Conflit de voisinage et nuisances en copropriété : enjeux de responsabilité et de conformité réglementaire.

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Conflit de voisinage et nuisances en copropriété : enjeux de responsabilité et de conformité réglementaire.

L’Essentiel : L’immeuble en copropriété a vu M. [C] louer un local commercial à la société [8] pour un commerce de traiteur libanais. Suite à des nuisances olfactives, le syndicat des copropriétaires a saisi le tribunal, qui a ordonné la cessation des activités de cuisson. En octobre 2021, le syndicat a assigné M. [C] et la société [8] pour résilier le bail. Après le départ de la société, le syndicat a renoncé à ses demandes principales, mais a réclamé des frais et des dommages-intérêts. Le tribunal a condamné in solidum M. [C], la SCI Valadon et la société [8] à verser 3.000 € au syndicat.

Contexte de l’affaire

L’immeuble situé à l’adresse mentionnée est en copropriété. M. [S] [C] était propriétaire d’un local commercial au rez-de-chaussée, qu’il a loué à la société [8] pour y exploiter un commerce de traiteur/restauration libanaise au début de l’année 2020.

Plainte pour nuisances olfactives

Le syndicat des copropriétaires a déposé une plainte en raison de nuisances olfactives provenant du local loué. Il a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris pour obtenir la cessation de l’activité de la société [8]. Le 23 novembre 2020, le juge a ordonné à la société de cesser toute activité de cuisson jusqu’à la mise en conformité des locaux.

Procédures judiciaires ultérieures

Le 6 octobre 2021, le syndicat a assigné M. [C] et la société [8] pour obtenir la résiliation du bail commercial et l’interdiction de l’activité nuisible. Entre-temps, M. [C] a vendu le local à la SCI Valadon, et la société [8] a quitté les lieux.

Demandes du syndicat des copropriétaires

Dans ses dernières écritures, le syndicat a renoncé à ses demandes principales en raison du départ de la société [8], mais a demandé des frais de procédure et des dommages-intérêts à M. [C], la SCI Valadon et la société [8].

Réponses de M. [C] et de la SCI Valadon

M. [C] et la SCI Valadon ont demandé le rejet des demandes du syndicat, affirmant que l’activité de traiteur n’était pas prohibée par le règlement de copropriété et que les travaux effectués pour la mise en conformité étaient réguliers.

Position de la société [8]

La société [8] a indiqué avoir fermé son commerce et souhaité se désister de la procédure, ayant été dissoute et liquidée.

Décision du tribunal

Le tribunal a constaté le renoncement du syndicat à ses demandes principales et a reçu l’intervention de la SCI Valadon. Il a rejeté les demandes de la société [8] et les demandes reconventionnelles de M. [C] et de la SCI Valadon contre le syndicat.

Condamnations et frais

Le tribunal a condamné in solidum la société [8], M. [C] et la SCI Valadon à verser 3.000 € au syndicat des copropriétaires au titre des frais de justice, ainsi qu’aux dépens. La société [8] a également été condamnée à garantir la SCI Valadon des condamnations prononcées contre elle.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conséquences juridiques du trouble de voisinage causé par l’activité commerciale ?

Le trouble de voisinage est un concept juridique qui se réfère à des nuisances causées par une activité qui affecte la jouissance paisible d’un bien. En l’espèce, le syndicat des copropriétaires a constaté des nuisances olfactives dues à l’activité de la société [8], ce qui a conduit à une action en justice.

Selon l’article 1240 du Code civil :

« Tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »

Cet article établit la responsabilité délictuelle, permettant au syndicat des copropriétaires de demander réparation pour les nuisances subies.

De plus, l’article 30 alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965 stipule que :

« Les travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble ne peuvent être exécutés qu’avec l’autorisation de l’assemblée générale. »

Dans ce cas, la société [8] a réalisé des travaux sans autorisation, ce qui constitue une infraction aux règles de la copropriété.

Ainsi, le tribunal a jugé que le syndicat des copropriétaires était fondé à agir contre les nuisances causées par la société [8] et a ordonné la cessation de l’activité litigieuse.

Quelle est la portée de la renonciation aux demandes principales par le syndicat des copropriétaires ?

