Conditions de maintien en soins psychiatriques et respect des droits du patient

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Conditions de maintien en soins psychiatriques et respect des droits du patient

L’Essentiel : Le 21 décembre 2024, [H] [M] a été admis en hospitalisation complète au CHU de [Localité 5] sur demande urgente de son fils, conformément à l’article L3212-3 du code de la santé publique. Après évaluation médicale, il a été décidé de maintenir l’hospitalisation. Le 27 décembre, le directeur a saisi le magistrat pour un contrôle de la mesure. Le conseil de [H] [M] a demandé la mainlevée, arguant que le patient était capable de communiquer. Cependant, les certificats médicaux ont confirmé des troubles mentaux significatifs, justifiant la poursuite de l’hospitalisation, ordonnée par le magistrat le 30 décembre 2024.

Admission en hospitalisation complète

Le 21 décembre 2024, [H] [M] a été admis en hospitalisation complète au CHU de [Localité 5] sur décision du directeur de l’établissement, suite à une demande urgente de son fils. Cette admission a été effectuée conformément à l’article L3212-3 du code de la santé publique.

Décision de maintien en hospitalisation

Le 24 décembre 2024, après évaluation médicale à 24 et 72 heures, il a été décidé de maintenir [H] [M] en hospitalisation complète. Le 27 décembre, le directeur de l’établissement a saisi le magistrat pour un contrôle de la mesure, conformément à la procédure légale.

Demande de mainlevée de la mesure

Le conseil de [H] [M] a demandé la mainlevée de l’hospitalisation, arguant que le patient était en état de discuter et de communiquer, ce qui aurait permis de signer la notification de ses droits. [H] [M] a également exprimé son souhait de quitter l’hôpital en raison de conditions d’hospitalisation jugées insatisfaisantes.

Notification des droits du patient

Selon l’article L3211-3 du code de la santé publique, le patient doit être informé de la décision d’admission et de ses droits, dans la mesure où son état le permet. Bien que [H] [M] n’ait pas pu signer la notification, il a été informé de la décision d’admission et de ses droits, comme l’atteste la documentation fournie.

Évaluation de l’état de santé

Les certificats médicaux indiquent que [H] [M] présentait des troubles mentaux significatifs, rendant son consentement impossible. Le juge ne peut pas contester l’évaluation médicale, qui a conclu à la nécessité de soins immédiats et d’une surveillance constante.

Décision du magistrat

Le magistrat a ordonné la poursuite de l’hospitalisation complète de [H] [M], précisant que cette mesure resterait en vigueur jusqu’à une levée médicale ou une décision de placement sous soins ambulatoires sans consentement, pour une durée maximale de six mois. La décision a été prononcée le 30 décembre 2024.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions de l’hospitalisation sans consentement selon le Code de la santé publique ?

L’article L.3212-1 du Code de la santé publique stipule que :

« Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur décision du directeur de l’établissement que si ses troubles rendent impossible son consentement et que son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier. »

Cet article établit donc deux conditions essentielles pour qu’une hospitalisation sans consentement soit légale :

1. **Impossibilité de consentement** : Le patient doit être dans un état qui ne lui permet pas de donner son accord éclairé à l’hospitalisation.

2. **Nécessité de soins immédiats** : L’état du patient doit nécessiter des soins urgents qui ne peuvent être fournis que dans un cadre hospitalier.

Il est important de noter que le juge ne peut pas substituer son avis à l’évaluation médicale concernant l’état du patient et sa capacité à consentir aux soins, comme l’indique la jurisprudence (Cour de cassation, civ 1ère, 27 septembre 2017, pourvoi n°16-22.544).

Ainsi, dans le cas de [H] [M], les certificats médicaux et l’avis du médecin ont confirmé que son état nécessitait une hospitalisation sous contrainte, justifiant ainsi la décision du directeur de l’établissement.

Quelles sont les obligations d’information du patient en matière de soins psychiatriques ?

L’article L.3211-3 du Code de la santé publique précise les obligations d’information du patient :

« Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état. »

Cet article impose plusieurs obligations :

1. **Information rapide et appropriée** : Le patient doit être informé le plus rapidement possible de la décision d’admission et des raisons qui la motivent.

2. **Droits et voies de recours** : Le patient doit être informé de sa situation juridique, de ses droits, et des voies de recours disponibles.

3. **Prise en compte des observations** : Les observations du patient doivent être recherchées et prises en considération dans la mesure du possible.

Dans le cas de [H] [M], bien que la notification de son admission ait été signée par des infirmiers en raison de son incapacité à signer, il a été informé de la décision d’admission et de ses droits, ce qui respecte les obligations légales.

