 2024, suivi d’un arrêté d’exécution de cette obligation le 03 novembre 2024. Ce même jour, une décision de placement en rétention a été notifiée. Le 02 janvier 2025, un magistrat a ordonné le maintien de Monsieur [H] [R] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire. Un appel a été interjeté par Monsieur [H] [R] le 03 janvier 2025. Déclarations de Monsieur [H] [R]Monsieur [H] [R] a expliqué qu’il est né en Algérie et qu’il est arrivé en France pour améliorer sa situation économique. Il a mentionné avoir voulu quitter la France mais n’ayant pas d’argent, il a cherché du travail. Il a des liens familiaux en Algérie et des oncles et tantes en France. Arguments de la défenseL’avocate de Monsieur [H] [R], Me Domnine ANDRE, a plaidé qu’il y a une méconnaissance de l’article L642-5 du CESEDA, arguant que les conditions pour la troisième prolongation de la rétention ne sont pas réunies. Elle a souligné qu’il n’a pas fait obstruction à la mesure et que la préfecture n’a pas prouvé que l’exécution de la mesure d’éloignement pourrait intervenir rapidement. Concernant la menace à l’ordre public, elle a noté qu’aucun incident n’est mentionné dans le registre de rétention et que son client n’a jamais été condamné. Réponse de Monsieur [H] [R]Monsieur [H] [R] a demandé à être libéré, exprimant son respect et sa surprise face à sa situation actuelle. Motifs de la décisionLa recevabilité de l’appel n’est pas contestée et aucune irrégularité n’est apparente dans le dossier. L’article L742-5 du CESEDA stipule que le magistrat peut être saisi pour prolonger la rétention dans certaines conditions. Les documents de voyage n’ont pas été délivrés par les autorités algériennes, mais des démarches ont été entreprises pour les obtenir. Le placement en rétention de Monsieur [H] est lié à des accusations graves, bien qu’il n’ait pas été condamné. Son comportement est jugé comme une menace pour l’ordre public. Conclusion de la décisionLa décision du premier juge est confirmée, et les parties sont informées de leur droit de se pourvoir en cassation dans un délai de deux mois. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention selon l’article L742-5 du CESEDA ?L’article L742-5 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) stipule que, à titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut être saisi pour prolonger le maintien en rétention au-delà de la durée maximale prévue à l’article L742-4, lorsque l’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours : 1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ; 2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement : a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L631-3 ; b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L754-1 et L754-3 ; 3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé, et il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai. Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public. L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué. Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours. Si l’une des circonstances mentionnées survient au cours de la prolongation exceptionnelle, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions, sans que la durée maximale de la rétention n’excède quatre-vingt-dix jours. Quelles sont les obligations de l’administration en matière de rétention selon l’article L741-3 du CESEDA ?L’article L741-3 du CESEDA précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ ». Cela implique que l’administration doit exercer toute diligence pour assurer le départ de l’étranger dans les meilleurs délais. Il est donc essentiel que la rétention ne soit pas prolongée au-delà de ce qui est nécessaire pour permettre l’éloignement effectif de l’étranger. Dans le cas de Monsieur [H] [R], bien que les documents de voyage n’aient pas été délivrés par les autorités consulaires algériennes, il a été auditionné et une copie de son passeport a été fournie. Les autorités consulaires ont été relancées, ce qui laisse penser que la perspective d’obtenir ces documents à bref délai n’est pas vaine. Comment la menace à l’ordre public est-elle définie dans le cadre de la rétention ?La menace à l’ordre public, dans le cadre de la rétention, doit être « sérieuse, actuelle et intervenir dans les 15 jours précédents ». Dans le cas présent, bien que Monsieur [H] [R] n’ait pas été condamné pour des faits d’apologie publique d’un acte de terrorisme ou de menace réitérée de crime, son comportement a été jugé comme caractérisant une menace pour l’ordre public. Cela signifie que même en l’absence de condamnation, des éléments de comportement peuvent justifier une rétention si ceux-ci sont considérés comme une menace actuelle et réelle pour la sécurité publique. Le registre de rétention ne mentionnant aucun incident ne suffit pas à écarter cette menace, surtout si des faits graves sont évoqués. Quelles sont les voies de recours possibles après la décision du magistrat ?Après la décision du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention, les parties ont la possibilité de se pourvoir en cassation. Le délai pour former ce pourvoi est de deux mois à compter de la notification de l’ordonnance. Le pourvoi doit être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation et doit être signé par un avocat au Conseil d’État ou de la Cour de cassation. Cette procédure permet de contester la décision rendue, en soulevant des questions de droit qui pourraient avoir été mal interprétées ou appliquées par le juge de première instance. Il est donc crucial pour les parties de respecter ce délai et de suivre les procédures appropriées pour garantir leurs droits. |
CHAMBRE 1-11, Rétention Administrative
ORDONNANCE
DU 3 JANVIER 2025
N° RG 25/00019 – N° Portalis DBVB-V-B7J-BOFUK
Copie conforme
délivrée le 03 Janvier 2025 par courriel à :
-l’avocat
-le préfet
-le CRA
-le JLD/TJ
-le retenu
-le MP
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention de [Localité 3] en date du 02 Janvier 2025 à 15H22.
APPELANT
Monsieur [H] [R]
né le 30 Décembre 1993 à [Localité 2] (MAROC)
de nationalité Algérienne
Comparant en visioconférence depuis le centre de rétention administrative de [Localité 3] en application des dispositions de la loi n°2024-42 du 26 janvier 2024.
Assisté de Maître Domnine ANDRE, avocate au barreau d’AIX-EN-PROVENCE, commise d’office.
et de Madame [F] [W], interprète en langue arabe , inscrite sur la liste des experts de la cour d’appel d’Aix-en-Provence.
