L’Essentiel : La SCI Aigues Mortes a conclu un bail dérogatoire avec Mme [D] [X] le 1er mars 2011, d’une durée de 23 mois pour des locaux commerciaux. À l’expiration du bail, Mme [D] [X] n’a pas quitté les lieux, entraînant une assignation en justice par la SCI pour expulsion. Le tribunal a reconnu un bail dérogatoire verbal et a condamné Mme [D] [X] à payer des charges, tout en lui accordant un délai de paiement. En 2021, la SCI a mis en demeure Mme [D] [X] pour loyers impayés, mais le tribunal a finalement débouté la SCI de sa demande de paiement.
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Constitution du bailLa SCI Aigues Mortes a conclu un bail dérogatoire avec Mme [D] [X] le 1er mars 2011 pour des locaux commerciaux, d’une durée de 23 mois, avec un loyer mensuel de 1 911,99 euros hors taxes. Les locaux étaient destinés à la vente d’antiquités, de brocante et divers articles. Conflit et résiliationÀ l’expiration du bail, Mme [D] [X] n’a pas quitté les lieux, ce qui a conduit la SCI Aigues Mortes à l’assigner en justice pour obtenir son expulsion et le paiement d’une indemnité d’occupation. Le juge des référés a constaté une contestation sérieuse et a débouté la SCI Aigues Mortes de sa demande. Actions judiciaires et paiementsAprès plusieurs échanges, Mme [D] [X] a contesté la demande de la SCI, signalant que celle-ci n’avait pas encaissé certains loyers. En réponse, la SCI a de nouveau assigné Mme [D] [X] pour obtenir son expulsion et le paiement de diverses sommes dues. Mme [D] [X] a ensuite réglé une partie de sa dette locative. Jugement du tribunalLe tribunal a reconnu l’existence d’un bail dérogatoire verbal et a condamné Mme [D] [X] à payer des charges et une taxe foncière, tout en lui accordant un délai de paiement. La SCI Aigues Mortes a interjeté appel, mais la cour d’appel a confirmé le jugement. Demande de paiement et désistementEn 2021, la SCI a mis en demeure Mme [D] [X] de régler des loyers impayés, puis l’a assignée à nouveau. Mme [D] [X] a cédé son fonds de commerce à la SAS Sabrina La Fée, qui est intervenue dans la procédure. La SCI a ensuite demandé la résiliation du bail et le paiement de sommes dues. Conclusions des partiesMme [D] [X] a demandé le rejet des demandes de la SCI, tandis que cette dernière a justifié sa créance par des loyers impayés. La SAS Sabrina La Fée a également demandé à se désister de l’instance, ce qui a été pris en compte par le tribunal. Décision du tribunalLe tribunal a constaté le désistement de la SCI concernant la résiliation du bail et a débouté la SCI de sa demande de paiement. Il a également condamné la SCI à verser une somme à Mme [D] [X] au titre des frais de justice et a statué sur l’exécution provisoire de la décision. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la nature et la durée du bail dérogatoire consenti par la SCI Aigues Mortes à Mme [D] [X] ?Le bail dérogatoire consenti par la SCI Aigues Mortes à Mme [D] [X] est un contrat de location commerciale, établi par acte sous seing privé, pour une durée de 23 mois entiers et consécutifs. Ce type de bail est régi par l’article L. 145-5 du Code de commerce, qui précise que « le bail dérogatoire est un contrat de location qui ne relève pas des dispositions du statut des baux commerciaux ». Il est important de noter que ce bail a été consenti pour une période déterminée, allant du 1er mars 2011 au 31 janvier 2013, ce qui est conforme aux exigences légales pour ce type de contrat. Quelles sont les obligations du preneur en vertu du bail commercial ?Les obligations du preneur dans le cadre d’un bail commercial sont principalement énoncées dans l’article 1728 du Code civil. Cet article stipule que « le preneur est tenu de deux obligations principales : celle d’user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention, et celle de payer le prix du bail aux termes convenus ». Ainsi, Mme [D] [X] avait l’obligation de payer le loyer mensuel convenu, qui était de 1 911,99 euros hors taxes, et de respecter la destination des lieux loués, qui était la