L’Essentiel : [S] [C], jeune homme algérien, est arrivé en France en septembre 2022 après le décès de sa mère. Condamné en juin 2024 à six mois de prison pour trafic de stupéfiants, il a reçu une interdiction de territoire de trois ans. Après sa peine, il a été placé en rétention administrative en décembre 2024. Le préfet a demandé une prolongation de cette rétention en janvier 2025, soutenue par la préfecture. Le tribunal a jugé les démarches administratives suffisantes et a prolongé la rétention de 30 jours, estimant qu’un éloignement était envisageable dans un délai raisonnable.
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Contexte de l’affaire[S] [C], un jeune homme algérien né le 29 septembre 2004, est arrivé en France de manière irrégulière le 4 septembre 2022, suite au décès de sa mère. Il a des liens familiaux en Espagne, où réside son père, et une sœur vivant à [Localité 2]. En raison de sa situation administrative, il est sans emploi. Condamnation et mesures administrativesLe 6 juin 2024, [S] [C] a été condamné par le tribunal correctionnel de Toulouse à six mois d’emprisonnement pour offre ou cession de stupéfiants, ainsi qu’à une interdiction de territoire français de trois ans. Auparavant, il avait reçu une obligation de quitter le territoire français (OQTF) le 3 mars 2024, avec une interdiction de retour de deux ans. Placement en rétentionAprès avoir purgé sa peine, [S] [C] a été placé en rétention administrative le 4 décembre 2024, suite à un arrêté du préfet de la Haute-Garonne. Cette décision a été notifiée à sa levée d’écrou. Le 9 décembre 2024, le juge des libertés a prolongé sa rétention pour 26 jours, décision confirmée par la cour d’appel le 11 décembre 2024. Demande de prolongation de la rétentionLe 2 janvier 2025, le préfet a demandé une nouvelle prolongation de la rétention pour 30 jours. Lors de l’audience du 3 janvier 2025, le représentant de la préfecture a soutenu cette demande, tandis que l’avocat de [S] [C] a souligné un manque de célérité de l’administration entre le 27 décembre 2024 et le 2 janvier 2025. Analyse des diligences administrativesLe tribunal a examiné les actions de l’administration, notant que les autorités consulaires algériennes avaient été contactées dès le 15 octobre 2024. Les démarches entreprises ont été jugées suffisantes, et le tribunal a conclu que l’administration avait agi avec célérité, malgré le délai entre la réponse des autorités et la demande de routing. Décision finaleLe tribunal a décidé de prolonger la rétention de [S] [C] pour une durée de 30 jours, considérant que les conditions légales étaient remplies et qu’un éloignement était envisageable dans un délai raisonnable. La décision a été prise en premier ressort, avec possibilité d’appel dans les 24 heures suivant son prononcé. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?La prolongation de la rétention administrative est régie par l’article L. 742-4 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA). Cet article stipule que : « Le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants : 1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ; 2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ; 3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison : a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ; b) de l’absence de moyens de transport. » Il est également précisé que si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention ne doit pas excéder soixante jours. Ainsi, pour qu’une prolongation soit accordée, il est nécessaire que l’administration démontre qu’il existe des perspectives raisonnables de mise à exécution de la mesure d’éloignement dans le délai maximal applicable. Comment le juge apprécie-t-il la nécessité de la rétention ?Le juge judiciaire doit apprécier concrètement, au regard des données de chaque situation à la date où il statue, si la mesure de rétention et sa poursuite sont justifiées par des perspectives raisonnables de mise à exécution de la mesure d’éloignement. Cette appréciation doit se faire en tenant compte des éléments suivants : – Les diligences effectuées par l’administration pour organiser l’éloignement. Il est important de noter que les perspectives doivent s’entendre comme celles qui peuvent être réalisées dans le délai maximal de rétention applicable à l’intéressé, soit 90 jours. La démonstration par l’administration d’un éloignement à bref délai n’est exigée que pour les troisième et quatrième prolongations de la rétention. Les diligences de l’administration doivent présenter un caractère suffisant pour justifier la prolongation. Quels sont les recours possibles contre la décision de prolongation de la rétention ?La décision de prolongation de la rétention administrative est susceptible d’appel. Selon les dispositions en vigueur, l’intéressé doit être informé des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant. En l’espèce, il est mentionné que la décision est susceptible d’appel dans un délai de 24 heures à compter de son prononcé. L’appel doit être formulé par déclaration motivée, transmise par tous moyens au greffe de la Cour d’appel de Toulouse. Il est également précisé que cette déclaration peut être faite de manière privilégiée par courriel, en l’absence de télécopieur disponible. Ainsi, l’accès à un recours effectif est garanti, permettant à l’étranger de contester la décision de prolongation de sa rétention. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE TOULOUSE