La renonciation aux demandes principales par le syndicat des copropriétaires a des implications significatives sur la procédure. En effet, cette renonciation signifie que le syndicat abandonne ses prétentions initiales, ce qui peut influencer le jugement final.

L’article 1351 du Code civil précise que :

« Le renoncement à un droit peut être exprès ou tacite. »

Dans ce cas, le syndicat a clairement exprimé sa volonté de renoncer à ses demandes principales suite au départ de la société [8]. Cela a pour effet de rendre sans objet les demandes de cessation d’activité et de résiliation du bail commercial.

Cependant, le syndicat maintient ses demandes au titre des frais de procédure, ce qui est conforme à l’article 700 du Code de procédure civile, qui permet à une partie de demander le remboursement des frais exposés.

Ainsi, le tribunal a pris acte de cette renonciation, ce qui a conduit à un recentrage des débats sur les frais de procédure et les dépens.

Quelles sont les conditions d’autorisation des travaux en copropriété selon la loi du 10 juillet 1965 ?

La loi du 10 juillet 1965 régit les règles de fonctionnement des copropriétés, notamment en ce qui concerne l’autorisation des travaux. L’article 25 b de cette loi stipule que :

« Les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires. »

De plus, l’article 30 alinéa 4 précise que :

« Lorsque l’assemblée générale refuse l’autorisation prévue à l’article 25 b, tout copropriétaire peut être autorisé par le tribunal judiciaire à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d’amélioration. »

Dans le cas présent, la SCI Valadon a demandé une autorisation judiciaire pour des travaux déjà réalisés, ce qui est problématique. En effet, le tribunal a jugé que la demande d’autorisation était irrecevable car les travaux avaient déjà été exécutés sans autorisation préalable de l’assemblée générale.

Ainsi, la SCI Valadon n’a pas pu obtenir la ratification a posteriori des travaux, ce qui souligne l’importance de respecter les procédures d’autorisation en matière de copropriété.

Comment la responsabilité des parties est-elle engagée dans le cadre de la copropriété ?

La responsabilité des parties dans le cadre d’une copropriété peut être engagée pour divers motifs, notamment en raison de la négligence ou de l’inobservation des règles de la copropriété. L’article 1241 du Code civil précise que :

« Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence. »

Dans cette affaire, la SCI Valadon a soutenu que le syndic avait engagé une action sans autorisation de l’assemblée générale, ce qui constituerait une négligence. Cependant, le tribunal a noté que la SCI Valadon n’a pas prouvé que le syndicat des copropriétaires avait commis une faute.

En conséquence, la demande de dommages-intérêts de la SCI Valadon a été rejetée, car elle n’a pas démontré que le préjudice subi était directement causé par une faute du syndicat.

Ainsi, la responsabilité dans le cadre de la copropriété est complexe et nécessite une preuve claire de la faute et du lien de causalité entre cette faute et le dommage subi.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1]
Expéditions
exécutoires
délivrées le :

8ème chambre
1ère section

N° RG 21/12664
N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

N° MINUTE :

Assignation du :
06 Octobre 2021

JUGEMENT
rendu le 07 Janvier 2025

DEMANDEUR

Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2], représenté par son syndic, la S.A.S. ORALIA PIERRE & GESTION
[Adresse 6]
[Localité 4]

représenté par Maître Jérôme CHAMARD, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #P0056

DÉFENDEURS

Monsieur [S] [C]
[Adresse 1]
[Localité 7]

représenté par Maître Marina ISRAEL EDERY de la SELARL ULMANN EDERY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A449

S.A.S. [8], objet d’une liquidation amiable
[Adresse 2]
[Localité 4]

représentée par Maître Rana CHAABAN, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0535
Décision du 07 Janvier 2025
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/12664 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

PARTIE INTERVENANTE

S.C.I. VALADON
[Adresse 3]
[Localité 5]

représentée par Maître Marina ISRAEL EDERY de la SELARL ULMANN EDERY, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A449

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame Laure BERNARD, Vice-Présidente
Monsieur Julien FEVRIER, Juge
Madame Muriel JOSSELIN-GALL, Vice-Présidente

assistés de Madame Justine EDIN, Greffière,

DÉBATS

A l’audience du 02 Octobre 2024 tenue en audience publique devant Monsieur Julien FEVRIER, juge rapporteur, qui, sans opposition des avocats, a tenu seul l’audience, et, après avoir entendu les conseils des parties, en a rendu compte au Tribunal, conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile.

