Évaluation du taux d’incapacité et conditions d’accès à l’allocation pour les personnes handicapées.

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Évaluation du taux d’incapacité et conditions d’accès à l’allocation pour les personnes handicapées.

L’Essentiel : Madame [W] [P] a déposé une demande d’Allocation aux adultes handicapés (AAH) le 24 septembre 2021, qui a été rejetée le 14 avril 2022 en raison d’un taux d’incapacité jugé inférieur à 50 %. Après un recours administratif, la CDAPH a confirmé sa décision. En janvier 2023, elle a saisi le tribunal judiciaire de Versailles, qui a entendu l’affaire le 17 septembre 2024. Le tribunal a rappelé que pour bénéficier de l’AAH, un taux d’incapacité d’au moins 50 % est requis. La demande de Madame [W] [P] a été rejetée, et elle a été condamnée aux dépens.

Demande d’Allocation aux Adultes Handicapés

Le 24 septembre 2021, Madame [W] [P] a soumis une demande d’Allocation aux adultes handicapés (AAH) à la Maison départementale des personnes handicapées (MDPH) des Yvelines. Sa demande a été rejetée le 14 avril 2022 par la Présidente de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH), en raison d’un taux d’incapacité jugé inférieur à 50 %.

Recours Administratif et Audience

Suite à ce rejet, Madame [W] [P] a engagé un Recours administratif préalable obligatoire (RAPO) le 27 mai 2022. La CDAPH a confirmé sa décision le 24 novembre 2022. En janvier 2023, elle a saisi le tribunal judiciaire de Versailles pour contester cette décision. L’affaire a été entendue le 17 septembre 2024, où Madame [W] [P] a maintenu sa contestation et a exprimé ses difficultés à travailler à temps plein.

Arguments de la MDPH

La MDPH des Yvelines a défendu sa position en affirmant que Madame [W] [P] ne présentait pas d’atteinte à son autonomie individuelle et qu’elle ne souffrait pas de troubles importants dans les trois domaines de la vie. Elle a également précisé que le taux d’incapacité de Madame [W] [P] était inférieur à 50 %, et que sa situation pouvait être réévaluée si son état de santé se dégradait.

Évaluation du Taux d’Incapacité

Le tribunal a rappelé que pour bénéficier de l’AAH, il faut un taux d’incapacité d’au moins 50 % ou des restrictions substantielles et durables pour l’accès à l’emploi. Les éléments fournis par Madame [W] [P] n’ont pas suffi à établir une atteinte significative à son autonomie. Les évaluations ont montré qu’elle était capable de gérer ses activités quotidiennes sans aide extérieure.

Décision du Tribunal

Le tribunal a confirmé la décision de la MDPH, rejetant la demande d’AAH de Madame [W] [P] en raison de son taux d’incapacité inférieur à 50 %. Il a également précisé que si son état de santé se dégradait, elle pouvait soumettre une nouvelle demande. Madame [W] [P] a été condamnée aux dépens de l’instance.

Appel de la Décision

Le tribunal a indiqué que tout appel de cette décision devait être interjeté dans le mois suivant la notification de celle-ci, sous peine de forclusion.

Q/R juridiques soulevées :

Quelle est la condition d’attribution de l’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) selon le Code de la Sécurité Sociale ?

L’Allocation aux Adultes Handicapés (AAH) est régie par les articles L. 821-1, L. 821-2 et D. 821-1 du Code de la Sécurité Sociale.

Selon l’article L. 821-1, pour prétendre à l’AAH, il est nécessaire de présenter, à la date de la demande :

– Soit un taux d’incapacité supérieur ou égal à 80 %,
– Soit un taux d’incapacité compris entre 50 et 79 % et de justifier, du fait de son handicap, d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.

L’article L. 821-2 précise que le taux d’incapacité de 50 % à 79 % correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne.

Ces troubles peuvent être repérés dans la vie de la personne ou nécessiter des compensations spécifiques pour préserver sa vie sociale, mais l’autonomie pour les actes élémentaires de la vie quotidienne doit être conservée.

En revanche, un taux d’incapacité de 80 % indique des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne, avec une atteinte de l’autonomie individuelle.

Comment le tribunal a-t-il évalué le taux d’incapacité de Madame [W] [P] ?

Le tribunal a évalué le taux d’incapacité de Madame [W] [P] en se basant sur les éléments fournis par la MDPH et les certificats médicaux.

