Cessation des paiements et régularisation des cotisations sociales : enjeux et implications.

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Cessation des paiements et régularisation des cotisations sociales : enjeux et implications.

L’Essentiel : Le 19 juillet 2019, Monsieur [B] [F] et Madame [R] ont créé la société Léa, spécialisée dans le transport terrestre. En décembre 2020, les parts de Léa ont été transférées à la holding Abv Group Léa. En mars 2024, l’Urssaf a mis en demeure Léa Vendée pour non-déclarations. Le tribunal a ouvert un redressement judiciaire, mais la société a interjeté appel, arguant qu’elle n’était pas en cessation de paiements. La cour a finalement infirmé le jugement initial, concluant qu’aucune procédure de redressement n’était nécessaire, tout en condamnant la société aux dépens.

Création des Sociétés

Le 19 juillet 2019, Monsieur [B] [F] et Madame [R] ont fondé une société à responsabilité limitée nommée Léa, spécialisée dans le transport terrestre, avec son siège social à [Localité 5] à [Localité 6]. Par la suite, Monsieur [F] a établi une autre société, Léa Vendée, dont le siège social était situé à [Adresse 8] à [Localité 7].

Changement de Propriétaire

Le 5 décembre 2020, les associés de la société Léa ont décidé d’apporter l’intégralité de leurs parts sociales à la holding Abv Group Léa, qui détient également la société Léa Vendée. En novembre 2022, Monsieur [F] a vendu les parts de cette holding à la société Alno, appartenant à Monsieur [X], qui a été nommé président des sociétés, y compris Léa Vendée.

Problèmes de Déclarations et Mise en Demeure

Depuis le début de l’année 2023, aucune déclaration relative à l’activité de Léa Vendée n’a été faite à l’Urssaf, ce qui a conduit l’organisme à adresser, le 8 mars 2024, une mise en demeure à la société pour le paiement de cotisations sociales, majorations et pénalités pour la période de mai à novembre 2023, sur la base d’une taxation d’office.

Procédure Judiciaire

Le 26 janvier 2024, l’Urssaf a assigné la société Léa Vendée devant le tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon pour ouvrir une procédure collective. Malgré une citation régulière, la société n’a pas comparu. Le 21 février 2024, le tribunal a constaté l’état de cessation des paiements et a ouvert un redressement judiciaire, nommant un mandataire judiciaire.

Appel et Échanges Judiciaires

Le 6 mars 2024, la société Léa Vendée a interjeté appel du jugement. Les parties ont été informées d’un calendrier de procédure, et la société a notifié ses déclarations d’appel et ses écritures à l’Urssaf et au mandataire judiciaire. Le 6 juin 2024, la cour d’appel a ordonné l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement initial.

Éléments de Défense et Décision de la Cour

La société Léa Vendée a soutenu qu’elle n’était pas en cessation des paiements, citant des éléments nouveaux, notamment des dettes réduites et un solde positif sur son compte courant. L’expert-comptable a précisé que les demandes de l’Urssaf étaient basées sur une taxation d’office pour des périodes où la société n’employait plus de salariés.

Conclusion de la Cour

La cour a conclu qu’il n’y avait pas lieu d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Léa Vendée, infirmant ainsi le jugement du tribunal de commerce. La société a été condamnée aux dépens des deux instances.

Q/R juridiques soulevées :

Quelles sont les conditions d’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire selon le Code de commerce ?

La procédure de redressement judiciaire est régie par l’article L. 631-1 du Code de commerce, qui stipule :

« Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements. »

Ainsi, pour qu’une procédure de redressement judiciaire soit ouverte, il faut que le débiteur soit en cessation des paiements, c’est-à-dire qu’il ne puisse plus faire face à ses dettes exigibles avec ses actifs disponibles.

Cette condition est essentielle, car elle permet de protéger les créanciers tout en offrant au débiteur la possibilité de redresser sa situation financière.

Il est donc crucial d’évaluer la situation financière de l’entreprise pour déterminer si elle remplit ces critères.

Quels sont les effets de la cessation des paiements sur la société Léa Vendée ?

La cessation des paiements a des conséquences significatives sur la société, notamment en ce qui concerne l’ouverture d’une procédure collective.

