Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la diligence et de l’ordre public.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de la diligence et de l’ordre public.

L’Essentiel : Le 29 novembre 2024, M. [O] [K] a été placé en rétention administrative, une décision prolongée par le juge des libertés le 2 décembre. Le 28 décembre, le préfet a demandé une nouvelle prolongation de trente jours, accordée le lendemain. M. [K] a interjeté appel le 30 décembre, arguant d’irrégularités dans la procédure. L’appel a été jugé recevable, mais l’examen a révélé que la prolongation était justifiée par l’absence de garanties de représentation et un comportement menaçant. Les démarches administratives pour son départ ont été entreprises, et l’appel a finalement été rejeté, confirmant la rétention.

Placement en rétention

Le 29 novembre 2024, l’autorité administrative a décidé de placer M. [O] [K] en rétention dans des locaux non pénitentiaires. Cette décision a été suivie d’une ordonnance du juge des libertés et de la détention, le 2 décembre 2024, qui a prolongé la rétention de M. [K] pour une durée de vingt-six jours.

Nouvelle prolongation de la rétention

Le 28 décembre 2024, le préfet du Rhône a demandé au juge des libertés et de la détention de prolonger la rétention de M. [K] pour trente jours supplémentaires. Le 29 décembre 2024, le juge a accédé à cette demande, prolongeant ainsi la rétention.

Appel de M. [K]

M. [K] a interjeté appel de l’ordonnance le 30 décembre 2024, demandant son infirmation et sa mise en liberté. Il a soutenu que la procédure était irrégulière et que l’administration n’avait pas pris les mesures nécessaires pour organiser son départ durant la première période de rétention.

Observations des parties

Le 30 décembre 2024, les parties ont été invitées à faire part de leurs observations concernant l’absence de nouvelles circonstances justifiant la fin de la rétention. L’avocat de la préfecture a confirmé les diligences déjà effectuées, tandis que l’avocat de M. [K] n’a pas formulé d’observations.

Recevabilité de l’appel

L’appel de M. [K] a été déclaré recevable, conformément aux dispositions légales en vigueur.

Examen du bien-fondé de la requête

L’article L. 741-3 du CESEDA stipule que la rétention d’un étranger ne peut excéder le temps strictement nécessaire à son départ. L’autorité préfectorale a justifié la prolongation de la rétention par l’absence de garanties de représentation de M. [K] et son comportement jugé menaçant pour l’ordre public, en raison de condamnations pénales antérieures.

Diligences administratives

L’autorité administrative a engagé des démarches pour obtenir un laissez-passer consulaire pour M. [K], en contactant les autorités algériennes dès le 28 novembre 2024. Les relances effectuées ont été documentées, et la réalité de ces diligences n’a pas été contestée.

Conclusion de l’appel

Les éléments présentés par M. [K] n’ont pas permis de justifier la fin de sa rétention administrative. En l’absence de nouvelles circonstances, l’appel a été rejeté et l’ordonnance de prolongation de la rétention confirmée.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’appel de M. [O] [K] ?

L’appel de M. [O] [K] est déclaré recevable conformément aux dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Ces articles précisent les conditions dans lesquelles un étranger peut interjeter appel d’une décision de rétention administrative.

L’article L. 743-21 stipule que « l’étranger peut faire appel de l’ordonnance du juge des libertés et de la détention dans un délai de 15 jours à compter de sa notification ».

Les articles R. 743-10 et R. 743-11 détaillent les modalités de cette procédure, notamment les délais et les formes à respecter pour que l’appel soit recevable.

Ainsi, M. [O] [K] a respecté les délais et les formes légales, rendant son appel recevable.

Quelles sont les conditions de prolongation de la rétention administrative selon le CESEDA ?

L’article L. 741-3 du CESEDA précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strictement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet ».

De plus, l’article L. 742-4 énonce les conditions dans lesquelles le juge des libertés et de la détention peut être saisi pour prolonger la rétention au-delà de trente jours.

Il énumère plusieurs cas, notamment :

1. En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.
2. Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé.
3. Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat.

Si le juge ordonne la prolongation, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention pour une durée maximale de trente jours, sans que la durée totale n’excède soixante jours.

Quels sont les arguments de M. [O] [K] concernant la régularité de la procédure ?

M. [O] [K] soutient que la procédure de rétention est irrégulière, invoquant l’article L. 741-3 du CESEDA.

Il affirme que « l’administration doit exercer toute diligence à cet effet » et que la Préfecture du Rhône n’a pas effectué les diligences nécessaires pour organiser son départ durant la première période de sa rétention.

Il conteste donc la légitimité de sa prolongation de rétention, arguant que l’administration n’a pas respecté son obligation de diligence.

