Responsabilité contractuelle et obligations de remise en état dans le cadre d’un bail à construction

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Responsabilité contractuelle et obligations de remise en état dans le cadre d’un bail à construction

L’Essentiel : La société Ceetrus France, propriétaire d’un terrain à [Localité 4], a engagé un litige avec Bail Actea Immobilier concernant des travaux de remise en état. En décembre 2019, Ceetrus a réclamé 154.888 euros pour des réparations, mais un désaccord sur le montant a surgi malgré un protocole d’accord. En avril 2022, Ceetrus a assigné Bail Actea devant le tribunal de Lille, demandant 204.356,42 euros et des dommages-intérêts. Le tribunal a finalement condamné Bail Actea à verser 139.228,70 euros pour les travaux, tout en déboutant Ceetrus de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive.

Contexte de l’affaire

La société Ceetrus France, anciennement connue sous le nom de société anonyme des marchés usines Auchan, est propriétaire d’un terrain à [Localité 4]. En 1990, elle a conclu un bail à construction avec la société Cavabail pour y édifier un bâtiment commercial. Ce bail a été transféré à la société Bail Immo Nord, puis à la société Bail Actea Immobilier en 2000.

Litige sur les travaux de remise en état

En décembre 2019, Ceetrus France a mis en demeure Bail Actea Immobilier de payer 154.888 euros pour des travaux de remise en état des menuiseries extérieures et du revêtement du sol. Un constat d’huissier a été réalisé en janvier 2020, et un protocole d’accord a été signé en début 2020, mais un désaccord est survenu concernant le montant des travaux nécessaires.

Procédure judiciaire

En avril 2022, Ceetrus France a assigné Bail Actea Immobilier devant le tribunal judiciaire de Lille. Dans ses conclusions de janvier 2024, elle a demandé le déboutement de Bail Actea Immobilier et le paiement de 204.356,42 euros, ainsi que des dommages et intérêts pour résistance abusive. De son côté, Bail Actea Immobilier a demandé le déboutement de Ceetrus France et a réclamé 15.608,48 euros pour la taxe foncière 2020.

Arguments des parties

Ceetrus France a soutenu que Bail Actea Immobilier était responsable de l’entretien du bâtiment et devait payer pour les travaux de remise en état. Bail Actea Immobilier a contesté cette demande, arguant que les travaux étaient dus à la vétusté et que l’entretien des menuiseries incombait au locataire exploitant, Maxi Jouets.

Décision du tribunal

Le tribunal a condamné Bail Actea Immobilier à payer 139.228,70 euros à Ceetrus France pour les travaux de reprise, tout en déboutant Ceetrus France de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive. Bail Actea Immobilier a également été condamnée à payer 15.608,48 euros pour la taxe foncière 2020, ainsi qu’aux dépens et à verser 2.500 euros à Ceetrus France au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les obligations du preneur en matière d’entretien selon le bail à construction ?

La société Ceetrus France soutient que la société Bail Actea Immobilier est tenue de conserver les constructions en bon état d’entretien, conformément à l’article L.251-1 du Code de la construction et de l’habitation, qui stipule :

« Constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s’engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d’entretien pendant toute la durée du bail. »

De plus, l’article 606 du Code civil précise que les grosses réparations, telles que celles des gros murs et des voûtes, sont à la charge du preneur dans le cadre d’un bail à construction.

Le contrat de bail à construction des 27 avril et 20 juin 1990, dans son paragraphe 5, stipule également que :

« Le preneur devra, pendant tout le cours du bail, conserver en bon état d’entretien les constructions édifiées et tous les aménagements qu’il y aura apportés, et effectuer à ses frais et sous sa responsabilité au fur et à mesure qu’elles deviendront nécessaires, les réparations de toute nature, y compris les grosses réparations telles qu’elles sont définies par l’article 606 du code civil. »

Ainsi, la société Bail Actea Immobilier a l’obligation de réaliser les réparations nécessaires pour maintenir le bâtiment en bon état, y compris les travaux de ravalement.

Quelles sont les conséquences de la vétusté sur les obligations du preneur ?

