L’Essentiel : Mme [D] [I] a été recrutée par la SARL AMIA en tant que secrétaire commerciale en CDI le 4 décembre 2018. Le 30 mars 2021, elle a été licenciée pour un prétendu refus de communiquer avec la clientèle. Contestant ce licenciement, elle a saisi le Conseil de Prud’hommes le 11 mai 2021, demandant des indemnités. Le 23 septembre 2022, le Conseil a condamné la SARL AMIA à lui verser 5 676,69 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse. Suite à l’appel de la SARL AMIA et à sa liquidation judiciaire, la cour a confirmé le jugement initial.
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Embauche de Mme [D] [I]La SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales (SARL AMIA) a recruté Mme [D] [I] en tant que secrétaire commerciale en contrat à durée indéterminée (CDI) à partir du 4 décembre 2018. Notification de licenciementLe 30 mars 2021, Mme [D] [I] a été informée de son licenciement pour cause réelle et sérieuse, invoquant son refus de communiquer avec la clientèle et une diminution de la sonnerie de son téléphone. Saisine du Conseil de Prud’hommesLe 11 mai 2021, Mme [D] [I] a saisi le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France pour contester son licenciement, demandant des indemnités pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ainsi que des dommages et intérêts pour préjudice moral. Jugement du Conseil de Prud’hommesLe 23 septembre 2022, le Conseil de Prud’hommes a condamné la SARL AMIA à verser à Mme [D] [I] 5 676,69 euros pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et a débouté Mme [D] [I] du surplus de sa demande. Appel de la SARL AMIALe 26 octobre 2022, la SARL AMIA a interjeté appel du jugement, contestant les condamnations financières et soutenant que le licenciement avait une cause réelle et sérieuse. Ordonnance de clôtureLe 18 juillet 2024, une ordonnance de clôture a été prononcée, fixant l’affaire à une audience de mise en état. Liquidation judiciaire de la SARL AMIALe 14 décembre 2023, la SARL AMIA a informé la cour de sa liquidation judiciaire, prononcée par le tribunal de commerce de Fort-de-France le 3 octobre 2023. Constitution des parties en liquidationLe greffe de la Cour a convoqué les parties concernées par la procédure collective, mais ni le liquidateur ni l’Unedic n’ont constitué avocat pour poursuivre l’instance. Irrecevabilité des demandes de la SARL AMIALa cour a constaté que la SARL AMIA, en liquidation judiciaire, n’avait pas qualité pour agir seule, et que le liquidateur devait être mis en cause pour que la procédure soit régulière. Confirmation du jugement de première instanceEn l’absence de demandes recevables du liquidateur, la cour a confirmé le jugement du Conseil de Prud’hommes, qui reprend son plein effet, laissant les dépens à la charge du Trésor Public. |
Q/R juridiques soulevées :
Quelle est la portée de l’article L641-9 I du Code de commerce concernant le dessaisissement du débiteur en liquidation judiciaire ?L’article L641-9 I du Code de commerce stipule que : « I.-Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur. » Cet article établit clairement que, dès l’ouverture de la liquidation judiciaire, le débiteur perd la capacité d’administrer et de disposer de ses biens. Ainsi, toutes les actions patrimoniales doivent être exercées par le liquidateur, qui représente les intérêts de la société en liquidation. Cela signifie que la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales, une fois en liquidation, ne peut plus agir en justice pour défendre ses intérêts ou contester des décisions, sauf par l’intermédiaire de son liquidateur. En conséquence, toute action en appel entreprise par la société sans la mise en cause du liquidateur est irrecevable, car elle ne dispose plus de la qualité pour agir. Quelles sont les conséquences de l’irrecevabilité des demandes de la SARL AMIA en raison de la liquidation judiciaire ?La Cour a constaté que la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales n’avait pas la qualité pour agir en justice en raison de son dessaisissement, comme le précise l’article 122 du Code de procédure civile, qui dispose que : « Nul ne peut se constituer partie dans un