L’Essentiel : La SCI [Adresse 2] a signé un bail commercial avec la société LPT Paris en mars 2014. Depuis juillet 2021, des fuites d’eau perturbent les locaux. En novembre 2024, LPT Paris a assigné la SCI devant le tribunal, demandant des réparations et le séquestre des loyers. Le tribunal a constaté un trouble illicite dû à l’inaction de la SCI, engageant sa responsabilité. Il a ordonné à la SCI de réparer les fuites sous astreinte de 300 € par jour, tout en rejetant la demande de séquestre des loyers, faute de preuve d’impropriété des locaux. La SCI a également été condamnée à verser 1 500 € à LPT Paris.
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Contexte du litigeLa SCI [Adresse 2] a signé un bail commercial avec la société LPT Paris le 14 mars 2014 pour des locaux situés à Paris. Depuis juillet 2021, des fuites d’eau affectent ces locaux, entraînant des désagréments pour le preneur. Procédure judiciaireLe 15 novembre 2024, la société LPT Paris a assigné la SCI [Adresse 2] devant le tribunal judiciaire de Paris, demandant des mesures pour identifier et réparer les fuites, ainsi que le séquestre des loyers jusqu’à la résolution des problèmes. L’audience a eu lieu le 2 décembre 2024, où la société LPT Paris a maintenu ses demandes, tandis que la SCI [Adresse 2] n’a pas constitué avocat. Motivations du tribunalLe tribunal a statué sur le fond malgré l’absence de la SCI [Adresse 2]. Il a constaté que les fuites d’eau constituaient un trouble manifestement illicite, en raison de la violation des obligations du bailleur selon l’article 1719 du code civil. La SCI [Adresse 2] n’a pas pris de mesures pour remédier aux fuites, engageant ainsi sa responsabilité. Décisions du tribunalLa SCI [Adresse 2] a été condamnée à faire intervenir un prestataire pour identifier et réparer les fuites, sous astreinte de 300 € par jour de retard. En revanche, la demande de séquestre des loyers a été rejetée, car la société LPT Paris n’a pas prouvé que les fuites rendaient les locaux impropres à l’usage commercial. Condamnations et indemnitésLa SCI [Adresse 2] a été condamnée aux dépens et à verser 1 500 € à la société LPT Paris au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La décision est exécutoire à titre provisoire. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les obligations du bailleur en vertu de l’article 1719 du code civil ?L’article 1719 du code civil énonce clairement les obligations du bailleur dans le cadre d’un contrat de bail. Il stipule que le bailleur est tenu de : 1° De délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ; 2° D’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ; 3° D’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ; 4° D’assurer également la permanence et la qualité des plantations. Dans le cas présent, la SCI [Adresse 2] n’a pas respecté ces obligations, car elle n’a pas pris les mesures nécessaires pour remédier aux fuites d’eau qui affectent les locaux loués. Ces fuites, qui entraînent des dégâts tels que l’humidité et les moisissures, compromettent l’usage paisible des locaux par la société LPT Paris, ce qui constitue une violation des obligations du bailleur. Quelles sont les conditions pour ordonner des mesures conservatoires en référé selon l’article 835 du code de procédure civile ?L’article 835 du code de procédure civile précise que le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection peuvent prescrire en référé des mesures conservatoires ou de remise en état, même en présence d’une contestation sérieuse. Ces mesures peuvent être ordonnées pour : – Prévenir un dommage imminent ; Le trouble manifestement illicite est défini comme la violation flagrante d’une règle de droit, proche de la voie de fait. Dans cette affaire, la société LPT Paris a démontré que les fuites d’eau constituaient un trouble manifestement illicite, car elles compromettent l’usage des locaux loués. Ainsi, le tribunal a jugé que la demande de la société LPT Paris visant à faire intervenir un prestataire pour identifier et réparer les fuites était justifiée. Quelles sont les conséquences du non-paiement des loyers en vertu de l’article 1728 du code civil ?L’article 1728 du code civil stipule que le paiement du prix du bail aux termes convenus constitue l’une des deux obligations principales du locataire. Il est important de noter qu’un locataire ne peut pas invoquer l’exception d’inexécution pour suspendre le paiement des loyers en raison de problèmes affectant le local loué, tels que des infiltrations, à moins que ces infiltrations n’aient rendu les locaux totalement impropres à l’usage prévu. Dans le cas présent, la société LPT Paris n’a pas prouvé que les fuites d’eau rendaient les locaux impropres à l’usage commercial. Par conséquent, le tribunal a décidé qu’il n’y avait pas lieu d’ordonner le séquestre des loyers, car la demanderesse n’a pas démontré que son activité commerciale était totalement compromise. Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans cette affaire ?L’article 700 du code de procédure civile permet au juge d’allouer une indemnité à la partie qui a gagné le procès, pour couvrir les frais non compris dans les dépens. Dans cette affaire, la SCI [Adresse 2], en tant que partie perdante, a été condamnée à verser à la société LPT Paris une somme de 1 500 € au titre de cet article. Cette indemnité vise à compenser les frais engagés par la société LPT Paris pour faire valoir ses droits en justice. Le tribunal a également condamné la SCI [Adresse 2] aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile, qui prévoit que la partie perdante doit supporter les frais de la procédure. |
JUDICIAIRE
DE PARIS
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N° RG 24/57808 – N° Portalis 352J-W-B7I-C5YL5
N° : 10
Assignation du :
15 Novembre 2024
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[1] 1 Copies exécutoires
délivrées le:
ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ
rendue le 06 janvier 2025
par Lucie LETOMBE, Juge au Tribunal judiciaire de Paris, agissant par délégation du Président du Tribunal,
Assistée de Pascale GARAVEL, Greffier.
DEMANDERESSE
La Société LPT PARIS S.A.S.
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Maître Delphine D’ALBERT DES ESSARTS de la SAS WILHELM & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS – #K0024
DEFENDERESSE
LA SCI DU [Adresse 2], société civile immobilière
[Adresse 1]
[Localité 5]
non constituée
DÉBATS
A l’audience du 02 Décembre 2024, tenue publiquement, présidée par Lucie LETOMBE, Juge, assistée de Pascale GARAVEL, Greffier,
Nous, Président,
Après avoir entendu les conseils des parties,
Par acte du 14 mars 2014, la SCI [Adresse 2] a consenti à la société LPT Paris un bail commercial portant sur des locaux situés [Adresse 2] à Paris (75001).
Plusieurs fuites d’eau affectent les locaux loués depuis le mois de juillet 2021.
Par acte du 15 novembre 2024, la société LPT Paris a fait assigner devant le président du tribunal judiciaire de Paris statuant en référés aux fins de voir :
– condamner la SCI [Adresse 2] à faire intervenir, le prestataire de son choix, aux fins qu’il identifie toutes les fuites affectant les locaux, détermine leurs causes et les origines, et effectuer les travaux permettant de mettre durablement un terme à ces désordres, sous astreinte de 1 000 € par jour de retard à compter de la présente décision,
– ordonner le séquestre des loyers auprès de la Caisse des dépôts et consignations ou entre les mains du bâtonnier séquestre de l’ordre des avocats de Paris jusqu’à ce que les travaux permettant de mettre durablement un terme à ces désordres étaient été définitivement réalisés et que le trouble manifestement illicite subi ait cessé,
– condamner la SCI [Adresse 2] à lui payer la somme de 5 000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
A l’audience du 2 décembre 2024, la société LPT Paris a, par l’intermédiaire de son conseil, maintenu les prétentions de son acte introductif d’instance et les moyens qui y sont contenus.
Bien que régulièrement assignée à étude, la SCI [Adresse 2] n’a pas constitué avocat de sorte, qu’il doit être statué par décision réputée contradictoire.
Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation, aux écritures déposées et développées oralement à l’audience, et à la note d’audience.
L’affaire a été mise en délibéré au 6 janvier 2025, date de la présente ordonnance.
En application de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne faisant alors droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Sur la demande principale
En application de l’article 835 du code de procédure civile, le président du tribunal judiciaire ou le juge des contentieux de la protection dans les limites de sa compétence peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite.
Le trouble manifestement illicite est constitué par la violation flagrante d’une règle de droit, proche de la voie de fait.
