Conflit sur la recevabilité et les conséquences d’une suspension procédurale dans une transaction commerciale.

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Conflit sur la recevabilité et les conséquences d’une suspension procédurale dans une transaction commerciale.

L’Essentiel : M. [E] [F] a demandé l’annulation de la vente d’un poney, invoquant une pathologie rendant l’animal inapte à la compétition. Le tribunal a désigné un expert, mais son rapport, remis sans la présence des parties concernées, a conduit à une reprise de l’expertise. M. [F] a ensuite assigné M. [Z] et la société Bailly Vétérinaires pour résiliation de la vente et dommages-intérêts. Malgré un appel interjeté, la cour a déclaré celui-ci sans objet, ayant constaté que le sursis à statuer avait été révoqué avant l’assignation, condamnant M. [F] aux dépens d’appel.

Contexte de la vente du poney

M. [E] [F] a demandé l’annulation de la vente d’un poney effectuée le 16 octobre 2020 avec M. [U] [Z], en raison d’une pathologie de l’animal qui le rendrait inapte à la compétition.

Expertise et procédures judiciaires

Le 13 mai 2022, le président du tribunal judiciaire de Melun a désigné M. [V] comme expert pour examiner le poney. Cependant, l’expert a remis son rapport le 30 décembre 2022 sans la présence de Mme [S] et M. [I], parties concernées par la vente. Le juge a ensuite ordonné le 9 mai 2023 que l’expertise soit reprise en présence de toutes les parties.

Demandes de M. [F]

Le 12 mai 2023, M. [F] a assigné M. [Z] et la société Bailly Vétérinaires pour demander la résiliation de la vente et des dommages-intérêts. Le 12 février 2024, le juge a ordonné un sursis à statuer jusqu’à la remise d’un nouveau rapport d’expertise.

Appel et contestations

Le 19 juin 2024, le premier président de la cour d’appel de Paris a permis à M. [F] d’interjeter appel de l’ordonnance de sursis. M. [F] a ensuite déposé un appel le 26 août 2024, demandant la constatation de la révocation du sursis et la condamnation de M. [Z] à lui verser 5000 euros.

Arguments de la société Bailly Vétérinaires

La société Bailly Vétérinaires a contesté la recevabilité de l’appel, arguant qu’il avait été interjeté tardivement et que M. [F] n’avait pas assigné la clinique. Elle a également demandé que l’appel soit déclaré sans objet en raison de la levée du sursis.

Décisions de la cour

La cour a constaté que le sursis à statuer avait été révoqué avant l’assignation de M. [F], rendant son appel sans objet. En conséquence, M. [F] a été condamné aux dépens d’appel, et les demandes d’indemnité des deux parties sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ont été rejetées.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la recevabilité de l’appel interjeté par M. [F] ?

L’article 380 du code de procédure civile stipule que :

« La décision de sursis peut être frappée d’appel sur autorisation du premier président de la cour d’appel s’il est justifié d’un motif grave et légitime.

La partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue selon la procédure accélérée au fond. L’assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

S’il accueille la demande, le premier président fixe, par une décision insusceptible de pourvoi, le jour où l’affaire sera examinée par la cour, laquelle est saisie et statue comme en matière de procédure à jour fixe ou comme il est dit à l’article 948 selon le cas. »

Dans cette affaire, la société Bailly vétérinaires soutient que l’appel est irrecevable car l’assignation a été délivrée plus d’un mois après l’ordonnance du premier président.

Cependant, il est important de noter que l’article 380 précise que c’est l’assignation devant le premier président qui doit être faite dans le mois suivant la décision de première instance.

Ainsi, l’assignation à jour fixe pour l’audience d’appel n’est pas soumise à ce même délai.

Par conséquent, la demande de constatation de l’irrecevabilité de l’appel ne peut être accueillie.

Quelles sont les conséquences du sursis à statuer ?

Le sursis à statuer, tel que prévu par le code de procédure civile, est une mesure qui suspend l’examen d’une affaire jusqu’à ce qu’une condition soit remplie.

Dans le cas présent, le juge de la mise en état a indiqué, par message RPVA du 5 juillet 2024, que « le sursis à statuer prononcé le 12 février 2024 n’a plus lieu d’être et le dossier est donc régulièrement renvoyé à l’audience de mise en état du lundi 9 septembre 2024 ».

Cela signifie que le sursis a été révoqué avant que M. [F] n’ait assigné, rendant ainsi sa demande d’infirmer la décision de sursis sans objet.

