Évaluation des conditions de maintien en soins psychiatriques contraints et respect des droits des patients.

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Évaluation des conditions de maintien en soins psychiatriques contraints et respect des droits des patients.

L’Essentiel : Le 30 décembre 2024, le tribunal judiciaire de Strasbourg a examiné la situation de Mme [E] [J], hospitalisée en raison de troubles mentaux. La Préfète du Bas-Rhin a demandé le maintien de son hospitalisation complète, justifiée par des certificats médicaux soulignant une décompensation de sa psychose chronique. Malgré le souhait de la patiente de quitter l’hôpital pour des soins ambulatoires, les médecins ont recommandé une prise en charge continue. Le tribunal a décidé de prolonger son hospitalisation, considérant cette mesure essentielle pour sa sécurité et son bien-être, avec possibilité d’appel dans un délai de 10 jours.

Contexte de l’affaire

Le 30 décembre 2024, le tribunal judiciaire de Strasbourg a examiné la situation de Mme [E] [J], née le 15 novembre 1994, actuellement hospitalisée à l’[8] de [Localité 7]. La requête a été déposée par Mme la Préfète du Bas-Rhin, sollicitant le maintien de l’hospitalisation complète de la patiente, en raison de troubles mentaux ayant nécessité des soins psychiatriques contraints.

Procédure judiciaire

La procédure a été initiée conformément aux articles du Code de la Santé Publique, stipulant que l’hospitalisation complète doit être validée par un magistrat dans un délai précis. Le juge des libertés et de la détention a statué après avoir pris connaissance des certificats médicaux et des décisions administratives antérieures, notamment celles du 6 mai et du 19 juillet 2024, qui avaient déjà confirmé la nécessité de soins psychiatriques.

Évaluation médicale

Les certificats médicaux présentés au tribunal ont souligné la nécessité de maintenir Mme [J] en hospitalisation complète, en raison d’une décompensation de sa psychose chronique. Les médecins ont noté des symptômes persistants, tels que des hallucinations et une anxiété significative, rendant indispensable une prise en charge sous cette forme pour garantir sa sécurité et son bien-être.

Déclarations de la patiente

Lors de l’audience, Mme [J] a exprimé son souhait de quitter l’hôpital pour poursuivre ses soins en ambulatoire. Cependant, les éléments médicaux ont indiqué que son état nécessitait une hospitalisation continue pour assurer une évolution favorable de sa santé mentale.

Décision du tribunal

Le tribunal a ordonné le maintien de l’hospitalisation complète de Mme [E] [J], considérant que cette mesure était la seule appropriée pour garantir la continuité des soins et la protection de la patiente. La décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours, mais n’est pas suspensive, sauf si le ministère public en fait la demande.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de maintien de l’hospitalisation complète selon le Code de la Santé Publique ?

L’article L. 3211-12-1 I du Code de la Santé Publique précise que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire ait statué sur cette mesure dans les délais suivants :

1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;

2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète ;

3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale ou de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention.

Ces délais garantissent un contrôle régulier et nécessaire de la mesure d’hospitalisation complète, afin de protéger les droits des patients.

Comment la régularité des décisions administratives est-elle contestée ?

L’article L.3216-1 du Code de la Santé Publique stipule que « la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire.

Le juge connaît des contestations mentionnées au premier alinéa dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1.

Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne.

Ainsi, la contestation de la régularité des décisions administratives doit être fondée sur des éléments concrets démontrant une atteinte aux droits du patient.

Quel est le rôle du juge des libertés et de la détention dans l’évaluation des soins psychiatriques ?

Le juge des libertés et de la détention doit apprécier le bien-fondé de la mesure d’hospitalisation complète en se basant sur les certificats médicaux fournis.

Il ne peut substituer sa propre appréciation à celle des médecins concernant l’existence des troubles psychiques, la justification thérapeutique des traitements ou la capacité du patient à consentir aux soins.

Cette distinction est essentielle, car elle garantit que les décisions relatives aux soins psychiatriques reposent sur une expertise médicale appropriée.

Quelles sont les voies de recours disponibles pour le patient en cas de décision d’hospitalisation complète ?

L’article R.3211-18 et suivants du Code de la Santé Publique précisent que la décision de maintien de l’hospitalisation complète est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision.

L’appel doit être motivé et transmis par tout moyen au Greffe de la Cour d’Appel de Colmar.

Il est important de noter que le délai d’appel et l’appel ne sont pas suspensifs, sauf si le ministère public forme un appel qui peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d’appel ou son délégué.

Ces dispositions assurent que le patient a la possibilité de contester la décision tout en maintenant la continuité des soins nécessaires.

