L’Essentiel : M. [W] [V], de nationalité indienne, a été mis en examen pour tentative de meurtre en avril 2019 et placé en détention provisoire à Paris. Le 17 novembre 2020, il a été relaxé par le tribunal judiciaire, décision confirmée par un certificat de non-appel en octobre 2024. Le 26 avril 2021, M. [V] a demandé une indemnisation pour sa détention, sollicitant 23 389 euros pour préjudice matériel et 15 000 euros pour préjudice moral. Cependant, lors de l’audience du 4 novembre 2024, la cour a déclaré sa requête irrecevable en raison de doutes sur son identité.
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Contexte de la requêteM. [W] [V], de nationalité indienne, a été mis en examen pour tentative de meurtre et port d’arme en avril 2019. Il a été placé en détention provisoire à Paris. En octobre 2020, les faits ont été requalifiés en violences volontaires, entraînant une détention prolongée. Décision de relaxeLe tribunal judiciaire de Paris a relaxé M. [V] le 17 novembre 2020, décision devenue définitive. Un certificat de non-appel a été émis le 29 octobre 2024, confirmant la fin des poursuites à son égard. Demande d’indemnisationLe 26 avril 2021, M. [V] a déposé une requête pour obtenir une indemnisation de sa détention provisoire, sollicitant 23 389 euros pour préjudice matériel et 15 000 euros pour préjudice moral, en vertu de l’article 149 du code de procédure pénale. Arguments des partiesLors de l’audience du 4 novembre 2024, M. [V] a demandé des analyses d’empreintes digitales et la désignation d’un expert pour évaluer ses préjudices. L’Agent Judiciaire de l’État a contesté la recevabilité de la requête, tandis que le Ministère Public a proposé une solution alternative. Recevabilité de la requêteLa cour a examiné la recevabilité de la requête selon les articles du code de procédure pénale. M. [V] a respecté le délai de six mois pour déposer sa demande après la décision de relaxe. Cependant, des doutes ont été soulevés quant à son identité par rapport à celle de M. [B] [V], qui avait été initialement mis en examen. Conclusion de la courLa cour a déclaré la requête de M. [W] [V] irrecevable, en raison de l’absence de preuve de son identité et de son placement en détention. Les dépens ont été laissés à sa charge, et la décision a été rendue le 6 janvier 2025. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la recevabilité de la requête d’indemnisation de M. [W] [V] ?La recevabilité de la requête d’indemnisation de M. [W] [V] est régie par les articles 149, 149-1, 149-2 et R.26 du Code de Procédure Pénale. Selon l’article 149, « la personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, relaxe ou acquittement devenue définitive, a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention. » Il est précisé que la demande d’indemnisation doit être faite dans un délai de six mois suivant la décision définitive. Ce délai commence à courir à partir du moment où la personne a été informée de son droit à réparation, ainsi que des dispositions des articles 149-1, 149-2 et 149-3. En l’espèce, M. [W] [V] a présenté sa requête le 26 avril 2021, dans le délai imparti, après que la décision de relaxe soit devenue définitive. Cependant, la requête est contestée sur la base de l’identité du requérant. En effet, la décision de relaxe concerne M. [B] [V], et non M. [W] [V]. Il n’existe aucune preuve tangible établissant que ces deux personnes sont identiques, ce qui rend la requête irrecevable. Ainsi, la requête de M. [W] [V] est déclarée irrecevable, car il ne prouve pas avoir été placé en détention provisoire de manière injustifiée. Quels sont les préjudices matériels et moraux demandés par M. [W] [V] ?M. [W] [V] sollicite une indemnisation pour deux types de préjudices : matériel et moral. Il demande spécifiquement 23 389 euros pour le préjudice matériel et 15 000 euros pour le préjudice moral. L’article 149 du Code de Procédure Pénale stipule que la réparation doit être intégrale, ce qui implique que le montant demandé doit correspondre à la réalité des préjudices subis. Le préjudice matériel peut inclure des pertes de revenus, des frais engagés durant la détention, ou d’autres pertes économiques directes. Le préjudice moral, quant à lui, est souvent plus difficile à quantifier, mais il peut inclure la souffrance psychologique, la stigmatisation sociale, ou d’autres impacts émotionnels résultant de la détention. Cependant, la demande de M. [W] [V] est contestée