L’article L. 631-1 du Code de commerce précise que la procédure de redressement judiciaire est ouverte lorsque le débiteur est dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible.

Dans le cas de la société Léa Vendée, le tribunal a constaté qu’elle était en cessation des paiements en raison de créances certaines, liquides et exigibles de l’Urssaf, totalisant 104 054,15 euros.

Cependant, il a été démontré que la société avait des éléments nouveaux, tels que des dettes remboursées selon un échéancier et un solde positif sur son compte courant, ce qui a conduit à l’infirmation du jugement initial.

Ainsi, la cessation des paiements a conduit à l’ouverture d’une procédure de redressement judiciaire, mais les éléments présentés par la société ont permis de contester cette situation.

Comment la taxation d’office par l’Urssaf influence-t-elle la situation de la société Léa Vendée ?

La taxation d’office par l’Urssaf est une procédure qui intervient lorsque la société ne déclare pas ses cotisations sociales.

Cette situation est précisée dans le jugement, où il est mentionné que la société Léa Vendée n’avait pas adressé de déclaration à l’Urssaf depuis le début de l’année 2023.

L’absence de déclaration a conduit l’Urssaf à établir une taxation d’office, ce qui a eu un impact direct sur la situation financière de la société.

Cependant, l’expert-comptable a précisé que la société n’employait plus de salariés durant cette période, et qu’une procédure de régularisation était en cours.

Cela soulève des questions sur la légitimité de la taxation d’office et sur la capacité de la société à contester les montants réclamés, ce qui a finalement conduit à l’infirmation du jugement de redressement judiciaire.

Quels sont les recours possibles pour une société en redressement judiciaire ?

Les recours possibles pour une société en redressement judiciaire sont encadrés par le Code de commerce.

La société peut faire appel du jugement d’ouverture de la procédure, comme cela a été fait par la société Léa Vendée.

L’article 455 du Code de procédure civile stipule que les parties doivent exposer leurs prétentions et moyens dans leurs conclusions.

Dans ce cas, la société Léa Vendée a notifié sa déclaration d’appel et a déposé ses premières écritures, ce qui lui a permis de contester le jugement initial.

Le recours en appel est un moyen pour la société de présenter de nouveaux éléments et de demander l’infirmation du jugement, ce qui a été le cas ici, entraînant la décision de ne pas ouvrir de procédure de redressement judiciaire.

Quelles sont les conséquences financières d’une procédure de redressement judiciaire pour la société ?

Les conséquences financières d’une procédure de redressement judiciaire peuvent être lourdes pour une société.

En effet, l’ouverture d’une telle procédure entraîne souvent des frais importants, notamment des frais de justice et des dépens.

Dans le cas de la société Léa Vendée, le jugement a condamné la société aux entiers dépens des deux instances, ce qui signifie qu’elle devra supporter les coûts liés à la procédure.

Cela peut avoir un impact significatif sur la trésorerie de l’entreprise, surtout si elle est déjà en difficulté financière.

Cependant, si la société parvient à prouver qu’elle n’est pas en cessation des paiements, comme cela a été le cas, elle peut éviter l’ouverture de la procédure et ses conséquences financières associées.

ARRET N°355

CL/KP

N° RG 24/00563 – N° Portalis DBV5-V-B7I-G7VK

S.A.R.L. LEA VENDEE

C/

Organisme URSSAF DES PAYS DE LA LOIRE

S.E.L.A.R.L. [J] ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES

Loi n° 77-1468 du30/12/1977

Copie revêtue de la formule exécutoire

Le à

Le à

Le à

Copie gratuite délivrée

Le à

Le à

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE POITIERS

2ème Chambre Civile

ARRÊT DU 19 NOVEMBRE 2024

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 24/00563 – N° Portalis DBV5-V-B7I-G7VK

Décision déférée à la Cour : jugement du 21 février 2024 rendu(e) par le Tribunal de Commerce de LA ROCHE SUR YON.

APPELANTE :

S.A.R.L. LEA VENDEE représentée par son gérant en exercice

[Adresse 8]

[Localité 7]

Ayant pour avocat postulant Me Bruno MAZAUDON de la SELARL JURICA, avocat au barreau de POITIERS

Ayant pour avocat plaidant Me Olivier MORINO, avocat au barreau de LA ROCHE SUR YON.