procès sans avoir qualité pour agir. » En l’absence de mise en cause du mandataire liquidateur, les demandes de la SARL AMIA sont déclarées irrecevables. Cela signifie que la société ne peut pas contester le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes, qui a condamné la société à verser des indemnités à Mme [D] [I]. Le jugement de première instance reprend donc son plein effet, et la SARL AMIA est tenue de respecter cette décision. Les conséquences sont donc lourdes pour la société, qui se voit dans l’impossibilité de faire valoir ses droits en appel, laissant ainsi le jugement initial en vigueur. Comment la procédure collective impacte-t-elle les droits des parties en litige ?La procédure collective, notamment la liquidation judiciaire, a un impact significatif sur les droits des parties en litige. L’article L641-9 I du Code de commerce, déjà cité, précise que le débiteur est dessaisi de l’administration de ses biens, ce qui signifie que toutes les actions doivent être menées par le liquidateur. Cela inclut le droit de contester des décisions judiciaires ou d’intenter des actions en justice. Dans le cas présent, la SARL AMIA, en liquidation, ne peut pas poursuivre l’appel sans l’intervention de son liquidateur. Cela protège les créanciers et assure que les actifs de la société sont gérés de manière appropriée pendant la liquidation. Ainsi, les droits de Mme [D] [I] sont également renforcés, car le jugement de première instance, qui lui accorde des indemnités, reste en vigueur, et elle peut en exiger l’exécution. Quelles sont les implications de l’absence de constitution d’avocat par le liquidateur ?L’absence de constitution d’avocat par le liquidateur a des implications directes sur la procédure. En effet, comme le stipule l’article 122 du Code de procédure civile, la qualité pour agir est essentielle. Sans la mise en cause du liquidateur, la Cour ne peut pas être saisie des demandes de la SARL AMIA, ce qui entraîne l’irrecevabilité de ses demandes. Cela signifie que le liquidateur, qui est le seul habilité à représenter la société en liquidation, doit être impliqué dans toute procédure judiciaire. L’absence de sa représentation par un avocat empêche la Cour d’examiner les arguments de la société, ce qui renforce la décision du Conseil de Prud’hommes. En somme, la non-constitution d’avocat par le liquidateur empêche toute défense ou contestation de la part de la SARL AMIA, confirmant ainsi le jugement initial. |
N° RG 22/00150 –
N° Portalis
DBWA-V-B7G-CLBE
Du 19/11/2024
S.A.R.L. ANTILLES MENUISERIE INDUSTRIELLES ET ARTISANALE ‘A MIA’
C/
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]
[I]
COUR D’APPEL DE FORT DE FRANCE
CHAMBRE SOCIALE
ARRET DU 19 NOVEMBRE 2024
Décision déférée à la cour : jugement du Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de fort de france, du 23 Septembre 2022, enregistrée sous le n° 21/00149
APPELANTE :
S.A.R.L. ANTILLES MENUISERIE INDUSTRIELLES ET ARTISANALE ‘A MIA’
[Adresse 9]
[Localité 2]
Représentée par Me Ghislain DADI de la SELAS DADI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS
INTIMEES :
Association UNEDIC DELEGATION AGS CGEA DE [Localité 5]
[Adresse 8]
[Localité 3]
Madame [D] [S] [I]
[Adresse 7]
[Localité 2]
Représentée par M. [G] [E] (Délégué syndical ouvrier)
S.C.P. BR ASSOCIES prise ne la personne de [K] [V]
[Adresse 4]
[Adresse 6]
[Localité 1]
COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DEBATS ET DU DELIBERE
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 20 septembre 2024, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Anne FOUSSE, Conseillère présidant la chambre sociale, chargée du rapport. Ce magistrat a rendu compte dans le délibéré de la cour composée de :
– Madame Anne FOUSSE, Présidente
– Madame Nathalie RAMAGE, Présidente de chambre
– Madame Séverine BLEUSE, Conseillère
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Madame Rose-Colette GERMANY,
DEBATS : A l’audience publique du 20 septembre 2024,
Les parties ont été avisées, dans les conditions prévues à l’article 450 du code de procédure civile, de la date du prononcé de l’arrêt fixée au 19 novembre 2024 par mise à disposition au greffe de la cour.
