Conditions de maintien en soins psychiatriques : enjeux de la protection des personnes vulnérables

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Conditions de maintien en soins psychiatriques : enjeux de la protection des personnes vulnérables

L’Essentiel : Le 19 novembre 2024, le Tribunal judiciaire de Rennes a examiné la demande de prolongation de l’hospitalisation complète de Monsieur [U] [D], admis le 11 novembre suite à une tentative de suicide. Le directeur du Centre Hospitalier a justifié cette demande par des certificats médicaux attestant d’un risque de passage à l’acte auto-agressif. Bien que la défense ait contesté la notion de péril imminent, le tribunal a conclu à la nécessité de maintenir l’hospitalisation en raison des idées suicidaires persistantes. La décision est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours.

Contexte de l’affaire

Le 19 novembre 2024, une audience publique a eu lieu au Tribunal judiciaire de Rennes, présidée par Guy Magnier, Vice-Président chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de liberté. Le directeur du Centre Hospitalier Guillaume Regnier a demandé la poursuite de l’hospitalisation complète de Monsieur [U] [D], actuellement en soins psychiatriques.

Admission en hospitalisation complète

Monsieur [U] [D] a été admis en hospitalisation complète le 11 novembre 2024, suite à une tentative de suicide. La demande d’hospitalisation a été formulée par un tiers, conformément aux dispositions du Code de la Santé Publique, qui stipule que l’hospitalisation sans consentement est possible lorsque les troubles mentaux rendent impossible le consentement du patient et nécessitent des soins immédiats.

Certificats médicaux et péril imminent

Le conseil de Monsieur [U] [D] a contesté la caractérisation du péril imminent, arguant que les certificats médicaux initiaux ne justifiaient pas suffisamment cette situation. Cependant, les certificats médicaux établis par deux médecins, dont l’un n’exerçait pas dans l’établissement, ont attesté d’un risque de passage à l’acte auto-agressif et d’une absence de critique du geste suicidaire, confirmant ainsi la nécessité de l’hospitalisation.

Décision du tribunal

Après examen des certificats médicaux et des circonstances de l’admission, le tribunal a conclu que le péril imminent était suffisamment caractérisé. La décision a été prise de maintenir l’hospitalisation complète de Monsieur [U] [D], en raison de la persistance des idées suicidaires et du risque grave pour son intégrité physique.

Voie de recours

La décision du tribunal est susceptible d’appel dans un délai de 10 jours à compter de sa notification. Les parties concernées ont été informées des modalités de contestation de cette ordonnance.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation complète d’une personne atteinte de troubles mentaux ?

Selon l’article L.3212-1 du Code de la Santé Publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement que si deux conditions sont réunies :

1° Ses troubles rendent impossible son consentement ;

2° Son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier.

La demande d’admission doit être présentée par un membre de la famille ou une personne agissant dans l’intérêt du malade, à l’exclusion des personnels soignants de l’établissement.

Cette demande doit être manuscrite et signée, et accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours, attestant que les conditions sont remplies.

Le premier certificat doit être établi par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement, tandis que le second peut être rédigé par un médecin de l’établissement. Les médecins ne doivent pas être parents ou alliés jusqu’au quatrième degré.

Quel est le rôle du juge dans la procédure d’hospitalisation complète ?

L’article L.3211-12-1 du Code de la Santé Publique stipule que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure.

Cette décision doit intervenir avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission. La saisine est accompagnée d’un avis motivé d’un psychiatre.

Le juge a le pouvoir d’examiner les circonstances exactes de l’admission du patient, au-delà des seuls certificats médicaux, afin de vérifier l’existence d’un péril imminent au moment de l’hospitalisation.

Comment est caractérisé le péril imminent dans le cadre de l’hospitalisation complète ?

Le péril imminent est caractérisé par l’existence d’un risque grave d’atteinte à l’intégrité physique ou à la vie du patient.

Dans l’affaire examinée, les certificats médicaux établis indiquaient un « risque de passage auto-agressif » et une « absence totale de critique du geste » après une tentative de suicide.

Ces éléments, corroborés par des certificats médicaux ultérieurs, ont permis de conclure à la persistance des idées suicidaires et à un discours pessimiste quant à l’avenir du patient.

Ainsi, le juge a considéré que les certificats médicaux étaient suffisamment précis pour établir l’existence d’un péril imminent, justifiant la poursuite de l’hospitalisation complète.