INTIMEES :

Organisme URSSAF DES PAYS DE LA LOIRE

[Adresse 1]

[Localité 2]

Ayant pour avocat plaidant Me Amaury EMERIAU de la SCP OUEST AVOCATS CONSEILS, avocat au barreau de LA ROCHE-SUR-YON.

S.E.L.A.R.L. [J] ET ASSOCIES MANDATAIRES JUDICIAIRES prise en la personne de Maître [N] [J] et en sa qualité de mandataire judiciaire du redressement judiciaire de la SARL LEA VENDEE

[Adresse 3]

[Localité 4]

Défaillante

COMPOSITION DE LA COUR :

L’affaire a été débattue le 07 Octobre 2024, en audience publique, devant la Cour composée de :

Monsieur Claude PASCOT, Président

Madame Lydie MARQUER, Présidente

Monsieur Cédric LECLER, Conseiller

qui en ont délibéré

GREFFIER, lors des débats : Madame Véronique DEDIEU,

ARRÊT :

– REPUTE CONTRADICTOIRE

– Prononcé publiquement par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

– Signé par Monsieur Claude PASCOT, Président et par Madame Véronique DEDIEU, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

******

Le 19 juillet 2019, Monsieur [B] [F] a créé avec Madame [R] une société à responsabilité limitée, dénommée Léa, ayant une activité de transport terrestre et dont le siège social était situé au [Localité 5] à [Localité 6].

Monsieur [F] a par la suite créé la société Léa Vendée, société à responsabilité limitée dont le siège social était situé [Adresse 8] à [Localité 7].

Par décision unanime du 5 décembre 2020, les associés de la société Léa ont apporté la totalité de leurs parts sociales à la holding Abv Group Léa, détenant les sociétés Léa et Léa Vendée.

En novembre 2022, Monsieur [F] a cédé les parts de la holding Abv Group Léa à la société Alno, holding appartenant à Monsieur [X]. En conséquence, Monsieur [X] a été désigné en qualité de président des sociétés, notamment de la société Léa Vendée.

Aucune déclaration concernant l’activité de la société Léa Vendée, servant de base au calcul des cotisations sociales auxquelles cette dernière était assujettie, n’a été adressée à l’Urssaf depuis le début de l’année 2023, date de la reprise.

Le 8 mars 2024, l’Urssaf a adressé à la société Léa Vendée une mise en demeure d’avoir à payer diverses cotisations sociales salariales, outre majorations et pénalités, pour la période courant de mai 2023 à novembre 2023, sur la base de la taxation d’office, en l’absence de toute déclaration en ce sens de la cotisante au 3 janvier 2024.

Par assignation en date du 26 janvier 2024, l’Urssaf des Pays de la Loire a assigné la société Léa Vendée devant le tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon, aux fins de voir ouvrir à son encontre une procédure collective.

Quoique régulièrement citée, la société Léa Vendée n’a pas comparu.

Par jugement réputé contradictoire en date du 21 février 2024, le tribunal de commerce de la Roche-sur-Yon a constaté l’état de cessation des paiements et ouvert le redressement judiciaire de la société Léa Vendée, en nommant la société [J] et associés mandataires judiciaires prise en la personne de Maître [N] [J], en qualité de mandataire judiciaire (le mandataire judiciaire).

Le 6 mars 2024, la société Léa Vendée a relevé appel de ce jugement en intimant l’Urssaf et le mandataire judiciaire.

Le 22 mars 2024, les parties ont été avisées d’un calendrier de procédure en circuit court.

Le 26 mars 2024, la société Léa Vendée a notifié à l’Urssaf sa déclaration d’appel et le calendrier de procédure à sa personne.

Le 26 mars 2024, l’Urssaf a constitué avocat.

Le 27 mars 2024, la société Léa Vendée a notifié à l’Urssaf sa déclaration d’appel et le calendrier de procédure.

Le 28 mars 2024, la société Léa Vendée a signifié au mandataire judiciaire sa déclaration d’appel et le calendrier de procédure à sa personne.

Le 19 avril 2024, la société Léa Vendée a déposé ses premières écritures.

Le 2 mai 2024, la société Léa Vendée a signifié au mandataire judiciaire ses premières écritures à sa personne.