ARRET : Réputé contradictoire
EXPOSE DES FAITS ET DE LA PROCEDURE
La SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales (dite SARL AMIA) a embauché Mme [D] [I] en qualité de secrétaire commerciale en CDI à compter du 4 décembre 2018.
Par courrier en date du 30 mars 2021 elle a reçu notification de son licenciement pour cause réelle et sérieuse (refus de contacts avec la clientèle, diminution de la sonnerie du téléphone pour ne pas prendre les communications avec la clientèle).
Le 11 mai 2021, Mme [D] [I] a saisi le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France aux fins d’obtenir la condamnation de l’employeur au paiement d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et de dommages et intérêts pour préjudice moral, procédure abusive.
Par jugement contradictoire du 23 septembre 2022, le Conseil de Prud’hommes de Fort-de-France a statué comme suit :
Condamne la SARL AMIA à payer à Mme [D] [I] les sommes de :
* 5676,69 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 800 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne la SARL AMIA aux dépens,
Déboute Mme [D] [I] du surplus de sa demande.
Par déclaration électronique du 26 octobre 2022, la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales AMIA, a relevé appel du jugement dans les délais impartis.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 18 juillet 2024.
EXPOSE DES PRETENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Par conclusions notifiées par voie électronique le 9 novembre 2022 signifiées à Mme [D] [I] par acte d’huissier du 22 novembre 2022 et déposées au greffe par le rpva le 23 novembre 2022, la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales a demandé à la cour de :
Infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a condamné la société aux sommes suivantes :
– Indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse 5 676,69 euros
– Art 700 CPC : 800 euros
– Entiers dépens.
Statuant à nouveau :
Juger que le licenciement de Madame [I] a une cause réelle et sérieuse et la débouter de ses demandes,
Juger que Madame [I] n’a pas subi de préjudice moral,
Condamner Madame [I] à un article 700 CPC de 1.500 euros
Condamner Madame [I] aux dépens d’instance.
Par ordonnance du 17 septembre 2023, la conseillère chargée de la mise en état a :
Débouté Mme [D] [I] de sa demande tendant au prononcé de la caducité de la déclaration d’appel de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales,
Déclaré les conclusions de Mme [D] [I] déposées au greffe de la chambre sociale de la Cour d’appel de Fort-de-France le 5 mai 2023 irrecevables,
Ordonné le renvoi de l’affaire à l’audience de mise en état virtuelle du 15 décembre 2023 à 14 h 30 pour clôture et fixation de l’affaire à l’audience de plaidoirie.
Par courrier du 14 décembre 2023, le conseil de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales a informé le conseiller de la mise en état de ce que la société était en liquidation judiciaire joignant un extrait K bis du 14 décembre 2023 lequel mentionne que par jugement du 15 juin 2023, le tribunal de commerce de Fort-de-France a ouvert le redressement judiciaire de la société et que la liquidation judiciaire a été prononcée par jugement du 3 octobre 2023.
Par courriers rar du 19 décembre 2023, le greffe de la Cour a convoqué tant l’Unedic délégation Ags CGEA de Fort-de-France que la SCP BR et associés es qualité de liquidateur, compte tenu de la procédure collective en cours et a renvoyé l’affaire à l’audience virtuelle de mise en état du 16 février 2024 dans l’attente de leur éventuelle constitution.
Par message rpva du 19 février 2024, le conseil de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales a été invité à mettre en cause le mandataire liquidateur de cette dernière, sous peine que la Cour ne soit pas saisie de ses demandes, lui laissant un délai d’un mois pour ce faire.
