Refuser de restituer un solde de trop perçu indu (vente immobilière, contrat de travail ou autre) expose, outre le remboursement, à une condamnation pour résistance abusive.
Pour rappel, l’article 1240 du code civil dispose que : » Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » En l’espèce, il résulte des éléments dans les débats qu’en présence d’une erreur manifeste de comptabilité ayant abouti au virement d’une somme partiellement indue par la SAS NOT’AVENIR, Mme [B] [F] n’apporte aucun élément permettant à la juridiction de comprendre pour quels motifs elle pourrait de bonne foi estimer que le paiement n’est pas indu, et qu’ainsi la somme peut lui demeurer définitivement acquise. En conséquence, en considération de la circonstance que le paiement indu date de plus de deux ans au jour du jugement, il convient de reconnaître une faute civile de résistance abusive, justifiant l’allocation d’une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de la SAS NOT’AVENIR. |
L’Essentiel : La SAS NOT’AVENIR a assigné Mme [B] [F] pour récupérer un trop-perçu de 22.166,39 euros, suite à une erreur de comptabilité. Malgré des tentatives amiables, le litige persista, justifiant des demandes d’astreinte et de dommages et intérêts. En défense, Mme [B] [F] contesta le caractère indu du paiement, demandant le rejet des demandes et des frais de justice. Le tribunal a finalement condamné Mme [B] [F] à restituer la somme, avec intérêts de retard, et a reconnu une résistance abusive, lui allouant 1.000 euros de dommages et intérêts. Elle devra également payer 2.000 euros à la SAS au titre de l’article 700.
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Résumé de l’affaire :
Contexte de l’AffaireLa SAS NOT’AVENIR a assigné Mme [B] [F] devant le tribunal judiciaire de Poitiers le 31 juillet 2023, réclamant la restitution d’un trop-perçu de 22.166,39 euros. La société notarial a également demandé des intérêts, une astreinte pour retard de paiement, des dommages et intérêts pour résistance abusive, ainsi que le remboursement des frais de justice. Arguments de la SAS NOT’AVENIRLa SAS NOT’AVENIR a soutenu qu’une erreur de comptabilité avait conduit à un trop-perçu, et que malgré des tentatives amiables, le litige n’avait pas pu être résolu. Elle a affirmé que le refus de Mme [B] [F] de restituer la somme justifiait ses demandes d’astreinte et de dommages et intérêts. Réponse de Mme [B] [F]En défense, Mme [B] [F] a contesté le caractère indu du paiement, arguant que la SAS NOT’AVENIR n’avait pas prouvé que la somme de 22.166,39 euros était indue. Elle a demandé le rejet des demandes de la SAS et a réclamé des frais de justice à son encontre. Décision du TribunalLe tribunal a constaté que la SAS NOT’AVENIR avait versé à Mme [B] [F] une somme supérieure à celle qui lui était due, et a condamné Mme [B] [F] à restituer 22.166,39 euros. Les intérêts de retard ont été accordés à partir du 26 août 2022, avec capitalisation, et une astreinte a été mise en place pour garantir l’exécution de la décision. Dommages et Intérêts pour Résistance AbusiveLe tribunal a également reconnu une résistance abusive de la part de Mme [B] [F], lui allouant 1.000 euros de dommages et intérêts. Cette décision a été fondée sur l’absence de justification de sa part concernant le paiement qu’elle avait reçu. Conséquences FinancièresMme [B] [F] a été condamnée à payer 2.000 euros à la SAS NOT’AVENIR au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’à supporter les dépens. L’exécution provisoire de la décision a été maintenue. