Tribunal judiciaire de Nancy, 26 novembre 2024, RG n° 24/00199
Tribunal judiciaire de Nancy, 26 novembre 2024, RG n° 24/00199

Type de juridiction : Tribunal judiciaire

Juridiction : Tribunal judiciaire de Nancy

Thématique : Responsabilité contractuelle et préjudice financier dans le cadre d’un contrat de construction

Résumé

Contexte du litige

Les époux [C] ont signé un contrat de construction avec la société [I] [L] le 27 mai 2021 pour la construction d’une maison à Armaucourt. Un procès-verbal de réception a été établi le 4 avril 2023, mais il comportait des réserves.

Procédures judiciaires

Le 2 et 4 avril 2024, les époux [C] ont assigné la société [I] [L] et sa caution, la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIRE (CGI), devant le tribunal judiciaire de Nancy. Ils ont demandé une provision de 7 516,35 euros pour préjudice financier, 2 000 euros pour préjudice moral, ainsi qu’une indemnité de 1 200 euros selon l’article 700 du code de procédure civile.

Arguments des époux [C]

Les époux [C] ont initialement assigné la société [I] [L] pour lever les réserves du procès-verbal. Ils ont ensuite obtenu un quitus de levée des réserves le 24 juin 2024. Ils justifient leur demande de provision pour préjudice financier par le fait que leur crédit immobilier n’a pas pu être débloqué intégralement, entraînant des intérêts intercalaires de 7 516,35 euros. Concernant le préjudice moral, ils évoquent le retard dans la levée des réserves qui a compliqué la finalisation des travaux.

Réponse de la société [I] [L]

La société [I] [L] conteste les demandes des époux [C], arguant que celles-ci dépassent sa compétence et que les époux n’apportent pas la preuve de leur préjudice financier. Elle soutient que l’amortissement du prêt aurait dû commencer dès la signature du procès-verbal, même avec des réserves.

Position de la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIERE

La CGI demande le rejet des demandes des époux [C] et conteste la compétence du juge des référés pour examiner les conditions d’application de sa garantie. Elle affirme que la défaillance du constructeur n’est pas démontrée.

Décision du tribunal

Le tribunal a reconnu la responsabilité contractuelle de la société [I] [L] et a accordé aux époux [C] une provision de 4 040,28 euros pour préjudice financier, correspondant aux intérêts intercalaires. En revanche, leur demande de provision pour préjudice moral a été rejetée, faute de preuves. La société [I] [L] a été condamnée aux dépens et à verser 800 euros aux époux [C] au titre de l’article 700 du code de procédure civile. La demande de la CGI a également été rejetée.

MINUTE N° : 24/00479
DU : 26 Novembre 2024
RG : N° RG 24/00199 – N° Portalis DBZE-W-B7I-JA5Z
AFFAIRE : [V] [C], [F] [C] née [O] C/ S.A.S. [I] [L], S.A. CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT

TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANCY

CH. 9 REFERES

ORDONNANCE
du vingt six Novembre deux mil vingt quatre

COMPOSITION

PRESIDENT : Claude DOYEN,
GREFFIER : Anne-Marie MARTINEZ,

PARTIES :
DEMANDEURS

Monsieur [V] [C],
demeurant 8 bis rue du dauphin – 54760 ARMAUCOURT
représenté par Me Laurène ALEXANDRE, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant, vestiaire : 165

Madame [F] [C] née [O],
demeurant 8 bis rue du dauphin – 54760 ARMAUCOURT
représentée par Me Laurène ALEXANDRE, avocat au barreau de NANCY, avocat plaidant, vestiaire : 165

DEFENDERESSES

S.A.S. [I] [L],
dont le siège social est sis 7 Route de Cupigny – 10150 CRENEY PRES TROYES
représentée par Me Melina LAMRHARI, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant, vestiaire : 045, Me Olivier PLOTTON, avocat au barreau de l’AUBE, avocat plaidant

S.A. CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT
prise en la personne de son représentant légal pour ce domicilié en cette qualité audit siège,
dont le siège social est sis 6 Rue de la Pérouse – 75116 PARIS
représentée par Me Sophie FERRY, avocat au barreau de NANCY, avocat postulant, vestiaire : 154, Me Claude VAILLANT, avocat au barreau de PARIS, avocat plaidant

Après avoir entendu les parties en leurs explications à l’audience de plaidoiries du 24 Septembre 2024, l’affaire a été mise en délibéré au 19 Novembre 2024 prorogé au 26 Novembre 2024.

Et ce jour, vingt six Novembre deux mil vingt quatre, après délibéré, la présente décision a été rendue par mise à disposition au greffe.

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon acte sous signature privée du 27 mai 2021, Monsieur [V] [C] et Madame [F] [O] épouse [C] (ci-après les époux [C]) ont conclu avec la société [I] [L] un contrat de construction d’une maison individuelle sur un terrain situé 1 grande rue à Armaucourt.

Le 4 avril 2023, les parties ont établi un procès-verbal de réception comprenant des réserves.

Par actes de commissaire de justice délivrés les 2 et 4 avril 2024, les époux [C] ont fait assigner la société [I] [L] et sa caution solidaire, la CAISSE DE GARANTIE IMMOBILIRE (ci-après CGI), devant le président du tribunal judiciaire de Nancy statuant en référé.