Tribunal judiciaire
de Strasbourg
————–
[Adresse 2]
[Adresse 2]
[Localité 4]
————–

Tél . [XXXXXXXX01]

PROCÉDURE DE CONTRÔLE SYSTÉMATIQUE
DES MESURES DE SOINS
PSYCHIATRIQUES

Juge des Libertés et de la Détention

ORDONNANCE

RG JLD n°N° RG 24/01842 – N° Portalis DB2E-W-B7I-NH5M

Le 30 Décembre 2024

Nous, Gaëlle TAILLE, vice-présidente chargée des fonctions de juge des libertés et de la détention au tribunal judiciaire de STRASBOURG, assistée de Benjamin ELWART, Greffier,

Statuant en premier ressort en qualité de magistrat du siège, après débats en audience publique ;

Vu les dispositions des articles L.3211-12, L.3211-12-1, L.3211-12-2, R.3211-12, R.3211-29 et R.3211-32 du Code de la Santé Publique et le dossier de la procédure ;

Vu la requête en date du 24 Décembre 2024 de MME LA PREFETE DU BAS-RHIN concernant Mme [E] [J] née le 15 Novembre 1994 à [Localité 9] demeurant [Adresse 3]
à[Localité 5] actuellement en hospitalisation complète à l’[8] de [Localité 7] ;

Vu l’ordonnance du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Strasbourg en date du 06 mai 2024 ;

Vu le certificat médical en date du 16 juillet 2024 mettant en place un programme de soins psychiatriques au bénéfice de Mme [E] [J] ;

Vu la décision relative à la modification de la forme de prise en charge prise par MME LA PREFETE DU BAS-RHIN en date du 19 juillet 2024 ;

Vu le certificat médical en date du 20 décembre 2024 sollicitant la réintégration en hospitalisation complète de Mme [E] [J] ;

Vu la décision de réintégration en soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète prise par MME LA PREFETE DU BAS-RHIN en date du 20 décembre 2024 ;

Vu le certificat médical mensuel du 12 novembre 2024 et vu le certificat médical mensuel du 11 décembre 2024 ainsi que l’avis motivé ;

Vu l’avis du procureur de la République aux termes duquel le Ministère public s’en rapporte à l’appréciation du tribunal ;

Mme [E] [J] régulièrement convoquée selon convocation avec récépissé, présente, assistée de Me Guillaume REYNOUARD, avocat de permanence ;

MOTIFS

L’article L. 3211-12-1 I du code de la santé publique dispose que « l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement (…), ait statué sur cette mesure :
1° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 ;
2° Avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de la décision modifiant la forme de la prise en charge du patient et procédant à son hospitalisation complète en application, respectivement, du dernier alinéa de l’article L. 3212-4 ou du III de l’article L. 3213-3 ;
3° Avant l’expiration d’un délai de six mois à compter soit de toute décision judiciaire prononçant l’hospitalisation en application de l’article 706-135 du code de procédure pénale, soit de toute décision prise par le juge des libertés et de la détention en application du présent I ou des articles L. 3211-12, L. 3213-3, L. 3213-8 ou L. 3213-9-1 du présent code, lorsque le patient a été maintenu en hospitalisation complète de manière continue depuis cette décision.

Sur la procédure

L’article L.3216-1 du code de la santé publique dispose que « la régularité des décisions administratives prises en application des chapitres II à IV du présent titre ne peut être contestée que devant le juge judiciaire. Le juge connaît des contestations mentionnées au premier alinéa du présent article dans le cadre des instances introduites en application des articles L.3211-12 et L.3211-12-1. Dans ce cas, l’irrégularité affectant une décision administrative mentionnée au premier alinéa du présent article n’entraîne la mainlevée de la mesure que s’il en est résulté une atteinte aux droits de la personne qui en faisait l’objet ».

Le conseil de Mme [J] qu’il n’a pas vu de notification des droits de la patiente qui aurait dû lui être communiqués et sollicite la mainlevée au regard de cette absence.

En l’espèce, il résulte du certificat du 20 décembre 2024 signé par le Docteur [N] que la patiente a été informée du projet de réintégration en hospitalisation complète ainsi que de ses droits, voies de recours et garanties et que ses observations ont pu être recueillies. Par ailleurs, Mme [J] a signé un document le 23 décembre 2024 dans lequel elle reconnait avoir reçu l’arrêté du préfet portant sur sa réintégration en hospitalisation complète, lequel arrêté précise les voies de recours à sa disposition.

En conséquence, la procédure a été menée conformément à la loi et est régulière en la forme.