Il a constaté que, selon l’article D. 821-1, pour bénéficier de l’AAH, il faut justifier d’une incapacité significative.

Dans le cas de Madame [W] [P], l’équipe pluridisciplinaire a estimé que son taux d’incapacité était inférieur à 50 %.

Les éléments médicaux, notamment le certificat du docteur [O], indiquaient que Madame [W] [P] avait des difficultés, mais celles-ci n’étaient pas suffisantes pour établir des troubles importants dans les trois sphères de la vie : domestique, sociale et professionnelle.

Le tribunal a également noté que, bien que la situation financière de Madame [W] [P] se soit dégradée, cela n’affectait pas l’évaluation de son taux d’incapacité.

Quelles sont les conséquences de la décision du tribunal sur la demande d’AAH de Madame [W] [P] ?

La décision du tribunal a des conséquences directes sur la demande d’AAH de Madame [W] [P].

En confirmant le taux d’incapacité attribué par la MDPH comme étant inférieur à 50 %, le tribunal a rejeté la demande d’AAH.

Cela signifie que Madame [W] [P] ne peut pas bénéficier de l’allocation, car elle ne remplit pas les critères d’incapacité requis par les articles L. 821-1 et L. 821-2 du Code de la Sécurité Sociale.

De plus, le tribunal a précisé que si l’état de santé de Madame [W] [P] s’est dégradé, elle a la possibilité de déposer une nouvelle demande auprès de la MDPH pour une réévaluation de son taux d’incapacité.

Enfin, conformément à l’article 696 du Code de procédure civile, Madame [W] [P] sera tenue aux dépens de l’instance, ce qui signifie qu’elle devra assumer les frais liés à la procédure judiciaire.

Pôle social – N° RG 23/00034 – N° Portalis DB22-W-B7H-RCQE

Copies certifiées conformes  délivrées,
le :
à :
– [W] [P]
– CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
N° de minute :

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VERSAILLES
POLE SOCIAL

CONTENTIEUX MEDICAL DE LA SECURITE SOCIALE

JUGEMENT RENDU LE MARDI 19 NOVEMBRE 2024

N° RG 23/00034 – N° Portalis DB22-W-B7H-RCQE

Code NAC : 88M

DEMANDEUR :

Mme [W] [P]
[Adresse 2]
[Localité 4]

comparante

DÉFENDEUR :

CONSEIL DEPARTEMENTAL DES YVELINES
Service juridique de la MDPH
[Adresse 1]
[Localité 3]

représentée par Mme [B] [J], munie d’un pouvoir régulier

COMPOSITION DU TRIBUNAL :

Catherine LORNE, Vice-présidente
Monsieur Jean-Luc PESSEY, Représentant des employeurs et des travailleurs indépendants
Madame [I] [C], Représentant les salariés

Madame Marie-Bernadette MELOT, Greffière

DEBATS : A l’audience publique tenue le 17 Septembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 19 Novembre 2024.
Pôle social – N° RG 23/00034 – N° Portalis DB22-W-B7H-RCQE