JUGEMENT

Prononcé par mise à disposition au greffe
Contradictoire
En premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

L’immeuble situé [Adresse 2] est constitué en copropriété.

M. [S] [C] était propriétaire d’un local commercial (lot 2) au rez-de-chaussée de l’immeuble.

Au début de l’année 2020, M. [C] a loué ce local commercial à la société [8] afin d’y exploiter un commerce de traiteur / restaurant de cuisine libanaise.

Se plaignant de nuisances olfactives en provenance du local loué par la société [8], le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] a saisi le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris afin d’obtenir la cessation de l’activité litigieuse.

Par ordonnance du 23 novembre 2020, le juge des référés du tribunal judiciaire de Paris a relevé que l’activité exercée par la société [8] constituait un trouble manifestement illicite en ce qu’elle contrevenait à la législation en vigueur et au règlement de copropriété et a ordonné sous astreinte à la société [8] de cesser l’exercice de toute activité de cuisson jusqu’à la mise en conformité des locaux.
Décision du 07 Janvier 2025
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/12664 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

Par la suite, par actes d’huissier de justice du 6 octobre 2021, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] a assigné M. [C] et la société [8] devant le tribunal au fond afin d’obtenir la résiliation du bail commercial conclu entre les défendeurs et l’interdiction de poursuite de l’activité litigieuse.

En cours de procédure, M. [C] a vendu le lot 2 à la SCI Valadon et la société [8] a quitté ce local commercial.

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 31 août 2023, le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] demande au tribunal de :

 » Vu la loi du 10 juillet 1965, notamment ses articles 8, 9, 14, 15, 25 b et 30 alinéa 4,

Vu l’article 1341-1 du Code Civil,

Constater que le Syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] renonce à ses demandes principales compte tenu du départ de l’exploitant à l’origine des nuisances,

Dire et juger Monsieur [S] [C], la SCI VALADON et la Société [8] irrecevables et mal fondés en leurs demandes,

En conséquence, les en débouter purement et simplement,

Condamner in solidum Monsieur [S] [C], la SCI VALADON et la Société [8] à payer au syndicat des copropriétaires de l’immeuble sis [Adresse 2] une somme de 7.000 Euros par application des dispositions de l’article 700 du Code de Procédure Civile,

Condamner in solidum Monsieur [S] [C], la SCI VALADON et la Société [8] aux entiers dépens de l’instance dont distraction au profit de Maître Jérôme CHAMARD conformément aux dispositions de l’article 699 du Code de Procédure Civile,

Rappeler l’exécution provisoire de droit du jugement à intervenir « .

*

Dans leurs dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 12 septembre 2023, M. [C] et la société Valadon demandent au tribunal de :

 » Vu l’article 55 du décret du 17 mars 1967 ;
Vu les articles 9, 328, 329, 699 et 700 du code procédure civile ; les articles 1240 et 1241 du code civil
Vu l’article 63-1 du Règlement Sanitaire Départemental de la ville de [Localité 9] ;
Vu les stipulations du règlement de copropriété et du contrat de bail commercial ;
Vu les pièces et les références jurisprudentielles versées aux débats

Il est demandé au Tribunal de céans de :

Recevoir la constitution de Me Marina EDERY ;

Recevoir la SCI VALADON en son intervention volontaire principale;

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

I) A TITRE LIMINAIRE

Débouter le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] de l’ensemble de ses demandes, fins, et conclusions

II) A TITRE PRINCIPAL

Débouter le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions

En conséquence :
Rejeter l’ensemble des demandes du SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2].

III) A TITRE RECONVENTIONNEL

Déclarer recevable et bien fondée la demande de la SCI VALADON

En conséquence :
Constater que les travaux diligentés par la société [8] pour la mise en conformité de la gaine d’extraction des odeurs et vapeurs ne portent pas atteinte à la destination de l’immeuble,

Ratifier a posteriori l’exécution desdits travaux vue leur régularité affirmée par l’inspecteur de la ville de [Localité 9],

Autoriser la SCI VALADON à introduire les modifications d’ordre esthétique conformément aux plans à transmettre au syndicat des copropriétaires de l’immeuble à l’occasion de la prochaine assemblée générale des copropriétaires ;

Condamner le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] à verser à la SCI VALADON une somme de 127.000 € à titre de dommages et intérêts en réparation de son préjudice ;

Condamner le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] à verser à la SCI VALADON une somme de 5.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamner le SYNDICAT DES COPROPRIETAIRES DE L’IMMEUBLE DU [Adresse 2] aux entiers dépens.