La société Bail Actea Immobilier invoque l’article 1755 du Code civil, qui stipule que le preneur n’est pas tenu des travaux rendus nécessaires par la vétusté, c’est-à-dire par une usure normale due à l’écoulement du temps.

Cet article précise que :

« Le preneur n’est pas tenu des réparations qui sont nécessaires par la vétusté, sauf clause contraire. »

Dans le cadre de ce litige, la société Bail Actea Immobilier soutient que les dégradations constatées relèvent de l’usure normale et ne sont pas de sa responsabilité. Cependant, le tribunal a constaté que les dégradations observées, telles que les fissures et les tâches sur la façade, ne relèvent pas de l’usure normale, mais d’un défaut d’entretien imputable au preneur.

Ainsi, même si la vétusté peut exonérer le preneur de certaines réparations, dans ce cas précis, les dégradations sont considérées comme résultant d’un manque d’entretien, ce qui engage la responsabilité de la société Bail Actea Immobilier.

Quelles sont les implications de la résistance abusive dans ce litige ?

La société Ceetrus France a demandé des dommages-intérêts pour résistance abusive, définie par la jurisprudence comme le comportement du débiteur refusant de manière persistante d’exécuter son obligation.

Bien que cette notion ne soit pas explicitement définie dans le Code civil, le tribunal a rappelé que :

« La résistance abusive se caractérise par un refus persistant d’exécuter une obligation. »

Dans ce cas, la société Ceetrus France n’a pas été entièrement accueillie dans ses demandes, ce qui signifie que la société Bail Actea Immobilier a exercé ses droits en justice de manière légitime.

Par conséquent, le tribunal a débouté la société Ceetrus France de sa demande de dommages-intérêts pour résistance abusive, considérant que la société Bail Actea Immobilier avait des raisons valables de contester les demandes de la bailleresse.

Comment sont déterminés les dépens et les frais dans ce type de litige ?

Les dépens sont régis par l’article 696 du Code de procédure civile, qui stipule que :

« La partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie. »

Dans ce litige, la société Bail Actea Immobilier, en tant que partie succombante, a été condamnée à payer les dépens.

En ce qui concerne les frais non compris dans les dépens, l’article 700 du Code de procédure civile prévoit que :

« Le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. »

Le tribunal a ainsi condamné la société Bail Actea Immobilier à verser à la société Ceetrus France une somme de 2.500 euros au titre de l’article 700, en tenant compte de l’équité et de la situation économique de la partie condamnée.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE
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Chambre 02
N° RG 22/02361 – N° Portalis DBZS-W-B7G-V7X2

JUGEMENT DU 07 JANVIER 2025

DEMANDERESSE:

S.A. CEETRUS FRANCE, immatriculée au RCS de LILLE METROPOLE sous le n°969201532, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domicilié audit siège.
[Adresse 5]
[Localité 2]
représentée par Me Jérôme LESTOILLE, avocat au barreau de LILLE, Me Maja ROCCO, avocat au barreau de PARIS

DÉFENDERESSE:

S.A. BAIL ACTEA IMMOBILIER
[Adresse 1]
[Localité 3]/FRANCE
représentée par Me Delphine CHAMBON, avocat au barreau de LILLE

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Président : Claire MARCHALOT, Vice Présidente
Assesseur : Maureen DE LA MALENE, Juge
Assesseur : Sarah RENZI, Juge
Greffier : Dominique BALAVOINE, Greffier

DÉBATS

Vu l’ordonnance de clôture en date du 20 Septembre 2024.

A l’audience publique du 05 Novembre 2024, date à laquelle l’affaire a été mise en délibéré,les parties ont été avisées que le jugement serait rendu le 07 Janvier 2025.

Vu l’article 804 du Code de procédure civile, Maureen DE LA MALENE, juge préalablement désigné par le Président, entendu en son rapport oral, et qui, ayant entendu la plaidoirie, en a rendu compte au Tribunal.

JUGEMENT : contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au Greffe le 07 Janvier 2025 par Claire MARCHALOT, Présidente, assistée de Dominique BALAVOINE, Greffier.

EXPOSÉ DU LITIGE

La société anonyme des marchés usines Auchan, devenue la société Ceetrus France, est propriétaire d’un terrain sis [Adresse 6] à [Localité 4].