vente d’antiquités et d’autres articles. Comment la SCI Aigues Mortes a-t-elle justifié sa demande de paiement de la dette locative ?La SCI Aigues Mortes a justifié sa demande de paiement de la dette locative en produisant un décompte des sommes dues par Mme [D] [X]. Selon l’article 1353 du Code civil, « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver ». Dans ce cas, la SCI Aigues Mortes devait prouver le montant de la créance, qui s’élevait à 10 235,98 euros. Cependant, le tribunal a constaté que le décompte fourni par la bailleresse était erroné et ne permettait pas de vérifier le bien-fondé de la demande. Quelles sont les conséquences de l’absence de quittance de loyer pour le bailleur ?L’absence de quittance de loyer peut avoir des conséquences significatives pour le bailleur. Selon l’article 21 de la loi du 6 juillet 1989, « le bailleur est tenu de délivrer au locataire une quittance de loyer lorsque celui-ci en fait la demande ». Dans le cas présent, la SCI Aigues Mortes n’a pas délivré de quittance de loyer à Mme [D] [X], ce qui a contribué à la contestation de la dette locative. Le tribunal a noté que cette carence dans la délivrance des quittances a renforcé l’imprécision des pièces probatoires fournies par la bailleresse. Quelles sont les implications de la résiliation judiciaire du bail commercial ?La résiliation judiciaire d’un bail commercial est régie par l’article L. 145-41 du Code de commerce, qui stipule que « le juge peut prononcer la résiliation du bail commercial à la demande du bailleur en cas de manquement du locataire à ses obligations ». Dans cette affaire, la SCI Aigues Mortes a initialement demandé la résiliation judiciaire du bail en raison des loyers impayés. Cependant, le tribunal a constaté que la bailleresse s’était désistée de cette demande, ce qui a eu pour effet de rendre la résiliation sans objet. Comment le tribunal a-t-il statué sur la demande d’expertise comptable ?Le tribunal a statué sur la demande d’expertise comptable en se référant aux articles 144 et 146 du Code de procédure civile, qui précisent que « les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer ». Cependant, le tribunal a estimé que la bailleresse n’avait pas fourni d’éléments probants suffisants pour justifier la nécessité d’une expertise. En conséquence, la demande d’expertise comptable a été déboutée, car la carence de la bailleresse dans l’administration de la preuve ne pouvait pas être corrigée par une mesure d’instruction. |
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]
[1] Expéditions
exécutoires
délivrées le:
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18° chambre
1ère section
N° RG 22/00402
N° Portalis 352J-W-B7F-CVQI6
N° MINUTE : 3
contradictoire
Assignation du :
05 Janvier 2022
JUGEMENT
rendu le 21 Novembre 2024
DEMANDERESSE
S.C.I. AIGUES MORTES
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Me Michel PATILLET, avocat au barreau de PARIS, vestiaire #A0742
DÉFENDERESSE
Madame [D] [X]
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Jacques RAYNALDY de la SCP LEICK RAYNALDY & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #P0164
Décision du 21 Novembre 2024
18° chambre 1ère section
N° RG 22/00402 – N° Portalis 352J-W-B7F-CVQI6
PARTIE INTERVENANTE
S.A.S. SABRINA LA FEE
[Adresse 1]
[Localité 3]
représentée par Maître Franck BENHAMOU de la SELEURL M. FOUAD BOUYAHBAR AVOCAT, avocats au barreau de PARIS, vestiaire #B1099
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Par application des articles R.212-9 du Code de l’Organisation Judiciaire et 812 du Code de Procédure Civile, l’affaire a été attribuée au Juge unique.
Avis en a été donné aux avocats constitués qui ne s’y sont pas opposés.
Madame Sophie GUILLARME, 1ère Vice-présidente adjointe, statuant en juge unique,
assistée de Monsieur Christian GUINAND, Greffier principal,
DÉBATS
A l’audience du 23 septembre 2024, tenue en audience publique, avis a été donné aux avocats des parties que la décision serait rendue par mise à disposition au greffe le 12 novembre 2024.
