Il appartient toujours à celui qui conteste l’acte de signature électronique qui répond aux qualités de signature électronique qualifiée de renverser la présomption de fiabilité dont elle bénéficie.
Au cas d’espèce, aucun élément n’est produit par les emprunteurs (tant en première instance ou en appel, ceux étant à chaque fois défaillants) pour contredire la présomption de fiabilité du procédé de recueil de signature électronique utilisé telle que prévue au décret susvisé pris pour l’application de l’article 1367 du code civil. Conformément aux dispositions de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au contrat, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. Selon l’article 1366 du code civil « L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité ». L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que « lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État ». L’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée, à savoir une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement (UE) n°910/2014 « eIDAS » du 23 juillet 2014 (sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché) et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 de ce règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 du même règlement. En la cause, le Crédit Mutuel communique en pièce 12 le fichier de preuve ProtectSign , en sa qualité de Prestataire de Services de Certification Electronique (PSCE), qui précise que les documents signés électroniquement ont été transmis à la plateforme de ProtectSign par le client Euro-Information dans le cadre de la transaction métier intitulée «’signature face à face Caisse Fédérale Crédit Mutuel’», qui atteste de la signature électronique du Crédit Mutuel et de chacun des emprunteurs de l’offre de crédit «’Passeport Crédit’» aux dates et heure figurant dans les blocs de signature de cette offre, et qui détaille le déroulement du protocole de consentement pour chacune des transactions (transaction n°1 signature du Crédit Mutuel’; transaction n°2 signature de Mme [W]’; transaction n°3 signature M. [Y]), à savoir notamment que chaque signataire s’est authentifié sur la page de consentement en saisissant un code qui lui avait été transmis par le Client Euro-Information, ledit code ayant été parallèlement fourni au service ProtectSign par le Client lors de l’initialisation de la transaction, ce service ayant vérifié l’égalité entre le code saisi par l’utilisatuer et le code transmis par le Client, chaque transaction étant identifiée par une référence distincte et personnelle, et chaque signature électronique étant vérifiée par le service Protect Sign. Le Crédit Mutuel communique également un document daté du 22 août 2019 22:48:51 intitulé «’enveloppe de preuve’service Protect&Sign’» défini comme étant «’une enveloppe électronique contenant le Fichier de Preuve référencé (suivent les données d’identification) crée par la société DocuSign en sa qualité de Prestataire de Services de Certification Electronique (PSCE) pour les besoins du client Euro-Information’». Il y est mentionné que «’ce fichier de preuve permet d’attester de la signature électronique du (ou des) document(s) du type ‘signature face à face Caisse Fédérale Crédit Mutuel’ par le(s) signataire(s) désigné(s) ci-après’»’; il y est ainsi mentionné le nom de Mme [W] et le nom de M. [Y] avec l’indication des heures distinctes de signature et des références de transaction attribuées personnellement à chacun des emprunteurs. l y est en outre dit que cette enveloppe est signée et horodatée électroniquement par DocuSign, que ce fichier de preuve est constitué conformément aux procédures décrites dans la Politique de Signature et de Gestion de Preuve de DocuSign et que la signature électronique peut être vérifiée en utilisant le logiciel Microsoft Office Word 2007 à 2016 édité par la société Microsoft. Ces éléments ajoutés à la communication du document «’Politique de Signature et de Gestion de preuve (PSGP)’»à l’entête DocuSign explicitant les process utilisés en matière de signature électronique permettent d’établir que le Crédit Mutuel justifie de l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’offre de prêt auquelle elle s’attache, mais également son intégrité, aucune modification ne pouvant avoir lieu ultérieurement. |
L’Essentiel : Le 22 août 2019, la Caisse de Crédit Mutuel de Valence Technoparc a accordé un crédit renouvelable de 25.000€ à M. [Y] et Mme [W]. Les remboursements ont cessé un an plus tard, entraînant une mise en demeure en février 2021. En mai 2021, le Crédit Mutuel a notifié la déchéance du terme, réclamant 24.197,75€. Après une assignation en justice en mars 2022, le tribunal a débouté la banque en novembre, invoquant l’irréalité de la signature électronique. En janvier 2023, le Crédit Mutuel a interjeté appel, affirmant la validité des preuves de signature, et l’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024.