Suivant acte authentique des 27 avril et 20 juin 1990, elle a donné à bail à construction cette parcelle afin d’y édifier un bâtiment commercial, à la société Cavabail pour une durée de trente ans avec effet au 8 janvier 1990.

Cette dernière a consenti un contrat de bail commercial à la société Maxi Jouets par acte du 27 décembre 1994, renouvelé le 2 mars 2010.

La société Cavabail a cédé le bail à construction à la société Bail Immo Nord, à laquelle vient désormais aux droits la société Bail Actea Immobilier, suivant acte notarié du 16 octobre 2000.

Par courrier remis par exploit d’huissier en date du 2 décembre 2019, la société Ceetrus France a mis en demeure la société Bail Actea Immobilier de lui payer la somme de 154.888 euros au titre des travaux de reprise des menuiseries extérieures et du revêtement du sol du parvis et du parking.

La société Ceetrus France a fait dresser un procès-verbal de constat de l’état des locaux loués par huissier au contradictoire de la société Bail Actea Immobilier le 13 janvier 2020.

La société Ceetrus France et la société Bail Actea Immobilier ont régularisé un protocole d’accord constatant le terme du bail à construction les 28 janvier et 3 février 2020.

Un désaccord est survenu entre les parties sur le montant des travaux de remise en état des locaux loués.

* * *

Par acte d’huissier en date du 1er avril 2022, la société Ceetrus France a assigné la société Bail Actea Immobilier devant le tribunal judiciaire de Lille.

En l’état de ses dernières conclusions notifiées le 24 janvier 2024, elle sollicite du tribunal, au visa de l’article L.251-1 du code de la construction et de l’habitation, et des articles 606, 1103 et 1134 ancien du code civil, de :
– débouter la société Bail Actea Immobilier de toutes ses demandes ;
– condamner la société Bail Actea Immobilier à lui payer la somme de 204.356,42 euros TTC outre les intérêts au taux légal à compter du 02 décembre 2019, date de la mise en demeure ;
– condamner la société Bail Actea Immobilier à lui payer la somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ;
– condamner la société Bail Actea Immobilier à lui payer la somme de 15.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que de tous les frais et les dépens.

En l’état de ses dernières conclusions notifiées le 22 mai 2024, la société Bail Actea Immobilier demande au tribunal, au visa des mêmes articles, de :
– débouter la société Ceetrus France de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;
– condamner la société Ceetrus France à lui verser la somme de 15.608,48 euros au titre de la taxe foncière 2020 prorata temporis, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la facture du 2 octobre 2020 et, subsidiairement, des premières conclusions valant demande de paiement du 4 janvier 2023, avec anatocisme ;
– condamner la société Ceetrus France à lui payer une somme de 15.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive ainsi que procédure abusive ;

– condamner la société Ceetrus France à lui verser la somme de 10.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner la société Ceetrus France au paiement des dépens d’instance.

Pour un plus ample exposé des faits, prétentions et moyens des parties, le tribunal se réfère expressément à leurs dernières écritures, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 20 septembre 2024 et l’affaire a été fixée à plaider à l’audience du 5 novembre 2024.

La décision a été mise en délibéré au 7 janvier 2025.

MOTIFS DE LA DECISION

SUR LES DEMANDES DE CONDAMNATION FORMEES PAR LA SOCIETE CEETRUS FRANCE

I. Au titre des travaux de remise en état :

La société Ceetrus France sollicite la condamnation de la société Bail Actea Immobilier au paiement de la somme de 204.356,42 euros TTC avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2019 au titre de la remise en état de l’ouvrage ayant fait l’objet du bail à construction.
Elle soutient ainsi que le preneur est tenu légalement et contractuellement de conserver les constructions en bon état d’entretien, comprenant la prise en charge des réparations de toute nature, en ce compris les grosses réparations visées à l’article 606 du code civil.
La bailleresse produit ainsi un audit technique patrimonial et un procès-verbal d’huissier pour établir le mauvais état de certaines parties du bâtiment et des voiries, à savoir les menuiseries extérieures en ce compris le revêtement en acier qui constitue les façades, et les enrobés extérieurs du parvis et des parkings, outre des devis de reprise.
Elle ajoute que les travaux de 2013 évoqués par la société Bail Actea Immobilier, et dont elle ne rapporte pas la preuve de les avoir effectivement exécutés, s’inscrivent dans l’entretien normal du bâtiment durant le contrat de bail.