EXPOSE DU LITIGE

Le 24 septembre 2021, Madame [W] [P], née le 19 avril 1966, a déposé une demande d’Allocation aux adultes handicapés (AAH) auprès de la Maison départementale des personnes handicapées (ci-après MDPH) des Yvelines.
Par décision datée du 14 avril 2022, la Présidente de la Commission des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (ci-après CDAPH), dont dépend la MDPH, a rejeté sa demande d’AAH en raison d’un taux d’incapacité inférieur à 50 %.
Le 27 mai 2022, Madame [W] [P] a effectué un Recours administratif préalable obligatoire (RAPO).
Par décision prise à l’occasion de sa séance du 24 novembre 2022, la Présidente de la CDAPH a confirmé la décision du 14 avril 2022 rejetant la demande d’AAH.
Par requête expédiée le 04 janvier 2023, Madame [W] [P] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Versailles en contestation de cette décision.
À défaut de conciliation entre les parties, l’affaire a été appelée et retenue à l’audience du 17 septembre 2024.
Lors de l’audience, Madame [W] [P], comparante en personne, maintient sa contestation du taux d’incapacité attribué par la MDPH et demande le bénéfice de l’AAH.
En substance, elle expose aimer son travail mais ne pas pouvoir travailler à temps plein, qu’elle est obligée d’être assise. Elle ajoute rencontrer des difficultés depuis que sa fille qui l’aidait, est partie en province pour ses études, et qu’elle a du mal à boucler ses fins de mois du fait qu’elle ne travaille que 130 heures par mois.
En défense, la MDPH des Yvelines, représentée par son mandataire, développe ses conclusions visées par le greffe à l’audience et demande au tribunal de :
– dire le recours introduit par Madame [W] [P] mal fondé ;
Et par conséquent,
– constater que Madame [W] [P] ne présentait pas d’atteinte de son autonomie individuelle lors de sa demande ;
– constater que Madame [W] [P] ne présentait pas de troubles importants dans les trois domaines de la vie lors de sa demande ;
– dire qu’en tout état de cause, Madame [W] [P] ne présentait pas au jour de sa demande, de Restriction Substantielle et Durable pour l’Accès à l’Emploi ;
– confirmer, par conséquent, la décision de la CDAPH en date du 24 novembre 2022 soit le rejet de la demande d’Allocation aux Adultes Handicapés ;
– rejeter, pour le surplus, l’intégralité des demandes de Madame [W] [P].
La MDPH, après avoir rappelé qu’il convient de bien distinguer un taux d’incapacité, lié aux conséquences du handicap et le taux d’invalidité qui est lié à la pathologie en elle-même, fait valoir que Madame [W] [P] est autonome dans la réalisation de tous les actes de la vie quotidienne; que l’équipe pluridisciplinaire a considéré que Madame [W] [P] ne présentait pas, au jour de sa demande, des troubles importants dans l’ensemble des activités des trois sphères de la vie : domestique, sociale et professionnelle, du fait de son handicap à savoir une broche dans le fémur droit.
Elle ajoute que si l’état de santé de Madame [W] [P] s’est dégradé depuis sa précédente demande d’AAH qui date de septembre 2021 elle peut en formuler une nouvelle pour voir réévaluer son taux.
À l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 19 novembre 2024 par mise à disposition au greffe.

MOTIFS DE LA DÉCISION

En préambule, il convient de rappeler que le tribunal n’est pas tenu de statuer sur les demandes de “constatations” ou de “dire et juger” qui ne sont pas, hors les cas prévus par la loi, des prétentions en ce qu’elles ne sont pas susceptibles d’emporter des conséquences juridiques mais constituent en réalité des moyens invoqués par les parties au soutien de leurs demandes.
Sur l’évaluation du taux d’incapacité et la demande d’attribution de l’allocation aux adultes handicapés:
En application des articles L. 821-1, L. 821-2 et D. 821-1 du code de la sécurité sociale, pour prétendre à l’AAH, il est nécessaire de présenter à la date de la demande :
– soit un taux d’incapacité supérieur ou égal à 80 %,
– soit un taux d’incapacité compris de 50 à 79 % et de justifier, du fait de son handicap, d’une restriction substantielle et durable pour l’accès à l’emploi.
Un taux de 50 % à 79 % correspond à des troubles importants entraînant une gêne notable dans la vie sociale de la personne. L’entrave peut soit être concrètement repérée dans la vie de la personne, soit compensée afin que cette vie sociale soit préservée, mais au prix d’efforts importants ou de la mobilisation d’une compensation spécifique. Toutefois, l’autonomie est conservée pour les actes élémentaires de la vie quotidienne.
Un taux de 80 % correspond à des troubles graves entraînant une entrave majeure dans la vie quotidienne de la personne avec une atteinte de son autonomie individuelle. Cette autonomie individuelle est définie comme l’ensemble des actions que doit mettre en œuvre une personne, vis-à-vis d’elle-même, dans la vie quotidienne. Dès lors qu’elle doit être aidée totalement ou partiellement, ou surveillée dans leur accomplissement, ou ne les assure qu’avec les plus grandes difficultés, le taux de 80 % est atteint. C’est également le cas lorsqu’il y a déficience sévère avec abolition d’une fonction.
Le guide-barème pour l’évaluation des déficiences et incapacités des personnes handicapées codifié à l’annexe 2-4 du code de l’action sociale et des familles permet la reconnaissance d’un taux inférieur à 50% lorsque les déficiences présentées par la personne constituent des troubles modérés n’entraînant pas une gêne notable dans sa vie sociale.
Ainsi, il y a lieu d’apprécier si, au regard des éléments fournis, la demanderesse établit une atteinte de son autonomie individuelle, étant souligné qu’elle n’a versé aucune pièce à l’appui de son recours, mise à part un attestation du docteur [O], rhumatologue, délivrée le 03 septembre 2021 selon laquelle Mme [W] [P] présente une broche dans le fémur droit contre indiquant un travail en station débout prolongée, ainsi que des pièces justifiant que sa situation financière se soit dégradée après cette opération.
L’organisme a estimé le taux d’incapacité de Madame [W] [P] comme étant inférieur à 50 %. La MDPH produit le certificat médical du docteur [O] joint à la demande de prestations.