Comment la jurisprudence interprète-t-elle la procédure d’hospitalisation sous contrainte ?

La jurisprudence, notamment la décision de la première chambre civile du 29 septembre 2021, a établi que :

« Cette procédure contradictoire préalable n’était pas applicable à la décision d’admission en soins psychiatriques. »

Cela signifie que, bien que le patient ait des droits, la procédure d’admission en soins psychiatriques ne nécessite pas une audience contradictoire préalable.

Les décisions d’hospitalisation sous contrainte sont donc prises en tenant compte de l’évaluation médicale et de l’urgence de la situation, sans qu’il soit nécessaire d’organiser une procédure contradictoire avant l’admission.

Dans le cas de [H] [M], la décision d’hospitalisation a été prise par le directeur de l’établissement sur la base de l’évaluation médicale, ce qui est conforme à la jurisprudence en vigueur.

Ainsi, même si le patient conteste les conditions de son hospitalisation, la légalité de la procédure d’admission est maintenue par la jurisprudence.

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE LILLE

Magistrat Délégué
Dossier – N° RG 24/02344 – N° Portalis DBZS-W-B7I-ZDEO

REPUBLIQUE FRANCAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

ORDONNANCE DU 30 Décembre 2024

DEMANDEUR
Monsieur LE DIRECTEUR DU CHU DE [Localité 5] – HOPITAL [4]
[Adresse 6]
Non comparant

DÉFENDEUR
Monsieur [H] [M]
CHU DE [Localité 5] – HOPITAL [4]
[Adresse 6]
Présent, assisté de Maître Xavier RAES, avocat commis d’office

TIERS
Monsieur [U] [M]
[Adresse 1]
[Localité 2]
Non comparant

MADAME LA PROCUREURE DE LA REPUBLIQUE
Non comparant – conclusions écrites du procureur de la République en date du 27/12/2024

COMPOSITION

MAGISTRAT : Aurore JEAN BAPTISTE, Magistrat Délégué
GREFFIER : Louise DIANA

DEBATS

En audience publique du 30 Décembre 2024 qui s’est tenue dans la salle d’audience de L’[3] de L’AGGLOMÉRATION LILLOISE, la décision ayant été mise en délibéré au 30 Décembre 2024.

Ordonnance contradictoire, en premier ressort, par mise à disposition au greffe le 30 Décembre 2024 par Aurore JEAN BAPTISTE, Magistrat délégué, assisté de Louise DIANA, Greffier.

Vu l’article 455 du code de procédure civile ;Vu la requête en date du 27 Décembre 2024 présentée par LE DIRECTEUR DU CHU DE [Localité 5] – HOPITAL [4] et les pièces jointes ;Vu les pièces visées par l’article R 3211-12 du code de la santé publique ;Vu la présence d’un avocat pour l’audience de ce jour ;Vu les conclusions du Ministère Public ;
Les parties présentes entendues.

RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCÉDURE

[H] [M] a fait l’objet le 21 décembre 2024 d’une admission en hospitalisation complète à l’[3] du CHU de [Localité 5] sur décision du directeur d’établissement selon la procédure prévue à l’article L3212-3 du code de la santé publique soit sur la demande d’un tiers (son fils) en urgence.

Sur la base des certificats médicaux établis aux échéances de 24 et de 72 heures son maintien en hospitalisation complète a été décidé le 24 décembre suivant.

Par requête en date du 27 décembre 2024, le directeur de l’établissement psychiatrique a saisi le magistrat du siège désigné par le Président aux fins de contrôle à 12 jours de la mesure.

Par mention écrite au dossier, le ministère public a fait connaître son avis requérant le maintien de l’hospitalisation sous contrainte.

***

Entendu le conseil de [H] [M] demande la mainlevée de la mesure et développe les moyens suivants :
– il n’est pas caractérisé l’impossibilité pour le patient de signer la notification des droits du 21 décembre 2024 alors que les deux certificats médicaux de la même date indiquent que [H] [M] est en état de discuter et de communiquer. Cette irrégularité fait grief.
Il est fait observer que [H] [M] dénoncent des conditions d’hospitalisation qui ne sont pas bonnes et qu’il consent aux soins.