Puis, le délibéré a été prorogé jusqu’au 21 novembre 2024.
JUGEMENT
Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort
Par acte sous seing privé du 1er mars 2011, la SCI Aigues Mortes a donné à bail dérogatoire à Mme [D] [X] des locaux commerciaux composés d’une boutique située au rez-de-chaussée du [Adresse 1] à [Localité 3].
Le bail a été consenti pour une durée de 23 mois entiers et consécutifs à compter du 1er mars 2011 jusqu’au 31 janvier 2013, moyennant le versement d’un loyer mensuel, indexé à l’indice du coût de la construction, de 1 911,99 euros hors taxes hors charges, soit 2 286,74 euros toutes charges comprises.
Les lieux ont pour destination l’activité exclusive de vente « d’antiquité, brocante, prêt-à-porter, accessoires, articles de [Localité 2], cadeaux, chaussures, gadgeterie [et] cartes postales ».
Mme [D] [X] n’ayant pas quitté les lieux le 31 janvier 2013 la SCI Aigues Mortes, se prévalant d’un acte de résiliation du 28 décembre 2012 l’obligeant à remettre les clés à cette date, l’a faite assigner, par acte d’huissier du 6 novembre 2015, devant le juge des référés du tribunal de grande instance de Paris aux fins, notamment, d’ordonner son expulsion et de la condamner au paiement d’une indemnité d’occupation provisionnelle de 2 900 euros par mois à compter du 1er janvier 2014 jusqu’à la libération des locaux.
Par ordonnance du 18 janvier 2016, le juge a dit n’y avoir lieu à référé au vu de l’existence d’une contestation sérieuse et a condamné la SCI Aigues Mortes aux entiers dépens et à payer à Mme [D] [X] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par lettre recommandée avec accusé de réception du 19 février 2016, la SCI Aigues Mortes a enjoint Mme [D] [X] de quitter les lieux le 26 février 2016. Par acte d’huissier du 4 avril 2016, Mme [D] [X] a contesté la demande de sa bailleresse, faisant part refus de celle-ci d’encaisser les loyers – de novembre et décembre 2015, janvier, février et mars 2016 – qui lui ont été régulièrement adressés ; la preneuse a également sommé la bailleresse de lui délivrer les quittances de loyer depuis le 1er février 2013.
Par acte d’huissier du 15 avril 2016, la SCI Aigues Mortes a fait assigner Mme [D] [X] devant le tribunal de grande instance de Paris aux fins, notamment d’ordonner son expulsion et de la condamner au paiement, d’une part, d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer actuel jusqu’à parfaite libération des lieux, et d’autre part, des sommes de 13 907,80 euros, 9 770,36 euros, 11 040,04 euros, 451 350 euros et 6 000 euros au titre, respectivement, de l’arriéré locatif, l’arriéré de charges, du droit de terrasse, de la taxe foncière et de dommages et intérêts pour résistance abusive.
Par courrier du 24 octobre 2016, Mme [D] [X] a fait parvenir à la SCI Aigues Mortes un règlement de 11 513,42 euros au titre de sa dette locative.
Par jugement du 31 mai 2018, le tribunal de grande instance a constaté la formation d’un bail dérogatoire verbal de 23 mois du 1er février 2013 au 31 décembre 2014 et d’un bail commercial de neuf ans à compter du 1er février 2015, a condamné Mme [D] [X] au paiement de 3 302,22 euros au titre des charges de 2011 à 2016 et de 4 513,5 euros au titre de la taxe foncière de 2011 à 2015, soit une somme totale de 7 815,72 euros, et lui a accordé un délai de paiement de 12 mois.
La SCI Aigues Mortes ayant interjeté appel du jugement le 6 août 2018, la cour d’appel a, par arrêt du 20 mai 2020, confirmé ce dernier.
Ayant mis en demeure Mme [D] [X], le 23 février 2021, de payer la somme de 24021,10 euros au titre des loyers et charges impayés arrêtés au 1er février 2021, la SCI Aigues Mortes l’a assignée, par acte d’huissier du 5 janvier 2022, devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins, notamment, de la condamner au paiement de la somme de 26 314,08 euros au titre de la dette locative, de prononcer la résiliation judiciaire du bail litigieux, d’ordonner son expulsion des lieux et de fixer l’indemnité d’occupation à 2 294,38 euros.