Sur le bien fondé de la mesure

Le juge qui se prononce sur le maintien de l’hospitalisation complète doit apprécier le bien fondé de la mesure au regard des certificats médicaux qui lui sont communiqués et ne peut substituer, à l’évaluation des médecins, sa propre appréciation sur l’existence des troubles psychiques, la justification thérapeutique des traitements ou la capacité du patient à consentir aux soins, ces différents éléments relevant d’une appréciation strictement médicale.

A l’audience, Mme [J] a expliqué que cette hospitalisation lui avait permis de “se reposer” et de “reprendre de la forme”. Elle a exprimé sno souhait de retourner chez elle et de continuer les soins au CMP de [Localité 6].

En l’espèce, il ressort des éléments joints à la saisine et des pièces du dossier que le 25 avril 2024 , [E] [J] a été admise au bénéfice des soins psychiatriques contraints sous la forme d’une hospitalisation complète à la demande du représentant de l’Etat, suite à un certificat médical établi constatant des troubles mentaux qui compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l’ordre public, justifiant une admission en soins psychiatriques sans consentement, en application de l’article L. 3213-1 du code de la santé publique.

Par décision du 6 mai 2024, le juge des libertés et de la détention, statuant dans le cadre du contrôle obligatoire des mesures de soins à l’issue d’une période de douze jours, a déclaré que les soins pouvaient se poursuivre sous la forme d’une hospitalisation complète.

Par arrêté préfectoral en date du 19 juillet 2024 , [E] [J] a été admise à un programme de soins au vu de deux certificats médicaux du 16 et 18 juillet 2024 desquels il ressortait que la mesure de soins psychiatriques sans consentement était toujours justifiée, mais que l’évolution de l’état de santé de la patiente permettait sa prise en charge sous une autre forme que l’hospitalisation complète.

Depuis lors, les certificats médicaux mensuels établis ont tous conclu à la nécessité de la poursuite des soins psychiatriques contraints, mais pouvant prendre une forme autre que l’hospitalisation complète.

Par arrêté préfectoral en date du 20 décembre 2024, [E] [J] a été réintégrée en hospitalisation complète, au vu d’un certificat médical constatant une décompensation délirante de sa psychose chronique et demandant la modification de la forme de la prise en charge de la patiente.

En dernier lieu, l’avis motivé mentionné à l’article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique relève que l’état de santé de la patiente nécessite une poursuite des soins contraints sous la forme d’une hospitalisation complète.

Il résulte des pièces du dossier, en particulier du certificat médical sollicitant la modification de la prise en charge et de l’avis motivé visé par l’article L. 3211-12-1 II du code de la santé publique que la patiente fait part de l’apparition brutale “d’un mal être général” ayant motivé une demande de réadmission à l’hôpital. Le corps médical relève la persistance des phénomènes hallucinatoires, fluctuante et bas bruit malgré le traitement, un fléchissement thymique avec une anxiété et un apragmatisme important empêchant Mme [J] de se rendre à ses rendez-vous.

Il est également établi que les conditions sont réunies pour que les soins psychiatriques sans consentement se poursuivent sous le régime de l’hospitalisation complète, cette mesure étant la seule à même de permettre la poursuite de soins adaptés à l’état de la patiente, de consolider son adhésion aux soins, de garantir sa protection et d’assurer une évolution suffisamment solide et durable de son état.

PAR CES MOTIFS

Statuant en audience publique, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort,

ORDONNONS le maintien de l’hospitalisation complète de Mme [E] [J]
née le 15 Novembre 1994 à [Localité 9] ;

DISONS que les dépens seront laissés à la charge du Trésor Public.

RAPPELONS que cette décision est susceptible d’appel devant le Premier Président de la Cour d’appel dans un délai de 10 jours à compter de la présente notification, par déclaration d’appel motivée transmise par tout moyen au Greffe de la Cour d’Appel de Colmar (article R.3211-18 et suivants du Code de la santé publique).

Le délai d’appel et l’appel ne sont pas suspensifs, à l’exception de l’appel formé par le ministère public qui peut être déclaré suspensif par le premier président de la cour d’appel ou son délégué conformément aux dispositions de l’article R.3211-20 du Code de la santé publique.

Le Greffier
Le Président

copie transmise par mail le 30 Décembre 2024 à :
– Mme [E] [J], par remise de copie contre récépissé par l’intermédiaire de l’établissement hospitalier,
– Ministère Public,
– Madame/Monsieur le Directeur de/du/des l’[8] de [Localité 7]
– Me Guillaume REYNOUARD, Conseil de [E] [J]
– Madame la Préfète du Bas-Rhin / ARS Alsace

Le Greffier


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