Cependant, l’autorité préfectorale a démontré avoir engagé des démarches dès le placement en rétention, notamment en contactant les autorités algériennes pour obtenir un laissez-passer consulaire.

M. [O] [K] n’a pas fourni d’éléments concrets pour prouver l’absence de diligences, ce qui affaiblit son argumentation.

Quelles sont les conséquences de l’absence de circonstances nouvelles dans l’appel de M. [O] [K] ?

L’absence de circonstances nouvelles de fait ou de droit depuis le placement en rétention administrative a des conséquences significatives sur l’appel de M. [O] [K].

L’article L. 743-23 alinéa 2 du CESEDA stipule que le juge peut décider de mettre fin à la rétention si des circonstances nouvelles sont présentées.

Dans le cas présent, M. [O] [K] n’a pas justifié d’éléments nouveaux depuis son placement en rétention, ce qui signifie que son appel ne peut être fondé sur ce motif.

Ainsi, le juge a considéré que les éléments invoqués par M. [O] [K] ne suffisent pas à justifier une mise en liberté, entraînant le rejet de son appel et la confirmation de l’ordonnance de prolongation de sa rétention.

N° RG 24/09897 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QC3Y

Nom du ressortissant :

[O] [K]

[K]

C/

PREFETE DU RHÔNE

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 31 DECEMBRE 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Emmanuelle SCHOLL, conseillère à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 16 décembre 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l’absence du ministère public,

Statuant en notre cabinet dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [O] [K]

né le 26 Juillet 1984 à [Localité 3] (ALGERIE)

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au centre de rétention administrative de [4]

Ayant pour conseil Maître Rodrigue GOMA MACKOUNDI, avocat au barreau de LYON, commis d’office

ET

INTIMEE :

Mme PREFETE DU RHÔNE

[Adresse 1]

[Localité 2] (RHÔNE)

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l’affaire en délibéré au 31 Décembre 2024 à 17 heures et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Par décision en date du 29 novembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [O] [K] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire à compter du 29 novembre 2024.

Par ordonnance du 2 décembre 2024, confirmée en appel le 4 décembre 2024, le juge des libertés et de la détention a prolongé la rétention administrative de M. [O] [K] pour une durée de vingt-six jours.

Suivant requête reçue le 28 décembre 2024 à 15 heures, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner une nouvelle prolongation de la rétention pour une durée de trente jours.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire du Rhône, dans son ordonnance du 29 décembre 2024 à 14 heures 00 a fait droit à cette requête.

Par déclaration au greffe le 30 décembre 2024 à 9 heures 47, M. [O] [K] a interjeté appel de cette ordonnance dont il demande l’infirmation outre sa mise en liberté au visa de l’article L. 741-3 du CESEDA. Il motive sa requête comme suit: «J’estime que la procédure est irrégulière et qu’elle devra, par conséquent, être annulée. Selon l’article L.741-3 du CESEDA, ‘un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que pour le temps strctement nécessaire à son départ. L’administration doit exercer toute diligence à cet effet’. J’estime que la Préfecture du Rhône n’a pas effectué les diligences nécessaires afin d’organiser mon départ pendant la première période de ma rétention. »

M. [O] [K] a demandé l’infirmation de l’ordonnance déférée et sa remise en liberté.

Par courriel adressé le 30 décembre 2024 à 11 heures 40 les parties ont été informées que le magistrat délégué par le premier président envisageait de faire application des dispositions du deuxième alinéa de l’article L. 743-23  du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) et les a invitées à faire part, le 31 décembre 2024 à 9 heures au plus tard, de leurs observations éventuelles sur l’absence de circonstance nouvelle de fait ou de droit depuis le placement en rétention administrative, ou sur l’absence d’éléments fournis à l’appui de la requête d’appel permettant de justifier qu’il soit mis fin à la rétention.

Vu les observations de l’avocat de la préfecture reçues par courriel le 30 décembre 2024 à 18 heures 27 tendant à la confirmation de la décision entreprise compte tenu des diligences déjà accomplies et justifiées.

Vu l’absence d’observations formées par l’avocat de la personne retenue.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel

Attendu que l’appel de M. [O] [K] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) est déclaré recevable ; 

Sur le bien-fondé de la requête

Attendu que l’article L. 741-3 du CESEDA rappelle qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l’administration doit exercer toute diligence à cet effet ;

Attendu que l’article L. 742-4 du même code dispose que «Le juge des libertés et de la détention peut, dans les mêmes conditions qu’à l’article L. 742-1, être à nouveau saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de trente jours, dans les cas suivants :

1° En cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public ;

2° Lorsque l’impossibilité d’exécuter la décision d’éloignement résulte de la perte ou de la destruction des documents de voyage de l’intéressé, de la dissimulation par celui-ci de son identité ou de l’obstruction volontaire faite à son éloignement ;

3° Lorsque la décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison :

a) du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé ou lorsque la délivrance des documents de voyage est intervenue trop tardivement pour procéder à l’exécution de la décision d’éloignement ;

b) de l’absence de moyens de transport.

