Prolongation de la rétention administrative : enjeux de santé et d’ordre public.

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Prolongation de la rétention administrative : enjeux de santé et d’ordre public.

L’Essentiel : Le 9 septembre 2023, le préfet du Rhône a notifié à [D] [X] une obligation de quitter le territoire, assortie d’une interdiction de retour de 36 mois. Suite à sa garde à vue, il a été placé en rétention administrative le 29 octobre 2024. Cette rétention a été prolongée par le juge des libertés et de la détention à plusieurs reprises, jusqu’à une nouvelle demande de prolongation le 27 décembre 2024. Malgré son appel, [D] [X] a vu sa rétention confirmée, l’administration arguant qu’il constituait une menace à l’ordre public et n’avait pas de documents d’identité.

Notification de l’obligation de quitter le territoire

Une obligation de quitter le territoire sans délai, accompagnée d’une interdiction de retour de 36 mois, a été notifiée le 9 septembre 2023 par le préfet du Rhône à [D] [X].

Placement en rétention administrative

Après son placement en garde à vue, une décision du 29 octobre 2024 a ordonné le placement de [D] [X] en rétention dans des locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire.

Prolongation de la rétention

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a prolongé la rétention administrative de [D] [X] par ordonnances des 3 et 28 novembre 2024, confirmées en appel les 5 et 30 novembre 2024, pour des durées de vingt-six et trente jours.

Nouvelle demande de prolongation

Le 27 décembre 2024, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention pour demander une prolongation exceptionnelle de la rétention de quinze jours.

Ordonnance du juge

Dans son ordonnance du 28 décembre 2024, le juge a fait droit à la requête du préfet.

Appel de [D] [X]

[D] [X] a interjeté appel de cette ordonnance le 30 décembre 2024, arguant que son état de santé n’était pas compatible avec la prolongation de la rétention et qu’il avait entamé une grève de la faim.

Audience et plaidoirie

Les parties ont été convoquées à l’audience du 31 décembre 2024, où [D] [X] a comparu avec un interprète et son avocat, qui a plaidé en faveur de la requête d’appel.

Position du préfet

Le préfet du Rhône, représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l’ordonnance déférée.

Recevabilité de l’appel

L’appel de [D] [X] a été déclaré recevable, conformément aux dispositions légales du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile.

Évaluation de la prolongation de la rétention

Le juge a rappelé que la rétention ne peut être maintenue que le temps strictement nécessaire à l’éloignement et que l’administration doit agir avec diligence.

Arguments de l’autorité administrative

L’autorité administrative a soutenu que [D] [X] constituait une menace à l’ordre public, n’avait pas d’hébergement stable en France, et était dépourvu de documents d’identité, rendant nécessaire la demande de laissez-passer auprès des autorités consulaires algériennes.

État de santé de [D] [X]

[D] [X] a produit un dossier médical d’octobre 2023, mais n’a pas justifié d’autres problèmes de santé actuels, à part ceux liés à sa grève de la faim, qui fait l’objet d’une surveillance médicale.

Confirmation de l’ordonnance

En conséquence, l’ordonnance qui avait maintenu la rétention de [D] [X] a été confirmée par la cour.

Q/R juridiques soulevées :

Sur la recevabilité de l’appel

L’appel de [D] [X] a été jugé recevable conformément aux dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du Code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA).

L’article L. 743-21 stipule que « l’étranger peut faire appel des décisions du juge des libertés et de la détention dans les conditions prévues par le présent code. »

Les articles R. 743-10 et R. 743-11 précisent les modalités de cette procédure d’appel, notamment les délais et les formes à respecter.

Ainsi, l’appel a été effectué dans les formes et délais légaux, ce qui le rend recevable.

Sur le bien-fondé de la requête

L’article L. 741-3 du CESEDA précise que « un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l’administration doit exercer toute diligence à cet effet. »

Cela signifie que la rétention ne doit pas être prolongée au-delà de ce qui est nécessaire pour permettre l’éloignement de l’étranger.