Il est donc inutile d’infirmer une décision qui a déjà été annulée.

Les parties doivent alors se préparer à la suite de la procédure sans l’entrave d’un sursis.

Quelles sont les demandes d’indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ?

L’article 700 du code de procédure civile dispose que :

« La cour peut, dans sa décision, condamner la partie perdante à payer à l’autre partie une somme au titre des frais irrépétibles.

Cette somme est fixée en équité. »

Dans cette affaire, tant M. [F] que la société Bailly vétérinaires ont sollicité une indemnité sur ce fondement.

Cependant, la cour a jugé que l’équité ne commandait pas d’appliquer l’article 700 dans ce cas précis.

Les deux parties ont donc été déboutées de leur demande d’indemnité.

Cela souligne que l’octroi d’une indemnité au titre de l’article 700 n’est pas automatique et dépend de l’appréciation de la cour sur les circonstances de l’affaire.

Ainsi, la cour a décidé de ne pas faire droit aux demandes d’indemnité, condamnant M. [F] aux dépens d’appel.

RÉPUBLIQUE FRAN’AISE

AU NOM DU PEUPLE FRAN’AIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 10

ARRÊT DU 21 NOVEMBRE 2024

(n° , 4 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/14889 – N° Portalis 35L7-V-B7I-CJ6EE

Décision déférée à la Cour : Ordonnance du 12 Février 2024 – Conseiller de la mise en état de [Localité 8]- RG n° 24/00036

APPELANT

Monsieur [E] [F]

né le 16 Août 1979

[Adresse 3]

[Localité 5]

Représenté et assisté à l’audience par Me Nicolas PORTE, avocat au barreau de PARIS, toque : J108

INTIMÉES

S.E.L.A.R.L. BAILLY VETERINAIRES, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée et assisté par Me Stéphane GAILLARD de la SELAS GTA, avocat au barreau de PARIS, toque : R075, substitué à l’audience par Me Thomas MULLER, avocat au barreau de PARIS,

E.U.R.L. [Z] [U], prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés ès qualités audit siège

[Adresse 2]

[Adresse 7]

[Localité 6]

Défaillante, régulièrement assignée le 06 septembre 2024 par procès-verbal de remise à l’étude

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été plaidée le 12 Septembre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Mme Marie-Odile DEVILLERS, Présidente

Mme Valérie MORLET, Conseillère

Mme Anne ZYSMAN, Conseillère

qui en ont délibéré, un rapport a été présenté à l’audience par Madame Marie-Odile DEVILLERS dans les conditions prévues par l’article 804 du code de procédure civile.

Greffier, lors des débats : Mme Ekaterina RAZMAKHNINA

ARRÊT :

– défaut

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Marie-Odile DEVILLERS, Présidente et par Catherine SILVAN, greffier présent lors de la mise à disposition.

***

Rappel des faits et de la procédure :

M. [E] [F] sollicite l’annulation de la vente d’un poney, réalisée le 16 octobre 2020 auprès de M. [U] [Z], entrepeneur individuel, au motif que l’animal serait atteint d’une pathologie le rendant impropre à la pratique de la compétition.

Par ordonnance de référé du 13 mai 2022, le président du tribunal judiciaire de Melun, saisi par M. [F], a désigné M. [V] en qualité d’expert pour examiner le poney.

Par ordonnance du 10 mars 2023, le juge des référés, à la demande de M. [Z], a déclaré l’ordonnance précédente commune et opposable à Mme [H] [S] et à M. [U] [I], respectivement vendeur du poney et intervenant à la vente.

Par acte du 12 mai 2023, M [F] a fait assigner M [Z] et la société Bailly Vétérinaires en demandant la résiliation de la vente et des dommages et intérêts.

L’expert a déposé son rapport le 30 décembre 2022, sans que Mme [S] et à M. [I] y aient été conviés.

Le juge chargé du contrôle des expertises a, par décision du 9 mai 2023, demandé à l’expert de reprendre ses opérations au contradictoire de toutes les parties en cause.

Par ordonnance du 12 février 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Melun a, à la demande de M [Z], ordonné un sursis à statuer dans la procédure opposant M. [F] à M.[Z] et à la société Bailly vétérinaires, jusqu’au dépôt du rapport de l’expert après réunion au contradictoire de toutes les parties mises en cause et a réservé les dépens.