L’étranger peut être maintenu à disposition de la justice dans les conditions prévues à l’article L. 742-2.

Si le juge ordonne la prolongation de la rétention, celle-ci court à compter de l’expiration de la précédente période de rétention et pour une nouvelle période d’une durée maximale de trente jours. La durée maximale de la rétention n’excède alors pas soixante jours.» ;

Attendu que dans sa requête en prolongation de la durée de la rétention de M. [O] [K], l’autorité préfectorale fait valoir que M. [K] ne justifie pas de garanties de représentation effectives, puisqu’il ne justifie pas être entrée de manière régulière sur le territoire ni avoir entamé des démarches pour régulariser sa situation et que son comportement constitue une menace pour l’ordre public au regard de deux condamnations prononcées le 18 septembre 2024 et le 12 mars 2024; qu’elle relève en outre l’absence de justificatif de logement stable et de moyens d’existences effectifs; qu’elle termine en précisant qu’il est dépourvu de documents d’identité et de voyage ce qui oblige l’administration à des démarches auprès des autorités algériennes dès le 28 novembre 2024 avec des relances effectuées les 13 décembre et 27 décembre 2024 ;

Attendu que sur le moyen tiré de la menace pour l’ordre public, il ressort des pièces de la procédure que M. [K] a fait l’objet de deux condamnations pénales depuis la notification de l’ordre de quitter le territoire français avec interdiction de revenir en France pendant douze mois; qu’il ne s’est pas exécuté; que la condamnation du 13 mars 2024 concerne son ex-épouse et concerne des faits de violences suivi d’incapacité n’excédant pas huit jours en présence d’un mineur par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte de solidarité et violence aggravée par deux circonstances n’excédant pas huit jours, ainsi que cela ressort de son audition; que cette condamnation a été assortie d’une partie avec sursis, qui a été révoqué partiellement quelques mois, le 19 septembre 2024 à l’occasion de la seconde condamnation pour des faits de rencontre malgré interdiction judiciaire prononcée à titre de peine; qu’ainsi, quand bien même il s’agirait pour lui d’obtenir un remboursement auprès de son ex-épouse, force est de constater que les moyens employés portent atteinte à l’ordre public et qu’il constitue une menace pour celui-ci, seule l’incarcération ayant mis fin à ses agissements ;

Attendu qu’à titre surabondant, sur le moyen tiré de l’attente de délivrance du laissez-passer consulaire, dans sa requête en prolongation de la rétention de M. [K], l’autorité préfectorale fait valoir que :

– elle a saisi dès le 28 novembre 2024 les autorités consulaires d’Algérie afin d’obtenir la délivrance d’un laissez-passer pour M. [K] qui circulait sans document d’identité ou de voyage en cours de validité ;

– le 28 novembre 2024 elle a adressé au consulat les empreintes et les photographies de l’intéressé, ainsi qu’une copie du passeport et un VISABIO par envoi recommandé ;

– et deux courriels de relance aux autorités consulaires a été envoyé les 13 décembre et 27 décembre 2024 ;

Attendu que la réalité de ces diligences n’est pas contestée ;

Qu’il ressort des pièces du débat que l’autorité administrative a engagé des diligences dès le placement en rétention administrative afin d’obtenir l’identification et ainsi la délivrance d’un laissez-passer consulaire et M. [K] ne désigne précisément aucune insuffisance particulière de l’autorité préfectorale dans les diligences susceptibles d’être utilement engagées durant le mois suivant son placement en rétention administrative ;

Attendu qu’il en résulte que le moyen tiré de l’absence de diligences ainsi que la prétention qui lui est associée tendent uniquement à solliciter une mise en liberté et à obtenir de manière claire la mainlevée de la rétention administrative ce qui relève manifestement des prévisions de l’article L. 743-23 alinéa 2 du CESEDA ;

Attendu qu’il y a lieu de considérer que les éléments invoqués par M. [K] ne permettent pas de justifier qu’il soit mis fin à sa rétention administrative tandis qu’il n’invoque ni ne justifie d’aucune circonstance nouvelle de droit ou de fait depuis son placement en rétention ;

Attendu que son appel doit dès lors être rejeté sans audience et l’ordonnance entreprise est confirmée ;

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par M. [O] [K],

Confirmons l’ordonnance déférée.

Le greffier, Le conseiller délégué,

Céline DESPLANCHES Emmanuelle SCHOLL


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