Quelles sont les voies de recours contre la décision d’hospitalisation complète ?

Conformément aux articles R.3211-18 et suivants du Code de la Santé Publique, la décision d’hospitalisation complète est susceptible d’être contestée par la voie de l’appel.

L’appel doit être interjeté dans un délai de 10 jours à compter de la notification de la décision.

La déclaration d’appel doit être motivée et transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’Appel, ou par courriel.

Cette procédure permet au patient ou à ses représentants de contester la décision de maintien en hospitalisation complète devant une juridiction supérieure.

TRIBUNAL
JUDICIAIRE DE RENNES

SERVICE DES HOSPITALISATIONS
SOUS CONTRAINTE

c
N° RG 24/08130 – N° Portalis DBYC-W-B7I-LIZ2
Minute n° 24/01127

PROCÉDURE DE SAISINE OBLIGATOIRE
HOSPITALISATION COMPLÈTE

Article L.3211-12-1 et suivants , R.3211-28 et suivants
du Code de la Santé Publique
Loi N° 2011-803 du 5 Juillet 2011
ORDONNANCE DE MAINTIEN
EN HOSPITALISATION COMPLÈTE

Le 19 novembre 2024 ;

Devant Nous, Guy MAGNIER,, Vice-Président chargé du contrôle des mesures privatives et restrictives de liberté prévues par le code de la santé publique au Tribunal judiciaire de RENNES,

Assisté de Marion GUENARD, Greffier,

Siégeant en audience publique,

DEMANDEUR :

M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER GUILLAUME REGNIER

Non comparant, ni représenté

DÉFENDEUR :

Monsieur [U] [D]
né le 19 Août 1962 à [Localité 3]
[Adresse 2]
[Localité 1]

et actuellement en soins psychiatriques au Centre Hospitalier de [Localité 5]

Présent, assisté de Me Antoine HELLIO

En l’absence du Ministère public qui a communiqué ses observations par écrit,

Vu la requête présentée par M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER GUILLAUME REGNIER, en date du 15 novembre 2024, reçue au greffe le 15 novembre 2024, aux fins de voir statuer sur la poursuite de l’hospitalisation complète ;

Vu les convocations adressées le 15 novembre 2024 à M. [U] [D], à M. LE DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER GUILLAUME REGNIER,  ;

Vu l’avis d’audience adressé le 15 novembre 2024 à M. [H] [D], tiers ;

Vu le procès-verbal d’audience en date du 19 novembre 2024 ;

Vu l’article L.3211-12 du code de la Santé Publique ;

Motifs de la décision

Selon l’article L3212-1 du Code de la Santé Publique, une personne atteinte de troubles mentaux ne peut faire l’objet de soins psychiatriques sur la décision du directeur d’un établissement mentionné à l’article L3222-1 que lorsque les deux conditions suivantes sont réunies :
– ses troubles mentaux rendent impossibles son consentement,
– son état mental impose des soins immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète soit d’une surveillance médicale régulière justifiant d’une prise en charge sous une autre forme incluant des soins ambulatoires.

Selon l’article L3211-12-1 du même code, l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le magistrat du siège du tribunal judiciaire préalablement saisi par le directeur de l’établissement n’ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de 12 jours à compter de l’admission. Cette saisine est accompagnée d’un avis motivé rendu par un psychiatre.

Sur la procédure :

– Sur le moyen tiré du défaut de caractérisation suffisant du péril imminent

[U] [D] a été admis le 11 novembre 2024 en hospitalisation complète à la demande d’un tiers à la suite d’une tentative de suicide.
Le conseil de [U] [D] fait valoir que les certificats médicaux initiaux ne caractériseraient pas suffisamment le péril imminent.

Aux termes de l’article L.3212-1 du Code de santé publique « Une personne atteinte de troubles mentaux ne peut être hospitalisée sans son consentement sur demande d’un tiers que si :

1° Ses troubles rendent impossible son consentement ;
2° Son état impose des soins immédiats assortis d’une surveillance constante en milieu hospitalier.
La demande d’admission est présentée soit par un membre de la famille du malade, soit par une personne susceptible d’agir dans l’intérêt de celui-ci, à l’exclusion des personnels soignants dès lors qu’ils exercent dans l’établissement d’accueil.