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Résumé de l’affaire : Le 22 août 2019, la Caisse de Crédit Mutuel de Valence Technoparc a accordé un crédit renouvelable de 25.000€ à M. [Y] et Mme [W], débloqué le 5 septembre 2019. Les remboursements ont cessé le 5 septembre 2020. En février 2021, le Crédit Mutuel a mis en demeure les emprunteurs de régler les mensualités impayées, puis a notifié la déchéance du terme en mai 2021, réclamant 24.197,75€. En mars 2022, le Crédit Mutuel a assigné M. [Y] et Mme [W] en justice pour obtenir le paiement des sommes dues. Le tribunal a débouté le Crédit Mutuel le 17 novembre 2022, arguant que la signature électronique des emprunteurs n’était pas fiable. Le Crédit Mutuel a interjeté appel le 18 janvier 2023, soutenant que les preuves de signature étaient valides et que la procédure de signature respectait les normes. L’appel a été signifié aux emprunteurs, qui n’ont pas constitué avocat, et l’ordonnance de clôture a été rendue le 7 mai 2024.
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Q/R juridiques soulevées :
Quelles sont les conditions de validité d’une signature électronique selon le Code civil ?La validité d’une signature électronique est régie par plusieurs articles du Code civil, notamment les articles 1366 et 1367. L’article 1366 du Code civil stipule que « l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’intégrité ». Cela signifie que pour qu’une signature électronique soit considérée comme valide, il est essentiel d’identifier clairement le signataire et de garantir que le document n’a pas été modifié après la signature. De plus, l’article 1367 alinéa 2 précise que « lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache ». La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garantie, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État. Il appartient toujours à celui qui conteste l’acte de signature électronique qui répond aux qualités de signature électronique qualifiée de renverser la présomption de fiabilité dont elle bénéficie. Conformément aux dispositions de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au contrat, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation. Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. Selon l’article 1366 du code civil « L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité ». L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que « lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État ». L’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée, à savoir une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement (UE) n°910/2014 « eIDAS » du 23 juillet 2014 (sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché) et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 de ce règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 du même règlement. Quels sont les effets de la déchéance du terme dans un contrat de crédit ?La déchéance du terme est une notion importante dans le cadre des contrats de crédit, notamment en matière de crédit à la consommation. Selon l’article L. 311-37 du Code de la consommation, « en cas de non-paiement d’une échéance, le prêteur peut, après avoir mis en demeure l’emprunteur de s’acquitter de sa dette, déclarer la totalité des sommes dues immédiatement exigibles ». Cela signifie que si l’emprunteur ne respecte pas ses obligations de paiement, le prêteur a le droit de demander le remboursement immédiat de l’intégralité du montant restant dû. En l’espèce, le Crédit Mutuel a notifié la déchéance du terme par lettre recommandée, ce qui lui permet de réclamer le paiement de la totalité de la créance. Quelles sont les conséquences juridiques d’une absence de preuve de la signature électronique ?L’absence de preuve de la signature électronique peut avoir des conséquences significatives sur la validité d’un contrat. L’article 1353 du Code civil stipule que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ». Ainsi, si le créancier ne peut pas prouver que la signature électronique est valide, il risque de voir sa demande rejetée. Dans le cas présent, le tribunal a estimé que le Crédit Mutuel n’avait pas produit l’attestation de fiabilité des pratiques délivrée par un organisme habilité, ce qui a conduit à un rejet de ses demandes. Quels sont les recours possibles en cas de jugement défavorable dans une affaire de crédit ?En cas de jugement défavorable, comme dans le cas du Crédit Mutuel, les