Par ordonnance du 19 juin 2024, le premier président de la cour d’appel de Paris a autorisé M. [F] à interjeter appel immédiat de cette ordonnance et a fixé l’affaire à l’audience du 12 septembre 2024 pour que la chambre 4-10 statue comme en matière de procédure à jour fixe.

Par déclaration du 26 août 2024, M. [E] [F] a interjeté appel de cette ordonnance rendue le 12 février 2024 et par actes des 6 septembre 2024 et 9 septembre 2024 a respectivement fait assigner M. [Z] et la société Bailly vétérinaires devant la cour pour l’audience du 12 septembre 2024 en demandant à la cour de :

– à titre principal qu’elle constate que le tribunal judiciaire de Melun a, par lui-même, d’ores et déjà révoqué sa décision de sursis à statuer en application de l’article 379 du code de procédure civile,

– à titre subsidiaire, qu’elle réforme la décision du tribunal judiciaire de Melun et rejette la demande de sursis à statuer sollicitée par M. [Z],

– en tout état de cause, qu’elle condamne M. [Z] à régler à M. [F] la somme de 5000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par dernières conclusions notifiées par voie électronique le 11 septembre 2024, la société Bailly vétérinaires demande à la cour de :

In limine litis :

– Déclarer l’appel interjeté par M. [F] irrecevable dans la mesure où il a été interjeté le 26 août 2024, soit plus d’un mois après l’ordonnance du 19 juin 2024 rendue par le premier président de la cour d’appel ;

– Déclarer l’appel interjeté par M. [F] caduc, ce dernier n’ayant jamais assigné la clinique Bailly vétérinaires ;

En tout état de cause :

– Juger que, du fait de la levée du sursis critiqué par le juge de la mise en état de [Localité 8], l’appel interjeté par M. [F] est sans objet ;

– Condamner en conséquence M. [F] au paiement de la somme de 2.000 euros au bénéfice de la SELARL Bailly vétérinaires au titre des frais irrépétibles, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de Maître Stéphane Gaillard, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’EURL [Z] [U] n’a pas constitué avocat.

SUR CE

Sur la recevabilité de l’appel

Aux termes de l’article 380 du code de procédure civile: La décision de sursis peut être frappée d’appel sur autorisation du premier président de la cour d’appel s’il est justifié d’un motif grave et légitime.

La partie qui veut faire appel saisit le premier président, qui statue selon la procédure accélérée au fond. L’assignation doit être délivrée dans le mois de la décision.

S’il accueille la demande, le premier président fixe, par une décision insusceptible de pourvoi, le jour où l’affaire sera examinée par la cour, laquelle est saisie et statue comme en matière de procédure à jour fixe ou comme il est dit à l’article 948 selon le cas.

La société Bailly vétérinaires soutient que l’appel est irrecevable parce que l’assignation à jour fixe délivrée pour l’audience aux fins de statuer sur l’appel sur le sursis a été délivrée plus de un mois après l’ordonnance du premier président.

Or il apparaît résulte très clairement de l’article 380 que c’est l’assignation devant le premier président qui doit être délivrée dans le mois de la décision de première instance ordonnant le sursis, la phrase suivante étant relative aux obligations après la décision du premier président, et ne précisant aucun délai pour assigner, ni même pour faire appel.

Il n’y a donc pas lieu de faire droit à la demande de constatation de l’irrecevabilité de l’appel.

Sur le sursis

Par message RPVA du 5 juillet 2024, le juge de la mise en état du tribunal judiciaire de Melun a écrit aux parties que ‘le sursis à statuer prononcé le 12 février 2024 n’a plus lieu d’être et le dossier est donc régulièrement renvoyé à l’audience de mise en état du lundi 9 septembre 2024″.

La demande d’infirmer la décision de sursis n’a donc plus lieu d’être et il est inutile d’infirmer la décision ordonnant un sursis qui a d’ores et déjà été révoqué.

Sur les autres demandes

Le sursis étant déjà révoqué au moment où M [F] a assigné les dépens d’appel seront à sa charge.

M. [F] et la société Bailly Vétérinaires sollicitent tous deux une indemnité sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

L’équité ne commande pas de faire application del’article 700 du code de procédure civile et les deux parties seront déboutées de leurs demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Constate que le juge de la mise en état de [Localité 8] a révoqué le sursis à statuer qu’il avait prononcé par ordonnance du12 février 2024 et que l’appel est sans objet,

Condamne M. [F] aux dépens d’appel.

LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,


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