L’Essentiel : Le 16 juin 2022, M. [P] [B] et Mme [F] [V] ont mandaté l’agence Kleber Immobilier pour vendre leur maison. Un compromis de vente a été signé le 02 juillet 2022, suivi d’un acte authentique le 04 octobre 2022. Cependant, dès avril 2023, les nouveaux propriétaires, M. [T] et Mme [K], ont signalé des problèmes d’humidité. Après une expertise, ils ont assigné les vendeurs et l’agence en justice, réclamant une expertise judiciaire et des dommages-intérêts. Le tribunal a ordonné une mesure d’expertise pour évaluer les désordres, sans que les parties n’obtiennent gain de cause sur les frais irrépétibles.
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Contexte de la vente immobilièreLe 16 juin 2022, M. [P] [B] et Mme [F] [V] ont mandaté l’agence immobilière Kleber Immobilier pour vendre leur maison située au [Adresse 4] à [Localité 13]. Le 02 juillet 2022, un compromis de vente a été signé avec M. [N] [T] et Mme [H] [K], et la vente a été officialisée par acte authentique le 04 octobre 2022. Problèmes d’humidité signalésÀ partir d’avril 2023, M. [T] et Mme [K] ont constaté des traces d’humidité et des infiltrations d’eau dans leur nouvelle habitation. Ils ont engagé la société Anjou Détection Fuite, qui a confirmé les désordres dans un rapport daté du 04 mai 2023. Par la suite, leur protection juridique a mandaté le cabinet Saretec pour une expertise amiable, dont le rapport a été déposé le 23 avril 2024. Assignation en justiceFace à l’absence de solution amiable, M. [T] et Mme [K] ont assigné M. [B], Mme [V], l’agence Kleber Immobilier, et d’autres parties devant le tribunal judiciaire d’Angers, demandant une expertise judiciaire et des dommages-intérêts. Ils ont également augmenté leur demande de frais irrépétibles à 3.000 euros. Arguments des partiesM. [T] et Mme [K] affirment que M. [B] et Mme [V] avaient connaissance des problèmes d’infiltration avant la vente et avaient effectué des travaux pour y remédier. Ils estiment que les vendeurs et l’agence immobilière ont dissimulé ces informations, ce qui les a conduits à des travaux estimés à 80.000 euros. En réponse, M. [B] et Mme [V] reconnaissent avoir rencontré des problèmes d’humidité, mais soutiennent que l’agence était informée des travaux effectués. Réponses des défendeursLa société Kleber Immobilier et son assureur demandent le rejet de la demande d’expertise, arguant qu’aucun désordre n’était présent au moment de la vente. Ils reprochent aux vendeurs d’avoir fourni des informations erronées. La société JCM Création, ayant réalisé des travaux en 2021, a également demandé à être déboutée des demandes à son encontre. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné une mesure d’expertise pour établir la preuve des désordres allégués, considérant qu’il existe un motif légitime pour cela. Les demandes de modification de la mission d’expertise et de constatation des franchises d’assurance ont été rejetées. Les dépens ont été mis à la charge de M. [T] et Mme [K], et aucune des parties n’a obtenu gain de cause au titre des frais irrépétibles. ConclusionLe tribunal a désigné un expert pour évaluer les désordres et a fixé un délai pour le dépôt de son rapport. Les parties ont été informées des modalités de l’expertise et des obligations qui leur incombent dans le cadre de cette procédure. