Cour d’appel de Versailles, 21 novembre 2024, RG n° 24/00141
Cour d’appel de Versailles, 21 novembre 2024, RG n° 24/00141

Type de juridiction : Cour d’appel

Juridiction : Cour d’appel de Versailles

Thématique : Compétence juridictionnelle et requalification des relations contractuelles : enjeux et implications.

Résumé

Présentation de GFP Technologies

La société par actions simplifiée GFP Technologies, située en Eure-et-Loir, développe un logiciel nommé « Open » destiné à l’assurance de personnes, en particulier dans les domaines de la santé et de la prévoyance. Employant plus de dix salariés, elle est régie par la convention collective Syntec.

Profil de M. [T]

M. [T], né en mars 1979, est consultant indépendant en systèmes et logiciels informatiques depuis 2009, avec une expertise reconnue en langage PHP.

Contrat de prestations de services

Le 4 janvier 2021, GFP Technologies a signé un contrat de prestations de services avec M. [T] pour une durée initiale de six mois, renouvelable tacitement. Ce contrat visait à répondre aux besoins d’Axa, notamment en matière de développement et de maintenance d’applications.

Fin du contrat et contestation

Le contrat a pris fin le 31 octobre 2022, alors que l’autorisation de travail de M. [T] avait expiré le 28 octobre 2022. M. [T] a alors saisi le conseil de prud’hommes de Chartres le 20 janvier 2023, revendiquant un lien de travail salarié avec GFP Technologies.

Demandes de M. [T]

M. [T] a demandé au conseil de prud’hommes de se déclarer compétent, de requalifier son contrat en contrat de travail salarié, et de condamner GFP Technologies à lui remettre des bulletins de salaire, un certificat de travail, et à payer diverses indemnités et dommages-intérêts.

Réponse de GFP Technologies

GFP Technologies a contesté la compétence du conseil de prud’hommes, demandant le rejet des demandes de M. [T] et a formulé une demande reconventionnelle pour obtenir des dommages-intérêts pour procédure abusive.

Audiences et jugement

Une audience de conciliation a eu lieu le 16 juin 2023, suivie d’une audience de jugement le 20 octobre 2023. Le jugement rendu le 22 décembre 2023 a déclaré le conseil de prud’hommes incompétent pour juger la relation de travail entre M. [T] et GFP Technologies.

Procédure d’appel

M. [T] a interjeté appel le 5 janvier 2024, demandant à la cour d’appel de se déclarer compétente pour connaître du litige. GFP Technologies a également interjeté un appel incident.

Prétentions des parties en appel

M. [T] a demandé l’infirmation du jugement de première instance, tandis que GFP Technologies a demandé la confirmation de ce jugement et la condamnation de M. [T] pour procédure abusive.

Motifs de l’arrêt

La cour a examiné la compétence de la juridiction prud’homale, concluant que M. [T] ne prouvait pas l’existence d’un contrat de travail. La demande de GFP Technologies pour procédure abusive a été rejetée, et le jugement de première instance a été confirmé.

Décision finale

La cour a confirmé le jugement du conseil de prud’hommes, condamnant M. [T] aux dépens d’appel et à payer 1 500 euros à GFP Technologies au titre des frais irrépétibles. M. [T] a été débouté de sa propre demande sur ce même fondement.

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 80O

Chambre sociale 4-2

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 21 NOVEMBRE 2024

N° RG 24/00141 – N° Portalis DBV3-V-B7I-WJDO

AFFAIRE :

[W] [T]

C/

S.A.S. GFP TECHNOLOGIES prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité.

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 22 décembre 2023 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de CHARTRES

N° Chambre :

N° Section : E

N° RG : 2023-00006

Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :

Me Abdelaziz MIMOUN

Me Sabine LAMIRAND

le :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MILLE VINGT QUATRE,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

APPELANT

Monsieur [W] [T]

né le 18 Mars 1979 à Chine (99)

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentant : Me Abdelaziz MIMOUN, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 89

****************

INTIME

S.A.S. GFP TECHNOLOGIES prise en la personne de son représentant légal domicilié audit siège en cette qualité.