parties ont la possibilité de faire appel. L’article 500 du Code de procédure civile précise que « toute décision rendue par un tribunal peut faire l’objet d’un appel, sauf disposition contraire de la loi ». L’appel doit être formé dans un délai d’un mois à compter de la notification du jugement, conformément à l’article 901 du même code. Dans cette affaire, le Crédit Mutuel a relevé appel et a demandé à la cour d’infirmer le jugement de première instance, ce qui est un recours classique en matière de contentieux. Quelles sont les implications de la solidarité entre co-emprunteurs dans un contrat de crédit ?La solidarité entre co-emprunteurs signifie que chacun des emprunteurs est responsable de la totalité de la dette, et non seulement d’une part proportionnelle. L’article 1200 du Code civil stipule que « la solidarité est la situation dans laquelle plusieurs débiteurs sont tenus d’exécuter la même obligation, chacun d’eux étant tenu de la totalité de la dette ». Cela implique que si l’un des co-emprunteurs ne peut pas payer, le créancier peut se retourner contre l’autre co-emprunteur pour le montant total de la créance. Dans le cas présent, M. [Y] et Mme [W] ont été condamnés solidairement à payer la somme due au Crédit Mutuel, ce qui illustre bien cette règle de solidarité. |
N° Portalis DBVM-V-B7H-LVMF
C3
N° Minute :
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
la SELARL LX GRENOBLE-CHAMBERY
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE GRENOBLE
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
ARRÊT DU MARDI 24 SEPTEMBRE 2024
Appel d’une décision (N° RG 22/00159)
rendue par le Tribunal judiciaire de Valence
en date du 17 novembre 2022
suivant déclaration d’appel du 18 janvier 2023
APPELANT :
LE CREDIT MUTUEL DE VALENCE TECHNOPARC Caisse de Crédit Mutuel immatriculée au RCS de ROMANS sous le n° 779 466 200 dont le siège social est [Adresse 6], prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
représenté par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LX GRENOBLE-CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE
INTIMES :
M. [H] [Y]
né le [Date naissance 5] 1979 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
Mme [I] [W]
née le [Date naissance 7] 1983 à [Localité 8]
[Adresse 4]
[Adresse 4]
non représentés
COMPOSITION DE LA COUR : LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Mme Catherine Clerc, Présidente,
Mme Joëlle Blatry, Conseiller,
Mme Véronique Lamoine, Conseiller,
DÉBATS :
A l’audience publique du 10 juin 2024 madame Clerc président de chambre chargé du rapport en présence de madame Blatry, conseiller, assistées de Anne Burel, greffier, en présence de [E] [F], greffier stagiaire, ont entendu les avocats en leurs observations, les parties ne s’y étant pas opposées conformément aux dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile.
Elle en a rendu compte à la cour dans son délibéré et l’arrêt a été rendu ce jour.
Suivant offre préalable acceptée par signature électronique le 22 août 2019, la Caisse de Crédit Mutuel de Valence Technoparc (le Crédit Mutuel) a consenti à M. [H] [Y] et Mme [I] [W] un crédit renouvelable type «’Passeport Crédit’»n°00020800102 pour un montant maximal de 25.000€ au taux effectif global de 5,75’%.
Une somme de 25.000€ (sous compte [XXXXXXXXXX03]) a été débloquée le 5 septembre 2019.
Le remboursement n’étant plus honoré à partir du 5 septembre 2020, le Crédit Mutuel, par lettres recommandées avec AR du 17 février 2021, a vainement mis en demeure M. [Y] et Mme [W] de s’acquitter des mensualités échues impayées, dans un délai de 15 jours, sous peine de déchéance du terme.
Suivant lettres recommandées avec AR du 10 mai 2021, le Crédit Mutuel leur a notifié la déchéance du terme, et les a mis en demeure de procéder au règlement de la somme de 24.197,75€.
Par acte extrajudiciaire du 1er mars 2022 (instance RG 22/00159), le Crédit Mutuel a assigné M. [Y] et Mme [W] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Valence afin d’obtenir sous le bénéfice de l’exécution provisoire leur condamnation solidaire au paiement des sommes suivantes’:
24.197,75€ au titre de l’utilisation de crédit renouvelable n°000’208’001 03 outre les intérêts au taux conventionnel de 2,79% l’an sur la somme de 21.150,58€ à compter du 10 mai 2021, date de déchéance de terme, et au taux légal sur le surplus, jusqu’à parfait règlement’;
500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.