IV) A TITRE SUBSIDIAIRE

Condamner la société [8] à garantir la SCI VALADON de toutes condamnations qui seraient prononcées à son encontre dans le cadre de la présente instance conformément aux stipulations du bail « .

*

Dans ses dernières écritures notifiées par le réseau privé des avocats le 15 mars 2022, la société [8] demande au tribunal de:

 » Vu les dispositions de l’article 1240 du Code de procédure civile ;
Vu les articles 9, 117, 699 et 700 du même Code ;
Vu l’article 55 du décret du 17 mars 1967 ;
Vu l’article 63 du Règlement Sanitaire Départemental de la ville de [Localité 9] ;
Tous droits et moyens des parties demeurant réservés, il est demandé à Messieurs les Présidents et juges du Tribunal Judiciaire de Paris :

Rejetant toutes fins, moyens et conclusions contraires,

I) A titre liminaire
Débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] de l’ensemble de ses demandes fins et conclusions, pour irrégularité de l’acte introduction d’instance.

II) A titre principal
Débouter le syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence :
Rejeter l’ensemble des demandes du syndicat des copropriétaires de l’immeuble du [Adresse 2].

III) A titre reconventionnel
Déclarer recevable et bien fondé la demande de la société [8]

En conséquence :
Constater que les travaux faits pour l’installation d’un conduit d’extraction des odeurs et vapeurs ne portent pas atteinte à la destination de l’immeuble,

Ratifier a posteriori l’exécution desdits travaux vue leur régularité affirmé par l’inspecteur de la ville de [Localité 9],

L’autoriser en conséquence à introduire les modifications d’ordre esthétique conformément aux plans à transmettre au Syndicat des copropriétaires de l’immeuble à l’occasion de la prochaine assemblée générale des copropriétaires,

dire et juger que ces travaux seront réalisés à ses frais,

condamner le Syndicat des copropriétaires à lui verser une somme de 4.500 € au titre de l’article 1240 du code civil,

condamner le Syndicat des copropriétaires à lui verser une somme de 5.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamner le Syndicat des copropriétaires aux entiers dépens dont recouvrement au profit de Me CHAABAN, au titre de l’article 699 du Code de procédure civile « .

Néanmoins, dans un message RPVA du 16 juin 2023 adressé au tribunal et soumis au contradictoire, le conseil de la société [8] indique que sa cliente a fermé le commerce exploité, qu’elle a mis fin au bail, qu’elle a été dissoute et sera liquidée et enfin qu’elle souhaite se désister.

*

Il est renvoyé aux conclusions récapitulatives des parties pour l’exposé des moyens de droit et de fait à l’appui de leurs prétentions conformément à l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de la procédure a été ordonnée le 26 février 2024 et l’affaire a été plaidée le 2 octobre 2024. La décision a été mise en délibéré au 7 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