Suivant acte sous seing privé du 24 octobre 2022 faisant suite à l’accord de la SCI Aigues Mortes, Mme [D] [X] a cédé son fonds de commerce à la SAS Sabrina La Fée. Par virement effectué à la même date, Mme [D] [X] a réglé à la bailleresse la somme de 15 000 euros.
Par conclusions notifiées le 31 octobre 2023, la SAS Sabrina La Fée est intervenue volontairement à la présente procédure.
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 29 avril 2024, Mme [D] [X] demande au tribunal judiciaire de Paris de :
Recevoir Mme [D] [X] en ces présentes écritures, À titre principal :
Donner acte à Mademoiselle [D] [X] de son acceptation du désistement des demandes de la SCI Aigues Mortes portant sur la résiliation du bail, l’expulsion et la demande de paiement d’une indemnité provisionnelle, Débouter la SCI Aigues Mortes de toutes ses demandes, À titre très subsidiaire :
Accorder un délai de dix-huit mois à Mme [D] [X] pour régler les sommes dues au titre des loyers arriérés, lesquels ne saurait excéder la somme de 58,46 euros, En tout état de cause :
Condamner la société Aigues Mortes à verser à Mademoiselle [D] [X] la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens d’instance.
Au soutien de ses demandes, Mme [D] [X] fait valoir en substance :
Sur le suivi de la dette locative : que la bailleresse ne lui adresse aucune demande de règlement ni de quittance et fait preuve d’inertie dans la production des décomptes, que le décompte locatif est incompréhensible dès lors, qu’il ne permet pas de confronter les avis d’échéance avec les règlements du preneur, qu’il se fonde sur des calculs erronés – concluant à une dette de 14 641,78 euros au lieu de 13 766,28 euros – et qu’il ne prend pas en compte les paiements, par le preneur, des loyers de 2021 et 2022 et de la somme de 11.513,42 euros, Sur le quantum de la dette locative : que les chèques émis par ses soins – portant sur une somme totale de 11 471,90 euros – n’ont pas été encaissés, que la bailleresse ne s’est pas acquittée de la somme de 1 000 euros à laquelle elle a été condamnée au titre de l’article 700 du code de procédure civile, visée par l’ordonnance de référé du 18 janvier 2016, qu’à l’aune de ces deux considérations, la dette locative ne saurait en tout état de cause excéder 58,46 euros,
Aux termes de ses dernières conclusions notifiées par RPVA le 14 juin 2024, la SCI Aigues Mortes demande au tribunal judiciaire de Paris de :
Dire et juger la SCI Aigues Mortes recevable et bien fondée en ses demandes actualisées,Donner acte à la SCI Aigues Mortes qu’elle entend se désister [de] la résiliation judiciaire du bail commercial dont était titulaire Mme [D] [X] et par voie de conséquence de sa demande d’expulsion des lieux loués ainsi que de sa demande de fixation d’une indemnité provisionnelle, Condamner Mme [D] [X] à verser à la SCI Aigues Mortes la somme actualisée, selon décompte, de 10 235,98 euros, au titre des loyers restant impayés à la date du 24 octobre 2022, Débouter Mme [D] [X] de l’ensemble de ses demandes, Dire que l’exécution provisoire de la décision à intervenir est de plein droit, et ne saurait être écartée ou cantonnée pour quelques motifs que ce soit,
Condamner Mme [X] à verser à la SCI Aigues Mortes la somme de 3 500 euros au titre de l’article 700 du Code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens, À titre subsidiaire, désigner un expert-comptable avec pour mission de faire les comptes entre les parties, à compter du 1er janvier 2017 jusqu’à la cession du fonds de commerce, à partir des relevés bancaires fournis par les parties.