Le 23 juin 2022, le Crédit Mutuel a fait délivrer une seconde assignation aux mêmes fins aux mêmes parties (RG 22/00276)
Par jugement réputé contradictoire du 17 novembre 2022, le tribunal précité a’:
ordonné la jonction des procédures enregistrées sous le numéro RG 22/00159 et sous le numéro RG 22/00276,
débouté le Crédit Mutuel de l’ensemble de ses demandes,
condamné le Crédit Mutuel aux dépens.
La juridiction a retenu en substance que’:
le Crédit Mutuel ne produit pas l’attestation de fiabilité des pratiques délivrée par l’ANSSI ou un organisme habilité par l’ANSSI au tiers certifiant les étapes du processus de signature électronique utilisé’; il ne justifie pas que cet organisme était un tiers digne de confiance habilité à authentifier des signatures si bien qu’il faut considérer que le procédé utilisé ne garantit pas la fiabilité de la signature imputée à M. [Y] et Mme [W],
la signature imputée à M. [Y] et Mme [W] ne figure pas sur l’acte de prêt qui leur est opposé mais uniquement la mention «’signé électroniquement par M. [Y] et Mme [W]’», en l’absence de certitude sur l’identité du signataire, que ce soit par écrit ou par voie électronique, l’acte fondant la demande ne saurait valablement être opposé à M. [Y] et Mme [W].
Par déclaration déposée le 18 janvier 2023, le Crédit Mutuel a relevé appel.
Aux termes de ses dernières conclusions déposées le 21 février 2024 sur le fondement des articles 1103 et suivants et 1366 et suivants du code civil, des articles L.312-1 et suivants du code de la consommation et de l’article 700 du code de procédure civile le Crédit Mutuel demande à la cour de’:
le déclarer recevable et bien fondé en son appel,
infirmer le jugement déféré,
statuant à nouveau’:
condamner solidairement M. [Y] et Mme [W] à lui payer la somme de 24.197,75€ au titre de l’utilisation de crédit renouvelable n°000’208’001 03 outre les intérêts au taux conventionnel de 2,79% l’an sur la somme de 21.150,58€ à compter du 10 mai 2021, date de déchéance de terme, et au taux légal sur le surplus, jusqu’à parfait règlement,
condamner solidairement M. [Y] et Mme [W] à lui payer la somme de 1.000€ en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
L’appelant fait valoir en substance que’:
les blocs de signature du contrat de crédit conclu attestent clairement de la date et de l’heure de signature de chacun des co-emprunteurs et attestent que ce sont bien les emprunteurs qui ont conclu le contrat,
le fichier de preuve versé aux débats permet de démontrer que les deux co-emprunteurs ont signé ce contrat et émanent de la société DocuSign France, leader sur le marché français,
aucun texte n’impose l’obligation pour l’utilisateur d’un service de signature électronique de produire l’attestation de fiabilité des pratiques délivrée par l’ANSSI ou un organisme habilité certifiant les étapes du processus de signature électronique,
même si la signature électronique devait être considérée non qualifiée, sa force probante serait la même que celle d’un écrit sur support papier dès lors que l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache est démontré, en l’état de la jurisprudence qui admet cette démonstration par la production d’une enveloppe de preuve et d’un fichier de preuve DocuSign,
les informations contenues dans le fichier de preuve correspondent aux données affichées dans le contrat de crédit conclu par signature électronique, conformément aux dispositions du règlement européen n° 910/2014 et justifient ainsi de l’usage d’un procédé fiable d’identification, garantissant son lien avec l’acte auquel il s’attache,
la remise de leur pièce d’identité par les emprunteurs et de plusieurs documents de justificatifs de ressource et charges vient aussi confirmer l’identité des signataires du contrat.
