Conditions et limites de l’hospitalisation psychiatrique sans consentement

·

·

Conditions et limites de l’hospitalisation psychiatrique sans consentement

L’Essentiel : Le 20 décembre 2024, M. [K] [W] a été admis en urgence en soins psychiatriques, à la demande de son épouse, sans consentement en raison de son état de santé. Le 22 décembre, son hospitalisation a été prolongée d’un mois, sans notification au patient. Le procureur a donné un avis favorable le 27 décembre, et une audience a eu lieu le 30 décembre. Selon le certificat médical, M. [K] souffre d’une décompensation aiguë d’un trouble thymique. Le magistrat a finalement autorisé la poursuite de l’hospitalisation, justifiant la nécessité de soins constants.

Admission en soins psychiatriques

Le 20 décembre 2024, le directeur de l’établissement public de santé a admis M. [K] [W] en urgence pour une hospitalisation complète en soins psychiatriques, à la demande de son épouse, Mme [Y] [W]. Cette admission a été effectuée sans consentement en raison de l’état de santé du patient, et la décision n’a pas été notifiée à ce dernier.

Poursuite des soins psychiatriques

Le 22 décembre 2024, le directeur a décidé de prolonger l’hospitalisation complète pour un mois supplémentaire, sans notification au patient. Le 24 décembre, il a saisi le tribunal judiciaire de Bobigny pour obtenir l’autorisation de poursuivre cette hospitalisation.

Avis du procureur et audience

Le procureur de la République a donné un avis favorable au maintien de l’hospitalisation par écrit le 27 décembre 2024. Les débats ont eu lieu lors d’une audience publique le 30 décembre 2024, où l’avocate de M. [K] [W], Me Anissa Berdjouh Marzouki, a été entendue.

Cadre légal de l’hospitalisation

Selon l’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique, la poursuite de l’hospitalisation complète nécessite une décision du magistrat dans un délai de douze jours après l’admission. De plus, l’article L. 3212-1 stipule que l’hospitalisation ne peut être décidée que si les troubles mentaux du patient rendent impossible son consentement et nécessitent des soins immédiats.

État de santé du patient

Le certificat médical du 19 décembre 2024 décrit M. [K] [W] comme souffrant d’une décompensation aiguë d’un trouble thymique, avec des symptômes tels que l’excitation psychomotrice et une insomnie sévère. D’autres certificats médicaux ont été établis les 20 et 22 décembre pour évaluer son état.

Observations du patient

Lors de l’audience, M. [K] [W] a déclaré que son hospitalisation se passait bien, bien qu’il ait exprimé des préoccupations concernant le vol de son téléphone portable. Il a mentionné qu’il était suivi pour un trouble bipolaire depuis 2017 et qu’il souhaitait reprendre son traitement à domicile, tout en faisant confiance à son psychiatre.

Conclusion de la procédure

L’ensemble des éléments présentés a permis de conclure à la régularité de la procédure. L’avis médical et les déclarations du patient indiquent que ses troubles psychiatriques persistent, rendant impossible son consentement aux soins. La nécessité de soins avec surveillance médicale constante justifie la poursuite de l’hospitalisation complète.

Décision du magistrat

Le magistrat a autorisé la poursuite de l’hospitalisation complète de M. [K] [W], a laissé les dépens à la charge de l’État et a rappelé que l’ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation complète sans consentement ?

L’article L. 3212-1, I, du code de la santé publique précise que pour qu’une personne atteinte de troubles mentaux puisse faire l’objet de soins psychiatriques sur décision du directeur d’un établissement, deux conditions doivent être réunies :

1° Ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ;

2° Son état mental impose des soins immédiats, assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous une autre forme.

Ces conditions sont essentielles pour garantir que l’hospitalisation est justifiée et respecte les droits de la personne concernée.

En l’espèce, le certificat médical initial a établi que M. [K] [W] présentait une décompensation aiguë d’un trouble thymique, rendant son consentement très fragile.

Cela répond à la première condition, tandis que la nécessité de soins immédiats justifie la seconde condition, permettant ainsi la poursuite de l’hospitalisation complète.