Au soutien de ses demandes, la SCI Aigues Mortes fait valoir :
Sur l’existence de la dette : qu’elle est caractérisée dès lors qu’elle est constituée de loyers impayés et de retards chroniques de paiement à compter de janvier 2017, qu’elle est persistante, liquide, certaine et exigible – la jurisprudence ayant affirmé que les « loyers Covid » sont dus – et qu’elle a été formellement constatée par l’arrêt du 20 mai 2020 de la cour d’appel, Sur le suivi de la dette : que, bien qu’aucune quittance de loyer ne soit communiquée au preneur, des états de loyers impayés lui sont transférés, que les décomptes fournis par la bailleresse sont parfaitement compréhensibles, prennent en comptes les règlements du preneur – et notamment le chèque de 11 513,42 euros et celui de 15 000 euros – et ne tiennent leur éventuelle ambiguïté que des retards chroniques de paiement susmentionnés, Sur le quantum de la dette : s’agissant du comportement du bailleur, que les chèques du preneur n’ont pas été délivrés, que ceux reçus ont bien été encaissés, que le preneur ne démontre en rien que les loyers ont été débités de son compte bancaire ; que le preneur ne s’est pas acquitté des sommes visées par le jugement du 31 mai 2018, soit 7 815,72 euros, que la créance actuelle s’élève à 10 235,38 euros.
Aux termes de ses conclusions notifiées le 9 septembre 2024 par RPVA, la SAS Sabrina La Fée demande au tribunal judiciaire de Paris de prendre acte de son désistement à l’instance, la SCI Aigues Mortes s’étant désisté de sa demande de résiliation judiciaire du bail litigieux.
Pour un plus ample exposé des faits de la cause et moyens des parties, il est expressément renvoyé aux écritures déposées dans le dossier, qui ont été contradictoirement débattues à l’audience.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 18 juin 2024 et l’audience de plaidoirie fixée le 23 septembre 2024.
Sur l’intervention volontaire et le désistement de la SAS Sabrina La Fée
L’intervention volontaire de la SAS Sabrina Fée est recevable dès lors qu’elle justifie venir aux droits de Mme [X] en sa qualité de preneur mais il y a lieu de prendre acte de son désistement à l’instance, la SCI Aigues Mortes s’étant désistée de sa demande de résiliation judiciaire du bail litigieux et ce dernier n’étant, de ce fait plus l’objet du litige.
Sur les demandes de la SCI aigues Mortes
A titre liminaire, il y a lieu de constater que la SCI Aigues Mortes entend se désister de ses demandes visant à obtenir la résiliation judiciaire du bail commercial dont était titulaire Mme [D] [X] et par voie de conséquence de sa demande d’expulsion des lieux loués ainsi que de sa demande de fixation d’une indemnité provisionnelle.
Etant entendu qu’il a été satisfait à cette demande de donner acte de ces désistements par leur mention dans le corps de la présente décision, sans qu’il y ait lieu de faire figurer dans le dispositif de celle-ci une formule qui serait dépourvue de toute valeur décisoire.
Sur la dette locative
L’article 1728 du code civil énonce que le preneur est tenu de deux obligations principales, celle d’user de la chose louée raisonnablement et suivant la destination qui lui a été donnée par le bail, ou suivant celle présumée d’après les circonstances, à défaut de convention, et celle de payer le prix du bail aux termes convenus.
L’article 1353 du même code dispose que « celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation ».
En l’espèce, il appartient à la SCI Aigues Mortes qui réclame à Mme [X] le paiement d’une dette locative de 10 235,98 euros, de justifier du montant de sa créance et à Mme [X] de justifier des règlements qu’elle invoque.
La SCI Aigues Mortes produit aux débats un unique décompte établi par ses soins duquel il apparaît qu’est appelée chaque mois la somme de 2 294,38 euros et que la créance dont elle se prévaut correspond à 4 échéances de 2294,38 euros (de juin 2022 à septembre 2022) et une échéance de 1 682,54 euros (pour la période du 1au 24 octobre 2024).
A titre liminaire, le tribunal relève que la somme finale avancée par la bailleresse à hauteur de 10 860,06 euros est erronée dès lors que celle obtenue eu égard aux données produites est de 11 916,48 euros
En outre, cet unique décompte ne met pas le tribunal en mesure de s’assurer du bien fondé du quantum de la demande de la bailleresse dans la mesure où dans la colonne crédit, il est reporté de façon invariable des sommes correspondant à ce même montant de 2294,38 euros, sans aucune date ni référence au n° de chèque ou virement correspondant.