par l’Agent Judiciaire de l’Etat, qui argue que la requête est irrecevable. En conséquence, sans une preuve d’identité et de détention, les demandes d’indemnisation pour préjudices matériel et moral ne peuvent être examinées. Ainsi, la requête de M. [W] [V] pour réparation de ses préjudices est déclarée irrecevable. Quelles sont les implications de l’absence de certificat de non-appel ?L’absence de certificat de non-appel a des implications significatives sur la recevabilité de la requête d’indemnisation. L’article 149-1 du Code de Procédure Pénale précise que « la demande d’indemnisation doit être accompagnée d’un certificat de non-appel. » Ce certificat atteste que la décision de relaxe est devenue définitive et qu’aucun recours n’est en cours. Dans le cas présent, bien que M. [W] [V] ait fourni un certificat de non-appel daté du 29 octobre 2024, la question de son identité reste centrale. L’Agent Judiciaire de l’Etat a soulevé l’irrecevabilité de la requête en raison de l’impossibilité d’identifier le requérant. Sans une identification claire et sans lien établi entre M. [W] [V] et la décision de relaxe, le certificat de non-appel ne peut pas suffire à établir la recevabilité de la demande. Ainsi, l’absence d’une identification adéquate, couplée à l’absence de preuves tangibles, conduit à la déclaration d’irrecevabilité de la requête d’indemnisation. |
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Chambre 1-5DP
RÉPARATION DES DÉTENTIONS PROVISOIRES
DÉCISION DU 06 Janvier 2025
(n° , 4 pages)
N°de répertoire général : N° RG 21/07688 – N° Portalis 35L7-V-B7F-CDRAJ
Décision contradictoire en premier ressort ;
Nous, Jean-Paul BESSON, Premier Président de chambre, à la cour d’appel, agissant par délégation du premier président, assisté de Victoria RENARD, Greffière, lors des débats et de [J] [O], Greffière stagiaire, lors de la mise à disposition avons rendu la décision suivante :
non comparant
Représenté par Me Jonathan LEVY, avocat au barreau de PARIS substitué par Me Anna BEJAOUI, avocat au barreau de PARIS
Vu les pièces jointes à cette requête ;
Vu les conclusions de l’Agent Judiciaire de l’Etat, notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les conclusions du procureur général notifiées par lettre recommandée avec avis de réception ;
Vu les lettres recommandées avec avis de réception par lesquelles a été notifiée aux parties la date de l’audience fixée au 04 Novembre 2024 ;
Entendu Me Anna BEJAOUI représentant M. [W] [V],
Entendu Me Cyrielle LOUBEYRE, avocat au barreau de PARIS substituant Me Fabienne DELECROIX, avocat au barreau de PARIS, avocat représentant l’Agent Judiciaire de l’Etat,
Entendue Madame Marie-Daphnée PERRIN, avocate générale,
Les débats ayant eu lieu en audience publique, le conseil du requérant ayant eu la parole en dernier ;
Vu les articles 149, 149-1, 149-2, 149-3, 149-4, 150 et R.26 à R40-7 du Code de Procédure Pénale ;
* * *
M. [W] [V], né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 6] (Inde) de nationalité indienne, a été mis en examen des chefs de tentative de meurtre de de ports d’arme de catégorie D le 11 avril 2019 par un juge d’instruction du tribunal de grande instance de Paris. Par ordonnance du juge des libertés et de la détention de la même juridiction, il a été placé en détention provisoire à la maison d’arrêt de [5].
Par ordonnance du 12 octobre 2020, le juge d’instruction a prononcé une requalification des faits et le renvoi du requérant devant le tribunal correctionnel de Paris du chef de violences volontaires commises sous la menace d’une arme et ayant entraîné une ITT supérieure à 8 jours. Il a été maintenu en détention provisoire.
Par jugement du 17 novembre 2020, la 13e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris a relaxé M. [V] des fins de la poursuite et il a été remis en liberté. Cette décision est devenue définitive à son égard comme en atteste le certificat de non appel du 29 octobre 2024.
Le 26 avril 2021, M. [V] a adressé une requête au premier président de la cour d’appel de Paris en vue d’être indemnisé de sa détention provisoire en application de l’article 149 du code de procédure pénale et sollicite dans celle-ci, de :
– Déclarer recevable et bien fondée la demande d’indemnisation ;
– Allouer à M. [W] [V] la somme de 23 389 euros au titre de la réparation de on préjudice matériel ;
– Allouer à M. [W] [V] la somme de 15 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral.