Aux termes de leurs conclusions soutenues à l’audience du 24 septembre 2024, date à laquelle l’affaire a été retenue, les époux [C] sollicitent la condamnation de la société [I] [L] à leur verser une provision d’un montant de 7 516,35 euros au titre de leur préjudice financier.

Ils sollicitent encore la condamnation solidaire des défendeurs à leur verser :

une provision de 2 000 euros au titre de leur préjudice moral ;une indemnité de 1 200 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils sollicitent enfin la condamnation solidaire des défendeurs aux dépens.

Les époux [C] exposent avoir initialement fait assigner la société [I] [L] pour obtenir la levée des réserves mentionnées dans ledit procès-verbal de réception.

Ils exposent encore qu’à la suite de la signification de l’assignation, le maître d’œuvre a repris les travaux de levée des réserves et qu’un quitus de levée des réserves a été régularisé le 24 juin 2024.

Au soutien de leur demande de provision au titre du préjudice financier, les époux [C] font valoir que le crédit immobilier souscrit pour le financement de la construction de leur maison n’ayant pu être intégralement débloqué en raison de l’absence de levée des réserves, ils justifient d’un préjudice financier à hauteur de 7 516,35 euros, somme qui correspond aux intérêts intercalaires réclamés par la banque.

En réponse au moyen opposé par la société [I] [L] et fondé sur l’absence de préjudice financier, les époux [C] soutiennent que ledit prêt n’ayant pu être intégralement débloqué qu’à compter du 2 juillet 2024, les sommes qu’ils ont réglées à la banque jusqu’à cette date correspondent à des intérêts intercalaires résultant du retard pris dans la livraison sans réserve de leur maison.

S’agissant de la période indemnisable, ils affirment que le constructeur s’étant engagé à réaliser les travaux dans un délai de 14 mois à compter de l’ouverture du chantier intervenue en février 2022, ils sont fondés à réclamer le remboursement des intérêts intercalaires qu’ils ont réglés entre avril 2023 et juillet 2024.

À l’appui de leur demande de provision au titre du préjudice moral, les époux [C] font valoir que le retard pris par la société [I] [L] pour lever les différentes réserves les a empêchés de finaliser les travaux d’aménagement de leur maison et les a contraints à relancer le constructeur à de très nombreuses reprises, par téléphone et par mail, et même à effectuer un aller-retour jusqu’au siège de ladite société située à Troyes.

En réponse au moyen opposé par la CGI et fondé sur l’absence de défaillance du constructeur pour actionner la caution, les époux [C] soutiennent que la garantie souscrite par la CGI est mobilisable dans la mesure où elle s’est portée caution solidaire du constructeur.

En défense, la société [I] [L] demande au juge des référés de constater que les demandes indemnitaires présentées par les époux [C] excèdent sa compétence et en conséquence de les renvoyer à mieux se pourvoir.

À titre subsidiaire, elle sollicite le rejet desdites demandes indemnitaires.

Pour s’opposer à la demande de provision au titre du préjudice financier, la société [I] [L] soutient que les époux [C] ne rapportent pas la preuve du préjudice financier qu’ils estiment avoir subi dans la mesure où il résulte des stipulations du prêt litigieux que l’amortissement aurait dû débuter dès la signature du procès-verbal, que celui-ci soit ou non assorti de réserve, dès lors que la somme garantissant la levée des réserves demeurait consignée.

Pour s’opposer à la demande de provision au titre du préjudice moral, la société [I] [L] affirme que les époux [C] n’administrent la preuve ni de la faute qu’elle aurait commise, ni du préjudice qui découlerait de cette faute.

La CGI demande le rejet des prétentions formulées par les époux [C] à son encontre.

Elle sollicite également la condamnation des époux [C] aux dépens et à lui verser une indemnité de 3 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Pour s’opposer aux prétentions des époux [C], la CGI fait valoir que le juge des référés n’est pas compétent pour rechercher si les conditions d’application de la garantie de la CGI sont réunies et que de toutes les façons la garantie n’est pas mobilisable étant donné que la défaillance du constructeur n’est pas démontrée.

PAR CES MOTIFS

Statuant par ordonnance contradictoire et en premier ressort, par mise à disposition au greffe,

Au principal, renvoyons les parties à se pourvoir ainsi qu’elles aviseront, mais dès à présent,

CONDAMNONS la société [I] [L] à verser aux époux [C] une provision d’un montant de 4 040,28 euros (quatre mille quarante euros et vingt-huit centimes) à valoir sur l’indemnisation de leur préjudice et correspondant aux intérêts intercalaires réclamés par leur banque entre les mois d’avril 2023 et de juillet 2024 ;

DÉBOUTONS les époux [C] de leur demande tendant à voir la société [I] [L] et la CGI condamnées solidairement à leur verser une provision d’un montant de 2 000 euros au titre du préjudice moral ;

CONDAMNONS la société [I] [L] à verser aux époux [C] une somme de 800 euros (huit cents euros) au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

REJETONS la demande d’indemnité formulée par la CAISSE GARANTIE IMMOBILIERE DU BATIMENT au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

CONDAMONS la société [I] [L] aux dépens.

La greffière La présidente

Copie exécutoire délivrée à le
Copie délivrée à le

 


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