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature de la demande de la SAS NOT’AVENIR en répétition de l’indu ?La demande de la SAS NOT’AVENIR repose sur le principe de la répétition de l’indu, qui est régie par l’article 1302 du code civil. Cet article stipule que : « Tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. » Dans cette affaire, la SAS NOT’AVENIR soutient qu’un trop-perçu a été versé à Mme [B] [F] à la suite d’une vente immobilière. Elle a versé une somme de 44.695,09 euros, alors que, selon son décompte, seule la somme de 22.528,70 euros aurait dû être versée. Ainsi, la SAS NOT’AVENIR demande la restitution de la somme de 22.166,39 euros, correspondant à la différence entre le montant versé et celui qui aurait dû l’être. La jurisprudence reconnaît que, pour qu’une action en répétition de l’indu soit fondée, il faut prouver que le paiement a été effectué sans cause légitime, ce qui est le cas ici, selon la SAS NOT’AVENIR. Quelles sont les obligations de preuve des parties selon le code de procédure civile ?L’article 9 du code de procédure civile précise que : « Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. » Dans le cadre de cette affaire, la SAS NOT’AVENIR a produit des éléments de preuve, notamment un décompte détaillé des sommes dues, pour établir le caractère indu du paiement effectué à Mme [B] [F]. En revanche, Mme [B] [F] conteste le caractère indu du paiement, mais elle ne parvient pas à apporter la preuve de ses allégations. Elle n’a pas démontré l’intention libérale de la SAS NOT’AVENIR ni prouvé qu’elle avait droit au montant total versé. Ainsi, la charge de la preuve incombe à chaque partie, et dans ce cas, la SAS NOT’AVENIR a satisfait à cette obligation, tandis que Mme [B] [F] n’a pas réussi à établir ses arguments. Quelles sont les conséquences de la résistance abusive de Mme [B] [F] ?L’article 1240 du code civil dispose que : « Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. » Dans cette affaire, le tribunal a constaté que Mme [B] [F] n’a pas apporté d’éléments justifiant sa résistance au paiement, malgré l’évidence d’une erreur de comptabilité. Cette résistance a été qualifiée de « résistance abusive », ce qui a conduit le tribunal à lui allouer des dommages et intérêts. En effet, le tribunal a reconnu une faute civile de la part de Mme [B] [F], justifiant l’allocation d’une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de la SAS NOT’AVENIR. La résistance abusive est donc sanctionnée par l’obligation de réparer le dommage causé à la partie qui a subi cette résistance. Quelles sont les modalités d’exécution des condamnations financières ?L’article 514-1 du code de procédure civile prévoit que : « L’exécution provisoire peut être ordonnée par le juge, même en matière gracieuse, sauf disposition contraire de la loi. » Dans le jugement rendu, le tribunal a ordonné l’exécution provisoire des condamnations financières, ce qui signifie que Mme [B] [F] doit s’acquitter des sommes dues immédiatement, même si elle peut faire appel de la décision. Les modalités d’exécution incluent également une astreinte de 20 euros par jour de retard, qui s’applique à compter de la signification de la décision. Cette astreinte vise à garantir l’exécution de l’obligation de paiement et à inciter Mme [B] [F] à s’exécuter rapidement. Ainsi, les condamnations financières sont assorties de mesures coercitives pour assurer leur mise en œuvre effective. |
DOSSIER : N° RG 23/01960 – N° Portalis DB3J-W-B7H-GCPC
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE POITIERS
PREMIÈRE CHAMBRE CIVILE
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
JUGEMENT DU 26 Novembre 2024
DEMANDERESSE :
S.A.S. NOT’AVENIR – OFFICE NOTARIAL
dont le siège social est sis [Adresse 1]
représentée par Me Jérôme CLERC, avocat au barreau de POITIERS, avocat postulant,
représentée par Me Alexandre ALQUIER, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION, avocat plaidant,
DÉFENDERESSE :
Madame [B] [F]
demeurant [Adresse 2],
représentée par Me Caroline MAISSIN, avocat au barreau de POITIERS, avocat plaidant
LE :
Copie simple à :
– Me CLERC
– Me MAISSIN
Copie exécutoire à :
– Me CLERC
COMPOSITION DU TRIBUNAL :
PRÉSIDENT : Sébastien VANDROMME-DEWEINE, Juge
Statuant par application des articles 812 à 816 du Code de Procédure Civile, avis préalablement donné aux avocats.