Aux termes de l’article 1719 du code civil, le bailleur est obligé, par la nature du contrat, et sans qu’il soit besoin d’aucune stipulation particulière :
1° De délivrer au preneur la chose louée et, s’il s’agit de son habitation principale, un logement décent. Lorsque des locaux loués à usage d’habitation sont impropres à cet usage, le bailleur ne peut se prévaloir de la nullité du bail ou de sa résiliation pour demander l’expulsion de l’occupant ;
2° D’entretenir cette chose en état de servir à l’usage pour lequel elle a été louée ;
3° D’en faire jouir paisiblement le preneur pendant la durée du bail ;
4° D’assurer également la permanence et la qualité des plantations.
Au cas présent, il ressort des pièces produites que :
– la société LPT Paris subit deux fuites d’eau, sans lien avec les intempéries, qui affectent les locaux loués : une fuite au rez-de-chaussée, au niveau d’une colonne d’eau située en face du laboratoire, et une fuite au niveau d’une canalisation située au sous-sol des locaux,
– la société LPT Paris subit deux autres fuites apparaissant à chaque nouvelle intempérie : une fuite au niveau du couloir du service après-vente directement visible par la clientèle, et une fuite sur le toit-terrasse située au-dessus du laboratoire en raison de la présence stagnante,
– il est établi la présence d’eau, d’humidité, et de moisissures dans les locaux loués destinés à accueillir la clientèle, s’agissant d’un magasin d’optique,
– le bailleur n’a pris aucune disposition efficace pour remédier aux fuites et remettre en état le local commercial, en dépit des nombreux courriers adressés par le preneur.
Il en résulte que ces dégâts des eaux, non réparés et non pris en charge par le bailleur, sont de nature à engager sa responsabilité sur le fondement de l’article 1719 susvisé, en ce que la SCI [Adresse 2] ne satisfait pas à ses obligations d’entretien des locaux loués en état de servir à l’usage prévu au contrat de bail, et d’en faire jouir paisiblement le preneur.
Le trouble manifestement illicite est ainsi caractérisé, et la demande principale de la société LPT Paris tendant à y mettre fin sera accueillie.
Dès lors, la SCI [Adresse 2] sera condamnée à faire intervenir, le prestataire de son choix, aux fins qu’il identifie toutes les fuites affectant les locaux, détermine leurs causes et les origines, et effectuer les travaux permettant de mettre durablement un terme à ces désordres, et ce sous astreinte de 300 € par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision et pendant une période de trois mois.
Sur la demande de séquestre des loyers
Aux termes de l’article 1728 du code civil, le paiement du prix du bail aux termes convenus constitue l’une des deux obligations principales du locataire.
Un locataire ne peut pas invoquer l’exception d’inexécution pour suspendre le paiement des loyers en raison d’infiltrations affectant le local loué et concernant le clos et le couvert, si les infiltrations alléguées n’ont pas rendu les locaux loués impropres à l’usage auquel ils étaient destinés (3ème civ. 3, 6 juillet 2023, 22-15.923).
Au cas présent, la demanderesse ne démontre pas que les fuites d’eau invoquées ont rendu totalement les locaux loués impropres à l’usage auquel ils étaient destinés, et qu’elle n’était plus en mesure d’exercer son activité commerciale et de recevoir des clients.
Dès lors, dans ces conditions, il convient de dire n’y avoir lieu à référé sur la demande de séquestre des loyers.
Sur les demandes accessoires
La SCI [Adresse 2], partie perdante, sera condamnée aux dépens, conformément aux dispositions de l’article 696 du code de procédure civile.
Il convient en outre d’allouer à une indemnité au titre des dispositions de l’article 700 du même code d’un montant de 1 500 €.
Statuant en référé, par remise au greffe le jour du délibéré, après débats en audience publique, par décision réputée contradictoire et en premier ressort,
Condamnons la SCI [Adresse 2] à faire intervenir, le prestataire de son choix, aux fins qu’il identifie toutes les fuites affectant les locaux, détermine leurs causes et les origines, et effectuer les travaux permettant de mettre durablement un terme à ces désordres, et ce sous astreinte de 300 € par jour de retard passé un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision et pendant une période de trois mois ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur la demande séquestre des loyers;
Condamnons la SCI [Adresse 2] aux dépens ;
Condamnons la SCI [Adresse 2] à payer à la société LPT Paris la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Disons n’y avoir lieu à référé sur le surplus des demandes ;
Rappelons que la présente décision est exécutoire à titre provisoire.
Fait à Paris le 06 janvier 2025
Le Greffier, Le Président,
Pascale GARAVEL Lucie LETOMBE
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