Validité des actes administratifs et respect des procédures de rétention

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Validité des actes administratifs et respect des procédures de rétention

L’Essentiel : M. [V] [Z] a été condamné à dix ans d’interdiction du territoire français. Le 24 décembre 2024, il a été placé en rétention administrative. Contestant cette décision, il a saisi le juge des libertés le 27 décembre. Le préfet a également demandé une prolongation de la rétention. Dans son ordonnance du 28 décembre, le juge a confirmé la régularité de la décision. M. [V] [Z] a interjeté appel le 30 décembre, arguant des irrégularités dans l’arrêté. L’examen a révélé l’absence de signature identifiable de la préfète, entraînant l’annulation de l’acte et la mise en liberté de M. [V] [Z].

Condamnation de M. [V] [Z]

M. [V] [Z] a été condamné par un jugement rendu le 22 juillet 2021 à une peine de dix ans d’interdiction du territoire français.

Placement en rétention administrative

Le 24 décembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [V] [Z] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.

Contestation de la décision de rétention

Le 27 décembre 2024, M. [V] [Z] a contesté la décision de placement en rétention administrative par une requête reçue par le greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon.

Demande de prolongation de la rétention

Le même jour, le préfet de l’Isère a également saisi le juge des libertés et de la détention pour demander la prolongation de la rétention de M. [V] [Z] pour une durée de vingt-six jours.

Ordonnance du juge des libertés

Dans son ordonnance du 28 décembre 2024, le juge a ordonné la jonction des deux procédures, déclaré recevable la requête de M. [V] [Z], et a confirmé la régularité de la décision de placement en rétention, tout en ordonnant la prolongation de la rétention.

Appel de M. [V] [Z]

M. [V] [Z] a interjeté appel de cette ordonnance le 30 décembre 2024, arguant que la procédure de placement en rétention était irrégulière en raison de l’absence de nom et de prénom sur l’arrêté, ainsi que de l’absence de signature de la préfète.

Audience et plaidoirie

Les parties ont été convoquées à l’audience du 17 novembre, où M. [V] [Z] a comparu avec un interprète et son avocat, tandis que le préfet de l’Isère a demandé la confirmation de l’ordonnance initiale.

Recevabilité de l’appel

L’appel de M. [V] [Z] a été déclaré recevable, conformément aux dispositions légales en vigueur.

Régularité de l’arrêté de rétention

L’examen de l’arrêté de placement en rétention a révélé des irrégularités, notamment l’absence de signature identifiable de la préfète, ce qui a conduit à l’annulation de l’acte.

Décision finale

L’appel a été accueilli, l’ordonnance a été infirmée, et l’arrêté de placement en rétention a été annulé. M. [V] [Z] a été mis en liberté, tout en étant rappelé à l’existence de son interdiction judiciaire du territoire français.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de M. [V] [Z] a été jugé recevable conformément aux dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

Ces articles stipulent que :

– **Article L. 743-21** : « Les décisions de placement en rétention administrative peuvent faire l’objet d’un recours devant le juge des libertés et de la détention dans un délai de quatre jours à compter de leur notification. »

– **Article R. 743-10** : « Le recours est formé par une requête écrite, signée par l’intéressé ou son avocat, et déposée au greffe du tribunal judiciaire. »

– **Article R. 743-11** : « Le greffe accuse réception de la requête et en informe l’autorité administrative. »

Dans le cas présent, M. [V] [Z] a interjeté appel dans les formes et délais légaux, rendant ainsi son appel recevable.

Sur la régularité de l’arrêté du placement en rétention administrative

La régularité de l’arrêté de placement en rétention administrative est examinée à la lumière des articles L. 741-10 et L. 212-1 du CESEDA et du Code des relations entre le public et l’administration.

– **Article L. 741-10** : « L’étranger qui fait l’objet d’une décision de placement en rétention peut contester cette décision devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire, dans un délai de quatre jours à compter de sa notification. »

– **Article L. 212-1** : « Toute décision prise par une administration doit comporter la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci. »

Dans cette affaire, l’arrêté de placement en rétention mentionne « LA PREFETE » suivi d’une signature. Toutefois, l’absence de clarté sur l’identité de l’auteur de la signature soulève des doutes quant à la légitimité de l’acte.

L’examen des signatures a révélé des différences notables, et l’autorité préfectorale n’a pas reconnu la signature contestée. Cela entraîne une incertitude sur les pouvoirs de la personne ayant signé l’arrêté.

En conséquence, l’arrêté est jugé irrégulier en la forme et doit être annulé, ce qui entraîne l’infirmation de l’ordonnance en toutes ses dispositions.

N° RG 24/09909 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QC4I

Nom du ressortissant :

[V] [Z]

[Z]

C/

PREFET DE L’ISERE

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 31 DECEMBRE 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Emmanuelle SCHOLL, conseiller à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 16 décembre 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l’absence du ministère public,

Statuant en notre cabinet dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [V] [Z]

né le 23 Décembre 2024 à [Localité 5]

de nationalité Lybienne

Actuellement retenu au CRA 2

comparant assisté de Maître Marie GUILLAUME, avocat au barreau de LYON, commis d’office Et avec le concours de Monsieur [G], interprète en langue Arabe, inscrit sur la liste CESEDA, ayant prêté serment à l’audience

ET

INTIME :

M. PREFET DE L’ISERE

[Adresse 3]

[Adresse 3]

[Localité 2]

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l’affaire en délibéré au 31 Décembre 2024 à 17h00 et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Par jugement contradictoire rendu le 22 juillet 2021,M. [V] [Z] a été condamné notamment à une peine de dix ans d’interdiction du territoire.

