Hospitalisation psychiatrique : enjeux de consentement et de protection des personnes vulnérables

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Hospitalisation psychiatrique : enjeux de consentement et de protection des personnes vulnérables

L’Essentiel : Le 16 novembre 2024, Mme [I] [T] a été admise en soins psychiatriques à la demande de sa mère, en raison de troubles du comportement. Le 20 novembre, le directeur général a saisi le tribunal pour prolonger son hospitalisation. Lors de l’audience du 25 novembre, Mme [I] [T] n’a pu être entendue, son état psychique ne le permettant pas. Représentée par son avocat, elle a vu sa situation évaluée. Malgré une amélioration notée, le tribunal a décidé de maintenir l’hospitalisation complète pour garantir sa sécurité et celle de son entourage, conformément à l’article L. 3212-1 du code de la santé publique.

Admission en soins psychiatriques

Le 16 novembre 2024, le directeur du centre hospitalier de [Localité 8] a décidé d’admettre Mme [I] [T] en soins psychiatriques, suite à une demande de sa mère. Cette décision a été motivée par des troubles du comportement de la patiente, qui la mettaient en danger.

Saisine du tribunal

Le 20 novembre 2024, le directeur général de l’établissement a saisi le tribunal pour obtenir la poursuite de l’hospitalisation complète de Mme [I] [T]. Conformément à la législation, une copie de cette saisine a été envoyée à la patiente, au ministère public, ainsi qu’aux autres parties concernées, en vue de l’audience prévue le 25 novembre 2024.

Audition et état de la patiente

Lors de l’audience, Mme [I] [T] n’a pas pu être entendue en raison d’un certificat médical indiquant que son état psychique ne le permettait pas. Elle a été représentée par son avocat, Me Eugénie DUBOIS-TOUBE. Aucune observation écrite n’a été déposée par les parties.

Motifs de la décision

L’article L. 3212-1 du code de la santé publique stipule que les soins psychiatriques peuvent être administrés sans consentement si les troubles mentaux de la personne rendent ce consentement impossible. L’hospitalisation complète doit être validée par le juge des libertés et de la détention dans un délai de douze jours suivant l’admission.

État clinique de la patiente

Mme [I] [T] a été hospitalisée en raison de divers troubles, notamment de l’agitation, des propos incohérents et des troubles du sommeil. Un avis médical du 20 novembre a noté une amélioration de son état, mais a recommandé de poursuivre l’hospitalisation pour garantir la stabilité de sa situation.

Conclusion de l’ordonnance

L’état de la patiente s’étant récemment dégradé, le tribunal a jugé prématuré de lever la surveillance médicale. La poursuite de l’hospitalisation complète a été ordonnée pour assurer la sécurité de Mme [I] [T] et de son environnement, ainsi que pour élaborer un programme de soins approprié. Les dépens de l’instance resteront à la charge de l’État.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions légales pour l’hospitalisation sans consentement en soins psychiatriques ?

L’article L. 3212-1 du code de la santé publique précise les conditions dans lesquelles une personne atteinte de troubles mentaux peut être hospitalisée sans son consentement.

Cet article stipule que :

« Une personne atteinte de troubles mentaux peut faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement, par décision du directeur d’un établissement de santé autorisé en psychiatrie, lorsque, cumulativement, ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins psychiatriques immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’autres modalités contraintes de prise en charge thérapeutique détaillées dans un programme de soins. »

Ainsi, pour qu’une hospitalisation sans consentement soit légale, il faut que :

1. La personne présente des troubles mentaux.
2. Ces troubles rendent impossible son consentement.
3. Son état nécessite des soins psychiatriques immédiats.

Ces conditions sont essentielles pour garantir le respect des droits des patients tout en assurant leur sécurité et celle des autres.

Quel est le rôle du juge des libertés et de la détention dans le cadre de l’hospitalisation complète ?

L’article L. 3211-12-1 du code de la santé publique définit le rôle du juge des libertés et de la détention dans le cadre de l’hospitalisation complète.

Cet article stipule que :

« L’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission en soins psychiatriques prononcée à la demande d’un tiers. »

Cela signifie que :

1. Le directeur de l’établissement doit saisir le juge dans un délai de douze jours après l’admission.
2. Le juge doit statuer sur la poursuite de l’hospitalisation complète.

Ce mécanisme vise à protéger les droits des patients en assurant un contrôle judiciaire sur les décisions d’hospitalisation, garantissant ainsi que les mesures prises sont justifiées et appropriées.

Quels sont les droits de la personne hospitalisée en soins psychiatriques ?

Les droits de la personne hospitalisée en soins psychiatriques sont protégés par plusieurs dispositions légales, notamment celles du code de la santé publique.