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la base légale pour la demande d’expertise judiciaire dans ce litige ?La demande d’expertise judiciaire est fondée sur l’article 145 du Code de procédure civile, qui stipule : « S’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé. » Cet article exige l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur. Dans le cas présent, les rapports de recherche de fuite et d’expertise amiable établissent des désordres d’infiltration et d’humidité dans l’immeuble, justifiant ainsi la demande d’expertise pour établir la preuve des faits. Il est important de noter que l’application de cet article ne préjuge pas de la responsabilité des parties ni des chances de succès d’un éventuel procès. Ainsi, M. [T] et Mme [K] ont démontré un motif légitime pour conserver ou établir la preuve de leurs allégations, ce qui a conduit le tribunal à faire droit à leur demande d’expertise. Quelles sont les conséquences de la non-comparution d’une partie selon le Code de procédure civile ?L’article 472 du Code de procédure civile précise : « Lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée, notamment au regard des dispositions d’ordre public régissant la matière. » Cet article indique que si un défendeur ne se présente pas, le juge doit examiner la demande et décider de son bien-fondé. Dans le contexte de cette affaire, la société Djimy Bretaudeau, qui n’a pas comparu, ne peut pas contester la demande d’expertise, mais cela ne signifie pas que la demande des autres parties sera automatiquement acceptée. Le juge doit s’assurer que la demande est conforme aux règles de droit et qu’elle est justifiée par des éléments de preuve suffisants. Ainsi, la non-comparution d’une partie n’entraîne pas nécessairement une décision favorable à l’autre partie, mais elle peut influencer la manière dont le juge apprécie la recevabilité et le bien-fondé des demandes. Comment le tribunal a-t-il statué sur les demandes de frais irrépétibles ?L’article 700 du Code de procédure civile stipule : « Dans toutes les instances, le juge peut condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles. » Cependant, le tribunal a décidé de ne pas faire droit aux demandes de frais irrépétibles dans cette affaire, en raison de la nature probatoire de la mesure d’expertise ordonnée. Le juge a considéré que la mesure d’expertise était nécessaire pour établir les faits et que, par conséquent, il n’y avait pas lieu d’appliquer les dispositions de l’article 700. Ainsi, M. [T] et Mme [K], ainsi que M. [B] et Mme [V], ont été déboutés de leurs demandes au titre de l’article 700, car la décision d’expertise ne constitue pas une instance au fond, mais une mesure d’instruction. Le tribunal a donc statué que les frais d’expertise seraient à la charge de M. [T] et Mme [K], demandeurs à cette mesure, ce qui est conforme à la jurisprudence en matière d’expertise judiciaire. Quelles sont les implications de la franchise contractuelle dans le cadre de l’assurance ?La franchise contractuelle est un élément essentiel dans les contrats d’assurance, et l’article 1.1.1 du Code des assurances précise que : « La franchise est la somme restant à la charge de l’assuré en cas de sinistre. » Dans cette affaire, la société Kleber Immobilier et son assureur ont demandé au juge de constater que la franchise de 10%, dans la limite de 7.600 euros, est opposable au tiers qui invoque le bénéfice de la police d’assurance. Cependant, le tribunal a jugé que ces demandes ne relevaient pas de sa compétence en référé, car aucune condamnation n’avait été prononcée à ce stade contre la société Kleber Immobilier. Cela signifie que les questions relatives à la franchise et à la garantie de l’assurance doivent être examinées dans le cadre d’une instance au fond, et non dans le cadre d’une procédure de référé. Ainsi, le tribunal a débouté la société Kleber Immobilier et son assureur de leurs demandes concernant la franchise, soulignant que ces questions nécessitent une analyse plus approfondie dans le cadre d’une procédure appropriée. |
