Suspension de l’instance civile en raison d’une procédure pénale en cours : enjeux et implications.

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Suspension de l’instance civile en raison d’une procédure pénale en cours : enjeux et implications.

L’Essentiel : Madame [C] a demandé un sursis à statuer le 7 juin 2023, en raison d’une instance pénale en cours, liée à une action en déchéance de garantie initiée par la MACSF. Cette dernière a contesté la demande, arguant que le sursis n’était pas justifié. Selon l’article 4 du code de procédure pénale, l’action civile ne peut être jugée tant que l’action publique n’est pas tranchée, mais cela ne s’applique pas aux actions autres que celles en réparation. Le juge a finalement ordonné un sursis à statuer jusqu’au jugement pénal, avec un renvoi fixé au 6 mars 2025.

Demande de sursis à statuer

Madame [C] a sollicité, par voie électronique le 7 juin 2023, un sursis à statuer jusqu’à l’issue d’une instance pénale en cours devant le tribunal judiciaire, référencée sous le numéro 21210000509. Cette demande s’inscrit dans le cadre d’une procédure civile où elle conteste une action en déchéance de garantie et en répétition de l’indu initiée par la MACSF.

Opposition de la MACSF

La MACSF a opposé à cette demande de sursis, par conclusions électroniques le 18 septembre 2023, en arguant que le sursis n’était pas justifié dans le cadre de l’action en déchéance de garantie, qui ne relève pas de la réparation du dommage causé par une infraction pénale.

Cadre juridique du sursis à statuer

Selon l’article 4 du code de procédure pénale, l’action civile en réparation du dommage causé par une infraction ne peut être jugée tant que l’action publique n’a pas été définitivement tranchée. Cependant, cette disposition ne s’applique pas aux actions autres que celles en réparation, permettant ainsi aux juges de statuer sur d’autres demandes.

Nature de l’action en cours

L’assignation de la MACSF à l’encontre de madame [C] concerne principalement une action en déchéance de garantie, fondée sur des accusations de faux documents, notamment un compte-rendu d’hospitalisation falsifié. Cette action est distincte de l’infraction pénale en cours, bien que les deux soient liées par les faits reprochés à madame [C].

Incidence du jugement pénal

Le jugement du tribunal correctionnel, qui portera sur les manœuvres frauduleuses de madame [C], est susceptible d’influencer l’issue de l’affaire civile. Par conséquent, le juge a décidé d’ordonner un sursis à statuer jusqu’à ce que le tribunal correctionnel rende sa décision.

Décision du juge de la mise en état

Le juge a ordonné le sursis à statuer sur toutes les demandes jusqu’à ce que le jugement pénal soit prononcé, tout en rejetant les autres demandes de madame [C] concernant le sursis. Les parties doivent informer le juge de la mise en état de l’état d’avancement de l’instance pénale, et l’affaire se poursuivra à l’initiative de l’une ou l’autre des parties après le jugement.

Prochaines étapes

Un renvoi à la mise en état dématérialisée a été fixé au 6 mars 2025, avec des instructions précises concernant la communication des messages. Les autres demandes, notamment celles relatives aux frais et dépens, ont été réservées pour une décision ultérieure.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la portée de l’article 455 alinéa 2 du code de procédure civile dans le cadre de la demande de sursis à statuer ?

L’article 455 alinéa 2 du code de procédure civile stipule que « les conclusions doivent exposer de manière claire et précise les prétentions et les moyens des parties ».

Cet article impose aux parties de formuler leurs demandes de manière suffisamment détaillée pour permettre au juge de comprendre les enjeux du litige.

Dans le cas présent, madame [C] a respecté cette exigence en communiquant ses conclusions aux fins d’incident, ce qui permet au juge de la mise en état d’examiner la demande de sursis à statuer.

Cependant, la MACSF s’oppose à cette demande, arguant que le sursis n’est pas de droit dans le cadre d’une action en déchéance de garantie, ce qui soulève des questions sur l’application de l’article 4 du code de procédure pénale.

Quelles sont les implications de l’article 4 du code de procédure pénale concernant le sursis à statuer ?

L’article 4 du code de procédure pénale précise que « l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique.

Toutefois, il est sursis au jugement de cette action tant qu’il n’a pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement ».

Cet article établit un principe de sursis pour les actions en réparation du dommage causé par une infraction, tant que l’action publique est pendante.

Cependant, l’alinéa 3 de cet article précise que la mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions, ce qui est pertinent dans le cas de l’action en déchéance de garantie engagée par la MACSF.