Quel est le rôle du magistrat dans la prolongation de l’hospitalisation complète ?

L’article L. 3211-12-1, I-1°, du code de la santé publique stipule que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire ait statué sur cette mesure.

Le directeur de l’établissement doit saisir le magistrat dans un délai de huit jours à compter de l’admission, et le juge doit statuer avant l’expiration d’un délai de douze jours.

Dans le cas présent, le directeur a saisi le magistrat le 24 décembre 2024, respectant ainsi le délai imparti.

Le magistrat a ensuite examiné la situation lors de l’audience publique du 30 décembre 2024, ce qui a permis de garantir que la décision de prolongation de l’hospitalisation était conforme aux exigences légales.

Comment la dignité et les droits de la personne hospitalisée sont-ils protégés ?

L’article L. 3211-3, alinéa 1er, du code de la santé publique prévoit que les restrictions à l’exercice des libertés individuelles d’une personne atteinte de troubles mentaux doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental.

Il est également stipulé que la dignité de la personne doit être respectée et que sa réinsertion doit être recherchée.

Dans le cas de M. [K] [W], les certificats médicaux et l’avis du psychiatre ont été pris en compte pour évaluer son état mental et la nécessité de l’hospitalisation.

Les éléments recueillis lors de l’audience montrent que, bien que M. [K] [W] ait exprimé le souhait de sortir, son état de santé ne lui permet pas de consentir réellement aux soins, ce qui justifie la poursuite de l’hospitalisation tout en respectant ses droits.

Quelles sont les implications de l’ordonnance du magistrat ?

L’ordonnance du magistrat autorise la poursuite de l’hospitalisation complète de M. [K] [W] et laisse les dépens à la charge de l’État.

Elle rappelle également que l’ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire, ce qui signifie qu’elle peut être mise en œuvre immédiatement, même si un appel est interjeté.

Cette exécution provisoire est cruciale dans les cas d’hospitalisation psychiatrique, car elle permet de garantir que les soins nécessaires sont fournis sans délai, en tenant compte de l’urgence de la situation.

Ainsi, l’ordonnance assure la continuité des soins tout en respectant les procédures légales établies pour protéger les droits des personnes hospitalisées.

TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BOBIGNY
ORDONNANCE STATUANT SUR LA POURSUITE D’UNE MESURE D’HOSPITALISATION COMPLÈTE

DÉLAI DE 12 JOURS

ADMISSION A LA DEMANDE D’UN TIERS OU EN CAS DE PÉRIL IMMINENT

N° RG 24/10853 – N° Portalis DB3S-W-B7I-2NHK
MINUTE: 24/2548

Nous, Thomas SCHNEIDER, juge, magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny désigné par le président en application de l’article R. 213-12-2 du code de l’organisation, assisté de Caroline ADOMO, greffier, avons rendu la décision suivante concernant:

LA PERSONNE EN SOINS PSYCHIATRIQUES :

Monsieur [K] [W]
né le 17 Janvier 1979 à [Localité 4]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Etablissement d’hospitalisation: L’EPS DE [5]

Présent assisté de Me Anissa BERDJOUH MARZOUKI, avocat commis d’office

PERSONNE A L’ORIGINE DE LA SAISINE

Madame la directrice de L’EPS DE [5]
Absente

TIERS A L’ORIGINE DE L’HOSPITALISATION

Madame [Y] [W]
Absente

MINISTÈRE PUBLIC

Absent
A fait parvenir ses observations par écrit le 27 décembre 2024

EXPOSÉ DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

Par décision du 20 décembre 2024, le directeur de l’établissement public de santé de [5] a admis M. [K] [W] en urgence en soins psychiatriques sans consentement sous la forme d’une hospitalisation complète à compter du 19 décembre 2024, à la demande présentée le 19 décembre 2024 par Mme [Y] [W], en sa qualité d’épouse. La décision n’a pas été notifiée au patient en raison de son état de santé.

Elle a décidé le 22 décembre 2024 de poursuivre pour un mois les soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète. La décision n’a pas été notifiée au patient en raison de son état de santé.

Le 24 décembre 2024, le directeur de l’établissement a saisi le magistrat du siège du tribunal judiciaire de Bobigny aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète de M. [K] [W].