TRIBUNAL JUDICIAIRE D’ ANGERS
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N° RG 24/436 – N° Portalis DBY2-W-B7I-HTGF
N° de minute : 24/499
O R D O N N A N C E
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Le VINGT ET UN NOVEMBRE DEUX MIL VINGT QUATRE, Nous, Benoît GIRAUD, Président du Tribunal Judiciaire d’ANGERS, assisté de Aurore TIPHAIGNE, Greffière présente lors des débats et lors de la mise à disposition, avons rendu la décision dont la teneur suit :
DEMANDEURS :
Monsieur [N] [T]
Né le 01 Octobre 1986 à [Localité 12] (16)
[Adresse 4]
[Localité 7]
représenté par Maître Patrice HUGEL de la SELARL PATRICE HUGEL AVOCAT, substitué par Maître Karla BEUNET, Avocate au barreau D’ANGERS
Madame [H] [K]
Née le 11 Août 1992 à [Localité 11] (49)
[Adresse 4]
[Localité 7]
représentée par Maître Patrice HUGEL de la SELARL PATRICE HUGEL AVOCAT, substitué par Maître Karla BEUNET, Avocate au barreau D’ANGERS
DÉFENDEURS :
Monsieur [P] [B]
Né le 12 Septembre 1972 à [Localité 15] (52)
[Adresse 2]
[Localité 7]
représenté par Maître Corentin CRIQUET de la SCP ANDCO, substitué par Maître Anaelle TANGRE, Avocate au barreau D’ANGERS
Madame [F] [V]
Née le 29 Janvier 1974 à [Localité 14] (CHINE)
[Adresse 2]
[Localité 7]
représentée par Maître Corentin CRIQUET de la SCP ANDCO, substitué par Maître Anaelle TANGRE, Avocate au barreau D’ANGERS
C.EXE : Maître Jean-baptiste LEFEVRE
Maître Corentin CRIQUET
Maître Régine GAUDRE
Maître Patrice HUGEL
C.C :
1 Copie défaillant (1) par LS
1 Copie Serv. Expertises
1 Copie régie
Copie Dossier
le
S.A.R.L. DJIMY BRETAUDEAU, immatriculée au RCS D’ANGERS sous le n°499 973 618, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 9]
[Adresse 9]
[Localité 8]
Non comparante, ni représentée,
S.A.S. KLEBER IMMOBILIER, immatriculée au RCS D’ANGERS sous le n°490 615 895, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 1]
[Localité 7]
représentée par Maître Régine GAUDRE de la SELARL CAPPATO GAUDRE, Avocate au barreau D’ANGERS, Avocate postulante, et par Maître Marie OUTTERS-LEPAROUX, Avocate au barreau de Strasbourg, Avocate plaidante,
S.A. SERENIS ASSURANCE, immatriculée au RCS de ROMANS sous le n°350 838 686, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège, en sa qualité d’assureur de la SAS KLEBER IMMOBILIER,
[Adresse 5]
[Localité 6]
représentée par Maître Régine GAUDRE de la SELARL CAPPATO GAUDRE, Avocate au barreau D’ANGERS, Avocate postulante, et par Maître Marie OUTTERS-LEPAROUX, Avocate au barreau de Strasbourg, Avocate plaidante,
S.A.R.L. JCM CREATION, immatriculée au RCS D’ANGERS sous le n°482 750 221, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège,
[Adresse 10]
[Localité 7]
représentée par Maître Jean-baptiste LEFEVRE de la SELARL 08H08 AVOCATS, Avocat au barreau D’ANGERS
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Vu l’exploit introductif du présent Référé en date du 08 et 09 Juillet 2024; les débats ayant eu lieu à l’audience du 24 Octobre 2024 pour l’ordonnance être rendue ce jour, ce dont les parties comparantes ont été avisées ;
Le 16 juin 2022, M. [P] [B] et Mme [F] [V] ont donné mandat à l’agence immobilière Kleber Immobilier, assurée auprès de la société Serenis Assurances, de vendre leur maison d’habitation située au [Adresse 4] à [Localité 13].
Le 02 juillet 2022, ils ont signé avec M. [N] [T] et Mme [H] [K], avec le concours de l’agence immobilière Kleber Immobilier, un compris de vente pour l’acquisition de cet immeuble.
La vente a été réitérée par acte authentique du 04 octobre 2022.
Dès le mois d’avril 2023, M. [T] et Mme [K] ont déploré des traces d’humidité et des infiltrations d’eau dans leur habitation.
