Type de juridiction : Tribunal judiciaire
Juridiction : Tribunal judiciaire de Bordeaux
Thématique : Responsabilité bancaire et vigilance face aux opérations atypiques
→ RésuméContexte de l’affaireMadame [W] [G], épouse [Y], et Madame [R] [Y] sont clientes de la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique (BPACA). Madame [W] [G] détient un compte personnel et elles partagent un compte joint. Entre septembre 2021 et février 2022, Madame [W] [G] a effectué neuf virements totalisant 366 000 euros pour acheter des bitcoins. En janvier 2022, elles ont reçu 350 000 euros de la vente d’un bien immobilier. En février 2022, elles ont déposé plainte pour escroquerie, affirmant que les virements n’étaient pas des investissements réels. Procédure judiciaireLe 20 avril 2022, Madame [W] [G] et Madame [R] [Y] ont assigné la BPACA en réparation de leur préjudice. Elles demandent la reconnaissance de leurs droits, le déboutement de la banque de ses demandes, et des indemnités pour préjudice financier, moral, ainsi que des frais de justice. La BPACA, quant à elle, conteste toute responsabilité, arguant qu’elle a respecté ses obligations légales et que les virements ont été effectués à la demande expresse de Madame [W] [G]. Arguments des demanderessesLes demanderesses soutiennent que la banque a manqué à son obligation de vigilance en ne contrôlant pas les opérations de paiement. Elles affirment que la banque aurait dû signaler les anomalies liées aux virements, notamment leur montant élevé et leur fréquence. Elles insistent sur le fait que la banque a une obligation de renseignement et de contrôle, surtout en cas d’opérations atypiques. Arguments de la défenderesseLa BPACA défend sa position en affirmant qu’elle n’a pas manqué à son devoir de vigilance. Elle précise que les obligations de vigilance renforcée ne s’appliquent qu’à la lutte contre le blanchiment d’argent et que les virements ont été effectués conformément aux instructions de Madame [W] [G]. La banque souligne également qu’elle a informé sa cliente des risques de fraude et qu’elle n’était pas tenue de s’immiscer dans les décisions d’investissement de ses clients. Décision du tribunalLe tribunal a débouté Madame [W] [G] et Madame [R] [Y] de leurs demandes de réparation pour préjudice financier et moral. Il a jugé que la BPACA avait respecté ses obligations et que les virements avaient été effectués sur instruction de Madame [W] [G]. Les demanderesses ont été condamnées aux dépens et à verser une somme à la banque au titre de l’article 700 du code de procédure civile. L’exécution provisoire de la décision a été ordonnée. |
N° RG 22/02996 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WQJZ
CINQUIÈME CHAMBRE
CIVILE
SUR LE FOND
63D
N° RG 22/02996 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WQJZ
Minute n° 2024/00608
AFFAIRE :
[W] [G] épouse [Y], [R] [Y]
C/
S.A. BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE
Grosses délivrées
le
à
Avocats : la SELARL ABR & ASSOCIES
la SELARL ACT
Me Christophe FOUQUIER
Me Maude HUPIN
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE BORDEAUX
CINQUIÈME CHAMBRE CIVILE
JUGEMENT DU 19 NOVEMBRE 2024
COMPOSITION DU TRIBUNAL
Lors des débats et du délibéré
Mme Angélique QUESNEL, Juge,
Statuant à Juge Unique
Greffier, lors des débats et du prononcé
Isabelle SANCHEZ, Greffier
DÉBATS
A l’audience publique du 17 Septembre 2024
JUGEMENT
Contradictoire
En premier ressort
Par mise à disposition au greffe, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du Code de procédure civile
DEMANDERESSES
Madame [W] [G] épouse [Y]
née le [Date naissance 1] 1991 à [Localité 10]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Maître Julie AMIGUES de la SELARL ACT, avocats au barreau de BORDEAUX, Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS
Madame [R] [Y]
née le [Date naissance 3] 1988 à [Localité 9]
de nationalité Française
[Adresse 6]
[Localité 5]
représentée par Maître Julie AMIGUES de la SELARL ACT, avocats au barreau de BORDEAUX, Me Maude HUPIN, avocat au barreau de PARIS
N° RG 22/02996 – N° Portalis DBX6-W-B7G-WQJZ
DÉFENDERESSE
S.A. BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE
[Adresse 2]
[Localité 4]
représentée par Maître Laurent BABIN de la SELARL ABR & ASSOCIES, avocats au barreau de BORDEAUX, Me Christophe FOUQUIER, avocat au barreau de PARIS
Madame [W] [G], épouse [Y] et Madame [R] [Y] sont clientes auprès de la société anonyme Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique (ci-après dénommée « BPACA »). Madame [W] [Y] est titulaire d’un compte personnel de dépôt ouvert sous le n°[XXXXXXXXXX07] dans les livres de la BPACA.