Par courrier rar du 19 février 2024, le greffe de la Cour a de nouveau convoqué l’Unedic délégation Ags CGEA de [Localité 5].
Par message rpva et courrier du 23 avril 2024, le magistrat en charge de la mise en état a accordé un dernier renvoi au 17 mai 2024, faute de régularisation de la procédure par la mise en cause du liquidateur, , invitant l’intimée à appeler en cause d’AGS,
Par message rpva du 17 mai 2024, le conseil de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales a été invité à demander au liquidateur s’il entendait poursuivre la procédure pour le compte de la société en liquidation,
Par courrier du 24 mai 2024, le conseil de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales a demandé à la SCP BR associés es qualité de liquidateur si elle entendait poursuivre la procédure devant la Cour d’appel de Fort-de-France.
Ni la SCP BR associés es qualité de liquidateur de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales, ni l’Unedic délégation Ags CGEA de Fort-de-France n’ont constitué avocat.
L’article L641-9 I du Code de commerce dispose que «I.-Le jugement qui ouvre ou prononce la liquidation judiciaire emporte de plein droit, à partir de sa date, dessaisissement pour le débiteur de l’administration et de la disposition de ses biens composant le patrimoine engagé par l’activité professionnelle, même de ceux qu’il a acquis à quelque titre que ce soit tant que la liquidation judiciaire n’est pas clôturée. Les droits et actions du débiteur concernant son patrimoine sont exercés pendant toute la durée de la liquidation judiciaire par le liquidateur. …»
Il résulte de l’article susvisé qu’en raison de son dessaisissement le débiteur en liquidation judiciaire n’a qualité ni pour exercer une action à caractère patrimonial ni pour défendre à celle- ci.
Le liquidateur qui exerce les fonctions dévolues au mandataire judiciaire, doit être mis en cause. Cette mise en cause est une condition de régularité de la procédure.
Convoquée par le greffe de la chambre sociale par courrier rar du 19 décembre 2023 reçu le 21 décembre 2023 à comparaître à l’audience du 16 février 2024 et invitée par le conseil de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales à indiquer si elle entendait poursuivre la procédure devant la Cour d’appel de Fort-de-France, la SCP BR associés es qualité de liquidateur n’a pas constitué avocat.
L’Unedic délégation Ags CGEA de [Localité 5] elle même convoquée par lettre RAR par les soins du greffe reçue le 21 décembre 2023 n’ a pas plus constitué avocat.
Si la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales avait qualité pour interjeter appel, sa liquidation judiciaire a été prononcée en cours d’instance, de sorte que dessaisie de l’administration et de la disposition de ses biens, son action aurait du être exercée et donc poursuivie par le liquidateur.
Il convient d’une part de constater que la Cour n’est saisie d’aucune demande ni moyen du mandataire liquidateur, seul à avoir qualité pour poursuivre l’instance et d’autre part de dire que les demandes de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales sont irrecevables pour défaut de qualité à agir seule, en application de l’article 122 du code de procédure civile, faute d’intervention volontaire ou forcée du mandataire liquidateur à l’instance.
En l’absence de conclusions recevables de Mme [D] [I], le jugement rendu par le Conseil de Prud’hommes le 22 septembre 2022 est confirmé et reprend son plein effet.
La Cour,
Dit que la Cour n’est saisie d’aucune demande ni moyen de la SCP BR Associés es qualité de mandataire liquidateur de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales, ce dernier étant le seul à avoir qualité pour poursuivre l’instance d’appel,
En conséquence,
Dit que les demandes de la SARL Antilles Menuiserie industrielles et Artisanales sont irrecevables pour défaut de qualité à agir seule, faute d’intervention volontaire ou forcée de son mandataire liquidateur à l’instance.
Dit que le jugement de première instance reprend son plein effet.
Laisse les dépens à la charge du Trésor Public.
Et ont signé le présent arrêt Mme Anne FOUSSE, Présidente et Mme Rose-Colette GERMANY, Greffière
La Greffière La Présidente
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