Ils ont alors mandaté la société Anjou Détection Fuite, laquelle a confirmé les désordres aux termes d’un rapport de recherche de fuite du 04 mai 2023.
Ils ont également saisi leur protection juridique, laquelle a mandaté le cabinet Saretec aux fins d’expertise amiable. Un rapport a été déposé le 23 avril 2024.
Les parties ne sont pas parvenues à solutionner amiablement leur différend.
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C’est dans ce contexte que, par actes de commissaire de justice des 08 et 09 juillet 2024, M. [T] et Mme [K] ont fait assigner M. [B], Mme [V], la société Kleber Immobilier, la société Serenis Assurance, prise en sa qualités d’assureur de la société Kleber Immobilier, la société Djimy Bretaudeau et la société JCM Création devant le président du tribunal judiciaire d’Angers statuant en référé, aux fins de voir ordonner une mesure d’expertise judiciaire sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile, condamner in solidum les défendeurs à leur payer la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre aux dépens.
Par voie de conclusions, M. [T] et Mme [K] augmentent à hauteur de 3.000 euros la somme sollicitée au titre des frais irrépétibles. Ils demandent au juge des référés de débouter la société Kleber de sa demande de condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Ils réitèrent le surplus de leurs demandes introductives d’instance.
A l’appui de leurs prétentions, M. [T] et Mme [K] exposent que M. [B] et Mme [V] auraient reconnu avoir rencontré des problèmes d’infiltration d’eau dans l’immeuble litigieux lorsqu’ils y vivaient encore. Ces désordres auraient notamment conduit les vendeurs à procéder à des travaux de maçonnerie et d’étanchéité au cours de l’année 2021, lesquels auraient été confiés aux sociétés JCM Création et Djimy Bretaudeau. Ils reprochent ainsi aux vendeurs et à l’agence immobilière d’avoir dissimulé ces informations lors de la cession du bien. Ils estiment à près de 80.000 euros les travaux de reprise à effectuer.
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Par voie de conclusions responsives, M. [B] et Mme [V] sollicitent du juge de :
– décerner acte de ce qu’ils ne s’opposent pas à la désignation d’un expert de justice, sous les protestations et réserves d’usage ;
– ajouter à la mission confiée à l’expert judiciaire les chefs détaillés dans le dispositif de leurs écritures ;
– dire que les parties conserveront à leur charge les frais irrépétibles ;
– juger que les demandeurs conserveront à leur charges les dépens ;
– débouter les autres parties de toute demande plus ample ou contraire.
A l’appui de leurs prétentions, M. [B] et Mme [V] ne contestent pas avoir rencontré des problèmes d’humidité et d’avoir fait procéder à des travaux, avant la vente du bien, pour résoudre les désordres. Ils soutiennent que l’agence immobilière aurait eu connaissance de la réalisation de ces travaux.
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Par voie de conclusions récapitulatives, la société Kleber Immobilier et la société Serenis Assurance sollicitent du juge de :
– débouter M. [T] et Mme [K] de leur demande d’expertise ;
– subsidiairement, prendre acte de leurs protestations et réserves et mettre à la charge des demandeurs l’intégralité de l’avance sur les frais d’expertise ;
– en tout état de cause, débouter M. [B] et Mme [V] ou toute autre partie de leur demande d’ajout de la mission d’expertise ;
– constater que la franchise contractuelle de 10% dans la limite de 7.600 euros est opposable au tiers qui invoque le bénéfice de la police d’assurance ;
– constater que la garantie de la société Serenis Assurances est limitée à 550.000 euros ;
– condamner in solidum M. [T] et Mme [K] à verser à la société Kleber Immobilier la somme de 2.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– les condamner à supporter les frais et dépens de la présente procédure.