La société Bail Actea Immobilier s’oppose à une telle demande aux motifs que conformément à l’article 1755 du code civil relatif au contrat de louage, le preneur n’est pas tenu des travaux rendus nécessaires par la vétusté, c’est-à-dire par une usure normale du fait de l’écoulement du temps, qui restent à la charge du bailleur en l’absence de clause contraire au contrat de bail à construction.
Or, elle a elle-même respecté ses engagements contractuels en restituant un immeuble entretenu, la société Ceetrus France ne rapportant pas la preuve du contraire.
La défenderesse ajoute que par ailleurs l’entretien des menuiseries est à la charge du locataire exploitant, à savoir la société Maxi Toys, et que celui du parking appartient à l’Association syndicale libre (ASL).
Elle conclut enfin que la bailleresse ne rapporte pas la preuve d’un préjudice, celle-ci n’ayant pas exécuté les travaux de reprise.

L’article 1134 du code civil dans sa version applicable au présent litige dispose que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

L’article L.251-1 alinéa 1er du code de la construction et de l’habitation dispose que constitue un bail à construction le bail par lequel le preneur s’engage, à titre principal, à édifier des constructions sur le terrain du bailleur et à les conserver en bon état d’entretien pendant toute la durée du bail.

L’article « charges et conditions » du contrat de bail à construction des 27 avril et 20 juin 1990 stipule en son paragraphe 5 relatif à l’entretien des constructions que « le preneur devra, pendant tout le cours du bail, conserver en bon état d’entretien les constructions édifiées et tous les aménagements qu’il y aura apportés, et effectuer à ses frais et sous sa responsabilité au fur et à mesure qu’elles deviendront nécessaires, les réparations de toute nature, y compris les grosses réparations telles qu’elles sont définies par l’article 606 du code civil et par l’usage, ainsi que le remplacement de tous éléments de la construction et de son aménagement, et tous travaux de ravalement prescrits ».

Aux termes de l’article 606 du code civil, les grosses réparations sont celles des gros murs et des voûtes, le rétablissement des poutres et des couvertures entières.
Celui des digues et des murs de soutènement et de clôture aussi en entier.
Toutes les autres réparations sont d’entretien.

Au titre de la façade et des menuiseries extérieures :
En l’espèce, il ressort notamment du procès-verbal de constat établi par huissier le 13 janvier 2020 et des différentes photographies qui y sont annexées que :
– la façade en tôle du bâtiment est en particulier mauvais état, avec une différence de coloration entre les surfaces haute et basse des façades, et de très nombreuses tâches noirâtres et verdâtres sur la partie basse, particulièrement présentes en pied de façade,
– la porte d’entrée du bâtiment est également en très mauvais état, du fait notamment d’un effritement des pourtours de la menuiserie outre des tâches noirâtres et rougeâtres,
– le bas de la façade avant présente de petites fissures.

Aussi, il ressort de ce seul constat d’huissier que le bâtiment donné à bail à construction à la société Bail Actea Immobilier est en particulier mauvais état, ce qui ne relève pas de l’usure normale de l’ouvrage mais bien d’un défaut d’entretien imputable au preneur. Il en est ainsi de l’intégralité de la façade, c’est-à-dire des pans de bardage et d’acier, contrairement à ce qu’allègue la défenderesse.

Or, conformément aux dispositions légales applicables en la matière, mais surtout du contrat de bail des 27 avril et 20 juin 1990, le preneur a l’obligation non seulement de restituer les constructions édifiées en bon état d’entretien, mais également de prendre en charge les réparations importantes, et notamment les travaux de ravalement prescrits.