Par ordonnance de référé en date du 6 juin 2024, la première présidente de la cour d’appel de Poitiers a notamment prononcé l’arrêt de l’exécution provisoire du jugement rendu par le tribunal de commerce de La Roche-sur-Yon le 21 février 2024.

Le 19 avril 2024, la société Léa Vendée a demandé de juger qu’elle n’était pas en état de cessation des paiements, d’infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et de juger n’y avoir lieu à ouverture d’une procédure de redressement judiciaire à son égard.

Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, la cour renvoie expressément aux dernières conclusions précitées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

Le 9 septembre 2024, a été rendue l’ordonnance de clôture de l’instruction de l’affaire.

MOTIVATION:

Selon l’article L. 631-1 alinéa premier du code de commerce,

Il est institué une procédure de redressement judiciaire ouverte à tout débiteur mentionné aux articles L. 631-2 ou L. 631-3 qui, dans l’impossibilité de faire face au passif exigible avec son actif disponible, est en cessation des paiements.

Pour prononcer le redressement judiciaire de la société Léa Vendée, le premier juge a retenu que celle-ci se trouvait dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible, en l’état des créances certaines, liquides et exigibles de l’Urssaf au titre des cotisations sociales, frais de procédure et frais d’acte à hauteur d’un total de 104 054,15 euros, que celle-ci avait été incapable de régler les dettes en résultant, et ce malgré les diverses procédures d’exécution engagées par l’organisme social.

Mais l’écrit de l’expert-comptable de la société Léa Vendée en date du 5 mars 2024 vient préciser que les demandes de l’Urssaf avaient été réalisées sur la base d’une taxation d’office pour des périodes de l’année 2023, alors que la société n’employait plus de salariés pour cette période, et qu’une procédure de régularisation était en cours auprès de l’organisme social.

Et il ressort du décompte produit par l’Urssaf en date du 15 avril 2024 que la société Léa Vendée ne lui est plus redevable que de frais de justice au titre des mois de janvier, février et mars 2023 pour un total de 407,37 euros.

De même, l’écrit du professionnel du chiffre vient préciser que la société Léa Vendée est redevable d’une dette sur la société Trans Céréales West d’un montant de 25 703 euros, après paiement de l’échéance de février 2024, pour le remboursement de laquelle il avait été convenu avec ce fournisseur un échéancier, sur la base de versements mensuels de 2159,18 euros, réglés par l’intermédiaire de sa société mère la holding Abv Group Léa.

A cet égard, il ressort du décompte liquidatif émanant du commissaire de justice chargé du recouvrement en date du 18 avril 2024 qu’à cette date, la société Léa Vendée respecte l’échéancier susdit, s’acquittant régulièrement des versements mensuels susdits pour la période du 18 mai 2023 et en dernier lieu au 9 avril 2024.

Enfin, l’extrait du compte courant de la société Léa Vendée fait apparaître, à la date du 18 avril 2024, un solde positif de 1717,51 euros.

L’expert comptable précise enfin que les autres dettes de la société Léa Vendée à l’égard de la société mère n’ont pas encore été rendues exigibles par cette dernière.

Ainsi, en l’état des éléments nouveaux présentés à la cour, la société Léa Vendée ne se trouve plus dans l’impossibilité de faire face à son passif exigible avec son actif disponible.

IL y aura donc lieu de dire n’y avoir lieu à ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société Léa Vendée, et le jugement sera infirmé de ce chef.

* * * * *

La procédure de taxation d’office en vertu de laquelle l’organisme social a réclamé des cotisations salariales à la redevable, avant de solliciter l’ouverture de la procédure collective, procède exclusivement de la carence déclarative de la cotisante.

Dans ces conditions, il y aura lieu de condamner la société Léa Vendée aux entiers dépens des deux instances.

PAR CES MOTIFS:

La cour,

statuant publiquement par mise à disposition au greffe, par arrêt réputé contradictoire et après en avoir délibéré conformément à la loi,

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant :

Dit qu’il n’y pas lieu d’ouvrir une procédure de redressement judiciaire à l’égard de la société à responsabilité limitée Léa Vendée ;

Condamne la société à responsabilité limitée Léa Vendée aux entiers dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,


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