N° SIRET : 882 18 1 9 85

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentant : Me Sabine LAMIRAND, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.455 –

Plaidant : Me Amandine RAVEL, avocat au barreau de CHARTRES, vestiaire : 000049

Substitué par : Me Pauline BABIN, avocat au barreau de CHARTRES

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 05 septembre 2024, en présence de Stéphanie HEMERY, greffière, et de [Z] [K], avocat stagiaire, les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Valérie DE LARMINAT, conseillère chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Catherine BOLTEAU-SERRE, présidente,

Madame Valérie DE LARMINAT, conseillère,

Madame Isabelle CHABAL, conseillère,

Greffière lors des débats : Madame Gaëlle RULLIER,

Greffière en préaffectation lors de la mise à disposition : Madame Victoria LE FLEM,

Rappel des faits constants

La société par actions simplifiée GFP Technologies, dont le siège social est situé à [Localité 4] en Eure-et-Loir, édite un logiciel informatique spécialisé dénommé  » Open  » dans l’assurance de personnes et plus particulièrement, la santé et la prévoyance qui permet aux assureurs de gérer les affiliations, les cotisations et les prestations. Elle emploie plus de dix salariés et applique la convention collective nationale des bureaux d’études techniques, des cabinets d’ingénieurs-conseils et des sociétés de conseils du 16 juillet 2021, dite Syntec.

M. [T], né le 18 mars 1979, exerce l’activité professionnelle de conseil en systèmes et logiciels informatiques en qualité d’indépendant depuis son immatriculation le 31 juillet 2009. Il dispose d’une expérience reconnue en langage PHP.

Le 4 janvier 2021, la société GFP Technologies a conclu avec M. [T] un contrat de prestations de services, pour une durée initiale de 6 mois renouvelable par tacite reconduction, impliquant son affectation sur la mission  » Axa » afin de répondre aux besoins spécifiques de cette société, notamment de développer et maintenir les applications, automatiser les méthodes de travail, rédiger les documents informatiques et assurer une veille technologique.

Le contrat a pris fin le 31 octobre 2022, alors que l’autorisation de travail de M. [T], de nationalité chinoise, avait pris fin le 28 octobre 2022 et que l’intéressé n’avait plus de titre valide.

Revendiquant avoir été lié à la société GFP Technologies par un contrat de travail, M. [T] a saisi le conseil de prud’hommes de Chartres par requête reçue au greffe le 20 janvier 2023.

La décision contestée

M. [T] a demandé au conseil de prud’hommes de :

– se déclarer compétent pour juger la relation de travail avec la société GFP Technologies,

– requalifier le contrat de prestations l’ayant lié à la société GFP Technologies en contrat de travail salarié au poste de développeur, statut cadre, convention collective nationale des bureaux d’études,

– condamner la société GFP Technologies à remettre les bulletins de salaire conformes comportant une rémunération brute mensuelle de 12 168 euros brut pour la période ayant couru entre le 4 janvier 2021 et le 31 octobre 2022 sous astreinte de 50 euros par document, à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement à intervenir,

– condamner la société GFP Technologies à lui remettre un certificat de travail comportant comme date d’entrée le 4 janvier 2021 et de sortie le 30 novembre 2022 en qualité de développeur informatique, sous astreinte de 50 euros par document à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement à intervenir,

– condamner la société GFP Technologies à procéder à sa déclaration auprès de l’URSSAF et procéder au règlement des cotisations afférentes sous astreinte de 100 euros et de lui en justifier, à compter du 30ème jour suivant la notification du jugement à intervenir,

– condamner la société GFP Technologies à lui restituer la somme de 65 260 euros versée au titre des cotisations sociales indépendant,

– fixer à la somme de 12 168 euros son salaire mensuel brut moyen,

– condamner la société GFP Technologies à lui verser les sommes suivantes :

. 73 008 euros à titre de dommages-intérêts pour travail dissimulé,

. 12 168 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement irrégulier,

. 24 000 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

. 36 504 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 3 650,40 euros au titre des congés payés afférents,

. 3 295,50 euros à titre d’indemnité légale de licenciement,

– ordonner l’exécution provisoire du jugement en application des dispositions de l’article 515 du code de procédure civile,

– 4 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– intérêts légaux avec capitalisation à compter de la saisine du conseil,

– dépens y compris ceux d’exécution.