L’article L. 3211-2 du code de la santé publique énonce que :

« Toute personne a le droit de recevoir des soins adaptés à son état de santé, dans le respect de sa dignité et de ses droits. »

Cela implique que :

1. La personne hospitalisée doit être traitée avec dignité.
2. Elle a le droit d’être informée sur son état de santé et les soins qui lui sont prodigués.
3. Elle peut être assistée par un avocat lors des procédures judiciaires.

Ces droits sont essentiels pour garantir que les patients reçoivent des soins appropriés tout en respectant leur autonomie et leur dignité.

Quelles sont les conséquences d’une hospitalisation complète sur la prise en charge des patients ?

L’hospitalisation complète a des conséquences significatives sur la prise en charge des patients, comme le souligne l’ordonnance rendue dans le cas de Mme [I] [T].

La décision de poursuivre l’hospitalisation complète est justifiée par plusieurs facteurs :

1. L’état psychique de la patiente doit être stabilisé avant d’envisager une sortie.
2. Une rupture du protocole thérapeutique pourrait entraîner une réapparition des troubles majeurs, mettant en danger la patiente et son environnement.

Ainsi, la poursuite de l’hospitalisation complète est souvent nécessaire pour garantir la sécurité du patient et la continuité des soins, permettant d’élaborer un programme de soins adapté à ses besoins.

Quelles sont les implications financières de l’hospitalisation complète pour les patients ?

Les implications financières de l’hospitalisation complète sont régies par les articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, qui stipulent que :

« Les dépens de la présente instance resteront à la charge de l’Etat. »

Cela signifie que :

1. Les frais liés à l’hospitalisation complète ne sont pas à la charge de la patiente.
2. L’État prend en charge les coûts associés à cette mesure.

Cette disposition vise à garantir que les patients ne soient pas pénalisés financièrement en raison de leur état de santé mentale, assurant ainsi un accès équitable aux soins psychiatriques.

– N° RG 24/01775 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDYAC
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE MEAUX
──────────

[Adresse 9]

ORDONNANCE
statuant sur la poursuite d’une mesure de soins psychiatriques
en hospitalisation complète

Dossier N° RG 24/01775 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDYAC – Mme [I] [T]
Ordonnance du 25 novembre 2024
Minute n°24/ 1769

AUTEUR DE LA SAISINE :

Le DIRECTEUR DU CENTRE HOSPITALIER de [Localité 8],
agissant par M. [P] [K] , directeur du grand hôpital de l’[5]
élisant domicile en cette qualité au centre hospitalier de [Localité 8] :
[Adresse 3],

non comparant, ni représenté.

PERSONNE FAISANT L’OBJET DES SOINS :

Mme [I] [T]
née le 06 Octobre 1987 à [Localité 6] (BELGIQUE)
demeurant [Adresse 2]
en hospitalisation complète depuis le 16 novembre 2024 au centre hospitalier de [Localité 8], sans son consentement, pour des soins psychiatriques décidés par le directeur de l’établissement à la demande d’un tiers en urgence.

non comparante, représentée par Me Eugénie DUBOIS-TOUBE, avocat au barreau de Meaux, commis d’office par le bâtonnier,

TIERS À L’ORIGINE DE L’ADMISSION :

Madame [D] [F]
née le 05 Juillet 1959
[Adresse 1]
[Localité 4]

demandeur des soins psychiatriques en sa qualité de mère de la personne hospitalisée.

non comparante ;

PARTIE JOINTE :

Monsieur le PROCUREUR DE LA RÉPUBLIQUE
près le tribunal judiciaire de MEAUX,
ayant domicile élu au palais de justice de Meaux :
[Adresse 9]

absent à l’audience

Nous, Catherine MORIN-GONZALEZ, magistrat du siège du tribunal judiciaire de Meaux, assistée de Béatrice BOEUF, greffier, avons rendu la présente ordonnance.

FAITS ET PROCÉDURE :

Le 16 novembre 2024, le directeur du centre hospitalier de [Localité 8] a prononcé l’admission en soins psychiatriques de Mme [I] [T], à la demande de la mère de la personne hospitalisée, en relevant l’existence de troubles du comportement l’exposant à un risque grave d’atteinte à son intégrité.

Par courriel reçu au greffe le 20 novembre 2024, le directeur général de l’établissement de santé a saisi le magistrat du siège de ce tribunal aux fins de poursuite de l’hospitalisation complète dont Mme [I] [T] fait l’objet sans interruption depuis son admission.