Vice-président
ORDONNANCE PRISE EN APPLICATION DES DISPOSITIONS DU CODE D’ENTRÉE ET DE SÉJOUR DES ETRANGERS
(demande de 2ème prolongation)
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N° de MINUTE N° RG 25/00016 – N° Portalis DBX4-W-B7J-TVCE
Le 03 Janvier 2025
Nous, Marion STRICKER,,vice-président désigné par le président du tribunal judiciaire de TOULOUSE, assistée de Marine GUILLOU, greffier ;
En présence de Mme [J] [D], interprète en langue arabe, serment préalablement prêté ;
Statuant en audience publique ;
Vu les articles L742-1 à L742-3, L742-4, R743-1 à R743-8 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile ;
Vu notre saisine par requête de M. LE PREFET DE LA HAUTE-GARONNE reçue le 02 Janvier 2025 à 15 heures 15, concernant :
Monsieur [S] [C]
né le 29 Septembre 2004 à [Localité 3] (ALGER)
de nationalité Algérienne
Vu la précédente ordonnance du Vice-président du Tribunal judiciaire territorialement compétent en date du 09 décembre 2024 ordonnant la prolongation du maintien en rétention administrative de l’intéressé confirmée par la décision de la cour d’appel de TOULOUSE en date du 11 décembre 2024 ;
Vu l’ensemble des pièces de la procédure ;
Monsieur le Préfet sus-désigné ayant été avisé de la date et de l’heure de l’audience ;
Le conseil de l’intéressé ayant été avisé de la date et de l’heure de l’audience ;
Attendu que l’intéressé et son conseil ont pu prendre connaissance de la requête et de ses pièces annexes ;
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Ouï les observations du représentant de la Préfecture qui a sollicité la prolongation de la mesure de rétention administrative ;
Ouï les observations de l’intéressé ;
Ouï les observations de Me Séverine DUTREICH, avocat au barreau de TOULOUSE ;
RAPPEL DES FAITS ET DE LA PROCEDURE :
[S] [C], né le 29 septembre 2004 à [Localité 3] (Algérie), non documenté (mais copie d’un visa biométrique), de nationalité algérienne, a déclaré être arrivé irrégulièrement en France le 4 septembre 2022 suite au décès de sa mère. Il aurait un droit au séjour en Espagne où vit son père. Il a une sœur qui vit à [Localité 2]. Il est célibataire, sans enfant, sans emploi du fait de sa situation administrative.
[S] [C] a été condamné le 6 juin 2024 par le tribunal correctionnel de Toulouse pour offre ou cession de stupéfiants à titre principal à la peine de 6 mois d’emprisonnement, et à titre complémentaire à la peine de 3 ans d’interdiction du territoire français (ITF). Il avait fait l’objet préalable d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), sans délai, fixant le pays de renvoi, avec une interdiction de retour pendant 2 ans, par arrêté du préfet de la Haute-Garonne daté du 3 mars 2024, notifié le même jour à 13h10.
Alors écroué au centre pénitentiaire de [Localité 5]-[Localité 4], il a fait l’objet d’un arrêté de placement en rétention dans un local ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pris par le préfet de la Haute-Garonne daté du 3 décembre 2024 et régulièrement notifié à sa levée d’écrou le 4 décembre 2024 à 9h18.
Par ordonnance rendue le 9 décembre 2024 à 18h06, le juge des libertés et de la détention de Toulouse a ordonné la prolongation de la rétention de [S] [C], pour une durée de vingt-six jours, décision confirmée par le magistrat délégué à la cour d’appel de Toulouse par ordonnance rendue le 11 décembre 2024 à 16h00.
Par requête datée du 2 janvier 2025, enregistrée au greffe le même jour à 15h15, le préfet de la Haute-Garonne a demandé la prolongation de la rétention de [S] [C] dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire pour une durée de 30 jours (deuxième prolongation).
A l’audience du 3 janvier 2025, le représentant de la préfecture soutient la demande de prolongation faisant valoir l’ensemble des démarches entreprises par l’administration. Le conseil de [S] [C] plaide un manque de célérité de l’autorité administrative en l’absence de démarche entre le 27 décembre 2024 (date de la réponse des autorités consulaires algériennes) et le 2 janvier 2025 (date de la demande de routing).