A l’appui de leurs prétentions, la société Kleber Immobilier et son assureur font valoir qu’une action au fond menée à l’encontre de l’agence immobilière serait vouée à l’échec dès lors qu’au jour de la vente de l’immeuble, celui-ci ne présentait aucun désordre d’infiltration ni d’humidité. De sorte qu’elle n’aurait commis aucune faute et aurait parfaitement remplie son obligation d’information à l’égard des acquéreurs. Ils reprochent cependant à M. [B] et Mme [V] d’avoir transmis à la société Kleber Immobilier des informations erronées et, ainsi, de ne pas avoir agi de bonne foi dans le processus de vente. Pour ces raisons, seule la responsabilité des vendeurs serait susceptible d’être recherchée.
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Par voie de conclusions récapitulatives, la société JCM Création sollicite du juge de donner acte de ses réserves de responsabilité et de garantie, de débouter M. [T] et Mme [K] de leurs demandes formulées à son encontre au titre des frais irrépétibles et des dépens, ainsi que de réserver les dépens.
A l’appui de ses prétentions, la société JCM Immobilier confirme être intervenue, en 2021, pour effectuer des travaux dans la maison litigieuse, à la demande de M. [B] et Mme [V].
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A l’audience du 24 octobre 2024 à laquelle l’affaire a été retenue, les parties ont réitéré leurs demandes, à l’exception de la société Djimy Bretaudeau, partie défenderesse régulièrement assignée, qui n’a pas comparu ni constitué avocat.
L’affaire a été mise en délibéré au 21 novembre 2024.
Conformément à l’article 446-1 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience.
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée, notamment au regard des dispositions d’ordre public régissant la matière.
I.Sur la demande d’expertise
Aux termes de l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.
Ce texte suppose l’existence d’un motif légitime, c’est-à-dire un fait crédible et plausible qui présente un lien utile avec un litige potentiel futur dont la solution peut dépendre de la mesure d’instruction sollicitée. L’application de cet article n’implique aucun préjugé sur la responsabilité des parties appelées à la procédure, ni sur les chances de succès du procès susceptible d’être ultérieurement engagé.
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En l’espèce, il résulte des pièces produites, notamment des rapports en recherche de fuite réalisés par la société Anjou détection Fuite les 4 mai et 1er octobre 2023, ainsi que du rapport d’expertise amiable établi le 23 avril 2024 par le cabinet Saretec, que des désordres d’infiltration et d’humidité affectant l’immeuble de M. [T] et Mme [K] ont été objectivés et dont la preuve, les causes et les conséquences pourraient être utiles à la solution d’un litige.
Il sera rappelé qu’il ne revient pas au juge des référés, juge de l’évidence, de se prononcer sur l’étendue de l’obligation d’information de l’agence immobilière, sur les éventuelles fautes commises par les parties dans le processus de vente, sur les éventuelles causes d’exonération, sur le caractère apparent des désordres et, plus généralement, de trancher les responsabilités en cause. A ce stade, la demande de mise hors de cause de la société Kleber Immobilier et de son assureur, lesquels ne contestent pas l’intervention de l’agence immobilière dans la vente du bien litigieux, apparaît ainsi prématurée.
Par ailleurs, aucune instance n’est en cours pour le même litige.
De ce fait, M. [T] et Mme [K] justifient d’un motif légitime au sens de l’article 145 du code de procédure civile à conserver ou établir la preuve de leurs allégations.
En conséquence, pour toutes ces considérations, il sera fait droit à la demande d’expertise sollicitée dans les conditions détaillées dans le dispositif.
Il ne sera pas fait droit à la demande de modification de la mission d’expertise sollicitée par M. [B] et Mme [V], la mission habituellement ordonnée étant suffisamment détaillée. A charge pour les parties de signaler à l’expert judiciaire les éventuels événements évoqués, pour qu’il les intègre dans son rapport. M. [B] et Mme [V] seront donc déboutés de cette demande.
Le coût de l’expertise sera avancé par M. [T] et Mme [K], demandeurs à cette mesure d’instruction ordonnée dans leur intérêt.