Par conclusions en réplique n°1 déposées et soutenues oralement lors de l’audience de plaidoiries du 04 novembre 2024, M. [W] [V] a demandé au premier président de :
Avant dire-droit
– Inviter le procureur de la République à ordonner une analyse des empreintes digitales de M. [W] [V] alias [L] [V] aux fins de comparaison des empreintes digitales avec celles recueillies dans le cadre de l’information judiciaire JI JI202 1900020 ;
– Désigner un expert ayant pour mission de se prononcer sur les préjudices présentés par M. [W] [V] alias [B] [V] reprenant les termes de la nomenclature Dintilhac ;
A titre principal
– Fixer le préjudice de M. [W] [V] alias [B] [V] aux sommes ci-dessous mentionnées :
‘ 23 389 euros au titre de la réparation de son préjudice matériel ;
’15 000 euros au titre de la réparation de son préjudice moral.
Dans ses dernières conclusions en défense, notifiées par RPVA et déposées le 11 septembre 2024, développées oralement, l’agent judiciaire de l’Etat demande au premier président de :
– Déclarer irrecevable la requête de M. [I] [V] en l’absence de certificat de non-appel et pour impossibilité d’identification du requérant ;
A titre subsidiaire
– Surseoir à statuer dans l’attente de la réception du dossier pénal.
Le Ministère Public, dans ses dernières conclusions notifiées le 23 août 2024 et reprises oralement à l’audience, conclut :
A titre principal
– A l’irrecevabilité de la requête ;
A titre subsidiaire
– A la recevabilité de la requête pour une détention provisoire de 586 jours ;
– A la réparation du préjudice moral dans les conditions indiquées ;
– Au rejet de la demande de réparation du préjudice matériel.
Sur la recevabilité
Au regard des dispositions des articles 149, 149-1, 149-2 et R.26 du code de procédure pénale, la personne qui a fait l’objet d’une détention provisoire au cours d’une procédure terminée à son égard par une décision de non-lieu, relaxe ou acquittement devenue définitive, a droit, à sa demande, à la réparation intégrale du préjudice moral et matériel que lui a causé cette détention.
Il lui appartient dans les six mois de cette décision, de saisir le premier président de la cour d’appel dans le ressort de laquelle celle-ci a été prononcée, par une requête, signée de sa main ou d’un mandataire, remise contre récépissé ou par lettre recommandée avec accusé de réception au greffe de la cour d’appel. Cette requête doit contenir l’exposé des faits, le montant de la réparation demandée et toutes indications utiles prévues à l’article R.26 du même code.
Le délai de six mois ne court à compter de la décision définitive que si la personne a été avisée de son droit de demander réparation ainsi que des dispositions des articles 149-1, 149-2 et 149-3 du code précité.
En l’espèce, M. [V] a présenté sa requête en vue d’être indemnisé de sa détention provisoire le 26 avril 2021, dans le délai de six mois suivant le jour où la décision de relaxe est devenue définitive. Cette requête contenant l’exposé des faits, le montant de la réparation demandée, ainsi qu’ultérieurement le certificat de non appel en date du 29 octobre 2024, est signée par son avocat et la décision d’acquittement n’est pas fondée sur un des cas d’exclusions visé à l’article 149 du code de procédure pénale.
Pour autant, la requête en indemnisation est présentée par M. [W] [V] né le [Date naissance 1] 1994 à [Localité 6] en Inde, alors que la décision de relaxe rendue le 17 novembre 2020 par la 13e chambre correctionnelle du tribunal judiciaire de Paris concerne M. [B] [V] né le [Date naissance 2] 1998 à [Localité 4] en Inde. C’est d’ailleurs sous cette même identité qu’il a été mis en examen et placé en détention provisoire le 11 avril 2019 et qui figure sur le bulletin numéro 1 du casier judiciaire.
C’est ainsi que rien ne permet d’affirmer que MM. [B] [V] et [W] [V] constituent la même personne et aucun élément n’est versé aux débats en ce sens. La simple affirmation qu’il s’agit de la même personne n’est pas suffisante pour ordonner une expertise, en l’absence de justificatifs laissant à penser que cette expertise aurait un sens. En outre, la procédure en indemnisation d’une détention provisoire devenue injustifiée est une procédure civile qui est régie par les dispositions du code de procédure civile qui ne permettent pas d’ordonner au procureur de la République de faire réaliser une comparaison des empreintes digitales.
Dans ces conditions, il y a lieu de constater que la requête en indemnisation présentée par M. [W] [V] est irrecevable car il ne démontre pas qu’il a bien fait l’objet d’un placement en détention provisoire aujourd’hui injustifié.
Déclarons la requête de M. [W] [V] irrecevable ;
Laissons les dépens à la charge de M. [W] [V] ;
Décision rendue le 06 Janvier 2025 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
LA GREFFI’RE LE MAGISTRAT DÉLÉGUÉ
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