Pour autant, la société Bail Actea Immobilier ne rapporte pas la preuve d’avoir déjà procédé, depuis l’édification de l’immeuble, au ravalement des façades qui présentent aujourd’hui un mauvais état général. Elle ne rapporte pas davantage la preuve que ces travaux ont été déjà pris en charge par le locataire exploitant, étant précisé que les obligations de ce dernier au titre du contrat de bail commercial ne soustrait par le preneur du bail à construction de ses propres obligations, s’agissant de deux contrats bien distincts ne concernant pas les mêmes parties.

La société Ceetrus France est donc bien fondée à solliciter la condamnation de la défenderesse au paiement du montant des travaux de reprise, étant rappelé qu’il est constant que l’indemnisation du bailleur, à raison des dégradations qui affectent le bien loué et qui sont la conséquence de l’inexécution par le preneur de ses obligations, n’est subordonnée ni à l’exécution de réparations par le bailleur, ni à l’engagement effectif de dépenses, ni à la justification d’une perte de valeur locative.

Elle produit à ce titre un devis établi le 12 février 2021 par la société Nord France Construction pour un montant de 115.080,42 euros HT soit 138.096,50 euros TTC, décomposé comme suit :
– 83.520,74 euros HT aux fins de reprise des façades,
– 27.592,18 euros HT aux fins de reprise de la porte d’entrée et de la sortie de secours,
– et 3.967,50 euros HT pour la mise en œuvre de la base vie.

Ce chiffrage apparaît cohérent avec les travaux nécessaires à la remise en état de l’intégralité des façades dont le mauvais entretien est exclusivement imputable à la société Bail Actea Immobilier. Aussi, les moyens développés par cette dernière au titre de la performance énergétique du bâtiment sont inopérants en l’espèce.

Elle est donc redevable de la somme de 138.096,50 euros TTC au titre de la reprise de la façade.

Au titre du revêtement du sol du parvis et du parking :
En l’espèce, aux termes de l’article « charges et conditions » paragraphe 1 relatif à l’engagement de construction du contrat de bail à construction des 27 avril et 20 juin 1990 « le parking est réalisé aux frais des preneurs sur la partie de façade leur revenant. Ils font leur affaire personnelle de la construction de ces parkings ». C’est donc à juste titre que la société Ceetrus France relève que la compétence de l’ASL se limite à l’entretien et à la réfection des voies de circulation et de desserte, des espaces verts et des éléments d’équipements techniques, si bien que l’entretien du parking et du parvis situés devant le bâtiment incombe au seul preneur.

Il ressort du procès-verbal de constat établi par huissier le 13 janvier 2020 et des différentes photographies qui y sont annexées que :
– le sol du parvis situé entre l’entrée du bâtiment et le parking présente quelques trous,
– le revêtement du parking présente quelques fissures,
– le terre-plein et la bordure du trottoir sont particulièrement détériorés.

Or, les fissures et les trous, relativement peu nombreux, sur le revêtement du parking et du parvis, relèvent de l’usure normale de l’ouvrage, si bien que la société Bail Actea Immobilier ne peut pas être tenue de la reprise de ces surfaces. Ce n’est en revanche pas le cas des bordures du trottoir et du terre-plein dont la détérioration résulte d’un particulier mauvais entretien et non pas d’une quelconque vétusté, si bien que ces travaux de reprise doivent être mis la charge du preneur.

Il ressort du devis établi par la société Colas le 12 février 2021 et produit aux débats par la société Ceetrus France que le poste relatif à la dépose, à la fourniture et à la pose des bordures endommagées est évalué à la somme totale de 943,50 euros HT.

Aussi, ce chiffrage apparaît cohérent avec les travaux de remise en état imputables à la société Bail Actea Immobilier si bien qu’elle est redevable de la somme de 1.132,20 euros TTC au titre de la reprise des bordures endommagées après application de la TVA de 20 %.

En conséquence, la société Bail Actea Immobilier sera condamnée à payer à la société Ceetrus France la somme totale de 139.228,70 euros TTC au titre de la reprise des travaux lui étant imputables, avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2019, date à laquelle cette dernière a mis en demeure la société preneuse de lui payer ces travaux de reprise, jusqu’à parfait paiement.