De plus, l’article L. 742-5 du même code indique que « à titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours : »

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement, une demande de protection ou d’asile ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.

Dans cette affaire, le conseil de [D] [X] n’a pas contesté que les conditions de prolongation étaient réunies, mais a mis en avant l’état de santé de son client.

L’autorité administrative a justifié la prolongation en soulignant que [D] [X] constituait une menace pour l’ordre public, n’avait pas d’hébergement stable et était dépourvu de documents d’identité.

En conséquence, l’ordonnance de maintien de la rétention a été confirmée, car les motifs avancés par l’autorité étaient pertinents et justifiés.

N° RG 24/09898 – N° Portalis DBVX-V-B7I-QC3Z

Nom du ressortissant :

[D] [X]

[X]

C/

PREFETE DU RHONE

COUR D’APPEL DE LYON

JURIDICTION DU PREMIER PRÉSIDENT

ORDONNANCE DU 31 DECEMBRE 2024

statuant en matière de Rétentions Administratives des Etrangers

Nous, Florence PAPIN, Présidente de chambre à la cour d’appel de Lyon, déléguée par ordonnance de madame la première présidente de ladite Cour en date du 16 décembre 2024 pour statuer sur les procédures ouvertes en application des articles L.342-7, L. 342-12, L. 743-11 et L. 743-21 du code d’entrée et de séjour des étrangers en France et du droit d’asile,

Assistée de Céline DESPLANCHES, greffier,

En l’absence du ministère public,

En audience publique du 31 Décembre 2024 dans la procédure suivie entre :

APPELANT :

M. [D] [X]

né le 06 Juillet 1996 à [Localité 2]

de nationalité Algérienne

Actuellement retenu au Centre de rétention de [1]

comparant assisté de Maître Cécile LEBEAUX, avocat au barreau de LYON, commis d’office et avec le concours de Monsieur [L] [O], interprète en langue Arabe, inscrit sur la liste CESEDA, ayant prêté serment à l’audience

ET

INTIME :

M. PREFETE DU RHONE

non comparant, régulièrement avisé, représenté par Maître Eddy PERRIN, avocat au barreau de LYON substituant Me Jean-Paul TOMASI, avocat au barreau de LYON

Avons mis l’affaire en délibéré au 31 Décembre 2024 à 15h15 et à cette date et heure prononcé l’ordonnance dont la teneur suit :

FAITS ET PROCÉDURE

Une obligation de quitter le territoire sans délai assortie d’une interdiction de retour pendant 36 mois a été notifiée le 9 septembre 2023 par le préfet du Rhône à [D] [X].

Suite à son placement en garde à vue, par décision du 29 octobre 2024, l’autorité administrative a ordonné le placement de [D] [X] en rétention dans les locaux ne relevant pas de l’administration pénitentiaire..

Par ordonnances des 3 et 28 novembre 2024, confirmées en appel par décisions des 5 novembre 2024 et 30 novembre 2024, le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon a prolongé la rétention administrative de [D] [X] pour des durées de vingt-six et trente jours.

Suivant requête du 27 décembre 2024, le préfet du Rhône a saisi le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon aux fins de voir ordonner une nouvelle prolongation exceptionnelle de la rétention pour une durée de quinze jours.

Le juge des libertés et de la détention du tribunal judiciaire de Lyon, dans son ordonnance du 28 décembre 2024 rendue à 11 heures 50 a fait droit à cette requête.

[D] [X] a interjeté appel de cette ordonnance par déclaration au greffe le 30 décembre 2024 à 8 heures 18 en faisant valoir que son état de santé n’est pas compatible avec la prolongation de la rétention et qu’il a d’ailleurs entamé une grève de la faim et n’a pu avoir accès au médecin du CRA.

[D] [X] a demandé l’infirmation de l’ordonnance déférée et sa remise en liberté.

Les parties ont été régulièrement convoquées à l’audience du 31 décembre 2024 à 10 heures 30.