Madame [W] [Y] et Madame [R] [Y] sont titulaires d’un compte joint de dépôt ouvert sous le n°[XXXXXXXXXX08] dans les livres de la BPACA.
Entre le 29 septembre 2021 et le 2 février 2022, Madame [W] [G], épouse [Y] a ordonné depuis son compte personnel neuf virements pour un montant total de 366 000€ dans le but d’acheter des bitcoins.
Le 24 janvier 2022, elles ont perçu sur leur compte le fruit de la vente de leur bien immobilier, soit la somme de 350 000€.
Le 21 février 2022, Madame [W] [G], épouse [Y] et Madame [R] [Y] déposent plainte pour escroquerie car les virements effectués n’étaient pas de réels investissements.
C’est dans ce contexte que Madame [W] [G], épouse [Y] et Madame [R] [Y] ont assigné le 20 avril 2022, la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique pour réparation du préjudice subi.
Aux termes de leurs dernières conclusions régulièrement notifiées le 10 octobre 2023 par voie électronique, Madame [W] [G], épouse [Y] et Madame [R] [Y] demandent sur le fondement des articles 1104, 1231-1 du code civil et L561-5 et suivants du code monétaire et financier au tribunal de :
Déclarer Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] bien fondées en leurs demandes, fins et conclusions,Débouter la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,Condamner la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE à payer à Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] la somme de 366.000 euros au titre du préjudice financier,Condamner la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE à payer à Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] la somme de 2.000 euros au titre du préjudice moral,Condamner la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE à payer à Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] la somme de 4.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,Condamner la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE à payer aux entiers dépens,Ordonner l’exécution provisoire. A l’appui de leurs demandes,
Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] font valoir à titre liminaire qu’il est important de rappeler les obligations et règles des établissements bancaires en matière de contrôle et d’exécution des opérations de paiement. Les banques sont tenues de procéder à un contrôle constant des opérations de paiement effectuées par leurs clients. Elle soutiennent que la responsabilité de la banque peut être engagée par son client sur plusieurs fondements juridiques.
En premier lieu, Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] exposent que la responsabilité de la banque peut être engagée par son client, non seulement sur le fondement de la responsabilité civile contractuelle classique, mais aussi en vertu d’un manquement aux obligations de vigilance, de prudence et de contrôle spécifiées dans le code monétaire et financier. Elles soulignent que la banque met en place deux types de contrôle : le contrôle “simple” et le contrôle “renforcé”. Ces mécanismes de contrôles sont activés lors de toute “opération particulièrement complexe, d’un montant inhabituellement élevé ou lorsque l’opération ne semble pas avoir de justification économique ou présente un objet illicite”. Par ailleurs, la banque dispose également du droit de refuser l’exécution d’une opération de paiement, quel qu’en soit la nature, à condition de motiver sa décision auprès de ses clients. En conséquence, affirmer que la banque est liée par une obligation de résultat en matière d’exécution des opérations de paiement est erronée. En outre, elles font valoir que les établissements bancaires privilégient l’exécution des opérations de paiement au détriment de leur obligation de contrôle. Aucune disposition légale et réglementaire n’exclut la possibilité de contester des opérations effectuées par un client, victime d’actes frauduleux. Ainsi, si le banquier omet de signaler des faits inquiétants, sa responsabilité peut être engagée sur le fondement de l’article 1231-1 du code civil ainsi que sur un manquement spécifique prévu aux articles L561-6 et suivants du code monétaire et financier.