La déclaration d’appel a été signifiée dans les formes des articles 656 et 658 du code de procédure civile à M. [Y] et Mme [W] qui n’ont pas constitué avocat’; l’arrêt sera rendu par défaut.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 mai 2024.
Conformément aux dispositions de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au contrat, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.
Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.
Selon l’article 1366 du code civil « L’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité ».
L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que « lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État ».
L’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en oeuvre une signature électronique qualifiée, à savoir une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement (UE) n°910/2014 « eIDAS » du 23 juillet 2014 (sur l’identification électronique et les services de confiance pour les transactions électroniques au sein du marché) et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 de ce règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 du même règlement.
Il appartient donc à celui qui conteste l’acte de signature électronique qui répond aux qualités de signature électronique qualifiée de renverser la présomption de fiabilité dont elle bénéficie.
Au cas d’espèce, aucun élément n’est produit par les emprunteurs (tant en première instance ou en appel, ceux étant à chaque fois défaillants) pour contredire la présomption de fiabilité du procédé de recueil de signature électronique utilisé telle que prévue au décret susvisé pris pour l’application de l’article 1367 du code civil.
Le contrat de crédit renouvelable comporte trois blocs de signature, à savoir,
le premier, au nom du Crédit Mutuel «’signature du prêteur CCM Camille Vernet à [Localité 8] le 22/08/2019 à 11/13/16 UTC +02′:00’»,
les deux autres, au nom de chacun des emprunteurs avec la mention’:
«’signé électroniquement par M.[Y] [H] ([XXXXXXXX02]) le 22/8/2019 à 22′:48′:51 UTC +02:00 D1[x] D2 [ ] 1[ x]’»
«’signé électroniquement par Mle [W] [I] ([XXXXXXXX01]) le 22/8/2019 à 12:53:45 UTC +02:00 D1[x] D2 [ ] 1[ x]’».
Le Crédit Mutuel communique en pièce 12 le fichier de preuve ProtectSign , en sa qualité de Prestataire de Services de Certification Electronique (PSCE), qui précise que les documents signés électroniquement ont été transmis à la plateforme de ProtectSign par le client Euro-Information dans le cadre de la transaction métier intitulée «’signature face à face Caisse Fédérale Crédit Mutuel’», qui atteste de la signature électronique du Crédit Mutuel et de chacun des emprunteurs de l’offre de crédit «’Passeport Crédit’» aux dates et heure figurant dans les blocs de signature de cette offre, et qui détaille le déroulement du protocole de consentement pour chacune des transactions (transaction n°1 signature du Crédit Mutuel’; transaction n°2 signature de Mme [W]’; transaction n°3 signature M. [Y]), à savoir notamment que chaque signataire s’est authentifié sur la page de consentement en saisissant un code qui lui avait été transmis par le Client Euro-Information, ledit code ayant été parallèlement fourni au service ProtectSign par le Client lors de l’initialisation de la transaction, ce service ayant vérifié l’égalité entre le code saisi par l’utilisatuer et le code transmis par le Client, chaque transaction étant identifiée par une référence distincte et personnelle, et chaque signature électronique étant vérifiée par le service Protect Sign.
Le Crédit Mutuel communique également un document daté du 22 août 2019 22:48:51 intitulé «’enveloppe de preuve’service Protect&Sign’» défini comme étant «’une enveloppe électronique contenant le Fichier de Preuve référencé (suivent les données d’identification) crée par la société DocuSign en sa qualité de Prestataire de Services de Certification Electronique (PSCE) pour les besoins du client Euro-Information’».
Il y est mentionné que «’ce fichier de preuve permet d’attester de la signature électronique du (ou des) document(s) du type ‘signature face à face Caisse Fédérale Crédit Mutuel’ par le(s) signataire(s) désigné(s) ci-après’»’; il y est ainsi mentionné le nom de Mme [W] et le nom de M. [Y] avec l’indication des heures distinctes de signature et des références de transaction attribuées personnellement à chacun des emprunteurs.