Le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] fait valoir que :
– le local litigieux était initialement affecté à une activité de cordonnerie qui ne générait aucune nuisance ;
– au début de l’année 2020, M. [C] a loué le local à la société [8] qui a ouvert en mai 2020 un commerce de traiteur / restaurant de cuisine libanaise ;
– dès le début du mois de mai 2020, les occupants de l’immeuble ont subi des nuisances olfactives ;
– l’inspecteur de salubrité de la mairie de [Localité 9] a relevé de nombreuses non conformités à l’origine des nuisances ;
– malgré l’ordonnance du juge des référés ayant ordonné la cessation de l’exercice de toute activité de cuisson, les nuisances ont persisté et se sont accrues ;
– la société [8] a réalisé des travaux affectant l’aspect extérieur de l’immeuble sans autorisation de l’assemblée générale, notamment en prolongeant le conduit d’extraction d’air en toiture ;
– les nuisances et non-conformités sont relevées par l’inspecteur de la mairie de [Localité 9] en 2021 ;
– il a été contraint de solliciter la résiliation judiciaire du bail et la suppression des travaux irréguliers ;
– en cours d’instance, M. [C] a vendu les murs du local commercial à la SCI Valadon ;
– la société [8] a quitté les locaux et ces derniers sont désormais occupés par un torréfacteur ;
– les nuisances ayant cessé, il renonce à ses demandes, sauf celle au titre des frais de procédure ;
– la question de l’habilitation du syndic à agir est devenue sans objet ;
– sur la demande reconventionnelle tendant à autoriser a posteriori le prolongement du conduit d’extraction, elle méconnaît les règles d’ordre public qui régissent les copropriétés ;
– la demande d’autorisation de travaux n’est recevable qu’à la condition que les travaux n’aient pas été exécutés, ni commencés, en application de l’article 30 alinéa 4 de la loi du 10 juillet 1965 ;
– la demande d’autorisation est donc irrecevable car les travaux ont été exécutés ;
– la SCI Valadon a accepté le départ de la société [8] et le versement d’une indemnité ;
– ce départ se trouve justifié par la faute du bailleur qui a donné à bail un local inadapté à l’activité de traiteur / restaurant ;
– la SCI Valadon a acquis le lot de M. [C] en connaissance de cause.

La société Valadon et M. [C] font valoir que :
– par acte authentique du 13 avril 2022, la société Valadon a acquis les locaux donnés à bail par M. [C] à la société [8] ;
– la société Valadon a été informée de la procédure et y intervient volontairement ;
– la société Valadon s’est obligée à faire son affaire personnelle de la procédure et est subrogée dans les droits de M. [C] ;
– le principe même d’installation d’un conduit d’extraction a été autorisé par l’assemblée générale des copropriétaires en 2010 ;
– l’activité de restaurant ou traiteur n’est pas prohibée par le règlement de copropriété ;
– par acte du 14 décembre 2022, la SCI Valadon a accepté de résilier amiablement et par anticipation le bail commercial et moyennant le versement d’une indemnité forfaitaire de résiliation de 127.000€ ;
– le local était adapté à l’activité de restaurant / traiteur ;
– le locataire a quitté les lieux en raison de la situation de blocage instaurée par le demandeur qui refuse l’installation d’une gaine d’extraction conforme à l’activité envisagée ;
– la partie demanderesse ne justifie pas de l’habilitation du syndic à agir en justice ;
– les travaux exécutés sur le conduit d’extraction ne portent pas atteinte à la destination de l’immeuble et sont conformes au règlement de copropriété et au règlement sanitaire de la ville de [Localité 9] ;
– elle demande à être autorisée à maintenir le conduit d’extraction en l’état et à effectuer les modifications d’ordre esthétique conformément aux plans à transmettre au syndicat des copropriétaires à l’occasion de la prochaine assemblée générale ;
– les travaux ont été exécutés afin de se conformer à l’ordonnance de référé qui imposait précisément une mise en conformité des locaux ;
– elle invoque les dispositions des articles 1240 et 1241 du code civil s’agissant de sa demande de dommages-intérêts ;
– le syndic a engagé une action sans y avoir été autorisé et sa négligence est flagrante ;
– si la procédure n’avait pas été introduite à tort, elle n’aurait pas eu à verser l’indemnité de 127.000 € à sa locataire pour le dédommager d’un trouble de jouissance paisible ;
– le lien de causalité entre le comportement fautif du demandeur et le dommage est rapporté.

La société [8] fait valoir en dernier lieu que :
– elle a fermé son commerce et mis fin au bail ;
– elle a été dissoute et sera liquidée ;
– elle souhaite se désister.

Sur l’intervention volontaire de la SCI Valadon

S’agissant de l’intervention volontaire de la SCI Valadon, ayant racheté le lot 2 de M. [C] le 13 avril 2022 suivant attestation notariale produite à la procédure et venant aux droits de ce dernier en application des termes de l’acte de vente, elle n’est pas contestée par les autres parties.

Il conviendra donc de la recevoir.

Sur les demandes principales du syndicat des copropriétaires

A titre liminaire, le tribunal constate que le syndicat des copropriétaires demandeur renonce finalement à ses demandes principales suite au départ de la société [8], locataire du local commercial concerné par le litige. Le syndicat des copropriétaires maintient uniquement ses demandes au titre des frais irrépétibles et des dépens.