INTIMÉ
Monsieur le PRÉFET DES ALPES-MARITIMES
Domicilié Centre administratif départemental des Alpes-Maritimes
[Adresse 1]
Non comparant, valablement avisé
MINISTÈRE PUBLIC
Avisé, non représenté
******
DÉBATS
L’affaire a été débattue en audience publique le 3 janvier 2025 devant Mme Nathalie FEVRE, Présidente de chambre à la cour d’appel déléguée par le premier président par ordonnance, assistée de Mme Carla D’AGOSTINO, greffière lors de l’audience ;
ORDONNANCE
Par décision réputée contradictoire,
Prononcée par mise à disposition au greffe le 3 janvier 2025 à 19h40,
Signée par Mme Nathalie FEVRE, Présidente de chambre et Monsieur Nicolas FAVARD , greffier lors du prononcé ;
Vu les articles L 740-1 et suivants du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) ;
Vu l’arrêté portant obligation de quitter le territoire pris par le préfet des Alpes-Maritimes en date du 02 septembre 2024, notifié le même jour à 14h40;
Vu l’arrêté portant exécution d’une obligation de quitter le territoire national pris le 03 novembre 2024 par la PREFECTURE DES ALPES MARITIMES , notifié le même jour à 13h55 ;
Vu la décision de placement en rétention prise le 03 novembre 2024 par la PREFECTURE DES ALPES MARITIMES notifiée le même jour à13h55 ;
Vu l’ordonnance du 02 Janvier 2025 rendue par le magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention décidant le maintien de Monsieur [H] [R] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire ;
Vu l’appel interjeté le 03 Janvier 2025 à 11H38 par Monsieur [H] [R] ;
Monsieur [H] [R] a comparu et a été entendu en ses explications ; il déclare
Je m’appelle [R] [H], je suis né le 30.12.1993 à [Localité 2] en Algérie. Je suis arrivé en France pour améliorer ma situation économique. Ma situation était catastrophique au pays. Je suis arrivé ici pour assurer mon avenir. J’ai eu une OQTF. J’ai voulu quitter la France mais je n’avais pas d’argent. J’ai cherché du travail. J’ai mes parents et ma fratrie en Algérie. J’ai des oncles et tantes à [Localité 4].
Me Domnine ANDRE est entendue en sa plaidoirie :
– Il y a une méconnaissance de l’article L642-5 du CESEDA : Les conditions de la 3ème prolongation ne sont pas réunies. Il n’a pas fait obstruction à la mesure, il n’a pas déposé de demande d’asile. La préfecture indique que la délivrance de laissez-passer doit intervenir à bref délai. La préfecture a relancé les autorités algériennes. Il n’est pas établi que les autorités algériennes vont répondre et que l’exécution de la mesure pourra intervenir à bref délai.
– menace à l’ordre public : la menace doit être sérieuse, actuelle et intervenir dans les 15 jours précédents . Le registre de rétention ne mentionne aucun incident. Il n’a jamais été condamné. Il travaille de manière non déclarée dans le bâtiment.
Le retenu a eu la parole en dernier : Avec tout le respect que je vous dois, je vous prie de me libérer. Je ne suis jamais retrouvé dans une telle situation.
Le préfet des Alpes Maritimes n’a pas comparu.
La recevabilité de l’appel contre l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention n’est pas contestée et les éléments du dossier ne font pas apparaître d’irrégularité.
Il s’agit de la troisime prolongation
L’article L742-5 du CESEDA prévoit:
A titre exceptionnel, le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparait dans les quinze derniers jours :
1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;
2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :
a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;
b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;
3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.
Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
L’étranger est maintenu en rétention jusqu’à ce que le juge ait statué.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la dernière période de rétention pour une nouvelle période d’une durée maximale de quinze jours.
Si l’une des circonstances mentionnées aux 1°, 2° ou 3° ou au septième alinéa du présent article survient au cours de la prolongation exceptionnelle ordonnée en application de l’avant-dernier alinéa, elle peut être renouvelée une fois, dans les mêmes conditions. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas quatre-vingt-dix jours.
L’article L741-3 du CESEDA prévoit
Un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet
Les documents de voyage n’ont pas été délivrés par les autorités consulaires algériennes dont relève l’intéressé.
Dans la mesure cependant où l’intéressé a été auditionné le 13 novembre 2024, où une copie de son passeport algérien a été fournie, où les autorités consulaires algériennes ont été relancées les 13 et 30 décembre 2024, la perspective de les obtenir à bref délai n’est pas vaine.
Le placement en rétention de monsieur [R] est consécutif à son placement en garde à vue pour des faits d’apologie publique d’un acte de terrorisme, menace réitérée de crime contre les personnes en raison de l’orientation sexuelle ou de l’identité de genre de la victime.
S’il n’a pas été condamné pour ces faits, le comportement que sous tend cette mise en cause caractérise une menace pour l’ordre public, actuelle et réelle.
Le moyen sera rejeté et la décision du premier juge confirmée
Statuant publiquement par décision Par décision réputée contradictoire en dernier ressort, après débats en audience publique,
Confirmons l’ordonnance du magistrat désigné pour le contrôle des mesures d’éloignement et de rétention du tribunal judiciaire de NICE en date du 02 Janvier 2025.
Les parties sont avisées qu’elles peuvent se pourvoir en cassation contre cette ordonnance dans un délai de 2 mois à compter de cette notification, le pourvoi devant être formé par déclaration au greffe de la Cour de cassation, signé par un avocat au conseil d’Etat ou de la Cour de cassation.
Le greffier Le président
Reçu et pris connaissance le :
Monsieur [H] [R]
Assisté d’un interprète
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