Dans le cas présent, elles soutiennent que la banque n’a pas fait preuve de vigilance au regard des placements atypiques opérés par sa cliente. Compte-tenu des règles de droit applicable, un tel contrôle et une telle vigilance auraient dû être exercés.
En second lieu, Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] font valoir que le devoir de non ingérence de la banque dans les affaires de ses clients ne la dispense pas de son obligation de vigilance lorsque le fonctionnement d’un compte bancaire présente des caractéristiques inhabituelles ou anormales. Cette obligation impose aux établissements bancaires de contrôler la régularité de toute opération bancaire présentant une anomalie apparente. Les anomalies peuvent être de nature matérielle et intellectuelle. Elles précisent que certaines circonstances, telles que le montant inhabituel de l’opération, la fréquence des opérations litigieuses, l’identité inconnue du bénéficiaire des fonds ou encore la destination des fonds vers des pays spécifiques, constituent des anomalies de fonctionnement qui devraient attirer l’attention de la banque. Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] considèrent que la banque a failli à son obligation de contrôle renforcé dans le traitement des virements intervenus entre janvier 2021 et février 2022. Ces virements, pour des montants inhabituels et répétitifs sur une période rapprochée et à destination de plateformes de cryptomonnaie, ont entraîné un préjudice financier pour elles. Ces transactions représentaient une rupture avec les modalités de gestion habituelle du compte. De plus, les ordres de virement comportaient de nombreuses anomalies tant matérielles qu’intellectuelles, que la banque, en tant que professionnelle des transactions financières, auraient du signaler à ses clientes.
En outre, Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] soutiennent que la banque est tenue d’une obligation de renseignement préalable en présence d’anomalies apparentes. Elles considèrent que la banque doit refuser d’exécuter un ordre de virement présentant des caractéristiques évidentes d’anomalie tant qu’elle n’a pas obtenu toutes les informations nécessaires concernant l’opération en question. Elles précisent que les ordres de virement en cause montrent que la banque n’a pas cherché à se renseigner sur la destination des fonds, l’objet des opérations, ni sur l’identité des bénéficiaires, ce qui constitue un manquement à son devoir de vigilance.
Enfin, Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] font valoir que les fautes commises par la banque ont contribué directement à leur préjudice financier subi.
Aux termes de ses dernières conclusions régulièrement notifiées le 28 novembre 2023 par voie électronique, la BPACA demande sur le fondement des articles 1231-1 et suivants et 1353 du code civil, puis des articles L133-3 et suivants du code monétaire et financier au tribunal de:
A titre principal :
Débouter Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] en l’ensemble de leurs prétentions, fins et demandes dirigées à l’encontre de la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE pour les motifs exposés dans les présentes conclusions.A titre subsidiaire :
Si par exceptionnel, le Tribunal estimait que la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE a commis une faute,
Ordonner un partage de responsabilité avec Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] et dire et juger qu’en pareille hypothèse, la responsabilité de la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE sera très minoritaire au regard des circonstances et des faits litigieux.Dire et juger que seule la perte de chance est indemnisable et qu’en l’espèce cette perte de chance est inexistante, la réalité des prétendus détournements subis n’étant d’ailleurs pas démontréeDébouter Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] de toutes ses demandes, fins et conclusions formées à l’encontre de la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE.En tout état de cause :
Ecarter en toute hypothèse l’exécution provisoire de la décision à intervenir ou subsidiairement, la subordonner à la constitution par Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] d’une garantie bancaire émanant d’un établissement bancaire de premier ordre et d’un montant suffisant pour répondre de toutes restitutions en cas d’infirmation du jugementCondamner in solidum Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] à payer à la BANQUE POPULAIRE AQUITAINE CENTRE ATLANTIQUE une somme de 5.000,00 € sur le fondement de l’article 700 du CPC.Condamner in solidum Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] aux entiers dépens qui seront recouvrés par Maître Laurent BABIN, Avocat au Barreau de BORDEAUX, conformément à l’article 699 du CPC.En défense,