Il y est en outre dit que cette enveloppe est signée et horodatée électroniquement par DocuSign, que ce fichier de preuve est constitué conformément aux procédures décrites dans la Politique de Signature et de Gestion de Preuve de DocuSign et que la signature électronique peut être vérifiée en utilisant le logiciel Microsoft Office Word 2007 à 2016 édité par la société Microsoft.
Ces éléments ajoutés à la communication du document «’Politique de Signature et de Gestion de preuve (PSGP)’»à l’entête DocuSign explicitant les process utilisés en matière de signature électronique permettent d’établir que le Crédit Mutuel justifie de l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’offre de prêt auquelle elle s’attache, mais également son intégrité, aucune modification ne pouvant avoir lieu ultérieurement.
En outre, le Crédit Mutuel est en mesure de justifier qu’il a obtenu des consorts [Y]-[W] les documents nécessaires à la finalisation du contrat de prêt litigieux (pièces d’identité, justificatifs de revenus, avis d’imposition…) et verse également la notice d’informations relative à l’assurance, la fiche explicative et la fiche en réponse aux besoins exprimés, la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées, le résultat de consultation du fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers, l’autorisation de prélèvement, l’historique du prêt et un décompte de créance’; en outre, le contrat a reçu exécution, une utilisation de crédit ayant été débloquée le 5 septembre 2019 pour un montant de 25.000€ qui a été remboursée par les emprunteurs jusqu’au 5 septembre 2020, date du premier incident de paiement non régularisé.
Ces éléments de preuves extrinsèques conjugués à la signature électronique des emprunteurs permettent d’établir l’existence du contrat de crédit en cause et par suite l’obligation de paiement dont se prévaut le Crédit Mutuel.
Le jugement est infirmé en conséquence.
Sur la demande en paiement
La recevabilité de l’action en paiement du Crédit Mutuel initiée par assignations des 1er mars et 23 juin 2022 et le prononcé de la déchéance du terme à la date du 10 mai 2021 ne font pas débat.
La créance du Crédit Mutuels’établit à la somme totale de 23.928,66€ selon le détail suivant’:
mensualités échues impayées : 4.609,53€
capital restant dû avec assurance-vie échue : 17.787,06€ + 6,80€
au jour de la déchéance du terme
intérêts échus au jour de la déchéance du terme : 102,31€
indemnité 8’% sur exclusivement le capital restant dû de 17.787,06€ : 1.422,96€
M. [Y] et Mme [W] seront en conséquence condamnés solidairement à payer la somme de 22.505,70€ avec intérêts au taux conventionnel de 2,790% et celle de 1.422,96 € au taux d’intérêt légal, l’ensemble de ces intérêts courant à compter du 10 mai 2021 jusqu’à parfait règlement.
Sur les mesures accessoires
Parties succombantes, les consorts [Y] -[W] sont condamnés aux dépens de première instance et d’appel et à verser à la Caisse d’Epargne une indemnité de procédure de 1.000€, l’ensemble de ces condamnations étant prononcées in solidum, la solidarité ne se présumant pas en ces matières.
La cour, statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut,
Infirme le jugement déféré,
Statuant à nouveau, et ajoutant,
Condamne solidairement M. [H] [Y] et Mme [I] [W] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8] Technoparc, au titre du crédit renouvelable Passeport Crédit n°00020800102 (sous compte [XXXXXXXXXX03]), la somme de 22.505,70€ avec intérêts au taux conventionnel de 2,79% et celle de 1.422,96€ au taux d’intérêt légal, l’ensemble de ces intérêts courant à compter du 10 mai 2021 jusqu’à parfait règlement,
Condamne in solidum M. [H] [Y] et Mme [I] [W] à payer à la Caisse de Crédit Mutuel de [Localité 8] Technoparc une indemnité de procédure de 1.000€,
Condamne in solidum M. [H] [Y] et Mme [I] [W] aux dépens de première instance et d’appel,
Prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de la procédure civile,
Signé par madame Clerc, président, et par madame Burel, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LE GREFFIER LA PRESIDENTE
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