Cette demande doit être manuscrite et signée par la personne qui la formule. Si cette dernière ne sait pas écrire, la demande est reçue par le maire, le commissaire de police ou le directeur de l’établissement qui en donne acte. Elle comporte les nom, prénoms, profession, âge et domicile tant de la personne qui demande l’hospitalisation que de celle dont l’hospitalisation est demandée et l’indication de la nature des relations qui existent entre elles ainsi que, s’il y a lieu, de leur degré de parenté.

La demande d’admission est accompagnée de deux certificats médicaux datant de moins de quinze jours et circonstanciés, attestant que les conditions prévues par les deuxième et troisième alinéas sont remplies.

Le premier certificat médical ne peut être établi que par un médecin n’exerçant pas dans l’établissement accueillant le malade ; il constate l’état mental de la personne à soigner, indique les particularités de sa maladie et la nécessité de la faire hospitaliser sans son consentement. Il doit être confirmé par un certificat d’un deuxième médecin qui peut exercer dans l’établissement accueillant le malade. Les deux médecins ne peuvent être parents ou alliés, au quatrième degré inclusivement, ni entre eux, ni des directeurs des établissements mentionnés à l’article L. 3222-1, ni de la personne ayant demandé l’hospitalisation ou de la personne hospitalisée. »

Le juge est autorisé à rechercher, au-delà des seules considérations du certificat médical initial, les circonstances exactes de l’admission du patient permettant de vérifier l’existence d’un péril imminent au moment de l’hospitalisation ;

En l’espèce le certificat médical initial critiqué, établi par le 10 novembre 2024 à 19H46 par le docteur [B] [P] au service des urgences de l’hôpital de [Localité 4], indique « risque de passage auto-agressif », « anosagnosie », « ambivalence et le second certificat établi le même jour à 20H30 par le docteur [Y] [L] relève la tentative de suicide du jour par pendaison dans un contexte de tentatives de suicide antérieures, ainsi qu’une « absence totale de critique du geste avec persistance des idées de mort et de l’intentionnalité » les médecins ayant privilégié le recours à la procédure en cas de péril imminent à la demande d’un tiers.

En outre, le certificat médical dit de « 24 heures » rédigé le 11 novembre 2024 à 12H45 indique la persistance des idées suicidaires ; le certificat dit des « 72H00 » marque une « persistance du discours pessimiste quant à son avenir » ;

Dès lors, il convient de considérer au regard de ces éléments, suffisamment précis pour établir l’existence d’un risque de mise en danger du patient, en l’occurrence un risque grave d’atteinte à son intégrité physique et à sa vie, que la notion de péril imminent pour la santé du patient, au demeurant expressément visée dans le certificat critiqué, apparaît suffisamment caractérisée.

Il s’ensuit que le moyen sera rejeté.

En l’espèce l’ensemble des certificats médicaux attestent que l’hospitalisation complète de M. [U] [D] doit se poursuivre, suivant le régime des soins sans consentement. La procédure est régulière et il convient donc de faire droit à la requête du Directeur de l’Etablissement.

PAR CES MOTIFS

Après débat contradictoire, en audience publique, statuant par décision contradictoire mise à disposition au greffe et en premier ressort :

Autorisons le maintien de la mesure d’hospitalisation complète de M. [U] [D].

Notifions qu’en application des dispositions des articles R.3211-18 et suivants du code de la Santé publique, la présente décision est susceptible d’être contestée par la voie de l’appel, interjeté dans un délai de 10 JOURS à compter de sa notification, devant le Premier Président de la Cour d’Appel de RENNES, par une déclaration motivée transmise par tout moyen au greffe de la Cour d’Appel ou par courriel : [Courriel 6].

LE GREFFIER LE JUGE

Copie transmise par voie électronique au Directeur
de l’établissement
Le 19 novembre 2024
Le greffier,

Copie transmise par voie électronique
à M. [U] [D], par l’intermédiaire du directeur de l’établissement
Le 19 novembre 2024
Le greffier,
Copie de la présente ordonnance a été adressée
au tiers demandeur à l’hospitalisation
Le 19 novembre 2024
Le greffier,

Copie transmise par voie électronique à l’avocat de M. [U] [D]
Le 19 novembre 2024
Le greffier,
Copie transmise par voie électronique à M. Le Procureur de la République
Le 19 novembre 2024
Le greffier,


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