La banque fait valoir en premier lieu, qu’elle n’a pas manqué à son devoir de vigilance. Elle souligne que les réglementations citées par les demanderesses ne s’appliquent pas aux faits en cause. Les articles L561-5, L561-5-1 et L561-6 du code monétaire et financier imposent une obligation de vigilance renforcée aux organismes financiers mais uniquement dans le cadre de la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme. Ces dispositions ont pour seul objectif de détecter des transactions liées à des fonds issus de trafics de stupéfiants ou d’activités criminelles organisées. La banque précise que l’obligation spéciale de déclaration et d’information en matière de blanchiment d’argent exige que le banquier ait des motifs raisonnables de soupçonner son client, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
La banque soutient en second lieu que l’article L133-10 du code monétaire et financier ne lui permet de refuser une opération de paiement que dans des circonstances limitées, notamment lorsque le compte n’est pas suffisamment approvisionné, ou lorsque l’ordre de paiement est incomplet ou contient des informations erronées. Cet article ne remet pas en cause ni le devoir de non-immixtion du banquier, ni l’obligation pour le prestataire de service de paiement de procéder au virement à bref délai. En effet, le prestataire de service de paiement a une obligation de non-immixtion dans les affaires de son client et n’a pas à refuser un ordre de paiement dont il est établi qu’il émane du titulaire du compte au motif que le montant ou la destination seraient inhabituels. Dans le cas présent, il n’incombait pas à la BPACA de contrôler le bien fondé, l’opportunité ou encore la destination des virements ordonnés et autorisés par son client. Elle rappelle que Madame [Y] a autorisé et ordonné les neuf virements litigieux, d’un montant total de 366 000€ vers des comptes ouverts en son nom via la plate-forme “crypto.com”. Conformément aux articles L133-3 et L133-21 du code monétaire et financier, dès lors que Madame [Y] a elle-même ordonné les virements litigieux en fournissant les identifiants uniques pour désigner les bénéficiaires, elle ne peut engager la responsabilité de la banque en raison d’un prétendu manquement à son devoir de vigilance.
Par ailleurs, la BPACA précise qu’elle a exercé une vigilance accrue au-delà de ses obligations légales en informant sa cliente dès le 29 septembre 2021 des risques de fraude potentiels. Elle rappelle également que cette dernière a signé un document dans lequel, elle reconnaît avoir été avertie des risques de fraude et s’engage à les assumer. Par conséquent, les arguments avancés par Madame [Y] concernant les prétendues anomalies affectant l’opération sous-jacente des ordres de virements qu’elle a expressément autorisés sont juridiquement et factuellement inopérants et doivent être rejetés.
En outre, la BPACA soutient qu’elle n’a commis aucune faute en sa qualité de simple teneur de compte courant. Elle précise qu’elle n’est pas intervenue en tant que prestataire de services d’investissement au sens de l’article L531-1 du code monétaire et financier, et que Madame [W] [Y] s’est limitée à l’ouverture de comptes courants. Dès lors, elle n’était tenue à aucune obligation d’information ou de conseil concernant les investissements financiers envisagés par sa cliente. Il est établi que Madame [W] [Y] a été contactée par un cabinet de gestion nommé MONEXE PAXFUL, seul responsable des choix d’investissements.
La banque en troisième lieu conteste l’argumentation fondée sur les prétendues anomalies affectant les virements autorisés par Madame [W] [Y]. Elle rappelle que, face à une anomalie matérielle ou intellectuelle apparente, un banquier manque à son devoir de surveillance et d’information s’il ne prend pas les mesures nécessaires pour prévenir la réalisation des opérations. Cependant, le 1er octobre 2021, Madame [Y] a reconnu avoir été avisée des risques potentiels de fraude au titre des deux premiers virements pour un montant de 10 000€ et 5 000€, et a malgré cela confirmé chaque demande de virement. La banque soutient qu’il est infondé de lui reprocher un manque d’alerte concernant les risques liés aux virements réalisés, d’autant plus qu’aucune anomalie apparente n’était identifiable, uniquement parce qu’elle avait pris l’initiative de mettre en garde sa cliente. Le fait d’avoir fait signer à Madame [W] [Y] des décharges de responsabilités pour l’inciter à la prudence ne constitue pas une faute de la part de la banque. Le devoir de vigilance du banquier ne s’applique que si une opération présente une anomalie apparente. Ce devoir consiste simplement à alerter au préalable son client avant d’exécuter l’opération, sans obliger le banquier à refuser de procéder si le client, après avoir été parfaitement informé des risques, souhaite tout de même poursuivre.