GREFFIER LORS DES DEBATS : Thibault PAQUELIN
GREFFIER LORS DE LA MISE A DISPOSITION : Tara MAUBOURGUET
Débats tenus publiquement à l’audience à juge unique du 01 Octobre 2024.
Par acte d’huissier de justice du 31 juillet 2023, la SAS NOT’AVENIR a fait assigner Mme [B] [F] devant le tribunal judiciaire de Poitiers (1ère chambre civile) en demandant de :
Condamner Mme [B] [F] à la restitution des sommes de 22.166,39 euros à l’office notarial NOT’AVENIR au titre du trop-perçu du solde de tout compte ;Assortir l’exécution d’une astreinte de 100 euros par jour de retard à compter du premier mois suivant le prononcé du jugement ;Assortir la restitution des intérêts au taux légal à compter du 26 août 2022 et prononcer la capitalisation des intérêts ;Condamner Mme [B] [F] au paiement de la somme de 2.000 euros à l’office notarial NOT’AVENIR au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive ;Débouter Mme [B] [F] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions ;Condamner Mme [J] [F] à lui payer la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;Ordonner l’exécution provisoire du jugement ;Condamner Mme [B] [F] aux dépens.
En demande, la SAS NOT’AVENIR n’a pas déposé de conclusions postérieures à son assignation.
Au soutien de sa position, la SAS NOT’AVENIR expose qu’une erreur de comptabilité a été commise aboutissant à ce que Mme [B] [F] perçoive un trop-perçu, que ce trop-perçu est incontestable mais qu’aucune démarche amiable n’a permis la résolution du litige. Elle soutient que ce trop-perçu justifie une action en répétition de l’indu, et que le refus jusqu’à ce jour de Mme [B] [F] de payer fonde les demandes complémentaires en astreinte et en dommages et intérêts pour résistance abusive.
En défense, Mme [B] [F], suivant dernières conclusions notifiées par RPVA le 26 mars 2024, demande au tribunal de notamment :
Juger que l’office notarial ne prouve pas le caractère indu du paiement à hauteur de 22.166,39 euros ;Rejeter toute demande de la SAS NOT’AVENIR ;Condamner la SAS NOT’AVENIR à lui payer la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens.
Au soutien de sa position, Mme [B] [F] expose que la SAS NOT’AVENIR échoue à rapporter la preuve du caractère indu du paiement qu’elle a reçu, et que l’office notarial ne lui a jamais fourni aucune explication lui permettant de comprendre les calculs effectués, et ainsi d’apprécier une éventuelle erreur.
La clôture a été prononcée par ordonnance au 23 mai 2024 et l’affaire a été fixée à l’audience du 1er octobre 2024.
Avis a été donné que la décision était mise en délibéré par mise à disposition au greffe au 26 novembre 2024.
1. Sur la demande principale de la SAS NOT’AVENIR en répétition de l’indu contre Mme [B] [F] pour 22.166,39 euros.
1.1. Sur le principal.
L’article 1302 alinéa 1er du code civil dispose que : » Tout paiement suppose une dette ; ce qui a été reçu sans être dû est sujet à restitution. »
L’article 9 du code de procédure civile dispose que : » Il incombe à chaque partie de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention. »
En l’espèce, il résulte des éléments mis dans les débats que la SAS NOT’AVENIR, notaire, a versé à Mme [B] [F], à la suite d’une vente immobilière, une somme de 44.695,09 euros (pièce demanderesse n°3).
Or la SAS NOT’AVENIR produit un décompte dont il résulte que seule la somme de 22.528,70 euros aurait dû être versée à Mme [B] [F] (pièce demanderesse n°2).