[D] [X] a comparu et a été assisté d »un interprète M.[L] et de son avocat.

Le conseil de [D] [X] a été entendu en sa plaidoirie pour soutenir les termes de la requête d’appel.

Le préfet du Rhône représenté par son conseil, a demandé la confirmation de l’ordonnance déférée.

[D] [X] a eu la parole en dernier.

MOTIVATION

Sur la recevabilité de l’appel

Attendu que l’appel de [D] [X] relevé dans les formes et délais légaux prévus par les dispositions des articles L. 743-21, R. 743-10 et R. 743-11 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile (CESEDA) est déclaré recevable ; 

Sur le bien-fondé de la requête

Attendu que l’article L. 741-3 du CESEDA rappelle qu’un étranger ne peut être placé ou maintenu en rétention que le temps strictement nécessaire à son départ et que l’administration doit exercer toute diligence à cet effet ;

Attendu que l’article L. 742-5 du même code dispose que «A titre exceptionnel, le juge des libertés et de la détention peut à nouveau être saisi aux fins de prolongation du maintien en rétention au-delà de la durée maximale de rétention prévue à l’article L. 742-4, lorsqu’une des situations suivantes apparaît dans les quinze derniers jours :

1° L’étranger a fait obstruction à l’exécution d’office de la décision d’éloignement ;

2° L’étranger a présenté, dans le seul but de faire échec à la décision d’éloignement :

a) une demande de protection contre l’éloignement au titre du 5° de l’article L. 631-3 ;

b) ou une demande d’asile dans les conditions prévues aux articles L. 754-1 et L. 754-3 ;

3° La décision d’éloignement n’a pu être exécutée en raison du défaut de délivrance des documents de voyage par le consulat dont relève l’intéressé et qu’il est établi par l’autorité administrative compétente que cette délivrance doit intervenir à bref délai.

Le juge peut également être saisi en cas d’urgence absolue ou de menace pour l’ordre public.» 

Attendu que le conseil de [D] [X] ne soutient pas que les conditions de ce texte ne sont pas réunies mais uniquement que l’état de santé de [D] [X] n’est pas compatible avec la prolongation de la rétention ;

Attendu que l’autorité administrative fait valoir dans sa requête que :

– [D] [X] constitue une menace à l’ordre public ayant été condamné à plusieurs reprises pour des faits de vol aggravés, de port d’armes et d’usage illicite de stupéfiants,

-il ne justifie pas d’un hébergement stable sur le territoire français,

-il est démuni de tout document d’identité et de voyage l’obligeant à solliciter la délivrance d’un laissez -passer auprès des autorités consulaires algériennes ce qui a été fait dès le 30 octobre 2024, avec envoi des empreintes et photos de l’intéressé le 12 novembre 2024 puis de nombreux rappels ont été effectués le dernier le 23 décembre 2024, demande en attente de réponse ;

Attendu que [D] [X] produit aux débats un dossier médical datant d’octobre 2023, période où, suite à des tentatives de suicide au Centre de Rétention Administrative, il avait été hospitalisé en psychiatrie, que le 9 octobre 2023, le médecin [M] avait relevé l’absence de symptomatologie psychotique et un refus des soins psychiatriques,

Attendu que [D] [X] ne justifie en tout état de cause pour la période actuelle d’aucun problème de santé autre que ceux qu’il s’inflige à lui-même par une grève de la faim laquelle fait l’objet d’une surveillance régulière (suivi infirmier quotidien et suivi médical hebdomadaire), qu’il ne produit aucun élément médical actualisé justifiant que son état de santé n’est pas compatible avec la rétention,

Qu’en conséquence, l’ordonnance entreprise, qui par des motifs pertinents que la cour adopte pour le surplus, avait maintenu la rétention de [D] [X], est confirmée ;

PAR CES MOTIFS

Déclarons recevable l’appel formé par [D] [X],

Confirmons l’ordonnance déférée.

Le greffier, La Présidente de chambre,

Céline DESPLANCHES Florence PAPIN


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