Si les dernières sommes portées au crédit du compte ventilées entre les mois d’octobre 2021 et avril 2022, correspondent au chèque de 15 000 euros adressé le 24 octobre 2022 par Mme [X] et à une échéance de mai 2022 réglée le 5 octobre 2022, pour autant, la bailleresse affirme mais ne justifie pas s’il a été effectivement tenu compte des autres versements justifiés par la preneuse, et dans l’affirmative à quelle date, à savoir, ceux opérés ainsi qu’il suit :
– chèque de 2 294,38 euros du 25 février 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 29 avril 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 26 mai 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 31 juillet 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 31 août 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 30 septembre 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 30 novembre 2021,
– chèque de 2 294,38 euros en date du 23 décembre 2021
– chèque de 2 294,38 euros en date du 31 janvier 2022
– chèque de 2 294,38 euros encaissé le 15 février 2022
– chèque de 2 294,38 euros encaissé le 6 avril 2022
– chèque de 2 294,38 euros encaissé le 18 juillet 2022
– chèque de de 2 294,38 euros encaissé le 20 juillet 2022
Par conséquent, le tribunal ne pourra que débouter la SCI Aigues Mortes de sa demande tendant à condamner Mme [D] [X] au paiement d’une dette locative de 10235,98 euros.
Sur la demande subsidiaire d’une expertise comptable
Les articles 144 et 146 du code de procédure civile disposent que « les mesures d’instruction peuvent être ordonnées en tout état de cause dès lors que le juge ne dispose pas d’éléments suffisants pour statuer » mais ne doivent « en aucun cas [l’être] en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve ». La jurisprudence précise que les juges du fond apprécient souverainement l’opportunité d’ordonner les mesures d’instruction demandées et que « peut se voir opposer sa carence la partie dont les allégations ne s’appuient sur aucun élément précis permettant de lui faire crédit ».
En l’espèce, la bailleresse n’a délivré au preneur aucune quittance de loyer et ne verse au débat qu’un « dernier état récapitulatif des sommes versées par Mme [X] ». S’il en résulte que ce dernier ne repose sur aucun élément tangible et que la bailleresse n’étaye, de ce fait, pas ses allégations, la carence de celle-ci est renforcée par le constat d’une valeur calculée erronée de la dette locative finale et par l’inadéquation de ses propos, de ses demandes et de sa prétention finale avec les valeurs transcrites dans son décompte.
L’imprécision des pièces probatoires n’étant que du fait des parties et ne pouvant être corrigée par la conduite d’une mesure d’instruction, le tribunal déboutera la SCI Aigues Mortes de sa demande subsidiaire tendant à désigner un expert-comptable aux fins de faire les comptes entre les parties à compter du 1er janvier 2017.
Sur les autres demandes
La SCI Aigues Mortes, qui succombe, supportera la charge des dépens. Elle sera déboutée de sa demande formée en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et condamnée sur ce fondement à payer à Mme [D] [X] la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Il n’y a pas lieu d’écarter l’exécution provisoire dont le prononcé est de droit en application des dispositions de l’article 514 du code de procédure civile.
Le tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, en premier ressort, mis à disposition au greffe à la date du délibéré
Déclare recevable l’intervention volontaire de la SAS Sabrina Fée,
Donne acte à la SAS Sabrina Fée de son désistement à d’instance,
Déboute la SCI Aigues Mortes de sa demande en paiement dirigée contre Mme [D] [X],
Déboute la SCI Aigues Mortes de sa demande d’expertise,
Condamne la SCI Aigues Mortes à payer à Mme [D] [X] la somme de 1500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SCI Aigues Mortes aux dépens,
Rejette toutes autres demandes,
Rappelle que l’exécution provisoire est de droit,
Fait et jugé à Paris le 21 Novembre 2024.
Le Greffier La Présidente
Christian GUINAND Sophie GUILLARME
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