Par décision en date du 24 décembre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de M. [V] [Z] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire à compter du 24 décembre 2024.

Suivant requête du 27 décembre 2024, réceptionnée par le greffe du juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon le 27 décembre 2024 à 20 heures 20, M. [V] [Z] a contesté la décision de placement en rétention administrative prise par le préfet de l’Isère.

Suivant requête du 27 décembre 2024, reçue le 27 décembre 2024 à 14 heures 48, le préfet de l’Isère a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner la prolongation de la rétention pour une durée de vingt-six jours.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 28 décembre 2024 à 13heures 42 a :

‘ ordonné la jonction des deux procédures,

‘ déclaré recevable en la forme la requête de M. [V] [Z] ,

‘ Rejeté les moyens d’irrecevabilité soulevés

‘ déclaré régulière la décision de placement en rétention prononcée à l’encontre de M. [V] [Z] ,

‘ déclaré recevable la requête en prolongation de la rétention administrative,

‘ déclaré régulière la procédure diligentée à l’encontre de M. [V] [Z] ,

‘ ordonné la prolongation de la rétention de M. [V] [Z] dans les locaux du centre de rétention administrative de [Localité 4] pour une durée de vingt-six jours.

M. [V] [Z] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le 30 décembre 2024 à 09 heures 49 en faisant valoir que la procédure de placement en rétention administrative était irrégulière, l’arrêté ne portant ni nom ni prénom et n’étant pas signé par la préfète. Il soutient également que la requête du préfet est mal fondée en ce que la procédure de garde à vue est irrégulière, de même que la deuxième consultation du FPR. Il demande subsidiairement une mesure d’instruction en vérifiant l’habilitation de M. [X] et à l’identification du détenteur du matricule n° [Numéro identifiant 1] ainsi que la confirmation qu’il est bien habilité et qu’il est à l’origine de la seconde consultation du FPR.

M. [V] [Z] a demandé l’infirmation de l’ordonnance déférée, de dire n’y avoir lieu à la prolongation de la rétention de M. [V] [Z] et d’ordonner sa remise en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 17 novembre à 10 heures 30.

M. [V] [Z] a comparu et a été assisté d’un interprète en langue arabe et de son avocat.

Le conseil de M. [V] [Z] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d’appel.

Le préfet de l’Isère, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l’ordonnance déférée.

M. [V] [Z] a eu la parole en dernier.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de M. [V] [Z] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) est déclaré recevable. 

Sur la régularité de l’arrêté du placement en rétention administrative

Aux termes de l’article L741-10 du CESEDA, l’étranger qui fait l’objet d’une décision de placement en rétention peut la contester devant le magistrat du siège du tribunal judiciaire, dans un délai de quatre jours à compter de sa notification.

Aux termes de l’article L 212-1 du code des relations entre le public et l’administration, toute décision prise par une administration comporte la signature de son auteur ainsi que la mention, en caractères lisibles, du prénom, du nom et de la qualité de celui-ci.

En l’espèce, l’arrêté de placement en rétention porte en mention finale ‘LA PREFETE’ suivie d’une signature. Le conseil de la préfecture a soutenu à l’audience qu’il s’agissait de la signature de la préfète et à titre subsidiaire, a indiqué que dans la mesure où l’appelant disait qu’il s’agissait de la signature de M. [T], il n’y avait pas de difficulté, la délégation de signature étant produite. Le conseil de l’appelant produit des arrêtés signés de la préfète.

L’examen comparé des signatures permet de constater qu’il ne s’agit pas de la même signature, celle de la préfète ressemblant à un trait horizontal avec deux boucles verticales tels un ‘f’ sur le côté gauche. La signature de l’arrêté comprend un ‘s’ majuscule suivi d’une autre lettre qui descend sous le trait horizontal sur lequel ces lettres sont posées.

Dans la mesure où l’autorité préfectorale n’a pas reconnu la signature de M. [T], il n’apparaît pas possible de la lui attribuer, quand bien même il existerait des ressemblances. Seule une expertise graphologique le permettrait avec certitude.

Il en résulte que l’incertitude sur l’auteur de cet arrêté conduit à l’incertitude sur les pouvoirs de cette personne pour le prendre.

En conséquence, l’acte est irrégulier en la forme et sera donc annulé. L’ordonnance sera infirmée en toutes ses dispositions.

La requête en prolongation de la rétention sera déclaré sans objet.

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par M. [V] [Z] ,

Infirmons en toutes ses dispositions l’ordonnance déférée;

Statuant à nouveau,

Annulons l’arrêté de placement en rétention de M. [V] [Z] ;

Déclarons sans objet la requête de la préfecture de l’Isère en prolongation de la rétention;

En tant que besoin, Ordonnons la mise en liberté de M. [V] [Z] ;

Rappelons à M. [V] [Z] qu’il fait l’objet d’une interdiction judiciaire du territoire français pendant dix ans suite à la décision du tribunal correctionnel du 22 juillet 2021 ;

Et l’informons qu’en application de l’article L. 824-9 du CESEDA que tout étranger qui se soustrait ou de tente de se soustraire à l’exécution d’une interdiction administrative du territoire français, d’une obligation de quitter le territoire français ou d’une décision d’expulsion ou qui refuse de se soumettre aux modalités de transport qui lui sont désignées pour l’exécution d’office de la mesure dont il fait l’objet encourt une peine de trois années d’emprisonnement ;

Le greffier, Le conseiller délégué,

Céline DESPLANCHES Emmanuelle SCHOLL


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