II.Sur les demandes de la société Kleber Immobilier et de son assureur
La société Kleber Immobilier et son assureur demandent au juge des référés de constater que la franchise contractuelle de 10%, dans la limite de 7.600 euros, est opposable au tiers qui invoque le bénéfice de la police d’assurance, ainsi que de constater que la garantie de la société Serenis Assurances est limitée à 550.000 euros.
Ces demandes, ne relevant pas de la compétence du juge des référés, ne peuvent prospérer, étant au surplus observé qu’aucune condamnation n’a, à ce stade, été prononcée à l’encontre de la société Kleber Immobilier.
III.Sur les dépens et les frais irrépétibles
Au vu de l’article 491 du code de procédure civile, le juge des référés doit statuer sur les dépens dès lors qu’il est dessaisi par la décision qu’il rend. Il ne peut ni les réserver, ni dire qu’ils suivront le sort d’une instance au fond qui demeure éventuelle à ce stade. Par conséquent, M. [T] et Mme [K] assumeront les dépens d’une procédure initiée dans leur intérêt et avant toute procédure au fond.
Par ailleurs, la mesure d’expertise étant à caractère purement probatoire, il n’y a pas lieu à application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. M. [T] et Mme [K], d’une part, et M. [B] et Mme [V], d’autre part, seront ainsi déboutés de leurs demandes à ce titre.
Nous, Benoît Giraud, président du tribunal judiciaire d’Angers, statuant en référé, publiquement, par ordonnance réputée contradictoire et en premier ressort :
Vu les dispositions de l’article 145 du code de procédure civile ;
Donnons acte aux parties présentes ou représentées de leurs protestations et réserves ;
Ordonnons une mesure d’expertise au contradictoire de M. [N] [T], Mme [H] [K], M. [P] [B], Mme [F] [V], la société Kleber Immobilier, la société Serenis Assurance, ès-qualités d’assureur de la société Kleber Immobilier, la société Djimy Bretaudeau et de la société JCM Création ;
Commettons pour y procéder, M. [Y] [W] – [Adresse 3], expert inscrit sur la liste de la Cour d’Appel d’Angers, avec mission de :
– convoquer et entendre les parties assistées le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion des opérations ou lors de la tenue des réunions d’expertise,
– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, ainsi que tout rapport technique ou rapport d’expertise déjà effectué à la demande de l’une ou l’autre des parties,
– se rendre sur les lieux : [Adresse 4] à [Localité 13],
-faire une visite et une description des lieux,
– produire des photographies, croquis et plans nécessaires pour illustrer son rapport,
– vérifier si les désordres allégués, malfaçons ou inachèvement de travaux existent en considération des documents contractuels liant les parties ; dans l’affirmative, les décrire, en indiquer la nature et la date d’apparition, en distinguant ceux qui affectent d’une part les éléments constitutifs de l’ouvrage ou les éléments d’équipement tels que définis par l’article 1792-2 du code civil et d’autre part ceux qui affectent les autres éléments d’équipement du bâtiment,
– préciser les dates essentielles des opérations de construction à savoir la date de demande de déclaration de travaux, la date de déclaration réglementaire d’ouverture du chantier, la date d’achèvement des travaux, ainsi que la date de réception de l’ouvrage par les parties en cause ou de prise de possession des lieux , la date du certificat de conformité et donner tous éléments sur la date d’apparition des désordres,
– rechercher les causes des désordres en faisant procéder si nécessaire à toute étude ou analyse technique, mécanique ou chimique,
– fournir tous éléments permettant de déterminer s’ils proviennent d’une erreur grave de conception, d’une erreur de construction, d’un vice des matériaux et/ou produits, d’une malfaçon dans leur mise en oeuvre, d’une négligence dans l’entretien ou l’exploitation des ouvrages ou de toute autre cause et si ces désordres constituent une simple défectuosité, des malfaçons ou des vices graves,