Conformément aux dispositions de l’article R. 3211-11 du code de la santé publique, copie de la saisine a été adressée à la personne qui fait l’objet des soins et au ministère public, lesquels, ainsi que le directeur du centre hospitalier et le tiers à l’origine de l’admission, ont tous été régulièrement avisés de la date, de l’heure, du lieu et des modalités de l’audience fixée le 25 novembre 2024.

Au vu d’un certificat médical en date du 25 novembre 2024, émanant d’un psychiatre ne participant pas à la prise en chargede la patiente au sein du centre hospitalier de [Localité 8] et indiquant que l’état psychique de la patiente ne permettait pas son audition par le juge des libertés et de la détention, Mme [I] [T] n’a pas pu être entendue et a été représentée par son avocat.

L’audience a été tenue à la date et à l’heure prévues dans la salle spécialement aménagée sur l’emprise du Centre Hospitalier de [Localité 7].

Me Eugénie DUBOIS-TOUBE, avocat de la personne hospitalisée, a été entendu en ses observations.

Aucune des parties n’a déposé d’observations écrites.

– N° RG 24/01775 – N° Portalis DB2Y-W-B7I-CDYAC
La présente ordonnance a été :
– prononcée publiquement le 25 novembre 2024, par mise à disposition de la décision au greffe du tribunal, avis en ayant été donné à l’issue des débats aux personnes présentes ou représentées
– signée par le juge ayant présidé aux débats et par le greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

MOTIFS DE LA DÉCISION :

L’article L. 3212-1 du code de la santé publique prévoit qu’une personne atteinte de troubles mentaux peut faire l’objet de soins psychiatriques sans son consentement, par décision du directeur d’un établissement de santé autorisé en psychiatrie, lorsque, cumulativement, ses troubles mentaux rendent impossible son consentement et que son état mental impose des soins psychiatriques immédiats assortis soit d’une surveillance médicale constante justifiant une hospitalisation complète, soit d’autres modalités contraintes de prise en charge thérapeutique détaillées dans un programme de soins.

L’article L. 3211-12-1 du même code énonce que l’hospitalisation complète d’un patient ne peut se poursuivre sans que le juge des libertés et de la détention, préalablement saisi par le directeur de l’établissement, n’ait statué sur cette mesure avant l’expiration d’un délai de douze jours à compter de l’admission en soins psychiatriques prononcée à la demande d’un tiers.

Il résulte des pièces et certificats médicaux joints à la requête que Mme [I] [T] a été hospitalisée le 16 novembre 2024 à la suite de troubles du comportement au domicile à type d’agitation psychomotrice, d’une logorrhée, de propos incohérents, d’un contexte probable de mal observance de traitement, d’une insomnie depuis quelques jours, d’une humeur exaltée, d’une irritabilité, d’une tachypsychie, et d’une tendance à la rationalisation des troubles. L’avis motivé émanant d’un psychiatre de l’établissement d’accueil, en date du 20 novembre 2024, faisant suite aux certificats de 24 heures et 72 heures ayant noté un état clinique en voie de normalisation avec rétablissement du sommeil, la disparition rapide des propos délirants et désorganisés initialement constatés ; toutefois, une diminution des sédatifs et un dosage du traitement sont nécessaires avant d’envisager probablement prochainement la sortie, a préconisé la poursuite de l’hospitalisation complète de cette patiente pour s’assurer de la pérénité de l’évolution favorable de sa situation.

A ce jour, il résulte du certification de situation parvenu au greffe à 12h37 que l’état de la patiente s’est dégradé (contexte d’agitation récente).

Dès lors, la mainlevée d’une surveillance médicale constante serait prématurée avant que l’état psychique soit stabilisé et qu’il soit acquis que Mme [I] [T] adhère durablement à un protocole de soins. Cette précaution est un préalable nécessaire à l’élaboration d’un programme de soins organisant la prise en charge de la patiente selon des modalités autres que l’hospitalisation complète. Une rupture intempestive du protocole thérapeutique initié ferait inévitablement ressurgir des troubles majeurs susceptibles de mettre la personne hospitalisée et son environnement en danger.

En conséquence, la poursuite de soins psychiatriques sous la forme d’une hospitalisation complète s’impose actuellement.

Conformément aux dispositions des articles R. 93 et R. 93-2 du code de procédure pénale, les dépens de la présente instance resteront à la charge de l’Etat.

PAR CES MOTIFS,

Statuant par ordonnance susceptible d’appel, prononcée publiquement par sa mise à disposition au greffe le 25 novembre 2024,

ORDONNONS la poursuite de la mesure d’hospitalisation complète pour soins psychiatriques dont Mme [I] [T] fait l’objet sans son consentement au centre hospitalier de [Localité 8] (Seine-et-Marne) ;

LAISSONS les dépens à la charge de l’Etat.

Le greffier Le juge


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