S’agissant de la sphère domestique : Sur le périmètre de marche, il est mentionné l’aide d’une canne en extérieur et il est fait état d’un périmètre infini pour la marche à plat et d’une durée de 20 minutes pour une marche en descente.
Au niveau de la mobilité, Madame [W] [P] ne présente pas de difficultés pour se déplacer à l’intérieur, mais la marche et le déplacement à l’extérieur sont réalisés avec difficulté à l’extérieur mais sans aide humaine
Concernant la cognition / capacité cognitive et sur l’entretien personnel, tous les items sont côtés en A signifiant que cela est réalisé sans difficulté et sans aide extérieure.
Sur la vie quotidienne et vie domestique, Madame [W] [P] gère son hygiène, son traitement médical, le suivi des soins, fait les courses ; fait ses démarches administratives, peut gérer son budget (tous côtés en A). Elle présente des difficultés mais sans aide humaine pour assurer les tâches ménagères et préparer les repas(côté en B).
S’agissant de la sphère sociale : Il ressort du certificat que la case “vie familiale” a été cochée.
S’agissant du retentissement professionnel : les items ne sont pas remplis étant observé que Madame [W] [P] justifie qu’elle est toujours en activité professionnelle à raison de 130 heures par mois dans le cadre d’un contrat de travail à temps partiel à durée indéterminée signé le 06 septembre 2021.
Au vu de ces éléments, l’équipe pluridisciplinaire a considéré que Madame [W] [P] rencontrait des difficultés pouvant entraîner des limitations d’activité. Cependant ces difficultés ont une incidence légère à modérée sur son autonomie sociale et professionnelle correspondant à un taux d’incapacité inférieur à 50% ne permettant pas de bénéficier de l’Allocation aux Adultes Handicapés.
Il sera observé que s’il n’est ni contesté ni contestable que la situation financière de Madame [W] [P] s’est dégradée à la suite de son opération dans la mesure où elle a démissionné de son précédent emploi et cherché un travail plus proche de chez elle, ces considérations sont sans effet sur l’attribution de l’AAH.
Ainsi, Madame [W] [P] ne présente pas des troubles dans les trois aspects de la vie quotidienne, à savoir professionnel, social et domestique, et les éléments médicaux présents au dossier ne suffisent pas à établir que ces troubles sont importants. Elle ne peut donc pas bénéficier d’un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, ni a fortiori d’un taux supérieur à 80 %.
Dès lors, il convient de confirmer le taux d’incapacité attribué à Madame [W] [P] par la MDPH des Yvelines comme étant inférieur à 50 % et, par conséquent, de la débouter de sa demande d’attribution de l’AAH.
À toutes fins, si l’état de santé de Madame [W] [P] s’est dégradé depuis sa précédente demande, elle peut déposer une nouvelle demande auprès de la MDPH.

Sur les dépens :
Madame [W] [P], succombant à l’instance, sera tenue aux éventuels aux dépens conformément à l’article 696 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le Tribunal, statuant publiquement, par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et mis à disposition au greffe le 19 novembre 2024 :

Dit bien fondée la décision de la maison départementale des personnes handicapées des Yvelines en date du 14 avril 2022, confirmée le 24 novembre 2022, ayant refusé l’allocation aux adultes handicapées en raison de son taux d’incapacité inférieur à 50 % ;
Rejette le recours de Madame [W] [P] ;
Laisse les éventuels dépens à la charge de Madame [W] [P].

Dit que tout appel de la présente décision doit, à peine de forclusion, être interjeté dans le mois de la réception de la notification de la présente décision

La Greffière La Présidente

Madame Marie-Bernadette MELOT Catherine LORNE


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