II. Au titre de la résistance abusive :

La société Ceetrus France sollicite également la condamnation de la société Bail Actea Immobilier au paiement de la somme de 15.000 euros pour résistance abusive.

Si la notion de résistance abusive ne fait l’objet d’aucune disposition juridique particulière au sein du code civil, elle est communément définie par la jurisprudence comme le comportement du débiteur tendant à refuser avec persistance à exécuter son obligation.

En l’espèce, la société Ceetrus France n’ayant été que partiellement accueillie en ses demandes, elle n’est pas fondée à sa prévaloir d’une quelconque résistance abusive de la part de la société Bail Actea Immobilier qui a valablement exercé ses droits en justice et qui était bien fondée à contester la reprise du revêtement du sol du parking.

Dès lors, la demanderesse sera déboutée de sa demande formée à ce titre.

SUR LES DEMANDES RECONVENTIONNELLES DE LA SOCIETE BAIL ACTEA IMMOBILIER

I. Au titre de la taxe foncière :

La société Bail Actea Immobilier sollicite la condamnation de la bailleresse au paiement de la somme de 15.608,48 euros au titre de la taxe foncière 2020 prorata temporis, augmentée des intérêts au taux légal à compter de la facture du 2 octobre 2020 avec anatocisme.

La société Ceetrus France ne s’y oppose pas.

Dès lors, elle sera condamnée à payer à la société Bail Actea Immobilier la somme de 15.608,48 euros au titre de la taxe foncière 2020 avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020 jusqu’à parfait paiement et avec capitalisation annuelle des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil.

II. Au titre de la résistance abusive :

La société Bail Actea Immobilier sollicite également la condamnation de la société Ceetrus France au paiement de la somme de 15.000 euros pour résistance abusive et procédure abusive.

Si la notion de résistance abusive ne fait l’objet d’aucune disposition juridique particulière au sein du code civil, elle est communément définie par la jurisprudence comme le comportement du débiteur tendant à refuser avec persistance à exécuter son obligation.

En l’espèce, la société Bail Actea Immobilier a succombé à la présente instance, si bien qu’elle ne peut qu’être déboutée de sa demande formée à ce titre.

SUR LES DEMANDES ACCESSOIRES

I. Sur les dépens :

L’article 696 du code de procédure civile dispose que la partie perdante est condamnée aux dépens, à moins que le juge, par décision motivée, n’en mette la totalité ou une fraction à la charge d’une autre partie.

En l’espèce, la société Bail Actea Immobilier, partie succombante, sera condamnée aux dépens.

II. Sur l’article 700 du code de procédure civile :

En vertu de l’article 700 du code de procédure civile, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d’office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu’il n’y a lieu à condamnation.

En l’espèce, la société Bail Actea Immobilier, partie succombante, sera condamnée à payer à la société Ceetrus France la somme de 2.500 euros à ce titre.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par mise à disposition au greffe de la juridiction, par jugement contradictoire et en premier ressort,

CONDAMNE la société Bail Actea Immobilier à payer à la société Ceetrus France la somme de 139.228,70 euros TTC au titre de la reprise des travaux avec intérêts au taux légal à compter du 2 décembre 2019 jusqu’à parfait paiement ;

DÉBOUTE la société Ceetrus France de sa demande de condamnation formée à l’encontre de la société Bail Actea Immobilier à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive ;

CONDAMNE la société Ceetrus France à payer à la société Bail Actea Immobilier la somme de 15.608,48 euros au titre de la taxe foncière 2020 avec intérêts au taux légal à compter du 2 octobre 2020 jusqu’à parfait paiement, et avec capitalisation annuelle des intérêts dans les conditions de l’article 1343-2 du code civil ;

DÉBOUTE la société Bail Actea Immobilier de sa demande de condamnation formée à l’encontre de la société Ceetrus France à titre de dommages-intérêts pour résistance abusive et procédure abusive ;

CONDAMNE la société Bail Actea Immobilier aux dépens ;

CONDAMNE la société Bail Actea Immobilier à payer à la société Ceetrus France la somme de 2.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETTE la demande de la société Bail Actea Immobilier formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

LE GREFFIER LA PRÉSIDENTE

Dominique BALAVOINE Claire MARCHALOT


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