Sur les demandes de la société [8]

La société [8] a indiqué au tribunal par message RPVA du 16 juin 2023 vouloir se désister et a justifié avoir engagé une procédure de dissolution anticipée le 12 juin 2023 en vue de sa liquidation amiable.

Néanmoins, elle n’a pas actualisé ses dernières conclusions du 15 mars 2022 pour prendre des conclusions de désistement.

Elle n’a pas non plus déposé de dossier de plaidoirie avec ses pièces pour justifier ses demandes figurant dans ses conclusions du 15 mars 2022.

Ces demandes sont devenues sans objet du fait de son départ des locaux loués par la SCI Valadon.

Au demeurant, la société [8] ne peut plus soulever la nullité de l’assignation devant le tribunal conformément à l’article 789 du code de procédure civile. Cet incident relevait de la compétence exclusive du juge de la mise en état ainsi que le précise justement le syndicat des copropriétaires demandeur.

Dans ce contexte, l’ensemble des demandes de la société [8] seront rejetées.

Sur les demandes reconventionnelles de la SCI Valadon

Sur la demande d’autorisation judiciaire de travaux

La SCI Valadon indique que la gaine d’extraction préexistante a été prolongée par la société [8], sans toucher aux façades de l’immeuble et afin de remédier dans l’urgence à une situation considérée comme une infraction par le demandeur et la Ville de Paris.

Décision du 07 Janvier 2025
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/12664 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

Elle demande à être autorisée à maintenir le conduit d’extraction en l’état et à effectuer les modifications d’ordre esthétique conformément aux plans à transmettre au syndicat des copropriétaires de l’immeuble à la prochaine assemblée générale des copropriétaires. Elle n’indique pas le fondement juridique de sa demande de  » ratification a posteriori de travaux exécutés uniquement afin de se conformer aux prescriptions de l’ordonnance du juge des référés « .

Vu l’article 25 b de la loi du 10 juillet 1965 qui dispose que ne sont adoptées qu’à la majorité des voix de tous les copropriétaires les décisions concernant l’autorisation donnée à certains copropriétaires d’effectuer à leurs frais des travaux affectant les parties communes ou l’aspect extérieur de l’immeuble et conformes à la destination de celui-ci.

Vu l’article 30 de la loi du 10 juillet 1965 qui prévoit que lorsque l’assemblée générale refuse l’autorisation prévue à l’article 25 b, tout copropriétaire peut être autorisé par le tribunal judiciaire à exécuter, aux conditions fixées par le tribunal, tous travaux d’amélioration.

Vu l’article 10 du décret du 17 mars 1967 qui précise que lorsque le projet de résolution porte sur l’application du b de l’article 25 de la loi du 10 juillet 1965, il est accompagné d’un document précisant l’implantation et la consistance des travaux.

Sur ce,

Les conditions dans lesquelles le tribunal peut autoriser des travaux sur la base de l’article 30 précité ne sont pas réunies.

En effet, d’une part, il n’est pas justifié d’un refus préalable de l’assemblée générale des copropriétaires d’autoriser les travaux litigieux de prolongation du conduit d’extraction d’air vicié.

D’autre part, la demande d’autorisation judiciaire est irrecevable après exécution de travaux non autorisés, ce qui est précisément le cas.

Dès lors, la demande d’autorisation de travaux de la SCI Valadon, irrecevable et au surplus mal fondée, sera rejetée.

Sur la demande de dommages-intérêts de la SCI Valadon contre le syndicat des copropriétaires

Vu les articles 1240 et 1241 du code civil invoqués, qui prévoient que tout fait quelconque de l’homme qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. Chacun est responsable du dommage qu’il a causé non seulement par son fait, mais encore par sa négligence ou par son imprudence.

Sur ce,

En l’espèce, la SCI Valadon fait valoir que le syndic de la copropriété du [Adresse 2] a engagé la présente action sans autorisation de l’assemblée générale des copropriétaires et qu’il s’agit d’une négligence flagrante de ce syndic. Elle indique que son préjudice, résultant du versement d’une indemnité de résiliation anticipée du bail à la société [8], trouve son origine dans cette négligence du syndic.
Décision du 07 Janvier 2025
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/12664 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

La SCI Valadon évoque une faute du syndic de copropriété qui n’est pas partie à la procédure.