– fournir tous éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer à quels fournisseurs ou intervenants ces désordres, malfaçons ou inachèvements sont imputables et dans quelle proportion,
– indiquer l’importance de ces désordres éventuels en précisant s’ils affectent l’ouvrage dans l’un ou l’autre de ses éléments constitutifs et sont de nature à rendre l’immeuble impropre à sa destination, ou leur conséquence sur la solidité, l’habitabilité ou l’esthétique du bâtiment, ou s’ils affectent la solidité d’éléments d’équipement en précisant si ces éléments sont dissociables ou non du corps de l’ouvrage ( fondation, ossature, clos et couvert),
– préciser les travaux nécessaires pour remédier aux désordres éventuels ; en évaluer le coût et la durée d’exécution, en fonction des devis qui devront être recherchés et produits par M. [N] [T] et Mme [H] [K] auprès des entreprises de leur choix, en vérifiant les devis fournis et le cas échéant en donnant toutes précisions sur les modifications à apporter à ces devis quant aux travaux et/ou à leur coût,
– d’une manière générale donner à la juridiction les éléments permettant de se prononcer sur les responsabilités éventuellement encourues,
– évaluer le préjudice subi par le maître de l’ouvrage du fait des malfaçons ou désordres constatés (trouble de jouissance notamment) ou provenant d’un retard dans l’exécution des travaux. En ce dernier cas, donner son avis sur les causes du retard et préciser à qui il peut être imputé,
– dire si, après l’exécution des travaux de remise en état, l’immeuble restera affecté d’une moins value et donner en ce cas son avis sur son importance,
– apurer les comptes entre les parties, s’il y a lieu et, dans l’affirmative, se faire remettre pièces relatives aux factures ou honoraires impayées et à leur paiement en donnant toutes précisions sur les sommes non réglées ;
Rappelons que l’expert peut s’adjoindre d’initiative, si besoin est, un technicien dans une autre spécialité que la sienne, dont le rapport sera joint au rapport (articles 278 et 282 du code de procédure civile) et/ou se faire assister par une personne de son choix intervenant sous son contrôle et sa responsabilité (article 278-1) ;
Rappelons que :
1) le coût final des opérations d’expertise ne sera déterminé qu’à l’issue de la procédure, même si la présente décision s’est efforcée de fixer le montant de la provision à une valeur aussi proche que possible du coût prévisible de l’expertise,
2) la partie qui est invitée par cette décision à faire l’avance des honoraires de l’expert n’est pas nécessairement celle qui en supportera la charge finale, à l’issue du procès,
et que le fait que l’une des parties bénéficie de l’aide juridictionnelle partielle ou totale n’implique pas nécessairement que cette partie soit dispensée, à l’issue du litige, de la charge totale ou partielle du coût de la mesure d’instruction ;
Accordons à l’expert pour le dépôt de son rapport au service du contrôle des expertises un délai de DIX MOIS à compter de la réception de l’avis de consignation envoyé par le Greffe ;
Disons que l’expert devra solliciter du magistrat chargé du contrôle de l’expertise une prorogation de ce délai si celui-ci s’avère insuffisant ;
Fixons à 3.000€ (trois mille euros) le montant de la provision à valoir sur la rémunération de l’expert que M. [N] [T] et Mme [H] [K] devront consigner auprès du régisseur du tribunal judiciaire d’Angers dans le délai de deux mois à compter de la date de la notification de la présente ordonnance, par virement ou par chèque établis à l’ordre de la régie des avances et recettes du tribunal judiciaire d’Angers en indiquant le n° RG et le nom de parties ;
Disons qu’à défaut de consignation dans ce délai et selon les modalités imparties, la désignation de l’expert sera caduque ;
Disons que s’il estime insuffisante la provision ainsi fixée, l’expert devra, lors de la première ou au plus tard de la deuxième réunion, dresser un programme de ses investigations et évaluer d’une manière aussi précise que possible le montant prévisible de ses honoraires et débours ;