Le procureur de la République a donné un avis favorable au maintien de l’hospitalisation par réquisitions écrites du 27 décembre 2024.

Les débats se sont déroulés à l’audience publique tenue le 30 décembre 2024 dans la salle d’audience aménagée à l’établissement public de santé de [5], situé [Adresse 2].

Me Anissa Berdjouh Marzouki, avocate de la personne hospitalisée, a été entendue en ses observations.

L’ordonnance a été mise en délibéré à ce jour.

MOTIVATION

L’article L. 3211-12-1, I-1°, du code de la santé publique dispose que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement lorsque l’hospitalisation a été prononcée en application du chapitre II du présent titre ou par le représentant de l’État dans le département lorsqu’elle a été prononcée en application du chapitre III du présent titre, de l’article L. 3214-3 du présent code ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale, ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission prononcée en application des chapitres II ou III du présent titre ou de l’article L. 3214-3 du même code. Le juge est alors saisi dans un délai de huit jours à compter de cette admission.

L’article L. 3212-1, I, du même code précise qu’une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L. 3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies : 1° ses troubles mentaux rendent impossible son consentement ; 2° son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’une surveillance médicale régulière justifiant une prise en charge sous la forme mentionnée au 2° du I de l’article L. 3211-2-1.

L’article L. 3211-3, alinéa 1er du même code prévoit que, lorsqu’une personne atteinte de troubles mentaux fait l’objet de soins psychiatriques en application des dispositions des chapitres II et III du présent titre ou est transportée en vue de ces soins, les restrictions à l’exercice de ses libertés individuelles doivent être adaptées, nécessaires et proportionnées à son état mental et à la mise en œuvre du traitement requis. En toutes circonstances, la dignité de la personne doit être respectée et sa réinsertion recherchée.

En l’espèce, le certificat médical initial établi le 19 décembre 2024 par le docteur [I] [R], médecin, décrit l’état suivant du patient : décompensation aiguë d’un trouble thymique chronique, excitation psychomotrice, tachypsychie, logorrhée, insomnie, ambivalence aux soins, consentement très fragile. Il constate le risque grave d’atteinte à l’intégrité du patient.

Des certificats médicaux ont été établis les 20 et 22 décembre 2024 par les docteurs [F] [N] et [V] [C], médecins psychiatres, afin de constater l’état de santé de la personne hospitalisée.

L’avis médical motivé dressé le 24 décembre 2024 par le docteur [Z], psychiatre de l’établissement, relate l’état suivant du patient : hospitalisé pour épisode maniaque déclenché par une rupture de traitement ; ce jour, contact facile, logorrhée, débit accéléré, méfiant et revendicateur, réclame sa sortie, banalise ses troubles.

M. [K] [W] a déclaré à l’audience que l’hospitalisation se passe bien ; qu’on lui a volé son téléphone portable ; qu’il a la visite de sa famille et de ses amis ; qu’il se sent très fatigué en raison des traitements ; qu’il est suivi pour un trouble bipolaire depuis 2017 ; qu’il souhaite reprendre son traitement médical à son domicile ; et qu’il souhaite sortir tout de suite, bien qu’il fasse confiance à son psychiatre habituel.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que la procédure est régulière. L’avis médical motivé et l’audition établissent que les troubles psychiatriques de la personne hospitalisée persistent. Son état de santé, tel que rapporté par l’avis médical motivé, ne lui permet pas de consentir réellement aux soins.

La nécessité de soins assortis d’une surveillance médicale constante justifie la poursuite de l’hospitalisation complète.

PAR CES MOTIFS

Le magistrat du siège,

Autorise la poursuite de l’hospitalisation complète de M. [K] [W] ;

Laisse les dépens à la charge de l’État ;

Rappelle que l’ordonnance bénéficie de l’exécution provisoire.

Fait et jugé à Bobigny le 30 décembre 2024.

Le Greffier

Caroline ADOMO

Le Juge

Thomas SCHNEIDER

Ordonnance notifiée au parquet le à

le greffier

Vu et ne s’oppose :

Déclare faire appel :


Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Chat Icon