La société GFP Technologies a quant à elle demandé au conseil de prud’hommes de :

– se déclarer incompétent au profit du tribunal de commerce de Chartres,

– débouter M. [T] de l’ensemble de ses demandes,

à titre reconventionnel,

– condamner M. [T] à lui payer la somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– condamner M. [T] aux dépens et à lui payer la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

L’audience de conciliation a eu lieu le 16 juin 2023.

L’audience de jugement a eu lieu le 20 octobre 2023.

Par jugement contradictoire rendu le 22 décembre 2023, la section encadrement du conseil de prud’hommes de Chartres :

– s’est déclarée incompétente pour juger la relation de travail entre M. [T] et la société GFP Technologies,

– a renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

– a dit que l’instance sera retirée du rang des affaires en cours,

– a débouté la société GFP Technologies de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– a condamné M. [T] à payer à la société GFP Technologies la somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– a condamné M. [T] aux entiers dépens de l’instance.

La procédure d’appel

M. [T] a interjeté appel-compétence du jugement par déclaration du 5 janvier 2024 enregistrée sous le numéro de procédure 24/00141.

Par requête reçue au greffe le 5 janvier 2024, M. [T] a sollicité l’autorisation d’assigner la société GFP Technologies selon la procédure à jour fixe.

Par ordonnance rendue le 31 janvier 2024, M. [T] s’est vu autoriser à assigner la société GFP Technologies selon la procédure à jour fixe pour une audience fixée le 5 septembre 2024, dans le cadre d’une audience rapporteur.

Prétentions de M. [T], appelant

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 13 août 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé de ses moyens conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, M. [T] demande à la cour d’appel de :

– infirmer le jugement en ce que le conseil de prud’hommes s’est déclaré incompétent pour juger la relation de travail le liant à la société GFP Technologies et :

. a renvoyé les parties à mieux se pourvoir,

. a dit que l’instance sera retirée du rang des affaires en cours,

. a débouté la société GFP Technologies de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

. l’a condamné à payer à la société GFP Technologies la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

. l’a condamné aux entiers dépens de l’instance,

statuant de nouveau.

– déclarer le conseil de prud’hommes de Chartres, ou le cas échéant la cour de céans dans sa faculté d’évocation, pour connaître du litige l’opposant à la société GFP Technologies,

– se déclarer compétent pour connaître du litige,

– condamner la société GFP Technologies à lui verser la somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux dépens,

– débouter la société GFP Technologies de ses demandes indemnitaires formées au titre de la procédure abusive et sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Prétentions de la société GFP Technologies, intimée et appelante incidente

Par dernières conclusions adressées par voie électronique le 26 avril 2024, auxquelles il est renvoyé pour l’exposé de ses moyens, la société GFP Technologies demande à la cour d’appel de :

– déclarer recevable et bien fondé l’appel incident qu’elle a interjeté,

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il s’est déclaré incompétent pour juger de la relation de travail la liant à M. [T],

– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné M. [T] à lui verser la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens,

– infirmer le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande reconventionnelle tenant à voir condamner M. [T] à lui verser une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

et statuant à nouveau,

– condamner M. [T] à lui verser une somme de 5 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive,

– condamner M. [T] à lui verser une somme de 4 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais qu’elle a été contrainte d’exposer en appel,

– condamner M. [T] aux entiers dépens.

PAR CES MOTIFS

La COUR, statuant publiquement, en dernier ressort et par arrêt contradictoire,

CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Chartres le 22 décembre 2023,

Y ajoutant,

CONDAMNE M. [W] [T] au paiement des dépens d’appel,

CONDAMNE M. [W] [T] à payer à la SAS GFP Technologies une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

DÉBOUTE M. [W] [T] de sa demande présentée sur le même fondement.

Arrêt prononcé publiquement à la date indiquée par mise à disposition au greffe de la cour d’appel, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile et signé par Mme Catherine Bolteau-Serre, présidente, et par Mme Victoria Le Flem, greffière en pré-affectation, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La greffière en préaffectation, La présidente,

 


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