Disons qu’à l’issue de cette réunion, l’expert fera connaître aux parties et au magistrat chargé du contrôle de l’expertise la somme globale qui lui paraît nécessaire pour garantir en totalité le recouvrement de ses honoraires et de ses débours et sollicitera, la cas échéant, le versement d’une consignation supplémentaire ;
Disons que l’expert provoquera la première réunion sur place dans un délai maximum de cinq semaines à partir de sa saisine, constituée par l’avis donné à l’expert du versement de la consignation, et que les parties lui communiqueront préalablement toutes les pièces dont elles entendent faire état ;
Disons que les parties communiqueront ensuite sans retard les pièces demandées par l’expert et que, en cas de défaillance, le juge du suivi de l’expertise pourra être saisi aux fins de fixation d’une astreinte ;
Disons que les pièces seront accompagnées d’un bordereau avec la justification de la communication à toutes les parties en cause ;
Disons que lors de la première réunion et en tout cas dès que possible, l’expert exposera sa méthodologie et fixera le calendrier de ses opérations, avec la date de diffusion du projet de rapport, le délai imparti aux parties pour lui faire parvenir leurs dires et la date du dépôt du rapport définitif ;
Disons que les parties procéderont aux mises en cause nécessaires dans les deux mois de la saisine de l’expert, ou, si la nécessité s’en révèle ultérieurement, dès que l’expert donnera son accord ;
Disons qu’à la fin de ses opérations, l’expert organisera une réunion de clôture ou adressera aux parties une note de synthèse pour les informer du résultat de ses investigations. Les parties disposeront alors d’un délai de trois semaines pour faire parvenir leurs observations récapitulatives. Le tout devant être consigné dans son rapport d’expertise ;
Disons que faute pour une partie d’avoir communiqué à l’expert les pièces demandées ou fait parvenir son dire dans les délais impartis, elle sera réputée y avoir renoncé sauf si elle a justifié préalablement à l’expiration du délai d’un motif résultant d’une cause extérieure ;
Disons que l’expert déposera au service des expertises du tribunal son rapport dans un délai maximum de DIX MOIS suivant sa saisine, sauf prorogation accordée préalablement à l’expiration de ce délai, en un seul original, après en avoir envoyé un exemplaire à chaque partie;
Disons que l’expert joindra à cet envoi la copie de sa demande de rémunération et que les parties disposeront d’un délai de quinze jours pour formuler des observations sur cette demande ;
Disons qu’en cas d’empêchement ou refus, l’expert commis pourra être remplacé par ordonnance à la demande de la partie la plus diligente ;
Désignons, pour contrôler les opérations d’expertise, le juge chargé des expertises de ce Tribunal;
Déboutons M. [P] [B] et Mme [F] [V] de leur demande de complément de la mission d’expertise ;
Déboutons la société Kleber Immobilier et la société Serenis Assurance, ès-qualités d’assureur de la société Kleber Immobilier de leurs demandes tendant à voir constater que la franchise contractuelle de 10%, dans la limite de 7.600 euros, est opposable au tiers qui invoque le bénéfice de la police d’assurance, ainsi que constater que la garantie de la société Serenis Assurances est limitée à 550.000 euros ;
Condamnons M. [N] [T] et Mme [H] [K] aux dépens ;
Déboutons M. [N] [T] et Mme [H] [K] de leur demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Déboutons la société Kleber Immobilier et la société Serenis Assurance, ès-qualités d’assureur de la société Kleber Immobilier, de leur demande formulée au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Rappelons que la présente décision est, de plein droit, exécutoire à titre provisoire.
Ainsi fait et prononcé à la date ci-dessus par mise à disposition au greffe, la présente ordonnance a été signée par Benoît Giraud, président, juge des référés, et par Aurore Tiphaigne, greffière,
Aurore Tiphaigne, Benoît Giraud,
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