Ainsi, le sursis à statuer n’est pas automatique et dépend de la nature de l’action engagée.

Comment l’article 378 du code de procédure civile s’applique-t-il dans cette affaire ?

L’article 378 du code de procédure civile dispose que « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine ».

Cet article permet au juge de suspendre une instance en attendant qu’un événement déterminé se produise, ce qui est souvent justifié par l’intérêt d’une bonne administration de la justice.

Dans le cas présent, le juge a décidé d’ordonner un sursis à statuer jusqu’à ce que le tribunal correctionnel ait rendu sa décision, car le jugement pénal pourrait avoir une incidence sur l’affaire civile en cours.

Cette décision est conforme à l’article 378, qui permet au juge d’apprécier discrétionnairement l’opportunité d’un sursis à statuer.

Quelles sont les conséquences de la décision de sursis à statuer sur l’instance en cours ?

La décision de sursis à statuer a pour effet de suspendre le cours de l’instance jusqu’à ce que le tribunal correctionnel ait rendu son jugement.

Cela signifie que toutes les demandes formées par les parties, y compris celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens, seront réservées jusqu’à la décision du tribunal pénal.

À l’expiration du délai fixé, l’instance se poursuivra à l’initiative de l’une ou l’autre des parties, ce qui permet de garantir que le litige civil pourra être repris une fois que la question pénale sera tranchée.

Cette approche vise à éviter des décisions contradictoires et à assurer une bonne administration de la justice, conformément aux principes énoncés dans les articles 378 et 379 du code de procédure civile.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] Copies
délivrées le :

4ème chambre
2ème section

N° RG 21/11913
N° Portalis 352J-W-B7F-CVFG3

N° MINUTE :

Assignation du :
16 Septembre 2021

SURSIS À STATUER

ORDONNANCE DE SURSIS À STATUER
DU JUGE DE LA MISE EN ETAT
rendue le 21 Novembre 2024

DEMANDERESSE

Mutuelle MACSF Prévoyance
[Adresse 4]
[Adresse 4]
[Localité 3]

représentée par Me Anne-Claire PICHEREAU, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #B369

DÉFENDERESSE

Madame [Z] [C] épouse [O]
[Adresse 1]
[Localité 2]

représentée par Me Yves MONERRIS, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #D0018

Décision du 21 novembre 2024
4ème chambre 2ème section
N° RG 21/11913

MAGISTRAT DE LA MISE EN ÉTAT

Madame VASSORT-REGRENY, Vice-Présidente

assistée de Salomé BARROIS, Greffière

DÉBATS

À l’audience du 03 octobre 2024, avis a été donné aux avocats que l’ordonnance serait rendue le 21 novembre 2024.

ORDONNANCE

Prononcée par mise à disposition
Contradictoire

Vu l’assignation en déchéance de garantie et en répétition de l’indu délivrée le 16 septembre 2021 à la requête de la MACSF PREVOYANCE, société d’assurance mutuelle (ci-après la MACSF) à madame [Z] [C] ;

Vu la requête déposée par madame [Z] [C] aux fins de voir ordonner un sursis à statuer ;

Vu la convocation adressée par le greffe aux parties le 19 septembre 2024 ;

Par dernières conclusions aux fins d’incident communiquées par voie électronique le 7 juin 2023 ici expressément visées auxquelles il convient de se reporter pour un complet exposé des prétentions et des moyens conformément aux dispositions de l’article 455 alinéa 2 du code de procédure civile, madame [C] demande au juge de la mise en état d’ordonner le sursis à statuer jusqu’à l’issue de l’instance pénale actuellement pendante devant le tribunal judiciaire sous le numéro 21210000509 .

Par dernières conclusions aux fins d’incident communiquées par voie électronique le 18 septembre 2023 ici expressément visées auxquelles il convient de se reporter pour un complet exposé des prétentions et des moyens conformément aux dispositions de l’article 455 alinéa 2 du code de procédure civile, la MACSF s’oppose à la demande visant à ordonner le sursis à statuer ;

SUR CE,

Aux termes de l’article 4 du code de procédure pénale, « l’action civile en réparation du dommage causé par l’infraction prévue par l’article 2 peut être exercée devant une juridiction civile, séparément de l’action publique. Toutefois il est sursis eu jugement de cette action tant qu’il n’est pas été prononcé définitivement sur l’action publique lorsque celle-ci a été mise en mouvement. La mise en mouvement de l’action publique n’impose pas la suspension du jugement des autres actions exercées devant la juridiction civile, de quelque nature que ce soit, même si la décision à intervenir au pénal est susceptible d’exercer directement ou indirectement une influence sur la solution du procès civil. »

Si l’alinéa 2 de l’article 4 susvisé impose le sursis pour l’action en réparation du dommage causé par l’infraction portée devant le juge civil, tant que la juridiction pénale ne s’est pas prononcée définitivement sur l’action publique mise en mouvement,  tel n’est pas le cas en vertu de l’alinéa 3 pour les actions autres que celles en réparation du dommage causé par l’infraction.