Elle ne précise pas quelle serait la faute délictuelle commise par le syndicat des copropriétaires lui-même.

En outre, l’indemnité de résiliation anticipée a été versée par la SCI Valadon dans le cadre d’un accord négocié par elle, de sorte qu’elle ne constitue pas un préjudice causé par un tiers, mais un choix de gestion lui permettant également de retrouver un local commercial libre.

La demande de dommages-intérêts sera donc rejetée.

Sur les demandes accessoires

Le syndicat des copropriétaires demandeur verse aux débats plusieurs rapports de l’inspecteur de salubrité de la Mairie de [Localité 9] du 24 juillet 2020 et du 7 juillet 2021, desquels il ressort que des nuisances causées par l’activité de la société [8] ont été constatées, ainsi que des infractions au règlement sanitaire départemental, notamment le débouché de l’extraction d’air vicié en toiture à moins de 8 mètres des fenêtres de toit de l’appartement du dernier étage.

Il produit également des constats d’huissier confirmant les nuisances olfactives dont se plaignent plusieurs occupants de l’immeuble.

Il en résulte que le syndicat des copropriétaires était bien fondé à engager une action judiciaire contre le locataire commercial à l’origine des nuisances et contre le bailleur de ce local commercial (responsable des troubles de voisinage causés par son locataire commercial), ce dans le but de faire cesser définitivement l’activité génératrice de ces nuisances.

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

La société [8] et ses bailleurs successifs, M. [C] et la SCI Valadon, parties perdantes, supporteront in solidum les dépens.

Maître Jérôme Chamard, avocat, sera autorisé à recouvrer les dépens dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

En application de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a pas lieu à cette condamnation.

La société [8] et ses bailleurs successifs, M. [C] et la SCI Valadon seront condamnés in solidum à verser au syndicat des copropriétaires demandeur une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Décision du 07 Janvier 2025
8ème chambre 1ère section
N° RG 21/12664 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVI2W

La société [8] devra garantir la SCI Valadon des condamnations prononcées contre elle au titre des dépens et frais irrépétibles dans la limite de 10.000 €, conformément au protocole d’accord conclu entre elles le 14 décembre 2022 et versé à la procédure.

En application des articles 514 et 515 du code de procédure civile, les décisions de première instance sont de droit exécutoires à titre provisoire à moins que la loi ou la décision rendue n’en dispose autrement. Le juge peut écarter l’exécution provisoire de droit, en tout ou partie, s’il estime qu’elle est incompatible avec la nature de l’affaire. Il statue d’office ou à la demande d’une partie.

En l’espèce, il n’y a pas lieu de suspendre l’exécution provisoire du jugement.

Les parties seront déboutées du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes plus amples ou contraires.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant après débats en audience publique, en premier ressort et par jugement contradictoire, par mise à disposition au greffe:

CONSTATE le renoncement par le syndicat des copropriétaires demandeur à ses demandes principales suite au départ de la société [8], locataire du local commercial concerné par le litige;

RECOIT l’intervention volontaire de la SCI Valadon ;

REJETTE l’ensemble des demandes de la société [8];

REJETTE l’ensemble des demandes reconventionnelles de M. [S] [C] et de la SCI Valadon contre le syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] ;

CONDAMNE in solidum la société [8], M. [S] [C] et la SCI Valadon à verser au syndicat des copropriétaires du [Adresse 2] une somme de 3.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMNE in solidum la société [8], M. [S] [C] et la SCI Valadon aux dépens ;

AUTORISE maître Jérôme Chamard, avocat, à recouvrer les dépens dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile ;

CONDAMNE la société [8] à garantir la SCI Valadon des condamnations prononcées contre elle au titre des dépens et frais irrépétibles dans la limite de 10.000 € ;

DIT n’y avoir lieu à suspendre l’exécution provisoire ;

DEBOUTE les parties du surplus de leurs demandes formées au titre des dépens et des frais irrépétibles ainsi que de leurs autres demandes.

Fait et jugé à Paris le 07 Janvier 2025.

La Greffière La Présidente


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