[H] [M] confirme qu’il veut la mainlevée de la mesure et que les conditions d’hospitalisation ne sont pas bonnes. A défaut, il veut être transféré.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la notification de l’admission du patient et de ses droits :

Il ressort de l’article L3211-3 alinéa 2 du code de la santé publique : “Avant chaque décision prononçant le maintien des soins en application des articles L. 3212-4, L. 3212-7 et L. 3213-4 ou définissant la forme de la prise en charge en application des articles L. 3211-12-5, L. 3212-4, L. 3213-1 et L. 3213-3, la personne faisant l’objet de soins psychiatriques est, dans la mesure où son état le permet, informée de ce projet de décision et mise à même de faire valoir ses observations, par tout moyen et de manière appropriée à cet état.
En outre, toute personne faisant l’objet de soins psychiatriques en application des chapitres II et III du présent titre ou de l’article 706-135 du code de procédure pénale est informée :
a) Le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état, de la décision d’admission et de chacune des décisions mentionnées au deuxième alinéa du présent article, ainsi que des raisons qui les motivent ;

b) Dès l’admission ou aussitôt que son état le permet et, par la suite, à sa demande et après chacune des décisions mentionnées au même deuxième alinéa, de sa situation juridique, de ses droits, des voies de recours qui lui sont ouvertes et des garanties qui lui sont offertes en application de l’article L. 3211-12-1.
L’avis de cette personne sur les modalités des soins doit être recherché et pris en considération dans toute la mesure du possible”.

La première chambre civile a jugé que cette procédure contradictoire préalable n’était pas applicable à la décision d’admission en soins psychiatriques (1re Civ., 29 septembre 2021, pourvoi n° 20-14.611, publié).

Il résulte, par ailleurs, de l’article L. 3211-3, alinéa 3, du CSP que le patient doit être informé :
– le plus rapidement possible et d’une manière appropriée à son état de la décision d’admission et de la décision maintenant les soins ainsi que des raisons qui motivent ces décisions,
– dès l’admission ou aussitôt que son état le permet, et, par la suite après chacune des décisions maintenant les soins s’il en fait la demande, de sa situation juridique, de ses droits et des voies de recours qui lui sont ouvertes.

En l’espèce, il ressort que [H] [M] a été admis en hospitalisation sous contrainte le 21 décembre sur décision du directeur d’établissement qui lui a été notifiée le même jour. Il est fait mention que [H] [M] n’était pas en état de signer la présente notification qui a donc fait l’objet de la signature de deux infirmiers.

Si [H] [M] n’a pas été en mesure de signer la notification de la décision d’admission et de ses droits, il ressort que le texte impose au directeur d’établissement de porter à la connaissance du patient les décisions prises à son encontre, ce qui a été fait en l’espèce comme en atteste la notification du 21 décembre 2024 qui indique que [H] [M] a été informé de la décision d’admission et a eu connaissance de ses droits.

En outre, s’il n’est pas indiqué sur la notification, les raisons pour lesquelles [H] [M] n’a pas été en capacité de la signer, il convient de se référer au certificat d’admission qui relève les troubles suivants : “désorganisation comportementale”, “accélération psychomotrice avec logorrhée, tachypsychie, tachyphémie et fuite des idées. Il présente de plus une désinhibition avec ludisme et mise en danger sur le plan social et sexuel depuis 3 jours. Il rapporte une insomnie complète depuis trois jours. Il présente de plus des propos délirants à thématique mystique, de mécanisme essentiellement intuitif”.

En conséquence, le moyen sera rejeté.

Sur la poursuite de la mesure :

En application de l’article L.3212-1 du code de la santé publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur décision du directeur de l’établissement que si ses troubles rendent impossible son consentement et que son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier.

Le juge ne peut substituer son avis à l’évaluation par les médecins tant des troubles psychiques du patient que de son consentement aux soins (Cour de cassation, civ 1ère, 27 septembre 2017, pourvoi n°16-22.544).

En l’espèce, il résulte des pièces médicales, de l’avis motivé établi par le docteur [D] le 27 décembre 2024 et des débats de l’audience que l’hospitalisation sous contrainte de l’intéressé doit être prolongée, en l’état de la persistance des troubles et de l’impossibilité pour le patient de consentir valablement aux soins nécessités par son état de santé.

PAR CES MOTIFS,

Le magistrat délégué statuant après débats, par ordonnance mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort

ORDONNE la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [H] [M].

DIT que cette mesure emporte effet jusqu’à levée médicale ou décision médicale de placement sous soins ambulatoires sans consentement et à défaut jusqu’à un délai de six mois suivant le prononcé de cette décision.

Ainsi jugé et prononcé par mise à disposition au greffe le 30 Décembre 2024.

Le Greffier, Le Magistrat Délégué,

Louise DIANA Aurore JEAN BAPTISTE


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