Au cas présent l’assignation à comparaître devant la chambre civile du tribunal judiciaire de Paris délivrée le 16 septembre 2021 à la requête de la MACSF à madame [C] est à titre principal une action en déchéance de garantie et en répétition de l’indu, non une action en réparation du dommage causé par l’infraction dont va connaître le tribunal correctionnel.

Le sursis à statuer n’est donc pas de droit.

En vertu de l’article 378 du code procédure civile, « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine ».

En vertu de l’article 379 du code procédure civile, « la décision de sursis suspend le cours de l’instance pour le temps ou jusqu’à la survenance de l’événement qu’elle détermine. »

En application des dispositions susvisées, le sursis à statuer est néanmoins ordonné lorsque le résultat de la procédure à venir a une conséquence sur l’affaire en cours, ce dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice, les juges du fond appréciant discrétionnairement l’opportunité du sursis à statuer.

Au cas présent, il résulte des termes de l’assignation du 16 septembre 2021 que la MACSF fonde sa demande de déchéance de garantie devant le juge civil par le fait que madame [C] aurait commis des faux, notamment en ôtant des mentions relatives à son état de santé au compte-rendu d’hospitalisation daté du 7 avril 2016 et aurait usé de ce faux en l’adressant à la MACSF pour obtenir les indemnités dont il est sollicité la restitution.

Or madame [C] comparaîtra devant le tribunal correctionnel notamment pour répondre du chef de manœuvres frauduleuses résultant de la production du compte-rendu d’hospitalisation falsifié daté du 7 avril 2016.

Le jugement qui sera rendu par le tribunal correctionnel est donc de nature à avoir une incidence sur l’affaire en cours.

En conséquence, en application de l’article 378 du code de procédure civile, et pour une bonne administration de la justice, il sera, dans les termes du dispositif de la présente ordonnance, sursis à statuer jusqu’à ce que le tribunal correctionnel ait rendu sa décision. Il n’apparaît pas en revanche dans l’intérêt d’une bonne administration de la justice de surseoir à statuer jusqu’à l’issue définitive de l’instance pénale, madame [C] étant déboutée du chef de cette demande et les parties devant pour la date de renvoi indiquer au juge de la mise en état si le jugement a été rendu par le tribunal correctionnel et si ledit jugement est ou non définitif.

À l’expiration du délai susvisé, l’instance se poursuivra à l’initiative de l’une ou l’autre des parties.

Toutes les autres demandes dont celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS,

Nous, Juge de la mise en état, statuant publiquement par ordonnance contradictoire mise à disposition au greffe le jour du délibéré :

ORDONNONS le sursis à statuer sur l’ensemble des demandes formées jusqu’à ce le tribunal correctionnel ait prononcé son jugement dans le cadre de l’instance pénale enregistrée sous le numéro 21210000509 ;

REJETONS pour le surplus les demandes formées par madame [C] au titre du sursis à statuer ;

DISONS qu’à l’expiration du délai susvisé, l’instance se poursuivra à l’initiative de l’une ou l’autre des parties ;

DISONS que les parties devront, à peine de radiation, indiquer au juge de la mise en état si le jugement a été rendu par le tribunal correctionnel et si ledit jugement est ou non définitif ;

ORDONNONS à cette fin le renvoi à la mise en état dématérialisée du 6 mars 2025,10h10, les messages devant être communiquées par voie électronique au plus tard la veille de la date susvisée,12h ;

RAPPELONS que la présente procédure devant le tribunal judiciaire est écrite, la communication dématérialisée et que pour la bonne organisation des audiences, les avocats qui se présenteraient hors rendez-vous judiciaire préalablement fixé par le juge de la mise en état ne pourraient être reçus (demande mentionnant le motif de la demande de RDV à adresser au moins 15 jours avant la date sollicitée).

RÉSERVONS toutes les autres demandes dont celles relatives aux frais irrépétibles et aux dépens.

Faite et rendue à Paris, le 21 novembre 2024.

LA GREFFIÈRE
Salomé BARROIS
LA VICE-PRÉSIDENTE,
JUGE DE LA MISE EN ÉTAT
Nathalie VASSORT-REGRENY


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