La décision a été mise en délibéré au jour même.
A titre liminaire, il est constaté que la défense ne soutient pas de fin de non-recevoir.
Sur la prolongation de la rétention
Aux termes de l’article L741-3 du CESEDA un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration exerce toute diligence à cet effet.
Aux termes de l’article L. 742-4 du CESEDA, « le magistrat du siège du tribunal judiciaire peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :
1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;
2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;
3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :
a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;
b) de l’absence de moyens de transport.
L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.
Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours ».
Il appartient au juge judiciaire d’apprécier concrètement au regard des données de chaque situation à la date où il statue, si la mesure de rétention et sa poursuite sont justifiées par des perspectives raisonnables de mise à exécution de la mesure d’éloignement, étant précisé que ces perspectives doivent s’entendre comme celles qui peuvent être réalisées dans le délai maximal de rétention applicable à l’intéressé, soit 90 jours, la démonstration par l’administration d’un éloignement à bref délai n’étant exigée que pour les troisième et quatrième prolongations de la rétention. Les diligences de l’administration doivent présenter un caractère suffisant.
En l’espèce, la défense soutient que l’administration aurait manqué de célérité depuis le 27 décembre 2024 en l’absence de démarche entre le 27 décembre 2024 (date de la réponse des autorités consulaires algériennes) et le 2 janvier 2025 (date de la demande de routing).
Il ressort de la lecture des pièces au soutien de la requête du préfet de la Haute-Garonne que [S] [C], de nationalité algérienne, a été placé en rétention par décision notifiée le 4 décembre 2024, à sa levée d’écrou. Il n’est pas contesté par la défense que les autorités consulaires algériennes ont été saisies en vue d’une demande d’identification, rapidement (dès le 15 octobre 2024) et valablement (avec copie du visa biométrique), bien en amont de l’arrêté de placement, plus d’un mois avant la levée d’écrou. Il a fait l’objet d’une audition consulaire le 4 décembre 2024, puis le fichier décadactylaire des empreintes a été envoyé le 11 décembre 2024, après la sollicitation des autorités étrangères reçue le 10 décembre 2024. L’administration a fait donc preuve de célérité avec des diligences utiles et effectives, en amont de la première audience devant le juge des libertés et de la détention.
Suite à la décision judiciaire du 9 décembre 2024, confirmée en appel le 11 décembre 2024, il est inexact de soutenir que l’administration a manqué de célérité dans ses diligences, alors que les autorités consulaires algériennes, après relances, ont finalement reconnu [S] [C] comme l’un de leurs ressortissants le vendredi 27 décembre 2024 (au nom de [N] [S] [C], même date et même lieu de naissance), alors que le jeudi 2 janvier 2025, une demande de routing a été effectuée, certes relativement tardive ce qui ne saurait toutefois s’analyser en un défaut de diligence, puisqu’elle a eu lieu après un week-end et un jour férié, alors que la rétention de l’intéressé suite à la première prolongation allait prendre fin le 3 janvier 2025 et qu’il était illusoire d’envisager un vol dédié avant cette échéance.
Ainsi, dans la mesure où les diligences effectuées par l’administration permettent d’envisager un éloignement dans les prochains jours, au plus tard les prochaines semaines, en tout cas avant la fin du délai maximal prévu par la loi, les conditions légales d’une seconde prolongation sont réunies et il sera fait droit à la requête aux fins de prolongation de la rétention de [S] [C], pour une durée de 30 jours.
Statuant publiquement en premier ressort, par décision assortie de l’exécution provisoire,
ORDONNONS la prolongation de la rétention de [S] [C], pour une durée de trente jours à l’expiration du précédent délai de vingt-six jours imparti par l’ordonnance prise le 9 décembre 2024 par le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire territorialement compétent, confirmée par la décision de la cour d’appel du 11 décembre 2024.
Le greffier
Le 03 Janvier 2025 à
Le Vice-président
Les parties soussignées ont reçu notification de la présente décision.
Disons avoir informé l’étranger des possibilités et des délais de recours contre toutes les décisions le concernant.
Rappelons que cette décision est susceptible d’appel dans un délai de 24 heures à compter de son prononcé par déclaration motivée transmise par tous moyens au greffe de la Cour d’appel de Toulouse et de manière privilégiée sur la boîte structurelle [Courriel 1] en l’absence de télécopieur disponible.
signature de l’intéressé
Préfecture avisée par mail
signature de l’interprète
avocat avisé par mail
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