Il convient de relever qu’une erreur de comptabilité comparable a été commise par la SAS NOT’AVENIR au profit des autres vendeurs, Mme [S] [F] et M. [X] [O], et que ceux-ci ont manifestement accepté à titre amiable de reverser le trop-perçu à l’office notarial.
Le tribunal doit relever que Mme [B] [F], qui conteste le caractère indu du paiement, ne peut toutefois ni établir l’intention libérale de la SAS NOT’AVENIR à son égard, ni démontrer dans quelle fraction ce paiement lui serait dû. Aucun autre élément aux débats ne permet de démontrer que Mme [B] [F] avait droit au paiement de la somme de 44.695,09 euros, alors que la SAS NOT’AVENIR produit un décompte détaillé des sommes dues (pièce demanderesse n°2), que Mme [B] [F] ne conteste par aucune preuve contraire.
En conséquence, il y a lieu de condamner Mme [B] [F], au titre de la répétition de l’indu, à payer à la SAS NOT’AVENIR la somme de 22.166,39 euros au titre du trop-perçu du solde de tout compte.
1.2. Sur les accessoires et les modalités de la condamnation.
Les intérêts de retard au taux légal sont accordés à compter du 26 août 2022, date de mise en demeure par huissier de justice (pièce demanderesse n°5).
Il y a lieu à capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière.
Il y a également lieu à astreinte pour garantir l’exécution de l’obligation, même s’agissant du paiement d’une somme d’argent, ceci dans les conditions du dispositif.
2. Sur la demande accessoire de la SAS NOT’AVENIR en dommages et intérêts pour résistance abusive.
L’article 1240 du code civil dispose que : » Tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer. »
En l’espèce, il résulte des éléments dans les débats qu’en présence d’une erreur manifeste de comptabilité ayant abouti au virement d’une somme partiellement indue par la SAS NOT’AVENIR, Mme [B] [F] n’apporte aucun élément permettant à la juridiction de comprendre pour quels motifs elle pourrait de bonne foi estimer que le paiement n’est pas indu, et qu’ainsi la somme peut lui demeurer définitivement acquise.
En conséquence, en considération de la circonstance que le paiement indu date de plus de deux ans au jour du jugement, il convient de reconnaître une faute civile de résistance abusive, justifiant l’allocation d’une somme de 1.000 euros à titre de dommages et intérêts au profit de la SAS NOT’AVENIR.
3. Sur les autres demandes et les dépens.
3.1. Sur les dépens.
Au vu du sens du jugement, Mme [B] [F] supporte les dépens.
3.2. Sur l’article 700 du code de procédure civile.
Mme [B] [F], tenue aux dépens, doit payer à la SAS NOT’AVENIR la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
3.3. Sur l’exécution provisoire.
Rien ne justifie d’écarter l’exécution provisoire de l’article 514-1 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire et en premier ressort, rendu après débats en audience publique par mise à disposition au greffe,
CONDAMNE Mme [B] [F] à payer à la SAS NOT’AVENIR la somme de 22.166,39 euros au titre du trop-perçu du solde de tout compte, avec intérêts au taux légal sur le tout à compter du 26 août 2022 et avec capitalisation des intérêts échus dus pour une année entière, et ORDONNE pour l’exécution de cette obligation de paiement une astreinte provisoire de 20 euros par jour de retard à expiration d’un délai d’un mois à compter de la signification de la présente décision et pendant une durée de 180 jours sans s’en réserver la liquidation ;
CONDAMNE Mme [B] [F] à payer à la SAS NOT’AVENIR la somme de 1.000 euros au titre des dommages et intérêts pour résistance abusive ;
CONDAMNE Mme [B] [F] à payer à la SAS NOT’AVENIR la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
CONDAMNE Mme [B] [F] aux dépens ;
REJETTE toute autre demande ;
MAINTIENT l’exécution provisoire en totalité ;
Le Greffier Le Président
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