La banque souligne également que les virements effectués n’ont entraîné aucun découvert de compte, ce qui exclut la présence d’une anomalie en soi.
Enfin, la banque estime que si par exceptionnelle la responsabilité de la banque devait être retenue, il est démontré que les négligences et fautes de Mesdames [Y] sont à l’origine exclusive du préjudice qu’elles revendiquent. De plus, elles ne démontrent pas davantage le lien de causalité entre le préjudice dont elles se prévalent et les prétendues fautes reprochées à la banque. En matière de responsabilité, il est établi qu’une victime ne peut engager la responsabilité de tiers fautifs lorsque ses propres fautes constituent la cause exclusive du sinistre et absorbent toute éventuelle faute d’un tiers. En pareille hypothèse, en l’absence de lien de causalité entre la faute reprochée au tiers et le dommage subi, toute action en responsabilité est infondée. Dans le cas d’espèce, les fautes de Madame [Y] excluent toute prétendue faute de la banque. En effet, cette dernière a choisi d’investir des sommes d’argent importantes en contractant avec une société découverte sur sa page facebook. Elle a donc commis des fautes graves et manifestes en acceptant de procéder à ces virements. Elle est donc seule responsable des préjudices qu’elle prétend avoir subis. La perte financière invoquée découlent directement et de manière déterminante des virements que Madame [Y] a effectués, sans précaution et, ce malgré les mises en garde de la banque.
S’agissant des préjudices allégués, la banque soutient que sa cliente ne démontre pas la réalité du préjudice invoquée. Et, si reconnaissance d’un préjudice, il ne pourrait s’agir que d’une perte de chance d’avoir pu éviter le risque réalisé. Or, en l’espèce, cette perte de chance est inexistante puisque Madame [W] [Y] était dès l’origine informée du caractère hautement risqué de ses investissements. De plus, malgré les avertissements de la banque sur le risque potentiel de fraude, elle a choisi de procéder aux virements litigieux.
En outre, les demandes formulées par Madame [Y] au titre d’un prétendu préjudice moral à hauteur de 2.000 € sont non seulement totalement injustifiées mais en outre, particulièrement infondées dans la mesure où Madame [W] [Y], de par ses nombreuses imprudences, est à l’origine exclusive du préjudice qu’elle revendique.
Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions des parties, il est renvoyé aux écritures visées ci-dessus conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.
La mise en état a été clôturée par ordonnance en date du 3 juillet 2024 et l’affaire fixée à plaider à l’audience du 17 septembre 2024 date à laquelle elle a été mise en délibéré au 19 novembre 2024, par mise à disposition au greffe.
PAR CES MOTIFS
Le tribunal,
Déboute Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] de leur demande de réparation du préjudice financier subi,
Déboute Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] de leur demande de dommages et intérêts au titre du préjudice moral,
Condamne in solidum Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] aux entiers dépens de la présente instance qui seront recouvrés par Maître Laurent BABIN, Avocat au Barreau de BORDEAUX, conformément à l’article 699 du code de procédure civile,
Condamne in solidum Madame [W] [G] épouse [Y] et Madame [R] [Y] à payer à la Banque Populaire Aquitaine Centre Atlantique la somme de 1 500€ au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Rappelle l’exécution provisoire de droit,
Rejette toute demande plus ample ou contraire.
La présente décision est signée par Mme Angélique QUESNEL, Juge , et Isabelle SANCHEZ, Greffier.
LE GREFFIER LE PRESIDENT
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